• il y a 7 mois
Dans un contexte de guerre en Ukraine, de crise sanitaire et de montée du protectionnisme américain avec l'élection de Donald Trump, le sujet de la souveraineté européenne est devenu un enjeu capital pour les chefs d'Etats de l'Union européenne. Il est important d'être autonome dans des secteurs stratégiques comme la santé, la défense ou la technologie. Raphaël Thuin, directeur des stratégies de marchés de capitaux de Tikehau Capital et Cédric Marc, gérant de Patrimonio Finance, détaillent les différentes options financières pour soutenir cette résilience.

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Transcription
00:00 [Générique]
00:04 Et nous enchaînons à présent avec enjeu patrimoine.
00:06 Nous allons regarder précisément ensemble comment investir sur une thématique en particulier,
00:11 la thématique de la souveraineté européenne,
00:14 ce qui va évidemment nous amener à nous demander ce que l'on met dans la définition de la souveraineté européenne.
00:20 Pour en parler, nous avons le plaisir de recevoir sur le plateau de Smart Patrimoine deux experts du sujet.
00:24 Tout d'abord Cédric Marc. Bonjour Cédric Marc.
00:27 Bonjour Nicolas.
00:28 Je ne sais pas si je suis un expert mais on aura des trucs à dire.
00:31 Espérons en tout cas. Bienvenue Cédric Marc.
00:33 Vous êtes gérant de patrimonieux finances et nous avons le plaisir d'accueillir également sur le plateau Raphaël Thuyn.
00:38 Bonjour Raphaël Thuyn.
00:39 Vous êtes directeur des stratégies de marché de capitaux chez TKO Capital.
00:42 TKO Capital qui a justement lancé un fonds sur la thématique de la souveraineté européenne.
00:47 Vous allez nous en parler dans un instant.
00:49 Cédric Marc, on va peut-être commencer avec vous.
00:52 Quand on parle de souveraineté européenne, qu'est-ce que ça évoque ?
00:57 Un gestionnaire de patrimoine.
00:59 Souveraineté européenne, c'est prendre des décisions pour soi-même afin de préserver et développer sa propre identité.
01:07 D'ailleurs, ce que disait dans le discours de la sœur Bonne, le président Macron, il y a quelques temps, qui était un moment clé.
01:16 Il disait qu'il vaut mieux essayer de réfléchir aux moyens de fixer des règles que de les subir.
01:23 Pourquoi est-ce qu'on parle aujourd'hui de souveraineté européenne ?
01:27 Parce qu'en fait, on change d'ère.
01:30 On a une ère passée où on achetait son hydrocarbure et ses engrais en Russie.
01:38 On faisait produire en Chine et puis on déléguait sa sécurité, sa protection aux États-Unis.
01:44 Cette ère, elle est révolue. Effectivement, avec ce qui s'est passé depuis 2022, il y a une prise de conscience très pointue
01:54 sur le fait qu'il faut dorénavant que ça pâche. Il faut qu'on prenne possession de notre souveraineté personnelle européenne.
02:01 Donc faire un pas en arrière, finalement, sur les sujets mondialisation, c'est ça que ça veut dire, la souveraineté européenne ?
02:06 En fait, c'est faire revenir en France un certain nombre d'industries.
02:09 Parce que là, vous nous avez parlé autant de la défense, de l'agricole que du transport quelque part.
02:15 Exactement.
02:16 Des énergies même.
02:17 Exactement. Et en fait, ce qui s'est passé depuis 2022, il y a eu beaucoup d'éléments factuels.
02:24 On a eu, pour tenter de répondre à votre question, on a d'abord eu, Repower a eu,
02:28 c'est-à-dire que juste après l'invasion de l'Ukraine, en disant, voilà,
02:34 quels sont les moyens pour essayer de trouver des solutions très concrètes et très drastiques sur le fait de diminuer notre dépendance à l'hydrocarbure russe.
02:44 Après, on a eu, je dirais, un traité industriel sur la stratégie d'armement en Europe.
02:53 C'était en mars 22.
02:54 Ça, on a dit, bon, dorénavant, à partir de 2030, il faut que l'on consomme européen, c'est-à-dire avec des chiffres de 40% à partir de 2030,
03:01 60% à partir de 2035, il faut que toutes nos dépenses soient faites dans ces proportions-là au niveau européen.
03:09 Et puis, il y a surtout un élément qui m'a marqué à l'époque et que je me permets bien volontiers de repartager,
03:15 c'est le discours sur l'état de l'Union en septembre 2022, lorsque Ursula von der Leyen, elle fait un état de l'Union et elle dit
03:23 on va mettre en place des projets de manière à essayer de développer des projets industriels dans l'hydrogène, dans les batteries,
03:32 dans la protection des semi-conducteurs, etc. Et qu'est-ce qui se passe aujourd'hui ?
03:37 Ce n'est pas des 20 mots. On a les fameux projets d'intérêt, les projets importants d'intérêt européen communs.
03:48 Tout est dit dans ce temps-là. Qu'est-ce qu'on a ? On a la mise en place sur l'hydrogène de la Banque de l'hydrogène.
03:53 On a la mise en place du CHIPT Act sur les semi-conducteurs. On a eu un traité récemment sur le fait que les matières premières critiquent.
04:02 Comment est-ce qu'on assure notre approvisionnement et la durabilité là-dessus ? Et puis, tout dernièrement, on en a parlé d'ailleurs
04:12 très récemment à la radio sur le fait de créer des gigafactories de batteries. Et c'est demain. On a dit qu'en 2025, il faut que 70% de la demande,
04:27 elle soit satisfaite par des productions européennes et puis à hauteur de 90% en 2030. Bravo à l'Europe.
04:35 — Alors ça, c'est une introduction un peu générale sur le terme de la souveraineté européenne. Si ça doit se traduire en investissement, Raphaël Chouin,
04:43 TKO Capital a créé un fonds sur le sujet, sur le sujet de la souveraineté européenne. Avant que vous nous expliquiez un petit peu comment on gère ce fonds,
04:48 quelle est l'origine de la volonté de créer un fonds sur la souveraineté européenne ? Parce qu'il n'y en a pas beaucoup, aujourd'hui, des fonds quand même
04:54 sur la souveraineté européenne. — Il n'y en a pas beaucoup. Et effectivement, Cédric en a bien parlé. C'est effectivement cette prise de conscience
05:00 qu'aujourd'hui, l'Europe est fébrile, elle est fragile, elle dépend de grands acteurs internationaux autour de secteurs stratégiques. Et ces grands acteurs
05:08 internationaux ne sont pas toujours très amicaux à son égard. Et aujourd'hui, elle a décidé de se reoutiller, de se réarmer au sens propre et au sens figuré
05:18 pour faire face à davantage – encore une fois – de résilience, d'autonomie, des mots-clés dans ce concept de souveraineté. Donc c'est vraiment,
05:25 selon nous – et ça va être le mot-clé du fonds de cette stratégie – une méga-tendance qui est en train de se créer. Et on sait que pour l'investisseur,
05:33 les méga-tendances, en particulier lorsqu'on investit au début, lorsqu'on les anticipe, elles sont source de performance sur le long terme.
05:39 Elles sont source de rendement. Donc voilà. On voulait chez TICIO essayer de se positionner sur cette idée de méga-tendance, sachant que c'est
05:48 pour nous une zone de chalandise, qu'on va dire qu'on connaît bien la souveraineté. Vous savez, nous, on investit beaucoup en Europe. Plus de 90% de ce qu'on fait,
05:56 c'est d'investir en Europe chez les petites et moyennes entreprises. – Bien sûr. – On a des fonds thématiques en dettes privées sur le PIB, avec par exemple
06:03 la cybersécurité, la transition énergétique. Et donc ce concept de souveraineté résonne beaucoup chez nous. Il manquait probablement un instrument pour le faire
06:12 sur les actions listées. Et c'est pour ça qu'on a lancé ce fonds. – Mais alors comment est-ce qu'on dresse les contours de ce qu'on définit
06:19 comme souveraineté européenne, quand ça doit se traduire par des investissements via un fonds d'investissement ?
06:24 – Alors on avait défini 7 grandes verticales. Je vais pas vous les lister, je vais vous les épargner. Mais je peux vous en citer quelques-unes
06:30 qui sont emblématiques. On va évidemment parler de la défense. Ça revient dans toutes les bouches. – D'accord. Oui.
06:35 – Aujourd'hui, l'Europe a décidé de se réarmer, de réinvestir dans sa défense nationale. Aujourd'hui, elle dépense environ 1,3% de son PIB.
06:44 Elle s'est engagée à faire 2%. Elle veut aller bien au-delà. Et on a des grands champions nationaux qui doivent pouvoir bénéficier en Europe
06:51 de ces mannes, de ces grands déploiements de capitaux. Je vais vous donner une statistique qui est assez parlante, qui en dit long
07:00 sur la fébrilité et l'état de dépendance dans laquelle on est. On a une très belle industrie de la défense en Europe. On a des grands champions.
07:07 80% de nos dépenses militaires d'équipement sont passées auprès d'entreprises non européennes. – D'accord.
07:13 – Donc aujourd'hui, il y a cette prise de conscience qu'il faut que nos grands acteurs nationaux puissent contribuer à l'essor
07:19 de cette défense européenne. Donc en Europe, on va parler évidemment de Rheinmetall en Allemagne, qui est évidemment un champion de la chose.
07:26 En France, on est aussi bien outillé avec Dassault Aviation par exemple, Thales. Voilà des exemples autour de la défense.
07:33 Ces entreprises devraient, devront pouvoir bénéficier de ces grands investissements publics autour de la défense.
07:40 La pharma est un autre exemple. Je vais vous donner le même genre de statistiques.
07:43 – D'accord. La pharmacie, ça rentre dans la souveraineté européenne ? – Absolument.
07:45 – Oui, et en lien peut-être avec la crise Covid et la recherche de médicaments qu'on n'avait pas à un moment,
07:50 voire de vaccins, voire de masques ou autre. – Tout à fait. Et Cédric disait à raison que depuis 2022,
07:55 ce concept de souveraineté revenait dans toutes les bouches. Mais peut-être qu'on peut même aller au-delà,
07:59 regarder Covid 2020, regarder les années Trump. Ça fait maintenant une décennie qu'on mijote,
08:05 qu'on ressasse cette idée de fébrilité, de fragilité. – D'accord.
08:08 – Donc la pharma, évidemment, aujourd'hui, 80% des molécules pharmaceutiques qu'on utilise pour fabriquer nos médicaments
08:15 viennent d'ailleurs de Chine en particulier. Et lorsqu'il faut fabriquer du Doliprane en 2020,
08:19 on se retrouve un petit peu en difficulté. Donc en pharma, on a des grands champions.
08:24 Novo Nordisk, au Danemark, est une entreprise exceptionnelle. Mais plus près de chez nous,
08:28 Biomério en France sur les diagnostics, Sartorius sur l'équipement médical en Allemagne.
08:33 Tout ça, ce sont des très belles signatures européennes de très bonne qualité sur lesquelles on doit pouvoir voir
08:39 de la performance sur le long terme autour de ce déploiement de capitaux. Voilà, je vais pas à toutes vous les citer.
08:44 Il y a évidemment les infrastructures. – Non, mais peut-être sélectionner...
08:47 J'imagine qu'il y a de nombreux thématiques, de nombreux secteurs. Un des secteurs qui serait le moins évident,
08:53 mais que TKO Capital fait quand même rentrer dans le sujet de la souveraineté européenne, c'est vrai que la défense,
08:59 on y pense, évidemment. La souveraineté, effectivement, agricole, on y pense aussi.
09:03 Est-ce que jusqu'où ça va, la souveraineté européenne ?
09:05 – Alors, très bonne question. On veut être très pur dans l'approche de cette thématique, à savoir qu'il faut savoir
09:11 sélectionner les entreprises qui seront susceptibles de bénéficier de ces grands plans lorsqu'ils seront déployés.
09:16 – D'accord. – Mais d'un autre côté, effectivement, il faut ouvrir les yeux.
09:19 Qu'est-ce qui pourrait ruisseler à travers ce concept de souveraineté et faire bénéficier certains secteurs ?
09:25 Je parlais d'infra. Dans l'infra, on va parler évidemment, par exemple, de l'infra énergétique.
09:29 On va parler aussi de l'infrastructure financière. Il y a beaucoup de travail aujourd'hui autour d'une place financière européenne.
09:36 – Bien sûr, l'union des marchés de capitaux, bien sûr, oui. – Absolument.
09:38 – Ça, ça pourrait rentrer dans une thématique de souveraineté européenne. – Tout à fait.
09:41 Et vous regardez, par exemple, une entreprise comme Deutsche Börse et d'autres.
09:44 On doit pouvoir voir autour de ces grandes places financières européennes une consolidation.
09:49 Et ces grands acteurs devraient pouvoir bénéficier de ces plans-là.
09:53 Donc on est effectivement sur toute une série de thématiques qui, lorsque ces grands plans seront mis à contribution, seront des bénéficiaires.
10:02 Une dernière qui est un petit peu contre-intuitive en Europe mais qui pourtant est réelle, c'est la technologie.
10:08 – D'accord. – Nous ne sommes pas des champions de la technologie en Europe quand on se compare aux États-Unis.
10:12 On a en revanche de très belles entreprises. Vous prenez les puces, les semi-conducteurs,
10:17 qui sont aujourd'hui d'une importance stratégique.
10:19 C'est, que ce soit en Chine, en Europe ou aux États-Unis, l'objectif n°1 en termes d'indépendance industrielle.
10:27 On a la plus belle entreprise du secteur, lorsqu'on regarde le concept de lithographie,
10:34 à savoir l'impression de cette silicone pour les transformer en semi-conducteurs.
10:39 Une entreprise qui a une quasi-monopolie, c'est ASML, aux Pays-Bas, qui fabrique donc ces semi-conducteurs
10:47 et qui est aujourd'hui une entreprise magnifique, disponible en Europe à des niveaux de valorisation
10:52 qui restent raisonnables lorsqu'on les compare à leurs équivalents américains.
10:56 – Quand on voit des grands noms de la Côte française se poser la question d'aller ce côté à Wall Street,
11:01 est-ce que ça fait réfléchir encore plus à l'idée de souveraineté européenne ?
11:05 Peut-être Raphaël Thuyn et Cédric Marc, rapidement ?
11:07 – Oui, on parlait de cette consolidation de la place financière, on est exactement dans le sujet.
11:12 Aujourd'hui, voir Total Energy quitter la place parisienne serait un souci de souveraineté.
11:19 Aujourd'hui, c'est un champion français qui a une importance stratégique
11:22 pour notre indépendance énergétique et notre indépendance économique.
11:25 Et donc on veut que les capitaux qu'il a financés restent français, restent européens.
11:29 Donc on est vraiment dans ce concept et c'est ce genre d'histoire, ce genre de réflexion,
11:34 ce genre d'annonce qui va faire accélérer la souveraineté et on l'espère aussi,
11:38 permettre de la performance à travers ce fonds.
11:40 – Cédric Marc, deux questions pour vous.
11:41 La première, effectivement, il y a le sujet investissement pour les entreprises
11:44 et puis il y a le sujet adhésion des épargnants, de ceux qui sont dans votre bureau,
11:48 à aller sur ce type de méga tendance où il va falloir faire de la pédagogie quelque part.
11:53 – Alors, sur la partie méga tendance, moi ça fait de nombreuses années,
11:57 j'achète peu de fonds actions internationaux mais une multitude de fonds thématiques.
12:03 Et je trouve que ce que vous présentez Raphaël est très intéressant
12:07 parce que ça va nous permettre de pouvoir condenser des investissements
12:13 sur des personnes qui n'ont peut-être pas la volumétrie nécessaire
12:17 pour faire une multitude de stratégies, actions différentes.
12:20 Exemple, pour trouver, moi j'ai voulu acheter des valeurs,
12:25 trouver des fonds liés à l'armement il y a quelques mois de ça,
12:29 ben j'en ai pas trouvé, j'en ai pas trouvé.
12:31 Les ETF, difficile à trouver, difficile à trouver et à faire référencer
12:36 dans des contrats classiques de contrats d'assurance vie, on oublie,
12:39 d'autant plus que c'est à tout le moins pas ESG.
12:42 Je trouve qu'une solution de ce type, c'est une très bonne solution.
12:47 L'adhésion, en fait, tout dépend lorsque c'est argumenté
12:50 et la relation que vous entretenez avec vos clients.
12:52 Donc moi je pense que si c'est expliqué, justifié,
12:57 et puis à force d'en parler, la population est sensible.
13:02 Et souvenez-vous de ce qui s'est passé en 2017 à la Sorbonne,
13:06 lorsque le président Macron a fait son fameux discours sur la souveraineté,
13:09 on se disait "mais de quoi nous parle-t-il ?"
13:11 Lorsqu'il nous a dit il y a quelques années "l'OTAN est en mort cérébrale",
13:14 on se dit "non mais il a eu une pousse".
13:16 On se dit "il y va un peu fort".
13:17 Et lorsqu'il nous dit "peut-être qu'on en verra des hommes là-dessus",
13:21 c'est aussi probablement pour préparer l'opinion à ceci.
13:27 Tout comme lorsque M. Pouyanné de Total dit "on va partir aux US",
13:32 c'est peut-être effectivement pour faire bouger les lignes.
13:36 Et autant de rappels quelque part au sujet de la souveraineté européenne, si je comprends bien.
13:39 C'est évident.
13:40 Merci beaucoup messieurs, on va s'arrêter là-dessus.
13:42 Merci beaucoup Cédric Marc, gérant de patrimonie aux finances.
13:44 Merci Raphaël Thion, directeur des stratégies de marché de capitaux chez Tikeo Capital.
13:49 Merci à vous de nous avoir suivis. On se retrouve tout de suite dans l'œil du CGP.

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