Tous les jours de la semaine, invités et chroniqueurs sont autour du micro de Thomas Schnell pour débattre des actualités du jour.
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00:00Vous êtes toujours dans Europe Un Soir, il est 19h31 avec le journaliste du Journal du Dimanche Raphaël Stainville et l'essayiste Paul Mellon.
00:07Nous venons de faire le tour sur les propositions de Gabriel Attal pour une éventuelle coalition autour d'Ensemble pour la République.
00:14On va se demander maintenant jusqu'où déraperont les comptes de l'Élysée.
00:18Et avant d'en débattre ensemble, je vous propose qu'on fasse un point sur ce qui est reproché aujourd'hui aux dépenses de la présidence de la République.
00:27La Cour des Comptes s'est alarmée d'un déficit de plus de 8 millions d'euros dans le budget de l'Élysée.
00:34Les magistrats financiers reprochent la progression des dépenses.
00:37Elles seraient liées aux déplacements, mais aussi à l'inflation.
00:40Alexandre Chauveau ?
00:41Oui, et notamment le coût des voyages présidentiels en progression de 7% sur un an pour atteindre la somme de 23,2 millions d'euros.
00:48En cause, l'augmentation des prix du transport et des hébergements.
00:52La Cour des Comptes recommande ainsi de plafonner la taille des délégations à l'étranger et de davantage anticiper.
00:57Car l'an dernier, 12 déplacements annulés ont généré une perte de 832 000 euros, faute d'avoir pu se faire rembourser les billets d'avion et les hôtels.
01:05Alors l'autre poste de dépenses qui pèse sur le budget de l'Élysée, c'est celui de la direction des opérations, chargée notamment d'organiser les réceptions.
01:13Budget annuel, 31 millions d'euros en augmentation de 45% sur un an, avec notamment deux dîners d'État qui ont coûté presque 500 000 euros chacun.
01:22Celui du Prince Charles III à Versailles, ainsi que celui au Louvre avec le Premier ministre indien Narendra Modi.
01:28Comme après chaque rapport, la présidence indique qu'elle tiendra compte des remarques de la Cour pour améliorer son organisation.
01:34Les détails d'Alexandre Chauveau du service politique.
01:37125 millions d'euros de budget, c'est trop ?
01:41C'est beaucoup ? Ça vous paraît être excessif pour, on va dire, le prestige et les fastes de la présidence de la République ?
01:48Non mais c'est vrai que quand on évoque des sommes comme ça, ça paraît toujours énorme.
01:52Parce que si on réfléchit à la lumière d'un ménage français, qu'il soit d'ailleurs modeste ou aisé ou de la classe moyenne,
01:59c'est vrai que quand on parle de dizaines de millions d'euros, ça paraît considérable.
02:03En revanche, il faudrait comparer ce chiffre-là peut-être à ce que d'autres chancelleries, d'autres palais présidentiels,
02:10d'autres premiers ministres peuvent dépenser dans d'autres pays européens.
02:13Peut-être que ça vous donnerait une idée, parce que là effectivement, ce dont il s'agit, et votre reportage le montre bien,
02:19c'est des frais notamment de réception.
02:21Moi, qu'on ait accueilli de façon fastueuse le roi Charles III ou le premier ministre indien,
02:29avec lesquels on a des rapports politiques et économiques importants,
02:33notamment avec l'Inde qui est quand même une puissance avec laquelle il faudra compter.
02:37Donc c'est très important que dans nos dépenses en matière de diplomatie, on garde une bonne voilure
02:42et qu'on soit en mesure, parce que c'est aussi de l'investissement pour notre pays.
02:45Donc moi, ça, ça ne me choque pas.
02:47Après, si ça avait été la gabegie personnelle du président de la République,
02:51alors que je crois qu'il paye ses factures, donc on ne peut pas lui faire ce reproche-là,
02:54mais si c'était la gabegie personnelle du couple présidentiel ou je ne sais quoi, là on pourrait en parler.
02:59Mais c'est des sujets avec lesquels je ne suis pas mal à l'aise,
03:01mais je ne veux pas tomber dans la démagogie en vous disant
03:05« Ah bah oui, c'est formidable, c'est 400 et quelques mille euros pour le roi d'Angleterre,
03:08c'était vraiment Macron qui s'en est mis plein les poches. »
03:11Non, parce que ce n'est pas vrai.
03:12C'est-à-dire que c'est, derrière tout ça, l'idée de représentation de la France.
03:15Et moi, je vais même vous dire plus, pour ce qui est de la diplomatie, par exemple,
03:18je déplore qu'Emmanuel Macron ait sous-investi dans nos ambassades
03:21et qu'il ait supprimé le corps diplomatique.
03:23Je pense même qu'il faudrait dépenser plus dans notre diplomatie, dans nos ambassades,
03:26parce que derrière, c'est le faste de la France et c'est son prestige à l'international.
03:30Donc pour moi, ce n'est pas de l'argent mis par les fenêtres.
03:32Après, c'est sain que la Cour des comptes mène un audit,
03:35qu'elle contrôle les dépenses publiques, elle le fait d'ailleurs à peu près partout,
03:38mais ne tombons pas non plus dans une lecture, je dirais, démagogique de ce type de sujet.
03:43Alors, contrôler ces dépenses-là, c'est démagogique ?
03:46Ou au contraire, il faut, à l'heure où on appelle à la sobriété,
03:49à l'heure où des tas de Français doivent parfois sauter des repas,
03:52il faudrait que le Président de la République montre l'exemple aussi ?
03:55Non, mais ce souci de transparence, il est nécessaire, en tout cas, depuis 2008.
04:01Je crois que c'est depuis 2008 et Nicolas Sarkozy
04:03que les comptes de l'Élysée sont auditionnés par la Cour des comptes.
04:08Dès lors que c'est inscrit dans la loi, difficile de s'y dérober.
04:13Après, il faut quand même, et je pense que ça a été très bien dit par Paul,
04:16remettre les choses dans leur contexte et relativiser pour partie les dépenses de l'Élysée.
04:21C'est une goutte d'eau dans l'océan des dépenses publiques.
04:25Ce qui est problématique, c'est de voir que la trajectoire finalement de ces dépenses de l'Élysée,
04:30elles n'ont cessé d'enfler année après année.
04:33Je me souviens qu'en 2019, déjà, on pointait du doigt la dérive du budget de l'Élysée
04:42et l'inflation qu'il avait prise.
04:46Emmanuel Macron s'était défendu en disant qu'il payait notamment les croquettes de son chien Némo,
04:52pour vous dire à quel point il était soucieux des données publiques.
04:56Il y a cette trajectoire qui est, à mon avis, problématique,
05:01d'autant plus problématique qu'on demande beaucoup d'efforts à un certain nombre d'administrations
05:06et on demande surtout encore plus d'efforts aux Français dans cette période.
05:11Souvenez-vous, c'était pendant la crise énergétique, on en appelait à la sobriété énergétique.
05:17Pour les Français, ça voulait dire surtout ne pas mettre l'électricité, se serrer la ceinture,
05:22parce que de toute façon, ils n'avaient plus l'argent et la question du pouvoir d'achat,
05:26elle ne peut pas être balayée d'un revers de la main.
05:29Alors tout ce que dit Paul Melun est absolument exact.
05:34Il en va de la grandeur de la France, de sa représentation,
05:38et c'est indispensable que de pouvoir poursuivre ses efforts.
05:42Reste qu'il y a un cadre qui est défini et qui est difficile d'en appeler un devoir d'exemplarité,
05:47de demander aux ministères de faire des efforts si l'Elysée ne montre pas l'exemple en la matière.
05:52On parle de 171 réceptions l'an dernier contre 149 en 2019.
05:59On parle de plus 13% d'invités et de plus 20% de dépenses par invité.
06:04La réception de Charles III a coûté 474 000 euros, dont 166 000 euros de traiteurs.
06:12Aujourd'hui, il faudrait montrer l'exemple, ou au contraire, les Français comprendraient-ils
06:17que ce soit la France qui reçoit, qui invite à des dîners, à des cocktails,
06:23et donc il faut être à la hauteur de notre terroir.
06:26On sait que la cave de l'Elysée comporte un certain nombre de bonnes bouteilles.
06:31C'est important. Les Français comprendraient cette importance-là, l'accepteraient.
06:35Les Français sont intelligents.
06:38Je pense que la compréhension fonctionne à condition qu'il y ait,
06:42et c'était rappelé par Raphaël, qu'il y ait de la transparence.
06:45Je ne suis pas pourtant un ayatollah de la transparence façon américaine.
06:48Ça m'agace d'ailleurs un peu. Je ne suis pas non plus pour l'ultra-transparence.
06:51Mais en tout cas, qu'il puisse y avoir des points d'information,
06:54qu'il y ait des personnalités, je n'en sais rien moi,
06:57des personnalités comme peut-être le secrétaire général de l'Elysée,
06:59qui puisse expliquer les raisons pour lesquelles telle ou telle dépense a été engagée,
07:04et expliquer aux Français que ces dépenses ont vocation à tels et tels objectifs.
07:09Effectivement, je suis peut-être un peu candide,
07:12mais je pense que les gens comprendraient et ne se diraient pas
07:15« Tiens, il y a eu des dépenses importantes. La location du château de Versailles, ça coûte très cher.
07:20Tel très bon traiteur pour pouvoir recevoir avec les meilleures crues le prince d'Angleterre, c'est trop cher.
07:27Bon, on ne va pas le recevoir avec une mauvaise piquette.
07:29On le reçoit avec ce qu'on a de meilleur parce que c'est l'image de la France.
07:32Et que si le roi Charles III repart avec sa délégation et qu'il se dise
07:38« Eh bien voilà, le panache de la France est intact. De Gaulle disait « La France n'est pas la France sans la grandeur. »
07:43Si c'est cette idée-là qui guide ces dépenses, moi je suis pour et ça ne me choque pas. »
07:48Il n'y a pas besoin qu'Emmanuel Macron ramène ses assiettes comme l'argenterie du général De Gaulle.
07:52Non, mais en fait, la difficulté c'est que je pense que les Français comprennent de moins en moins
07:57cette nécessité de la représentation et qui participe de la grandeur de la France.
08:02Moi j'ai le souvenir, et tout le monde s'en souvient, j'en suis sûr,
08:05de l'affaire des appartements de fonction de la famille Guémard
08:09qui avait dû finalement renoncer à son poste de ministre des Finances
08:13après avoir loué un appartement, je crois, de 400 m2.
08:18Ça a participé aussi probablement de la grandeur, de cette nécessaire représentation
08:23que doivent avoir les ministres de l'économie et des Finances.
08:27Il en va de même avec l'Elysée et ses réceptions somptuaires.
08:32Mais ça, les Français, je pense, le comprennent de moins en moins
08:36probablement parce qu'ils pensent que le pouvoir a de moins en moins de pouvoir.
08:40Et ça participe peut-être aussi à un désamour et une défiance vis-à-vis de la classe politique.
08:44En parlant des chiffres, aujourd'hui vous avez vu la croissance française, plus 0,3% pour le PIB.
08:49Est-ce qu'il faut s'en réjouir comme le ministre des missionnaires de l'économie s'en est félicité aujourd'hui ?
08:55Tout ce qui est positif pour la France, on doit s'en réjouir.
08:59Évidemment, il ne s'agit pas, et j'espère en tout cas que l'opposition réfléchit aussi comme moi,
09:03moi je ne fais pas de politique donc c'est facile, mais pour ceux qui font de la politique
09:07et qui désapprouvent le bilan d'Emmanuel Macron, de se réjouir des bonnes nouvelles.
09:11Maintenant, là où il faut être prudent, c'est que l'économie se regarde aussi à très long terme.
09:17Il faut aussi regarder depuis par exemple l'an 2000, c'est déjà du court terme à l'échelle de l'histoire,
09:22mais pourquoi pas, on va dire depuis la zone euro, il y a des cycles quand même
09:26qui se sont amorcés en économie, qui se prolongent aujourd'hui, même s'il y a quelques soubresauts ça et là de croissance,
09:30qui sont mauvais. Je pense par exemple à notre balance commerciale, c'est pas très très positif.
09:35Je pense par exemple aux emplois industriels, alors là on est en train de retrouver peu à peu
09:39des emplois industriels, mais ça reste pas suffisamment significatif
09:44pour revenir au niveau d'industrialisation qu'avait notre pays encore avant la désindustrialisation,
09:50donc dans les années 60-70. Donc si vous voulez, il y a quand même à long terme
09:54un certain nombre de problématiques, après qu'il y ait une reprise c'est positif,
09:58il y a peut-être un certain nombre, il faut être aussi honnête, il y a peut-être un certain nombre de mesures qui ont été prises par le Président de la République
10:02qui ont fonctionné, notamment je pense à l'attractivité à tous ces programmes, vous savez, Choose France, etc.
10:06Les investissements directs à l'étranger sont repartis, on s'en réjouit,
10:10donc il y a probablement des choses. Peut-être que cette stratégie du quoi qu'il en coûte
10:14a fonctionné aussi parce qu'elle a permis de sauver un certain nombre d'emplois, un certain nombre
10:18d'entreprises, notamment de PME, de TI, donc il y a des choses qui sont positives dans le bilan économique,
10:22mais attention, ce n'est pas parce que vous avez quelques centièmes de points de croissance
10:26que vous avez un pays qui va bien économiquement.
10:30Raphaël Stainville, on est quand même dans la fourchette haute des prévisions selon les calculs de l'INSEE,
10:34c'est une preuve que l'économie française résiste bien.
10:38C'est d'abord effectivement une très bonne nouvelle, mais encore une fois,
10:42et je pense que ça a été dit de manière assez nuancée par Paul Melun,
10:46c'est-à-dire qu'il faut quand même s'interroger sur les conditions qui ont permis cette croissance.
10:50Est-ce que ce sont des réformes structurelles ou des initiatives politiques qui ont permis
10:54de rendre cette croissance possible, ou est-ce que de manière un peu artificielle,
10:58on aurait dopé l'économie et la croissance,
11:02et c'est pour ça que Paul Melun évoquait notamment ce quoi qu'il en coûte,
11:06qui a un prix et qu'on payera un jour ou l'autre.
11:10Aujourd'hui, il est trop tôt, on se réjouit, et c'est parfait pour notre économie
11:14que de pouvoir compter sur une croissance qui va permettre de booster l'économie,
11:18mais il y a un certain nombre de points d'interrogation qui demeurent.
11:22Et on scrutera de près le budget qui va être établi, qui l'établira d'ailleurs,
11:26on est peut-être en retard sur le calendrier, puisque sans doute que généralement c'est pendant l'été
11:30que l'on établit le budget pour l'année suivante, là c'est impossible avec un gouvernement démissionnaire.
11:34Visiblement, Bruno Le Maire s'y attelle,
11:38préparant différentes options en fonction de la coloration
11:42du gouvernement qui prendrait les commandes, soit à mi-août, soit plus tard.
11:46Difficile pour les parlementaires de préparer des amendements
11:50dans cet été avant l'examen du budget, on verra quelle couleur politique sera au gouvernement d'ici là.
11:54Il est 19h43 sur Europe 1, dans un instant,
11:58on va jeter un oeil sur les Jeux Olympiques, de belles images,
12:02d'unité, d'une France heureuse qui suit
12:06ce déluge de médailles depuis trois jours maintenant, quatrième jour aujourd'hui,
12:10et déjà 17 médailles au compteur, on va parler de ces
12:14beaux moments avec Paul Melun et Raphaël Stainville sur Europe.