L'invité du jour de Télématin est l'écrivain et comédien Philippe Torreton.
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00:00 On a maintenant le plaisir d'accueillir le comédien et écrivain Philippe Toretton.
00:03 Bonjour.
00:04 Bonjour.
00:04 Et bienvenue sur le plateau de Télé Matins.
00:07 Vous avez publié un nouveau roman, Un cœur outragé, chez Calman Levy.
00:10 Je dis roman, mais quand on vous lit, quand même, ça nous interroge un petit peu sur le personnage principal,
00:16 Albert Stéphan, ce comédien délaissé par le monde du cinéma.
00:19 Il vous ressemble un peu quand même, non ?
00:21 Oui, j'ai fait exprès de mélanger certaines choses, effectivement.
00:25 Mais c'est plus de l'ordre du détail.
00:27 C'est-à-dire que le fond du personnage n'est pas moi.
00:30 Mais deux, trois péripéties sont…
00:33 Tirées de votre vie ?
00:34 Inconnues, oui.
00:35 Et voilà, je voulais donner un cadre le plus vrai possible à ce roman,
00:40 le milieu du cinéma que je connais et que j'ai pratiqué.
00:43 Et donc, il n'y a rien de tel que finalement de raconter deux, trois anecdotes qui me sont arrivées et de lui donner à lui.
00:49 Mais sinon…
00:51 Ça va beaucoup plus loin, effectivement.
00:53 Parce qu'il se crée en fait un double, ce personnage, un peu à la Romain Garry.
00:57 Il faut le dire, qui est vraiment au cœur de ce livre.
00:59 Pour décrocher des rôles, en fait, il cherche à dénoncer un milieu, un système, ou à satisfaire son propre égo.
01:04 Il cherche quoi ?
01:05 Non, il ne cherche pas du tout à se…
01:07 Ce n'est pas tellement une vengeance, c'est une blessure d'orgueil.
01:12 C'est une blessure de comédien délaissé qui aime le cinéma et qui est en souffrance.
01:19 Et il s'est aigri, il s'est racrapoté et il veut leur prouver qu'ils ont eu tort de l'écarter des studios, des plateaux.
01:26 Et donc…
01:27 Mais ce n'est pas tellement…
01:29 C'est presque une vengeance, mais ce n'est pas tout à fait ça.
01:32 C'est un peu comme Romain Garry, d'une certaine façon.
01:34 Il a inventé Émile Ajard et d'autres pseudonymes pour que le lecteur puisse le lire avec une virginité retrouvée.
01:45 - Sans a priori. - Parce que sa vie incroyable polluait un peu son œuvre.
01:50 Et il n'était plus lu en tant qu'auteur réellement, mais en tant que personnage fantasque qui a fait plein de choses.
01:58 Albert Stéphan, votre personnage que vous décrivez comme un comédien boycotté ou délaissé par le cinéma,
02:03 est-ce que là, il y a un parallèle à y voir ?
02:05 Est-ce que vous, vous avez déjà ressenti ça dans votre vie de comédien, de vous sentir délaissé ou boycotté, mis de côté ?
02:10 Oui, je me sens un peu délaissé depuis une douzaine d'années maintenant.
02:15 Et…
02:16 - Où on ne fait plus appel à moi pour des rôles… - Vous savez pourquoi ?
02:20 Oui, bien sûr.
02:21 Disons-le franchement, pour une tribune que vous avez écrite dans Libération en 2012.
02:26 - En 2012, fin 2012, exactement. - Contre Gérard Depardieu.
02:28 Oui, c'est ça. Depuis… Alors, il y a plusieurs facteurs, il y a ça…
02:32 On voit le titre, "Alors Gérard, t'as les boules, vous pensez que vous l'avez payé cette tribune ?"
02:37 Oh, vu ce que certains de mes camarades ont dit sur moi, oui, je pense que je l'ai payé, oui.
02:43 Mais moi, j'ai envie de dire tout va bien. Je suis heureux dans ma vie, je fais du théâtre, j'écris.
02:49 Je continue à faire un peu de cinéma, je picore comme ça des petits rôles à droite, à gauche.
02:54 À chaque fois, on me dit "Oh, ce serait tellement bien que vous fassiez ce petit rôle,
02:57 ce serait tellement bien pour nous, etc." Et je le fais volontiers.
03:01 Mais vous ne regrettez rien quand vous voyez cette tribune, quand vous y repensez,
03:04 quand vous voyez la douzaine d'années qui vient de passer ? Vous ne vous dites pas "Je regrette" ?
03:06 Non, ce n'est pas dans mon habitude de regretter, ça ne sert pas à grand-chose.
03:11 Et…
03:12 C'est… Il faut avancer, voilà.
03:15 J'avais envie de lui dire ça, oui, à l'époque.
03:19 Parce que je trouve que l'évasion fiscale est un vrai sujet.
03:23 C'était au moment où il est parti en Belgique.
03:24 Oui, voilà, et que lui était un personnage public, donc symbolique.
03:27 Ce n'est pas le pire dans l'évasion fiscale, mais c'est un symbole.
03:32 C'est toujours un personnage public et il y a d'autres affaires qui sont sorties depuis,
03:36 notamment des accusations de viol.
03:38 Est-ce que c'est un homme intouchable, selon vous, aujourd'hui ?
03:41 La preuve que non, puisqu'il y a des procédures judiciaires sur lesquelles je ne vais pas m'exprimer,
03:46 parce que c'est du domaine de la justice.
03:49 Mais la preuve que non.
03:50 Il a fallu du temps.
03:51 Pardon ?
03:52 Il a fallu du temps.
03:53 Oui, je pense qu'il faut… Bah oui, il faut du temps.
03:55 Il faut du temps pour toutes ces révélations-là, il faut du temps.
03:58 Mais comme partout, dans tous les sujets,
04:01 on ne peut pas passer sur des générations et des générations de silence dans tous les domaines.
04:07 C'est compliqué.
04:08 On le voit à travers le père.
04:09 Valérie.
04:10 On vous dit, finalement, tu as peut-être eu raison de dire des choses.
04:14 Est-ce que des gens reviennent vers vous par rapport à ce qui s'est passé ?
04:18 Oui, certaines personnes me le disent, oui.
04:20 C'est…
04:22 On reconnaît que j'étais bien seul.
04:26 J'étais bien seul au début.
04:28 Et voilà.
04:30 Bon.
04:31 En tout cas, il y a quelqu'un qui s'intéresse beaucoup à votre avenir.
04:33 C'est vrai.
04:34 Et vous le connaissez, en plus.
04:35 Regardez, il a un petit message pour vous.
04:37 Salut Philippe.
04:39 Quel plaisir de te parler en direct des Rhines,
04:41 où nous, on cultive la biodiversité, comme toi, tu cultives les différentes identités de ton héros.
04:45 C'est toujours agréable de parler avec toi de culture, d'agriculture, de cinéma, de théâtre, de bouquins.
04:51 Et maintenant, ton futur projet, c'est quoi ?
04:54 Un livre, un film ou devenir paysan ?
04:57 Ça, c'est la question d'Emmanuel.
04:59 C'est votre voisin, votre ami.
05:00 C'est mon ami très cher, Emmanuel Félot, dans le Beaujolais, que j'adore.
05:05 Et toute sa famille, d'ailleurs, que je salue.
05:07 Nadej et leurs trois filles.
05:09 Et c'est…
05:11 Ce sont des gens formidables.
05:12 Mais vraiment formidables.
05:13 Ils me font un bien fou à chaque fois qu'on y va.
05:15 En famille, on travaille.
05:17 On conduit le tracteur, on va nourrir les vaches.
05:19 C'est un des rares vignerons, éleveur aussi, en bio.
05:23 Ils sont plein de frères, les frères Félot.
05:26 Il y a un ancien clown, il y a un musicien, il y a des gens qui…
05:28 Et donc, votre avenir, c'est quoi ?
05:29 Peut-être aller travailler dans les vignes ou non ?
05:31 Mais moi, ça me plairait.
05:32 Le vin, t'aurais-t-on ?
05:34 Ça me plairait faire le vin.
05:36 C'est formidable.
05:37 Moi, j'adore.
05:38 J'adore les caves, j'adore la vigne.
05:40 Qu'est-ce qui vous en empêche aujourd'hui ?
05:42 Parce que c'est un peu tard.
05:44 J'ai 58 ans, j'ai consacré ma vie au métier d'acteur,
05:48 aux mots, à la poésie, à cette parole,
05:52 à dresser à d'autres, à dire quelque chose à quelqu'un.
05:55 Donc, je suis très content que lui ait consacré sa vie au vin.
05:58 Et écrire sur le vin ?
06:00 Non, je pense pas.
06:03 Je pense pas.
06:04 Juste le déguster.
06:05 C'est pas mal.
06:08 Déjà, c'est pas mal.
06:08 Et participer.
06:10 Est-ce que vous avez toujours un petit bout de bois sur vous ?
06:12 Vous ne l'avez aujourd'hui ?
06:13 Non, je ne l'ai pas.
06:14 Non, j'en ai souvent, mais là, non.
06:16 J'ai changé de veste.
06:18 Mais on parlait bricolage avec Nadine,
06:21 mon attaché de presse, tout à l'heure.
06:23 Oui ?
06:24 Phil Thoré, toi qui es notre invité,
06:25 au sujet de la petite pause,
06:27 on va vous retrouver dans un instant.
06:27 Vous publiez "Le Coeur Outragé" chez Calman Levy
06:30 et vous êtes notre invité jusqu'à 9h30 dans Télé Matin.
06:32 À tout de suite.
06:33 *musique*