• il y a 6 mois
Le témoignage de Sandrine Josso, députée de la 7e circonscription de la Loire-Atlantique, droguée à son insu par le sénateur Joël Guerriau en novembre dernier.

Et celui de Caroline Darian. En novembre 2020, sa mère découvre que son mari l’a droguée à son insu pour abuser d’elle et la faire abuser par des hommes.

Caroline Darian est la fondatrice du mouvement de sensibilisation et de prévention « M’endors pas, stop à la soumission chimique », devenu depuis peu une association.

Ensemble, elles demandent une vraie prise de conscience et les moyens d’une prise en charge à la hauteur pour lutter contre ce fléau et accompagner les victimes.

Si vous souhaitez témoigner https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSdnzMNu26Sw_eevc0-kWrpk0tmVe89VYkFuwsbRECwxEoODkA/viewform

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Transcription
00:00 J'ai un sénateur qui a mis de la drogue dans mon verre, de la MDMA,
00:05 et j'ai commencé à avoir des symptômes de nausée, de palpitations, de sfeurs, de tremblements.
00:12 Et à un moment donné, j'ai aperçu ce sénateur qui avait dissimulé mon verre dans la cuisine
00:19 avec un sachet de drogue à la main, et là je me suis échappée à temps, en fait.
00:25 Moi, avant novembre 2020, je n'avais jamais entendu parler de la soumission chimique.
00:30 Et j'ai envie de dire, même jusqu'en novembre 2020, j'avais ce que je dirais une vie normale,
00:37 une vie de famille normale, une vie de femme normale.
00:39 Et un jour, je reçois un appel de ma mère qui m'apprend à avoir découvert
00:46 que son mari, donc mon père, la droguait.
00:49 Et on va découvrir qu'il la droguait de façon régulière et pendant de nombreuses années
00:54 à des fins de crimes sexuels.
00:55 Et à partir de novembre 2020, va démarrer une instruction d'ampleur.
01:01 Je vais découvrir ce que c'est que ce phénomène.
01:03 Je vais découvrir qu'à force d'investiguer, d'aller rencontrer des professionnels
01:09 et aussi des victimes, qu'en réalité c'est un fléau, c'est un mode opératoire
01:15 qui est beaucoup plus utilisé, beaucoup plus répandu qu'on ne le croit.
01:18 La soumission chimique, c'est un fait social, c'est un fait de société,
01:21 c'est une problématique de santé publique précisément.
01:25 On pensait que c'était réservé à un public plutôt jeune,
01:30 mais pas du tout, ça concerne tout le monde.
01:33 En fait, il n'y a pas de profil de victime type.
01:36 En revanche, il y a sans doute un profil type d'agresseur.
01:41 Ce sont souvent des hommes qui ont un ego assez développé,
01:46 qui sont souvent très auto-centrés, qui sont assez froids, qui n'ont pas d'empathie.
01:50 Mais ça, on n'arrive pas à le déceler quand on est la personne.
01:53 C'est souvent des traits de caractère qui s'arrivent à dissimuler.
01:56 Et d'ailleurs, c'est tout le problème de la soumission chimique
01:59 utilisée par les prédateurs sexuels, c'est que ça permet d'autant plus
02:02 d'effacer les preuves, ou en tout cas les traits saillants
02:07 de la personnalité du prédateur sexuel.
02:09 Oui, le prédateur en général, il le fait en série.
02:13 Il faut savoir qu'un prédateur, un agresseur sexuel,
02:17 dans sa vie, il peut au moins avoir plus de 50 victimes.
02:21 Vous êtes toutes les deux parmi les signataires de la tribune
02:25 qui est récemment parue dans Le Monde.
02:27 Est-ce que vous pourriez nous parler du projet qu'il y a derrière
02:30 cette tribune et la pétition qui y est liée ?
02:33 Il y a deux sujets. Il y a d'abord se réunir.
02:35 Vous avez vu dans cette tribune, il y a des hommes, il y a des femmes,
02:38 un peu plus de femmes.
02:40 Mais c'est aussi se dire qu'on est tous ensemble et qu'on est plus forts ensemble.
02:43 Et ensemble, on continue à porter le sujet parce qu'il y reste
02:47 encore un énorme chantier dans notre pays.
02:49 Le projet derrière cette tribune, c'est de faire changer les textes
02:54 en matière d'agression sexuelle et de viol.
02:56 Quand vous savez que vous avez plus de 90% des plaintes qui n'aboutissent pas,
03:01 c'est un drame absolu pour les victimes.
03:04 Il y a autre chose qui est mise en lumière au travers de cette tribune,
03:08 c'est des aberrations dans le cas d'agression sexuelle.
03:13 C'est qu'on investigue beaucoup la personnalité et l'intimité des victimes.
03:19 En revanche, l'intimité et le parcours des auteurs restent dans l'ombre.
03:26 De ce que j'ai lu, le projet de cette tribune, c'était d'obtenir
03:28 ce qu'on appelle une loi intégrale.
03:31 Qu'est-ce que ça comprend, du coup, une loi intégrale ?
03:33 Il faut comprendre qu'il y a des besoins en termes financiers,
03:36 des besoins humains pour remédier justement à une meilleure protection,
03:39 c'est-à-dire pour faire en sorte que les agresseurs puissent de moins en moins agresser,
03:45 que ces agresseurs soient condamnés à des peines exemplaires.
03:50 Il faut aussi des possibilités aujourd'hui de mieux écouter les victimes.
03:55 Aujourd'hui, les victimes, ce qu'elles ressentent, c'est que finalement,
03:59 les auteurs, les agresseurs ont plus de droits qu'elles.
04:03 Ça, c'est un vrai souci.
04:04 Les victimes ont peur parfois de porter plainte.
04:07 Et c'est aussi un parcours semé d'embûches.
04:10 Porter plainte, ça coûte beaucoup sur le plan humain,
04:13 sur le plan de la société, sur le plan professionnel et sur le plan financier.
04:17 Et beaucoup de victimes, pour toutes ces raisons,
04:19 ne peuvent pas ou ne veulent pas porter plainte.
04:22 Et ça, c'est juste plus possible aujourd'hui.
04:24 Quand on est victime, on n'est certainement pas coupable.
04:27 Mais il y a un biais dans la société qui fait qu'une victime,
04:30 obligatoirement, quelque part, elle est un peu coupable.
04:32 Et aujourd'hui, on dit non.
04:33 Il y a aussi l'accueil de la parole des victimes.
04:36 Est-ce qu'aujourd'hui, elle est véritablement légitime
04:38 et reconnue auprès des services de police, de justice ?
04:41 C'est une vraie question.
04:42 La question des moyens matériels et humains, matériels,
04:45 c'est la collecte de preuves.
04:48 La collecte de preuves aujourd'hui,
04:50 qui permet aux victimes de légitimer une judiciarisation
04:54 ou de légitimer leur statut de victime,
04:57 elle est prépondérante.
04:58 Et aujourd'hui, c'est là où aussi le bas blesse en France.
05:01 Il y a deux choses.
05:02 Il y a la collecte de preuves et l'accessibilité à la preuve.
05:05 Alors aujourd'hui, pour une victime, par exemple,
05:09 de soumission chimique, c'est compliqué de parler rapidement,
05:13 d'avoir une accessibilité facile pour collecter, par exemple, du sang,
05:19 parce que parfois, les victimes, elles ne vivent pas dans un endroit
05:23 où il y a un hôpital avec un laboratoire spécialisé
05:25 qui pourra bien collecter, par exemple, leur urine
05:28 ou tout simplement pouvoir faire une analyse de sang.
05:32 Il y a quelque part des inégalités sur le territoire.
05:35 Donc, il faut obligatoirement former à tous les niveaux.
05:39 Et puis aussi, il y a quelque part une prévention indispensable
05:44 pour faire en sorte que ces victimes, elles soient mieux accompagnées
05:48 par tout le monde dans la société, mais aussi par les professionnels
05:51 qui sont au plus près des victimes lorsqu'elles veulent se manifester,
05:56 porter plainte ou tout simplement être soignées.
05:59 En cas d'agression sexuelle et de viol, où les victimes peuvent se rendre
06:03 pour près des prélèvements qui vont être conservés.
06:05 Et comment on va conserver des preuves pour les victimes
06:09 qui ne seront peut-être pas en capacité de déposer plainte à l'instant T,
06:13 mais qui pourront y revenir ensuite ?
06:14 Il y a un système qui existe aujourd'hui,
06:17 qui est instauré au sein de la Maison des Femmes du 93,
06:19 qui n'est pas forcément généralisé partout.
06:21 C'est ça, la collecte de preuves.
06:22 On sait très bien qu'aujourd'hui, les analyses d'urines et de sang
06:27 sont valables qu'entre 24, 48 à 72 heures.
06:32 Ça ne suffit plus de se dire, on a ce levier-là à activer en tant que victime.
06:38 On sait très bien que c'est peau de chagrin,
06:40 parce que c'est juste un laps de temps qui est très, très limité.
06:43 Il y a d'autres gestes scientifiques qui existent
06:47 et qui nécessiteraient une généralisation,
06:49 en tout cas, à minima, une systématisation, pardon.
06:53 Et là, je parle de, par exemple, d'un prélèvement de cheveux
06:56 qui aujourd'hui est réservé à une classe infime de victimes.
06:59 Et malheureusement, ça n'aide pas dans la prise en charge
07:03 et en tout cas dans la reconnaissance du statut de victime.

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