Alice Zeniter : "Je n'aime pas l'idée que l'identité soit une sorte d'essence monolithique"

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Alice Zeniter publie un nouveau livre, "Frapper l’épopée" (Flammarion), où elle s'intéresse à la Nouvelle-Calédonie et plus largement à la colonisation. Elle est l'invitée de 9h20. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20/l-itw-de-9h20-du-jeudi-05-septembre-2024-7790440

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00:00Mathilde Serrel, ce matin, je prends mon souffle, vous recevez une romancière, dramaturge,
00:07metteuse en scène, essayiste et traductrice !
00:11Alice Zéniter, bonjour !
00:12Bonjour !
00:13Et j'ajouterais même Nicolas, couturière ! Est-ce que vous diriez avec moi que le fil
00:19conducteur entre vos œuvres, c'est de repriser les mémoires à trous ?
00:23Oui, je crois que c'est une jolie définition et merci pour ça !
00:28Vous publiez depuis vos 16 ans, vous en avez 37, Alice Zéniter, ça fait plus de 20 ans
00:33de métier quand même, couturière et tout ce qui va avec, votre troisième roman, Sombre
00:37Dimanche, porté sur la chute du rideau de fer du point de vue du bloc de l'Est, c'est
00:40le prix Inter en 2013, en 2017 avec l'art de perdre, grand succès, couvert de prix,
00:45vous rapiésez la mémoire de l'Algérie à travers le récit de votre famille et des
00:49harkis.
00:50Aujourd'hui dans votre nouveau roman, le cinquième, frappez l'épopée ! Chez Flammarion, vous
00:55embarquez pour un territoire à 20 000 kilomètres, la Nouvelle-Calédonie, avec une héroïne
01:00Tass, professeure de français, descendante d'un bagnard algérien et deux de ses élèves
01:04jumeaux, possiblement impliqués dans un groupe activiste indépendantiste.
01:09Je vous cite, l'histoire, enfin la narratrice, l'histoire familiale de Tass commence par
01:13un trou énorme de vide bien épais, du noir poisseux.
01:18C'est ça, c'est ce trou noir, ce trou de mémoire qui vous a attiré dans cette histoire
01:22Alice Zéniter.
01:24Disons qu'il est rendu encore plus visible, ce vide prend encore plus de place du fait
01:32qu'entre les ancêtres et Tass aujourd'hui, il y a non seulement cinq générations mais
01:38il y a aussi 18 000 kilomètres.
01:40Et donc forcément la question elle se pose de qu'est-ce que je fous ici, sur cet endroit
01:45du globe ? Et comme les ancêtres n'ont pas laissé de traces et n'ont pas laissé
01:49d'écrits, cette question elle reste sans réponse.
01:53Et sur un territoire qui aujourd'hui est à l'orée d'une possible indépendance
01:58et où se pose la question de qui a le droit d'être ici, connaître son histoire c'est
02:02aussi pouvoir se sentir à l'aise pour dire ceci est chez moi.
02:05Et Tass elle ne peut pas.
02:06Et Tass, elle veut comprendre ce qu'il y a en fait dans cette mémoire agglomérée.
02:11Ça c'est intéressant, il y a plusieurs strates.
02:13En fait on découvre dans votre livre Alice Zéniter que la Nouvelle-Calédonie c'est
02:16déjà une strate très riche de populations.
02:19Ça ne se divise pas entre colons et colonisés, entre canaques et métropolitains.
02:24Et il y a aussi des strates d'histoire, ce qu'on raconte à l'école jusque dans
02:28les années 90.
02:29On apprend qu'on a la grandeur de la métropole, qu'on a le même destin, c'est nos ancêtres
02:33les Gaulois.
02:34Il y a ce que raconte la famille, le père, etc.
02:37Vous, vous avez vécu aussi cette situation, c'est ce que vous avez projeté dans Tass,
02:41de ne pas savoir ?
02:43Je crois que Tass, elle est un peu cousine de la Naïma de l'Art de perdre, mais avec
02:52un écart qui est encore plus grand entre ce que les gens portent comme mémoire et
03:00ce dont elle dispose.
03:02Et c'est quelque chose qui va être aggravé en plus quand elle part en métropole pendant
03:06ses années d'études, parce qu'elle a ce rêve de faire une carrière de journaliste
03:09là-bas.
03:10En fait, non seulement elle, elle ne sait pas d'où vient sa famille dans le temps,
03:13et elle va s'apercevoir que pour les Français, les métropolitains, personne ne sait d'où
03:17elle vient dans l'espace.
03:18C'est-à-dire que personne ne sait où situait la Nouvelle-Calédonie.
03:21C'est quoi cet archipel ? Tout le monde confond avec Tahiti, personne n'est capable
03:25de donner une personnalité un peu célèbre qui aurait permis d'avoir des représentations
03:30de ce territoire.
03:31Et donc, tout est obscurité.
03:33Tout est obscurité et cliché aussi, d'une certaine manière, puisqu'on imagine que
03:37ce qui est d'homme-tomme, c'est chemisette à fleurs et zouk dans le même paquet.
03:41Parce qu'il faut le dire, c'est un roman extrêmement drôle.
03:44On y reviendra tout à l'heure avec des passages d'une hilarité totale.
03:48Et dès le début, lorsque l'héroïne monte dans l'avion pour faire ses 20 000 km et
03:55qu'elle doit enjamber son voisin en essayant de ne pas lui faire une lapdance qui aurait
04:00été gênante pour les deux.
04:01On a tous vécu peut-être cette situation dans un avion long courrier.
04:04Vous dites que vous n'aimez pas le mot « identité » Alice Zénither, pourquoi ?
04:08Disons que je n'aime pas l'idée que l'identité, ce soit une sorte d'essence monolithique
04:16que chacun et chacune, on porterait en nous et qui ne varierait jamais.
04:21Il n'y aurait qu'une seule Mathilde, il n'y aurait qu'une seule Alice.
04:23Je suis persuadée que l'identité, c'est toujours une relation, qu'elle se construit
04:27avec l'autre qu'on a en face et que donc, c'est toujours mouvant.
04:30Parce que selon l'interlocuteur ou l'interlocutrice, on ne va pas être la même personne avec
04:36les mêmes libertés, la même marge d'action.
04:38On va se concentrer sur l'exergue du livre qui est intéressant, il y en a deux.
04:42Il existe donc un étroit rapport entre les fleurs et les bagnards, c'est du Jean Genet,
04:48pourquoi vous l'avez choisi celle-ci ?
04:49D'abord, disons-le pour la beauté splendide de la phrase et j'avais cette envie de parler
05:00de la beauté des choses.
05:01C'est-à-dire, le fait de lier les fleurs et les bagnards, c'est donner à ces hommes
05:06une beauté qu'on leur a toujours déniée.
05:08Parler de la Nouvelle-Calédonie, inventer un groupe qui pratique l'empathie violente
05:14et pas une forme d'action armée avec des fusils, c'est aussi proposer autre chose
05:20que les images de violence qu'on peut avoir quand on pense à cet archipel, alors qu'ils
05:24ont fait des souvenirs de Ouvéa dans les années 80, ou aujourd'hui les images de
05:29des émeutes.
05:30Qui ont rattrapé votre livre d'ailleurs, vous avez commencé à l'écrire bien avant
05:33les émeutes de mai.
05:34Oui, et donc tout à coup l'archipel vient avec des images de barrages, l'idée de ces
05:40morts très jeunes, et moi je voulais rendre aussi une beauté à ça, rappeler à quel
05:47point cet archipel en fait il est splendide, comme le dit un ruisseau, les blancs sont
05:52arrivés ici et ils se sont dit c'est un paradis, nous allons en faire un bagne, ce
05:57qui est quand même très étonnant.
05:58Et par ailleurs, dernière chose, le parallèle en fait entre l'Algérie et la Nouvelle-Calédonie
06:04qui va vraiment tisser toute une partie du livre, ça a été un parallèle qui a été
06:09fait beaucoup par les colons et en termes de domination, c'est-à-dire on a fait ça
06:16à ces populations en Algérie, on va faire ça à ces populations ici, la différence
06:20entre les Arabes et les Canaques, c'est ceci ou cela, et tout à coup j'avais aussi
06:24envie de dire, le parallèle ça peut être un parallèle de beauté, ça peut être le
06:27fait que c'est des paysages dans lesquels on peut regarder d'immenses montagnes vertes
06:31et bleues en se disant qu'on est minuscules, et la Kabylie sur ça est la chaîne centrale
06:35de la Grande-Terre, elle se ressemble, et c'est une ressemblance de beauté, pas juste
06:40d'histoire coloniale.
06:41Il y a une histoire aussi très belle de pacifisme, on va écouter Jean-Marie Djibaouh qui est
06:47le leader indépendantiste de la Nouvelle-Calédonie, et c'est aussi une position différente en
06:54même temps dans la façon de défendre sa terre qu'est-ce qu'on a pu vivre en Algérie.
06:58Il ne faut pas oublier que les Canaques sont là, ils seront toujours là et ils vous emmerderont
07:04jusqu'à l'indépendance, que vous soyez content ou pas content, mais pacifiquement.
07:10Mais pacifiquement, c'est très intéressant, c'est ce qui vous a donné cette idée d'empathie
07:17violente.
07:18On va poser les choses simplement, Henri Ruisseau est l'un de vos personnages, c'est une
07:21sorte de gourou théoricien d'un groupe indépendantiste, et il propose des actions non violentes mais
07:30des actions d'empathie violente.
07:32Ça consiste par exemple, lorsqu'on est masseuse, pendant qu'on masse ses clients,
07:37qui sont plutôt des métropolitans, des oreilles, des blancs, à leur piquer les chaussures,
07:42et eux dans une espèce de brume, ils se demandent ce qui s'est passé, est-ce que la personne
07:46porte vraiment ses chaussures ? Vous faites dire à Henri Ruisseau que c'est une expérience
07:51de la dépossession qu'ont pu vivre les canaques.
07:54Et puis il y a ce passage magnifique, vous avez décidé de donner à Henri Ruisseau
08:00une autre action, voler les cartes bleues en achetant n'importe quoi, pour reprendre
08:06cette absurde.
08:07Est-ce que vous pouvez nous expliquer comment est venue cette idée de créer des actions
08:11qui n'existent pas dans le répertoire aujourd'hui de l'activisme indépendantiste canaque ?
08:16Il y a cette idée de faire ressentir à des communautés qui n'ont pas été victimes
08:24de la colonisation, ce que ça veut dire de perdre son chez-soi, d'avoir le sentiment
08:30à la fois qu'on est chez soi, qu'on est sur ses terres, et en même temps se faire
08:34déposséder de ça.
08:36Il y a toute une liste d'actions qui tourne autour de ça, qui consiste à déplacer des
08:40objets, faire des faux cambriolages, on entre mais on ne prend rien, mais on brouille l'agencement
08:46de la maison qui est familier, il y en a tout un tas d'autres que je ne vais pas raconter
08:50ici parce que ça fait partie des choses qu'on suit et qu'on découvre au fur et à mesure
08:56du roman.
08:57Et puis il y a cette chose dont je parlais tout à l'heure, le fait d'être arrivé
09:02dans cet archipel si beau et si vivable, et d'en avoir fait un bagne, du coup pour
09:07un ruisseau, il y a l'impression qu'il faut absolument reproduire aussi ce sentiment
09:14douloureux et absurde de se faire voler, mais pas par besoin, pour faire quelque chose.
09:20D'aussi absurde que de transformer un paradis en prison ?
09:23Exactement.
09:24Et donc il va recommander à toutes les jeunes recrues de faire la même chose, de créer
09:30chez les propriétaires des cartes bleues volées, des interrogations, à se taper la
09:33tête sur les murs.
09:34Pourquoi on m'a piqué ma carte bleue pour aller acheter une autre toilette au parfum
09:38patamodelé, une statue de bulldog dorée, une autobiographie dédicacée de Rullio Iglesias ?
09:44Qu'est-ce qui s'est passé ? Et il faut que jamais les volets ne comprennent.
09:48Il faut qu'ils avancent comme ça dans l'incompréhension du vol pendant des semaines, des mois.
09:53Et là, alors, dit un ruisseau, ils auront une idée de ce qu'ont ressenti les canaques
09:58quand les blancs sont arrivés pour leur voler leur terre.
10:00Voilà la définition de l'action d'empathie violente à l'isolation sanitaire.
10:04Vous, quand vous êtes arrivée en Nouvelle-Calédonie, c'était pour un salon littéraire il y a
10:09cinq ans, donc ce n'est pas du tout lié aux événements qu'on a découverts ensuite.
10:12Vous avez appris là-bas qu'il y avait eu des bagnards algériens.
10:17Comment vous avez découvert cette histoire ? Et vous vous êtes dit que vous étiez des cousins ?
10:22C'est ça.
10:23Je venais présenter à l'Art de perdre, au Silo, le salon du livre océanien itinérant.
10:29Et des lecteurs et des lectrices du roman venaient me voir en me disant peut-être qu'on
10:34est cousins.
10:35Et ça me paraissait absurde tout à coup qu'on m'invente et qu'on me prête une
10:38famille à 18 000 kilomètres.
10:40Et en découvrant cette histoire des forçats algériens, des 2106 arabes de Kalédoun,
10:47comme on les a appelés, cette possibilité est devenue de plus en plus forte.
10:52C'est-à-dire que parmi les hommes qui ont été envoyés là-bas, beaucoup ont été
10:57arrêtés dans les montagnes kabiles, pas très loin du village de ma famille.
11:02Et donc tout à coup, les ancêtres de mon personnage, les ancêtres de Tass et mes ancêtres,
11:08se regardaient comme ça à travers la fiction en disant peut-être que nous sommes cousins.
11:12Et donc vous avez eu envie de faire porter à Tass aussi ces questionnements sur ses
11:18ancêtres, ses aïeuls, c'est bizarre de ne rien savoir de ce bagnard algérien qui
11:23est votre ancêtre.
11:25Et vous avez franchi le quatrième mur à l'Isle des Nétaires, les lecteurs le découvriront
11:29mais tout d'un coup vous nous parlez.
11:30Pourquoi vous avez eu envie de nous dire « voilà pourquoi j'ai écrit Tass » ?
11:34Parce que je crois que l'écriture est vraiment partie de ce vertige, de la familiarité d'une
11:44histoire qui en même temps était complètement étrangère.
11:46C'est-à-dire que quand je pose le pied dans cet autre hémisphère, dans cet autre
11:49bout du monde, je ne connais rien de cette histoire et plus j'avance et plus les noms
11:55des condamnés, les noms de leur village, tout ça m'est extrêmement familier, j'ai
12:01vécu dedans.
12:02Et donc c'est ce que j'écris au cœur du livre en fait, que le roman il naît de
12:10ce flou comme ça très étrange.
12:12Cette histoire n'est pas la mienne mais elle n'est pas pas la mienne.
12:16Et qu'est-ce que je fais de ça ?
12:18J'écris un livre et ce livre va garder en son cœur ce vertige que je n'ai toujours
12:23pas réussi à nommer et pour lequel il faudrait inventer un nom je pense.
12:27Vous avez beaucoup de territoire à l'île des Zénithères quand on y pense, il y a des
12:32années passées en banlieue parisienne, ensuite vous avez habité dans la Sarthe, aujourd'hui
12:37vous êtes toujours du côté de Saint-Brieuc en Bretagne, où est-ce que vous vous sentez
12:41chez vous ?
12:42Je me sens chez moi dans les endroits où j'arrive à écrire, dans les endroits où
12:52j'arrive à nager aussi, donc mon bord de mer me convient très bien, dans les endroits
12:58où j'arrive à être au calme et à dérouler le monde qui par ailleurs quand je suis en
13:06mouvement m'échappe un peu parce que tout va trop vite et c'est pour ça que j'écris
13:12c'est parce que ça me permet de cartographier le monde au calme.
13:16Donc le vrai lien, on parlait de reprise et les mémoires, pour vous c'est les territoires
13:21dans les romans que vous écrivez, dans ce que vous produisez à l'île des Zénithères ?
13:25Oui, mais là j'ajouterais qu'il y a un petit twist peut-être, qui est qu'en fait
13:31dans la conception canaque de l'espace et du temps, le paysage c'est de l'histoire,
13:36donc il n'y a pas de différence entre le territoire et le passé, et ça c'est une
13:41manière de raconter qui m'a aussi complètement déplacée dans l'exercice d'écrire Frappé
13:46l'Épopée.
13:47C'est-à-dire, pour préciser, on va se repérer par exemple avec un arbre, ça va
13:53être ça la borne chronologique, un petit peu comme une date ?
13:55C'est ça, c'est-à-dire au niveau de ce rocher, on est en 1917 et au moment où le
14:01clan s'est révolté contre l'enrôlement pour la seconde guerre mondiale, mais au
14:04niveau de ce pin, on est à un autre moment, et au niveau de ce ruisseau, on est encore
14:08à un autre moment.
14:09Alors, vous écrivez, je le disais, depuis vos 16 ans, 2-1 égale 0, c'était votre
14:17premier roman, j'ai l'impression que ça parle de rupture.
14:19Non, c'était beaucoup plus tragique que ça, parce que j'avais décidé à ce moment-là
14:25de mon adolescence de vraiment essayer de prendre en charge des souffrances qui me dépassaient
14:29pour montrer ma maturité, et donc ça parle d'un frère et d'une sœur qui essayent
14:35de survivre dans une guerre imaginaire, très inspirée par la guerre de Bosnie, alors qu'ils
14:41meurent lentement de faim.
14:42Et quel regard vous portez sur vos premiers romans, justement ? Après 20 ans d'écriture
14:47finalement, à 37 ans ?
14:49Aujourd'hui, je crois, beaucoup de tendresse, mais comme envers toute mon adolescence, c'est-à-dire
14:58que quand j'en étais encore très très proche, c'était quelque chose qui me faisait
15:02grincer des dents de me dire, mais non, mais pourquoi j'ai fait ça ? Pourquoi il y a
15:05une citation d'Indochine dans ce premier roman ? Est-ce que vraiment je pourrais un
15:09jour me le pardonner ? Et plus de 20 ans plus tard, et maintenant que mes cheveux blanchissent,
15:14j'ai beaucoup de tendresse pour la jeune fille qui a écrit ça et qui a eu la bravoure,
15:19peut-être stupide, peut-être bornée, mais de se jeter dans cet exercice-là en disant
15:24si c'est possible, je veux que ma vie, je veux que mon territoire, ça devienne l'écriture,
15:29et je vais essayer.
15:30Rêve illimité, vous dirait Kasé, la rappeuse que vous citez aussi en exergue et qui donne
15:34son nom à ce livre, Frappé, l'épopée, le livre qui a le plus de P dans son titre,
15:38on peut le dire, une belle allitération Alice Zéniter.
15:41C'est le moment des impromptus, c'est une sorte de rituel du 9h20, vous allez répondre
15:47presque sans réfléchir aux questions que je vous pose.
15:50Paris, Saint-Brieuc ou Budapest, Alice Zéniter ?
15:55Aujourd'hui, forcément, pas Saint-Brieuc, mais mon bord de mer des Côtes d'Armor.
16:00Camus ou Sartre ?
16:01Camus.
16:02Pourquoi ?
16:03Parce que sur l'écriture de l'Algérie, il a laissé des phrases que j'aurais pu
16:08porter en tatouage ou en collier pendant très longtemps.
16:11Ni jamais trop tard.
16:12Qu'est-ce qui vous indigne ?
16:13Tellement de choses, mais j'aurais tendance à penser à le fait de masquer ou de se masquer
16:23les processus de domination et d'oppression qu'on perpétue.
16:26Est-ce que vous pourriez faire de la politique, Alice Zéniter ?
16:30Je préfère pour le moment penser que ce que je fais en littérature, c'est aussi
16:37une manière politique de raconter le monde.
16:39Et je ne sais pas si j'ai… disons que le politique m'intéresse, la politique
16:43me demanderait une énergie que je n'ai pas forcément.
16:46C'est votre anniversaire dans deux jours.
16:48Oui.
16:49Vous allez avoir 38 ans.
16:51Qu'est-ce qu'on vous souhaite ?
16:55Un petit peu de repos, puisque comme on a dit dans tous les slashes de mes activités
16:58au début, j'ai quand même tendance à beaucoup enchaîner les choses et il y a des
17:04moments où je me sens un peu fatiguée.
17:06Je vous propose pour la première fois dans cette émission d'écouter la question de
17:12Jacques Chancel.
17:13Et Dieu n'a tout cela !
17:18Alors, Alice Zéniter ?
17:23Eh bien, je ne saurais pas trop quoi répondre.
17:26Je pense.
17:27C'était dans un entretien face à Georges Marchais, au moment du générique.
17:30Il lui disait Dieu dans tout cela et il finit par comparer la foi des chrétiens avec la
17:34foi des communistes.
17:37Ce n'est pas une foi que j'ai.
17:39Cela dit, dans ce livre-là, j'ai essayé de me glisser dans les croyances des autres
17:45et de réfléchir à ce que ça veut dire un paysage qui est habité par ces croyances-là.
17:50Certains lieux sont des lieux de passage et de communication avec les esprits des ancêtres.
17:55Et c'était assez agréable de vivre dans un monde qui est peuplé de lutins et des
18:01fantômes des vieux.
18:02Voilà ce en quoi vous croyez, Alice Zéniter.
18:05Frappez l'épopée.
18:06C'est publié chez Flammarion, c'est ultra contemporain et ancestral.
18:10On vous retrouvera au musée de l'Orangerie, salle des Nymphéas, pour une soirée musique
18:13le lundi 23 septembre.
18:15Bonne journée à vous.
18:16Merci.

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