• il y a 5 mois
Lors de la deuxième session du Think & Do Tank du 25 juin 2024 "Plus de femmes dans les métiers de la Défense et de la Cybersécurité" au ministère des Armées, nous avons eu le plaisir d'écouter le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, clôturer la session.

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Transcription
00:00...
00:05Merci à tous les intervenants.
00:06J'appelle le ministre des Armées, M. Sébastien Lecornu.
00:10...
00:19Merci beaucoup.
00:21Bien, mesdames, messieurs, bonjour à toutes et tous.
00:23Bienvenue à l'hôtel de Brienne
00:25pour cette matinée un peu exceptionnelle.
00:28Et je suis vraiment reconnaissant aussi en tant que Marie-Claire
00:31et à l'ensemble des partenaires qui ont permis cet événement,
00:33puisque depuis 2 ans, j'essaie de faire en sorte
00:35que cette maison redevienne un lieu de dialogue,
00:37de discussion, de réflexion,
00:39et pas seulement le siège du ministère,
00:42du ministre, sa résidence,
00:43mais au contraire, en refaire au regard
00:46de la particularité du contexte géopolitique
00:48qui nous amène à prendre un certain nombre de décisions,
00:51à ce qu'on puisse prendre le temps,
00:52soit de réfléchir sur ce que font les autres,
00:54ministères tournés vers l'international,
00:56soit, évidemment, prendre le temps de se tourner
00:58vers ce que nous sommes nous-mêmes
01:00dans une institution particulière
01:02qui a toujours existé depuis que la nation française existe,
01:05avec ses 200 000 militaires,
01:07ses 60 000 civils de la défense,
01:09qui fait du ministère des Armées
01:10un ministère où il y a plus de civils
01:12qu'au ministère de la Justice ou au ministère de l'Environnement.
01:15Ca permet aussi de redonner un tout petit peu
01:17ce point de référence-là.
01:18Et puis, évidemment, 40 000 réservistes.
01:20Bref, une institution qui, par définition, bouge beaucoup.
01:24Alors, agir pour l'égalité,
01:28place des femmes dans l'institution militaire,
01:30métier cyberdéfense.
01:32Je vais commencer par le volet cyberdéfense,
01:34parce que ça nous amène quand même à parler d'une menace
01:36et qu'au fond, si on investit sur tous ces sujets,
01:39c'est pas pour faire bien, c'est pas pour être à la mode,
01:41c'est parce que, malheureusement, évidemment,
01:43à chaque fois, on est obligé de carréner
01:45notre système de défense en fonction du niveau d'agressivité
01:48que l'on trouve en face.
01:50Il se trouve, au fond, mais ça a sûrement été déjà dit
01:51ce matin, donc si ça a déjà été dit,
01:54c'est donc un effort de synthèse que je fais devant vous.
01:56Si ça n'a pas été dit, c'est donc un effort d'analyse.
02:00Au fond, on a eu plusieurs...
02:02Il y a toujours eu des sujets de cyber
02:04depuis que l'informatique existe.
02:06Plutôt de nature, comment dire, individualisée,
02:10non massifiée jusqu'à présent,
02:12plutôt avec des mobiles tournés autour du rançonnage,
02:16de l'escroquerie,
02:17destruction d'infrastructures informatiques,
02:19chantage à la donnée,
02:21contreversement de rançon,
02:23et avec une menace, au fond, qui s'est internationalisée.
02:27Quelques grands opérateurs, plutôt russophones,
02:29d'ailleurs, nativement,
02:31russophones ne veut pas dire que seulement en Russie,
02:33mais sur l'ensemble de l'Asie centrale,
02:35avec des gens qui se sont spécialisés dans un business
02:37qui a pu rapporter jusqu'à, parfois,
02:391,5 milliard de dollars
02:41sur certaines opérations de chantage
02:43et sur lequel, au fond, les écosystèmes se sont organisés
02:47pour se protéger individuellement,
02:48puis commencer à imaginer de la protection collective.
02:51On dit à notre cabinet, Patrick Payou, dans cette maison,
02:53et on était d'ailleurs celui qui a créé l'ANSI,
02:55et au fond, commencer aussi un peu à réfléchir
02:57à quand vous êtes chez vous,
02:59vous payez votre serrure, votre système d'alarme, vos fenêtres,
03:03parce que c'est quand même ce qu'on attend d'un propriétaire,
03:05de protéger son infrastructure,
03:08puis si vous arrive une intrusion,
03:09vous êtes capable d'appeler le 17,
03:11vous êtes donc des services d'enquête qui débarquent,
03:13une institution judiciaire qui prend le relais.
03:15Et donc, au fond, sur le cyber,
03:17jusqu'à présent, on a toujours été dans une logique
03:19Norton-antivirus, avec un animateur qui est l'Etat
03:23et qui cherche, au fond, déjà à armer l'Etat
03:26de propres outils de défense pour lui-même,
03:28pour son propre compte.
03:30Et puis, depuis maintenant 5-6 ans,
03:32pourrait le dater différemment, mais mettons 5-6 ans,
03:35vous avez évidemment une cybersécurité
03:37qui s'est complètement transformée,
03:39déjà parce que la géopolitique est passée par là,
03:42et d'opérateurs qui, parfois, étaient éloignés des Etats,
03:45vous avez désormais des Etats qui font de la menace cyber,
03:48évidemment, un des instruments clés et particuliers
03:51pour attenter soit aux économies, soit aux systèmes informationnels,
03:54soit même aux systèmes régalés.
03:56Et c'est évidemment la Russie qui pose le défi le plus lourd
04:00en la matière, et pour une raison, d'ailleurs,
04:01qui n'est pas toujours identifiée et dite publiquement,
04:04parce que la Russie est une puissance nucléaire
04:06et que, par définition, pour s'en prendre
04:08à une autre puissance nucléaire, le meilleur moyen étant de passer
04:11par des menaces dites hybrides, c'est-à-dire sous voûte nucléaire.
04:14Et comme nous sommes une puissance nucléaire,
04:16la perspective où l'on s'en prenne à nous directement
04:19et frontalement serait suicidaire, c'est notre doctrine.
04:23En revanche, passer sous la voûte de protection
04:26de nos intérêts vitaux, voûte nucléaire,
04:29passer par le cyber est un des moyens de s'en prendre
04:31à nos infrastructures, soit régaliennes,
04:33soit même, évidemment, économiques,
04:35parce que le principe d'une menace hybride,
04:37c'est de prendre un objet civil détourné à des fins militaires.
04:40Et donc, on voit bien qu'on avance de plus en plus
04:42dans une remise en question
04:44de notre infrastructure de sécurité,
04:45parce que, si attaquer un hôpital à Corbeillesson
04:48par un proxy russophone pour obtenir une rançon
04:53contre réparation du système SI de l'hôpital,
04:57c'est une chose,
04:58voir un proxy iranien ou russe
05:01attenter 300 attaques cyber sur 300 hôpitaux en même temps,
05:06vous voyez qu'on est sur un relèvement du seuil
05:08de ce que peut être une attaque.
05:10D'ailleurs, avec une zone grise militarisée,
05:12qui est aussi une zone grise en matière de droit international,
05:15à quel moment vous estimez que vous êtes face
05:17à une déclaration de guerre
05:18et donc à une notion de co-belligérance ?
05:20C'est pas parce que les menaces sont hybrides,
05:22c'est pas parce qu'elles sont sous voûte nucléaire
05:24qu'elles échappent au droit international de la guerre.
05:26Et d'ailleurs, c'est un peu le non-dit
05:27dans la période dans laquelle nous nous trouvons,
05:29où la Russie multiplie des attaques directes
05:30sur notre territoire,
05:31sur lequel, pour des raisons éminemment diplomatiques,
05:36nous faisons en sorte de justement maîtriser cet escalade-là.
05:39Ca veut donc dire aussi qu'on pivote en même temps.
05:41On pivote, ça veut dire quoi ?
05:43Ca veut dire l'interministérialité,
05:44le secrétariat général pour la défense nationale,
05:46les grandes entreprises, l'Annecy elle-même.
05:49Et puis, évidemment, dans ce ministère,
05:522 zones dans lesquelles ça pivote furieusement.
05:55La 1re, les forces armées,
05:56parce que vous n'avez pas de combat de demain
05:58dans lequel il n'y aurait pas une dimension cyber.
06:01Même dans une culture expéditionnaire,
06:04où vous projetez des forces sur un théâtre,
06:07il est évident qu'autour de ce théâtre,
06:09vous avez de la guerre électronique.
06:10C'est d'ailleurs un des grands retours d'expérience
06:12de la guerre en Ukraine,
06:14qui est probablement une des zones,
06:15les officiers qui sont ici,
06:17les plus brouillés et les plus contestés
06:20sur le terrain électronique et sur le terrain cyber.
06:22Des menaces informationnelles.
06:23Alors, on met pas mal de choses derrière tout ça.
06:25Fausses informations, production de faux contenus.
06:28Enfin, jadis, on l'aurait fait avec un tract
06:31ou une menace indirecte.
06:32Aujourd'hui, si vous êtes général de brigade,
06:35vous commandez votre brigade au front,
06:37et on vous apprend qu'au fond,
06:39votre famille a été prise en otage,
06:40il est fort à parier que le officier général en question
06:43aura davantage son esprit à se préoccuper
06:45de ce qui est devenu sa famille qu'a commandé sa brigade.
06:47Et ça, ce sont des cas pratiques très concrets
06:49que le comcyber des armées amène en se disant
06:52que le combat, il n'est plus du tout qu'horizontal,
06:55il est aussi à 360 degrés,
06:57y compris dans les champs immatériels,
06:58je dirais un mode spatial après,
07:00et donc, évidemment, la galaxie numérique
07:02constitue une zone de confrontation en tant que telle,
07:04soit propre, soit qui s'additionne
07:06à une zone de combat classique.
07:08Et puis l'autre partie dans laquelle ce ministère
07:10pivote beaucoup sont évidemment les services de renseignement,
07:13parce que la DGSE, la DRSD ou la DRM
07:16ont évidemment des rôles particuliers en la matière,
07:19soit en défensif,
07:21soit pour une fonction importante,
07:24vous en avez sans doute parlé ce matin,
07:26qui est l'attribution,
07:28parce que c'est une chose que de voir qu'on s'est fait attaquer,
07:30ce n'est une autre que de dire qui vous a attaqué,
07:33et dans notre monde, évidemment, ça compte énormément,
07:36surtout qu'on n'est plus dans un système de rançonnage,
07:38mais si on est sur un système de menaces directes,
07:40si vous voulez savoir si c'est la Russie ou l'Iran
07:43ou la Corée du Nord,
07:44c'est quand même pas une petite information,
07:45et donc la capacité à aller dire, à signer,
07:48à attribuer l'attaque
07:50est évidemment quelque chose de clé,
07:51et puis, bien sûr, la capacité à entraver,
07:53et je n'en dis pas plus ici,
07:55mais la capacité aussi à contre-attaquer,
07:56qui est évidemment un des métiers importants de la DGSE.
07:59Et donc ce pivot-là,
08:01il s'est accompagné de plusieurs réflexions.
08:05Déjà, il n'y a pas de technologie, et j'y reviendrai,
08:09il n'y a pas de technologie sans fixer des compétences.
08:12Et c'est un grand drame français,
08:13notamment dans la puissance publique,
08:15c'est l'incapacité, au fond,
08:17à s'adapter au parcours des gens, quels qu'ils soient,
08:20un mot particulier pour les femmes après, cela va s'en dire,
08:23mais déjà, y compris pour nos amis à suite à capuche
08:25qui sentent un peu mauvais la nuit,
08:28car ils existent.
08:31Même ce public-là, qui est quand même, au fond,
08:33un public qui n'aime pas trop les heures ouvrées,
08:35qui n'aime pas trop la pointeuse, qui n'aime pas trop la cravate,
08:38qui n'aime pas trop le costume,
08:40donc dans un environnement plutôt militarisé,
08:42y compris au sein des services de renseignement,
08:46commencer à entendre que le jeune prodige,
08:49fille ou garçon de 22, 23 ans,
08:51a plutôt envie de travailler avec une bière à la main
08:53à 4h du matin, la nuit du samedi au dimanche,
08:56ça ne s'est pas bien connecté dans la tête
08:57de son lieutenant-colonel immédiatement.
09:00Et ça, c'est une réalité d'adaptation,
09:04et j'y reviendrai parce que je pense
09:05que c'est un des fils conducteurs,
09:06en tout cas, c'est ce que je cherche à faire
09:07depuis 2 ans que je suis dans cette maison,
09:09c'est de se dire qu'à un moment donné,
09:10il faut s'adapter aux logiques que la société nous donne.
09:14C'est comme ça.
09:15Le déploré, c'est plutôt une maison
09:17dans laquelle on aime bien déplorer
09:18en disant que c'était mieux avant.
09:19Enfin, une fois qu'on a dit que c'était mieux avant,
09:21la réalité, c'est que si on veut être attractif
09:23dans un schéma de recrutement,
09:24dans une grande maison qui recrute en flux comme en stock,
09:28par définition, il faut s'adapter.
09:29Et le métier du cyber, les métiers du cyber
09:32nous ont amené à, au fond, révolutionner
09:35la manière aussi de concevoir les carrières,
09:37la manière de rétribuer aussi ces carrières.
09:40L'ingénieur général Chobar est ici,
09:43la patronne de l'école Polytechnique,
09:44qui est évidemment l'école d'ingénieurs militaires
09:47par excellence dans notre pays
09:49avec un rayonnement international.
09:50Mais là aussi, la manière de créer le parcours
09:52pour un jeune ou une jeune sous-lieutenante
09:54sortant de Polytechnique
09:56a complètement évolué en seulement quelques années
09:59et va continuer d'évoluer.
10:01Ca vaut aussi pour la reconnaissance par les grades.
10:05Vous avez un jeune prodige de 24-25 ans,
10:08n'importe quel GAFA peut lui faire une offre
10:12de 10 000 ou 15 000 euros par mois.
10:14Il va sans dire que le ministre indésarmé
10:16ne peut pas suivre sur ses grilles de salaire.
10:19Donc on va chercher à compenser par un système de compétence,
10:22de reconnaissance de sa compétence.
10:24Et donc, on va se dire, globalement,
10:27vu ce qu'il ou elle sait faire,
10:29ça correspond à un lieutenant-colonel
10:32ou colonel ou capitaine de vaisseau dans les armées.
10:35Si vous voulez, c'est une petite révolution
10:37que de faire des officiers commissionnés
10:38tandis qu'à 24 ans, vous pouvez être colonel.
10:41Et ça, évidemment, culturellement, dans cette maison,
10:44c'est quelque chose qui, pourtant, a existé jadis,
10:47parce qu'en période de conflit, en période de guerre,
10:49par définition, nécessité fait loi,
10:51mais en période de paix,
10:52les institutions comme les nôtres ont parfois du mal à pivoter
10:55et à s'adapter à ces exigences ressources humaines.
10:58Ce que je dirais pour le cyber vaut aussi pour le spatial,
11:01qui est un espace aussi, en tant que tel,
11:03de conflictualité nouveau.
11:04C'est pas l'objet de la matinée, mais je le pose là,
11:06parce que vous avez une perméabilité très importante,
11:08au fond, dans ces différents métiers,
11:10y compris parce qu'une partie du spatial
11:12est portée sur, non pas seulement l'observation,
11:15mais aussi la télécommunication,
11:17et que tout ça, au fond,
11:18le mot a peut-être été prononcé plusieurs fois ce matin,
11:20mais en plus, va être largement perturbé
11:23par l'avènement de l'intelligence artificielle,
11:25qui est, au fond, la révolution aussi puissante
11:27que l'atome dans les années 60
11:29ou l'électricité au début du XXe siècle.
11:31Et donc, vous voyez bien, on fait des allers-retours
11:34entre brique technologie, capacité à maîtriser le hard,
11:37à fixer la compétence,
11:39dans un ministère dans lequel les enjeux de souveraineté
11:41sont clés, parce que, par définition,
11:43on doit pouvoir savoir le faire tout seul,
11:46parce que si vous êtes dépendant d'une puissance étrangère,
11:49fustelle amie, fustelle américaine,
11:51c'est que, globalement, vous n'êtes plus souverain,
11:52parce que ça veut donc dire que vous abandonnez
11:54une partie de votre diplomatie.
11:55C'est pour ça, d'ailleurs, que toute une dissuasion nucléaire,
11:56on la met en oeuvre de A à Z, complètement tout seul,
11:59et il n'y a pas de schéma dans lequel,
12:01dans un héritage gaullien dans ce pays,
12:03les métiers du cyber et les métiers du spatial
12:05ne seraient pas mis en oeuvre à 100 % tout seul.
12:08Et donc, chemin faisant,
12:10j'avance sur le thème de la matinée,
12:12en fait, ça nous pose aussi des questions
12:14sur comment on recrute et chez qui on recrute,
12:17et, au fond, c'est quoi le combat de demain.
12:20Et c'est là où c'est intéressant,
12:21et ça me permet de vous parler aussi un peu
12:22du moment dans lequel on se trouve sur la féminisation
12:25de l'institution militaire et de nos armées.
12:28Le combat évolue.
12:30Or, la plupart des regards dans notre société
12:34véhiculés par les médias,
12:35y compris donc chez les jeunes filles
12:37qui sont en situation de réfléchir à un engagement,
12:40collège, lycée, études,
12:42ou même plus tard, dans le cadre d'une reconversion,
12:45au fond, sont frappés d'un énorme syndrome
12:48qu'il faut combattre psychologiquement,
12:49culturellement et politiquement,
12:51et c'est pour ça que je suis heureux d'accueillir
12:52cet événement ici à Brienne,
12:54c'est le fameux ce n'est pas pour moi.
12:57Et ce n'est pas pour moi est évidemment
12:59ce qui nous revient le plus puissamment
13:01de toutes les opérations de sensibilisation
13:04des collèges, qu'ils soient CSP+,
13:07dans des environnements privilégiés
13:08ou dans des zones d'éducation prioritaire,
13:11toutes les opérations que nous avons pu mener sur les BTS,
13:14bref, ça fait quelques années,
13:16puis vous savez que ma prédécesseure Florence Parly
13:18a fait de ce combat quelque chose de majeur.
13:20Au fond, on a un premier combat à mener,
13:24et ça, on ne peut pas y arriver seul,
13:25parce que tous les décrets, toutes les circulaires
13:27et tous les projets de planète Terre ne le régleront pas,
13:29c'est le fameux recul devant l'obstacle de, au fond,
13:33tout ça n'est pas pour moi, ce n'est pas fait pour moi.
13:36Et ça, c'est très ennuyeux, voyez-vous,
13:37parce que un, déjà, c'est faux,
13:39et puis deux, précisément,
13:41comme le combat a évolu, le métier de combattant,
13:43y compris un cyberattaquant,
13:46alors, on dit hacker éthique
13:50dans les environnements ONG,
13:52chez nous, on parlerait d'un cyberattaquant légal,
13:55parce que, salarié de la DGSE,
13:57il a donc la violence légitime et légale cyber pour lui,
14:02parce que c'est une opération de combat
14:04que la loi de la République et le commandement
14:06légitimement élus par le peuple français lui confient.
14:10On le voit bien, là, on a besoin de tout le monde.
14:14Et singulièrement, nous avons besoin de femmes.
14:17Féminisation des armées, disais-je.
14:19Aujourd'hui, nous avons globalement
14:2120 % des armées françaises qui sont féminisées.
14:25C'est peu et beaucoup, en fonction des lectures,
14:26c'est toujours pareil.
14:28C'est peu, parce que 20 %, par définition,
14:30on est loin de la moitié, c'est factuel.
14:33C'est peu, mais en même temps, c'est mieux qu'avant,
14:35puisque, en la même réunion ce matin, en 2012,
14:40le chiffre n'était pas de 20 %, mais de 12 %.
14:42Donc, en 12 ans, pratiquement 8 % d'augmentation,
14:46ça donne un tendanciel qui est encourageant.
14:49C'est peu, mais nous sommes la 4e armée féminisée au monde.
14:55Après Israël, pour des raisons qui tiennent aussi
14:59au recrutement de Tzahal, évidemment,
15:01puisque c'est une armée de professionnalisés conscrits,
15:05elle est particulière, comme vous le savez,
15:06alors que nous, c'est un modèle purement professionnel,
15:09comme vous le savez, avec des réservistes.
15:11La 2e armée féminisée est la Hongrie, figurez-vous,
15:14ce qui n'est pas intuitif, forcément, au 1er abord.
15:16En tout cas, quand on regarde M. Orban,
15:18c'est pas intuitif.
15:19Et la 3e armée féminisée, et c'est moins surprenant,
15:23parce que, même si l'anti-américanisme primaire
15:26court un peu autour de nous,
15:27c'est évidemment les armées américaines
15:29dans lesquelles le Pentagone, comme vous le savez,
15:31historiquement a mené des opérations importantes
15:33de mobilisation, de recrutement, etc.
15:36La vraie difficulté dans laquelle nous nous sommes confrontés
15:38aujourd'hui, au bout de 2 ans d'expérience dans cette maison,
15:42c'est, au fond, 1, le c'est pas pour moi
15:44pour le recrutement initial,
15:46et 2, ce qui est encore plus ennuyeux,
15:48la fidélisation des personnels militaires féminins
15:52déjà engagés.
15:53Et, comme vous le savez, le principe d'un pourcentage,
15:56c'est pas tellement le nombre de gens
15:57qui rentrent dans l'institution,
15:58mais le nombre de gens qui, une fois rentrés, y restent.
16:00C'est ce qu'on appelle l'attrition.
16:02Et donc, évidemment, de regarder pourquoi, au fond,
16:05on a plus de départs précipités ou anticipés
16:09dans les parcours féminins tout grade confondus
16:12que dans les parcours masculins.
16:14Et ça, on a fait ce travail sur 2 types de publics.
16:19Un est terminé, l'un est en cours.
16:21Le 1er type de public, ce sont les femmes officiers générales.
16:26Florence Parly a tenu, ma prédécesseure,
16:29à obliger l'institution à proposer plus de candidateux
16:35à l'attribution des étoiles.
16:36Alors, je fais juste une minute de cours de militarité.
16:40L'institution a une particularité,
16:41c'est que, pour être général d'armée,
16:44vous n'y ferez rien, il faut avoir été sous-lieutenant.
16:47Ce qui n'est pas vrai d'un ambassadeur
16:49qui peut être ambassadeur directement.
16:50C'est pas vrai d'un préfet, d'une préfète
16:52qui peut être préfète directement.
16:53C'est pas vrai d'une commissaire de police
16:55qui passe le concours et qui sortira
16:56commissaire de police de l'école.
16:58Vous ne sortez pas général de l'école.
17:00Vous sortez sous-lieutenant.
17:01C'est vrai de Salon de Provence, c'est vrai de l'école navale,
17:04c'est vrai de Saint-Cyr-Coët-Quidant,
17:06c'est vrai de l'école polytechnique.
17:08Pour être général un jour, il faut avoir été sous-lieutenant
17:11que vous soyez... Mieux que ça.
17:13Après avoir été sous-lieutenant, il faut être lieutenant.
17:14Après avoir été lieutenant, il faut être capitaine.
17:16Après avoir été capitaine, il faut être commandant.
17:17Après avoir été commandant, il faut être lieutenant-colonel.
17:19Après avoir été lieutenant-colonel, il faut être colonel.
17:20Et enfin, vous rentrez dans le vivier
17:22dans lequel les colonels sont proposables
17:25pour accéder au généralat et donc à 2 étoiles.
17:27Une fois qu'on est général de brigade,
17:28on peut être général de division.
17:30Une fois qu'on est général de division,
17:31on peut être général de corps d'armée.
17:32Une fois qu'on est général de corps d'armée,
17:33on peut être général de l'armée.
17:34Mais ça, c'est la militarité.
17:36Et je parle sous le contrôle des officiers qui sont ici.
17:38Personne ne change un seul instant en remettre cela en cause.
17:41Parce que c'est précisément la légitimité du chef au combat
17:45d'avoir été sous-lieutenant
17:47qui donne une légitimité militaire particulière
17:50lorsqu'on devient général d'armée.
17:52Et ça, c'est un point commun à l'ensemble des cadres militaires.
17:57Et figurez-vous que c'est pas propre à l'armée française.
17:59C'est le principe de la militarité partout dans le monde.
18:01Donc en fait, vous le voyez bien,
18:02on revient toujours à mon sujet, recrutement initial.
18:05Pour que le pouvoir politique puisse avoir
18:06plus de candidats teux au généralat,
18:09c'est donc mathématique.
18:11Il faut donc plus de femmes sous-lieutenants teux
18:14lorsqu'elles sortent de l'école
18:15ou lorsqu'elles peuvent rentrer dans l'école.
18:17Et ça nous amène aux efforts importants.
18:19Laura l'a fait, évidemment, beaucoup pour Polytechnique,
18:20elle pourra en témoigner plus avamant que moi.
18:22C'est vrai aussi pour les autres écoles militaires
18:24sur lesquelles on a encore du travail à faire,
18:26me semble-t-il, pour l'armée de terre.
18:27Mais c'est de permettre, au fond,
18:29d'avoir un recrutement initial qui soit beaucoup plus fort.
18:31Et après, le reste, assez mécaniquement, se forme.
18:34Mais je vous parlais d'attrition.
18:37Nous avons constaté chez la plupart des femmes
18:39nommées officiers générales
18:41que souvent, elles anticipaient
18:43leur date de départ de l'institution.
18:45Et ça, ça m'a beaucoup travaillé,
18:47parce que faire tout ça pour qu'à un moment donné,
18:49ça se solde par quelque chose qui pourrait ressembler à,
18:53je mets des guillemets, une forme d'échec.
18:55En tout cas, ça pourrait être interprété comme cela,
18:58et ça me semblait nécessaire de le documenter.
19:00On a mené un travail avec une officier générale
19:03qui a regardé de près, au fond,
19:05pourquoi ça n'a pas fonctionné comme il fallait.
19:08Et là, on le voit bien, c'est un point commun
19:09qu'on peut retrouver, au fond, tout grade confondu,
19:12c'est tout simplement l'adaptation
19:14des suggestions militaires à un parcours féminin.
19:18Et quand on gratte un peu et quand on fouille un peu,
19:20et c'est le 2e travail qui est en cours,
19:23c'est un travail, je fais une parenthèse,
19:24que j'ai confié au Cevipof,
19:26sur une cohorte de 10 000 à 15 000 personnes,
19:29et de les suivre sur de nombreuses années
19:31pour voir ce que ces personnes deviennent.
19:33On a vu les relignes pour les campagnes européennes
19:35pour les sondages.
19:37Ca, c'est pas un sondage, c'est de se dire,
19:38on prend 10 000 personnes, on les prend très tôt,
19:41et sociologiquement, politiquement,
19:43psychologiquement, administrativement,
19:46financièrement,
19:47on va regarder comment, justement,
19:49cette cohorte de 10 000 personnes évolue dans le temps.
19:52Le travail sera bientôt terminé.
19:53Enfin, il dénote déjà et démontre quelque chose
19:56qui vous est, je crois, connu mieux que quiconque,
19:59c'est évidemment l'énorme fragilité
20:01sur les populations entre 30 et 35 ans.
20:03Et c'est évidemment la question de la prise en compte
20:06de la maternité par l'institution militaire.
20:09Et cela, je parle sous le contrôle d'Emilie,
20:12mon aide de camp,
20:13qui avait comme collègue une autre aide de camp.
20:15Je vais vous donner cette anecdote, elle est symbolique,
20:16mais elle dit quelque chose.
20:18Quand je suis arrivé,
20:21capitaine, donc lieutenant de vaisseau
20:25de la Marine nationale,
20:28me fait savoir qu'elle était enceinte.
20:29Je la félicite.
20:31Et puis, un jour, je la sens un peu contrariée,
20:33parce qu'elle me dit que son gestionnaire,
20:35on est entre nous, la Marine nationale,
20:38lui a fait savoir qu'elle pouvait rebasculer en civile
20:43parce qu'elle était enceinte.
20:44Et je lui dis, mais vous êtes militaire.
20:48Il n'y a aucune raison que vous rebasculiez en civil
20:50parce que vous êtes enceinte.
20:51Quand on est militaire, on est militaire.
20:53Pas de conditions de dégradation.
20:55Enfin, pour ceux qui portent l'uniforme ici
20:58pour en témoigner mieux que moi,
20:59porter l'uniforme, c'est porter l'uniforme.
21:01Il n'y a pas de zone de gris.
21:02Si on ne porte plus l'uniforme,
21:03c'est qu'on n'est plus membre de l'institution.
21:04Et au fond, l'état-major de la Marine nationale
21:06ne voulait pas imaginer un uniforme
21:08adapté à la grossesse.
21:11Bon, là, je me suis pincé.
21:13J'ai réalisé qu'on était encore en 2022
21:16et que, globalement, ne pas reconnaître
21:19la militarité d'une femme enceinte,
21:22c'est précisément, justement, l'énorme problème.
21:26Et donc, ce sont des correctifs, celui-ci, symbolique,
21:28je le cite parce que je le trouve marquant,
21:29mais vous en avez beaucoup d'autres
21:31dans la vie quotidienne, sur une base aérienne,
21:33sur un bateau, dans une base navale,
21:35dans un régiment, évidemment, qui viennent impacter cela.
21:38Et c'est pas qu'un problème de crèche,
21:40même s'il faut construire des crèches
21:41parce qu'on est en 2022, on n'en a pas assez.
21:43Donc, là, on voit bien que ce qu'on appelle
21:45les suggestions militaires, évidemment,
21:48nécessitent une adaptation majeure.
21:49Et vous me voyez arriver.
21:51Il y a des endroits dans lesquels il ne faut pas faire de démagogie.
21:53L'adaptation des suggestions militaires
21:55seront complexes.
21:57Un sous-marin nucléaire.
21:59Et vous avez d'autres univers du combat,
22:02le cyber-combat, dans lequel l'adaptation
22:05des suggestions militaires seront très simples.
22:09Et là, il ne faut pas se payer de mots.
22:11Et vous voyez qu'on a le droit d'avoir un alignement de planètes.
22:14Je viens de vous dire qu'on a des menaces
22:16qui pèsent sur la nation française,
22:17qui sont particulièrement graves,
22:19et en plus, qui nous concernent plus qu'eux autres,
22:21parce que, précisément, on ne va pas nous envahir
22:23avec des chars parce que nous sommes
22:24ce que nous sommes militairement.
22:26Ca veut donc dire qu'on est condamnés à la menace sournoise,
22:29par-derrière, en-dessous, hybride, mais dangereuse,
22:33dans des démocraties qui sont quand même un peu fatiguées.
22:35Je crois que ça se voit ces temps-ci.
22:36Et de l'autre côté, vous avez un besoin énorme,
22:40en RH, de gens qualifiés,
22:42ayant le cerveau bien orienté,
22:44et dans lequel, en plus, les suggestions militaires,
22:47la militarité...
22:48Parenthèse, la militarité, c'est pas tant se faire tuer,
22:52c'est tuer sur ordre,
22:54parce qu'il ne faut jamais perdre cette vue.
22:56La militarité, c'est tuer sur ordre
22:58pour l'exécution de la mission,
23:00pour la protection du peuple français
23:02et de la nation française.
23:03C'est pour ça que j'éructe quand je vois
23:05qu'un certain nombre de gens veulent nous mettre...
23:07Il y a une grève de bus, il faut mettre les militaires
23:08pour conduire les bus.
23:10Il y a les éboueurs qui font grève,
23:12il faut mettre les militaires pour ramasser les poubelles.
23:14Personne ne songerait à envoyer les conducteurs de bus
23:16ou les éboueurs combattre Daech au Levant, si vous voulez.
23:18Donc je pense qu'il faut faire attention à ça,
23:21parce que c'est tuer sur ordre,
23:23et qu'on voit bien que le cybercombat,
23:25c'est une autre manière, potentiellement,
23:28de tuer sur ordre pour la protection du drapeau.
23:30Et cette suggestion militaire particulière,
23:33il est évident qu'elle est très adaptable
23:35et qu'elle doit rester en souplesse.
23:37Et c'est là où, nativement,
23:39penser ses métiers différemment dès maintenant
23:42permet de bien correspondre aussi à ce qu'est notre société.
23:46Dernier mot, et pardon, je suis un peu long.
23:47Je pourrais vous parler du spatial.
23:49Je fais une parenthèse.
23:50On connaît tous Thomas Pesquet.
23:51Son remplaçant est une remplaçante.
23:53Elle s'appelle Sofiane Naud.
23:54Elle est colonnelle en armée de l'air et de l'espace.
23:56Et c'est parce qu'elle est colonnelle
23:58en armée de l'air et de l'espace
23:59qu'elle est formée, qu'elle est compétente
24:00et qu'elle était une évidence en latin ex-wideo,
24:03ce qui saute aux yeux, pour remplacer Thomas Pesquet.
24:06Donc la militarité permet aussi, parce qu'il faut le dire,
24:09de pousser des profils d'élite absolus.
24:12Et s'il n'y avait pas eu, justement, l'armée et Sophie,
24:15je pense qu'on aurait eu du mal à trouver peut-être
24:18un niveau équivalent à la succession de Thomas Pesquet.
24:20Donc le spatial, tous ces autres sujets,
24:22évidemment, méritent aussi d'être documentés
24:24au même titre que le cyber.
24:25Dernier point sur la féminisation des institutions militaires.
24:29Et c'est pas que la féminisation.
24:30C'est vrai après des sujets de représentation
24:35des catégories socio-professionnelles, etc.
24:37Il n'y a pas d'armée
24:41qui peut convenablement exécuter sa mission
24:44si elle ne ressemble pas au corps social
24:46et donc à la nation qu'elle protège.
24:48Et ça, c'est ce que l'histoire militaire
24:50nous a démontré depuis maintenant plus d'un siècle.
24:53Et là, en fait, c'est là...
24:54J'aurais pu commencer mon propos par là,
24:56mais je le termine par là,
24:57parce qu'en fond, c'est l'essentiel.
24:59C'est qu'à un moment donné,
25:00peut-être que les évolutions sont plus lentes
25:02au sein des institutions militaires,
25:03mais pour des raisons qui s'expliquent,
25:05qui se documentent.
25:06On ne peut pas... Ou alors, on est démagogue,
25:07et puis on balaye tout dans un verre de main.
25:09Mais si on les regarde froidement, elles existent,
25:13mais il est impensable que l'institution militaire
25:15n'évolue pas comme la société française doit évoluer.
25:18Parce qu'en fait, il ne peut pas y avoir protection
25:20de la nation française si l'institution militaire
25:22ne ressemble pas à la nation qu'elle protège.
25:23Et ça, c'est clé. C'est vrai de la féminisation,
25:26mais vous le voyez bien, c'est vrai aussi d'autres parcours.
25:28Et d'ailleurs, historiquement et nativement,
25:30l'institution militaire a permis de donner beaucoup de chance
25:32à beaucoup de jeunes gens
25:34qui étaient issus de milieux défavorisés.
25:37Et d'ailleurs, c'est aussi un point d'attention pour moi,
25:39c'est que la féminisation,
25:40et ce sera mon dernier message que je fais passer,
25:42ne se fasse pas au bénéfice uniquement d'élite féminine,
25:45mais qu'on soit bien et bien capables
25:47d'offrir une place pour chaque femme,
25:49quelles que soient ses origines sociales,
25:52parce que c'est évidemment le danger qui nous guette,
25:54surtout sur les sujets à forte valeur ajoutée,
25:56comme on a évoqué ce matin,
25:57c'est évidemment de se concentrer sur le haut du spectre qualifié,
26:01alors qu'on le voit bien derrière,
26:02se déroule et se découle beaucoup de carrières,
26:04beaucoup de métiers sur lesquels on a besoin
26:06et qui doit constituer une promesse républicaine
26:08pour tout le monde.
26:09Soyez les bienvenus à Brienne, c'est votre maison.
26:11Merci à tous.
26:12Merci.

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