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Après la guerre en Ukraine, les tensions géopolitiques s’intensifient au Proche et Moyen-Orient. Que révèlent-elles de la mondialisation actuelle ? Selon Jean-Pierre Petit, la puissance extérieure de l’Europe s'affaiblit, pendant que celle des Etats-Unis est de plus en plus importante depuis 3 ans. À côté de cela, un sud global continue d'émerger.

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Transcription
00:00 (Générique)
00:05 On repart donc avec Jean-Pierre Petit, président des Cahiers Verts de l'économie. Salut Jean-Pierre.
00:09 - Salut Stéphane. - Donc le choc géopolitique,
00:12 double choc géopolitique, est-ce qu'on monte en intensité à ton avis ?
00:18 Donc en fait il a démarré avec la guerre ukrainienne,
00:21 est-ce qu'on monte en intensité avec ce qui est en train de se passer au Proche-Orient ?
00:25 - Moi je pense que la dégradation des relations internationales remonte à une vingtaine d'années déjà.
00:31 A partir du 11 septembre, on a vu que...
00:33 Il y a un certain nombre de think-tanks américains qui mesurent ça,
00:36 que la violence politique internationale s'est mise à reprogresser,
00:40 alors qu'il y avait eu une formidable amélioration après la chute du mur de Berlin,
00:45 et l'effondrement de l'Union soviétique en 1991.
00:49 Donc il y a eu une dégradation, et cette dégradation s'est manifestée aussi
00:52 par une hausse des dépenses militaires par exemple,
00:55 une montée de l'incertitude géopolitique chez les investisseurs, chez les décideurs.
00:58 Donc c'était antérieur.
01:00 - Moi je veux insister sur le côté multifactoriel de cette histoire.
01:03 C'est-à-dire que tu dis effectivement "Afghanistan, l'Afghanistan nous ramène au Proche-Orient",
01:08 on se dit "c'est le nœud essentiel", ben non, il y a aussi la Russie et l'Ukraine,
01:12 et puis il y a surtout, si tu te mets effectivement dans une perspective à 20 ans,
01:16 il y a surtout les tensions internes aux États.
01:18 Les retours des populismes, les retours des frontières,
01:22 enfin bref, une sorte quand même de tension, voire de violence,
01:27 tout le concept des décivilisations là, que je trouve très intéressant,
01:30 qui n'est pas seulement qu'en France évidemment.
01:32 Tout ça en fait, j'ai l'impression, produit le climat dans lequel on est aujourd'hui.
01:39 - Et pour revenir à l'Occident, revenir à nous, l'Europe et les États-Unis principalement,
01:43 nous sommes attaqués de, à la fois de l'intérieur et de l'extérieur si je puis dire.
01:47 - Exactement.
01:48 - A l'intérieur, parce que les démocraties sont quand même assez impuissantes,
01:51 passent un certain nombre de problèmes, je pense en particulier à l'immigration,
01:54 qui n'a pas été gérée pendant plusieurs décennies,
01:56 et dont on subit quand même pas mal de conséquences.
02:00 Il y a une impuissance plus générale là également,
02:03 parce que les États ont délégué leur pouvoir au Cours suprême, au Conseil constitutionnel,
02:07 il y a le poids du lobbying, le poids du corporatisme,
02:10 le poids de toutes les minorités actives très puissantes.
02:13 - Eh dis donc, tu nous ferais pas un peu la campagne de Laurent Wauquiez là ?
02:17 - Si Laurent Wauquiez dit ça, c'est d'accord.
02:21 - Non, ça m'intéresse sur l'ensemble des instances supranationales
02:26 ou de contrôle de l'activité économique.
02:28 - Bien sûr, notamment les instances européennes, qui ne sont pas très claires,
02:31 d'ailleurs sur le djihadisme soit dit en passant, il y aurait des choses à dire là-dessus,
02:36 et puis les minorités actives qui sont très très puissantes.
02:39 - Mais tu dirais ça, tu dirais la même chose de nos cours constitutionnels, de notre Conseil d'État ?
02:44 - Bien sûr, l'immigration... - Vas-y Jean-Pierre, vas-y.
02:48 - La politique d'immigration était en large part déterminée par le Conseil d'État,
02:52 et notamment, qui joue un rôle de contrôle de la Constitution comme le Conseil fonctionnel,
02:56 mais par d'autres biais, et notamment la Régistie à la fin des années 70,
03:00 donc oui oui absolument, ça a été un point de blocage,
03:05 et ça a vraiment tétanisé la plupart des politiques, qui soient de gauche ou de droite,
03:11 et on en subit en large part les conséquences.
03:14 - Tu penses que c'est le cœur aujourd'hui... - C'est pas le cœur !
03:17 - Bah oui, c'est pour ça, tu vois, c'est pas le cœur de ce sujet de décivilisation, de tension, etc.
03:23 Quand on traverse la crise des Gilets jaunes, personne ne parle d'immigration.
03:26 Le sujet est bien plus fondamental autour des victimes de la mondialisation,
03:30 autour de la désindustrialisation, autour de la repère totale de...
03:34 - J'aurais pu en parler, mais je trouve qu'au niveau de l'immigration,
03:37 on en a beaucoup parlé à cause de la crise migratoire,
03:39 qui va revenir au fur et à mesure du temps, ça c'est la crise migratoire,
03:43 on va en avoir pour des décennies.
03:44 Il suffit de tracer les courbes démographiques en Afrique et au Moyen-Orient,
03:48 et en Europe, et t'as tout de suite compris du point de vue historique.
03:50 C'est pour ça que j'en parlais.
03:51 Mais je peux parler aussi des industrialisations, de la frustration des classes moyennes...
03:56 - Mais bien sûr, c'est ça le sujet quand même Jean-Pierre.
03:58 - Et tout ça affaiblit les démocraties.
03:59 Ce qui amène Trump, qui est un facteur de tension géopolitique considérable,
04:05 c'est pas l'immigration, pas une seconde.
04:08 C'est la crise des Appalaches, c'est la désindustrialisation,
04:11 c'est le malheur profond de la Rust Belt, c'est ça qui...
04:15 - Oui, mais le malheur profond de la Rust Belt, comme tu dis, peut trouver un écho dans les...
04:20 - Il peut, il peut, mais c'est pas le cœur du truc Jean-Pierre.
04:24 Faut faire gaffe aux histoires de boucs émissaires quand même.
04:27 - Ah mais je cherche pas de boucs émissaires. Moi je dis qu'il y a un problème,
04:30 et on voit bien d'ailleurs dans les réactions des politiques européens,
04:33 ou des politiques français, qu'il y a vraiment un aveu d'impuissance totale
04:36 par rapport à la crise migratoire. Et ça c'est un vrai sujet.
04:39 Les grands chocs migratoires sont des chocs, dans l'histoire longue,
04:43 sont des phénomènes extraordinairement challenging pour les nations.
04:47 - On est d'accord. - Voilà, et faut pas le traiter à la légère.
04:49 Et dans la campagne de 2016, et tu l'oublies peut-être,
04:52 la campagne de 2016 aux Etats-Unis, et sur Brexit, l'immigration était le premier sujet.
04:56 Tu me diras "ça n'a rien à voir avec la choucroute" peut-être, mais il n'en fait pas.
04:59 - Ça n'a rien à voir avec la choucroute parce que c'était justement pas le même type d'immigration.
05:02 C'est ça qui est intéressant. Le problème du Brexit c'était les Polonais.
05:05 Non ! Eh ben oui, mais t'as pas un problème d'identité avec les Polonais.
05:08 Ou alors je comprends plus rien.
05:10 - Ah ben, il y a plusieurs problèmes. D'ailleurs pas que l'Europe de l'Est qui était mise en avant.
05:14 N'oublie pas que 2015 c'est l'année où Angela Merkel ouvre les frontières.
05:19 Donc en 2015, 2016... - Il y a Chafendas, c'est ça ?
05:22 - Oui, Chafendas. - On va y arriver, on va y arriver, disons Angela Merkel.
05:26 - Combien de fois je l'ai critiqué ? - Ah ça, là-dessus, j'ai été visionnaire.
05:28 - Et donc, non, mais peu importe... - Mais non, pas "peu importe", Jean-Pierre.
05:33 Si tu veux régler un problème, il faut faire le bon diagnostic.
05:36 - Oui, mais tu as des frustrations croissantes dans nos sociétés.
05:40 Et donc, tu n'empêcheras pas les gens, même s'ils voient que dans les pays dits "autoritaires",
05:45 non démocratiques, ça marche pas forcément beaucoup mieux que chez nous.
05:49 Peu importe, tu auras toujours la nostalgie de l'homme fort, des décisions rapides,
05:53 de l'absence d'atermoiement ou de soumission aux pressions démocratiques,
05:59 des manifestations, des grèves, des lobbies, etc.
06:02 Tu auras toujours une attirance pour l'homme fort, pas pour l'idéologie.
06:06 On n'est pas dans une période où on a des idéologies totalitaires,
06:09 comme dans les années 30, avec le national-socialisme en Allemagne
06:12 et le marxiste-léninisme en Union soviétique.
06:14 Tu n'as pas de projet global messianique, mais tu as une tentation de l'homme fort.
06:18 Et c'est pour ça que tu as des gars comme Poutine, Erdogan, Xi Jinping, etc.
06:24 - Comment les démocraties finissent, pour citer un titre célèbre,
06:28 moi je l'entends depuis 40 ans.
06:30 Le sujet, c'est quand même qu'à un moment, avec une situation économique à peu près solide,
06:36 c'est pas la démocratie qui s'est effondrée, c'est bien l'empire soviétique qui s'est effondrée.
06:41 - Je suis d'accord, mais par rapport aux espoirs qui ont été formulés
06:45 justement après l'effondrement de l'Union soviétique, nous sommes en recul.
06:49 Et d'ailleurs les think tanks que je mentionnais tout à l'heure
06:53 démontrent aujourd'hui une perte de la profondeur démocratique, déjà en nombre,
06:59 et puis en population, c'est devenu archi-minorité.
07:04 - Tu veux dire les pays dont on peut dire que la Constitution est...
07:08 - Pleinement démocratique.
07:10 Et même des pays qui étaient démocratiques, ça se dégrade.
07:12 Il y a l'Inde, il y a Israël, la Hongrie, enfin tu vois c'est pas aussi démocratique qu'avant.
07:17 Je veux pas dire que ce sont des régimes horribles, mais ce sont des régimes moins démocratiques.
07:21 Donc la démocratie recule depuis le milieu des années 2000, très clairement.
07:25 - Et puis quand même a repris un petit regain de vigueur avec la Pologne, quand même.
07:32 - Oui, il y a ça, puis l'Europe réagit enfin !
07:34 - Même si je veux pas faire de jugement de valeur.
07:36 Oui, mais je reviens parce que ça m'intéresse énormément à ce sujet de l'immigration.
07:40 Ça me permet d'ailleurs de dire un truc.
07:42 On est là quand même sur un sujet intéressant, important en France.
07:46 Est-ce qu'il faut, oui ou non, régulariser les gars qui bossent depuis 10 ans, 15 ans ?
07:51 Combien sont-ils ? On n'en sait rien.
07:53 Est-ce qu'ils sont vraiment indispensables à la machine économique ? On n'en sait rien.
07:56 Ah si, il y en a qui savent !
07:57 Il y en a qui pourraient nous dire 2-3 trucs, c'est les patrons.
08:00 Ils sont tétanisés par le sujet, ce qui peut-être te donne raison d'ailleurs.
08:03 - Mais bien sûr !
08:04 - Tétanisés ! Tu peux pas, t'as pas le droit de leur poser la question sur...
08:07 - C'est un débat...
08:08 - Oui ou non pour la régularisation... Putain, les gars qui sont sur les chantiers, oui ou non, est-ce qu'il faut les régulariser ?
08:12 Les gars sont tétanisés !
08:13 - C'est le problème, c'est que ça n'a pas été traité.
08:15 Ça aurait dû être traité démocratiquement.
08:17 Comme ça l'est, le Japon est un pays démocratique.
08:19 - Mais pour que ce soit traité démocratiquement, il faut que les gens aient le courage de s'exprimer !
08:23 - Mais l'idéologie, disons on va dire égalitariste, mondialiste, mondiale, a interdit ce débat.
08:32 Puisque en France, si on prend l'exemple de la France, dès que tu critiquais l'immigration,
08:36 tout le monde était associé à l'extrême droite, ce qui était un facteur d'excommunication, il faut bien le dire.
08:42 Et on a encore même aujourd'hui ce discours, de la part de la gauche.
08:46 Donc on n'a pas traité le sujet de l'immigration, on n'a pas pu traiter...
08:50 Moi je pense que le pouvoir culturel est au moins aussi important que le pouvoir économique, si tu veux.
08:55 C'est Gramsci qui avait raison.
08:56 Et sur le plan culturel, on peut dire que la gauche occidentale, d'une manière générale, a interdit un débat là-dessus.
09:02 - Mais t'es d'accord que quand on s'interroge sur le marché du travail, le recul démocratique, démographique,
09:07 aujourd'hui en Europe, même les reculs de productivité, la question de l'immigration est une question intéressante.
09:12 Elle a quand même fondé les Etats-Unis d'Amérique, bon dieu l'immigration !
09:14 - Oui, mais enfin le taux d'emploi est encore plus intéressant.
09:17 - Mais tout à fait ! Mais posons la question ! On est d'accord !
09:19 - En particulier, je veux dire, on pourrait résoudre les problèmes de pénurie, etc., que tu mentionnais à l'instant,
09:24 plus par une augmentation du taux d'emploi, avant de penser à l'immigration.
09:27 - C'est pas ce que j'ai dit !
09:28 - Non, non, bien sûr !
09:29 - Mais j'ai dit juste que c'est pas possible qu'on ne pose pas le sujet en termes économiques.
09:34 A chaque fois, ils disent "économie stupide".
09:36 Et si tu poses le problème en termes d'identité, t'en sors pas, t'as pas de débat possible.
09:41 C'est du ressenti, l'identité. Je suis inquiet, je suis inquiet.
09:44 - Je suis d'accord. Mais pour répondre à ta question tout à l'heure,
09:46 je crois que les démocraties sont attaquées à l'intérieur du fait de leur impuissance,
09:50 c'est notre responsabilité, et elles sont attaquées de l'extérieur.
09:53 Parce que les systèmes autoritaires ont des velléités impériales.
09:56 C'est ça la nouveauté. La Russie, c'est évident.
09:59 L'Iran, c'est aussi le cas.
10:01 Et d'ailleurs, s'ils se manifestent autant aujourd'hui, c'est pas pour rien.
10:04 La Turquie, ça me paraît assez évident.
10:06 Et même la République Populaire de Chine, qui n'a pas,
10:08 alors là c'est moins qu'on puisse dire, de traditions bellicistes,
10:11 millénaire après millénaire, se manifeste de façon un petit peu plus voyante.
10:15 D'ailleurs, de façon assez inefficace, mais enfin, peu importe.
10:19 Elle se manifeste.
10:20 Et donc là, ça veut dire que les démocraties sont attaquées des deux bouts.
10:24 À l'intérieur et à l'extérieur.
10:26 Et l'Europe est encore plus perdante.
10:29 Parce qu'au moins, les États-Unis conservent leur puissance,
10:31 je dirais même qu'ils l'ont accrue depuis trois ans,
10:33 en termes technologiques, en termes économiques, en termes militaires.
10:36 Mais nous, on a perdu.
10:37 Alors, effectivement, il y a une guerre civile virtuelle aux États-Unis,
10:41 qu'on n'a pas vraiment en Europe,
10:42 mais du point de vue de la puissance extérieure, ils sont là.
10:44 Alors que nous, on est quand même fragilisés au niveau interne,
10:47 pas autant qu'aux États-Unis,
10:49 mais au niveau externe, on en prend plein la figure.
10:52 On a les cyberattaques de la Russie,
10:55 la pression migratoire par le biais d'Erdogan,
10:57 il faut quand même bien le dire,
10:58 le terrorisme islamiste, il faut quand même bien le dire,
11:00 qui frappe plus l'Europe que les États-Unis, évidemment.
11:03 Donc on a la désinformation massive, quand même, sur les réseaux sociaux.
11:07 Enfin, je veux dire, on s'en prend plein la figure.
11:09 Non, non, mais au-delà de ça, d'ailleurs...
11:11 Et Trump ?
11:12 Les deux crises, à la limite, les deux récentes crises considérables
11:15 qu'on vient de traverser,
11:17 Covid, qu'on le veuille ou non, c'est l'Amérique qui nous en sort,
11:20 Poutine, qu'on le veuille ou non, c'est l'Amérique qui arrête Poutine.
11:23 Alors, par l'Ukraine interposée, mais c'est l'Amérique qui arrête Poutine.
11:26 Et l'année prochaine, si Trump revient,
11:28 qui va subir le plus ?
11:30 Ça va être nous, encore une fois,
11:31 parce que tu vas avoir un nouveau retrait du multilatéralisme,
11:34 tu vas avoir peut-être au moins une baisse,
11:37 pour ne pas dire l'arrêt de l'aide militaire à l'Ukraine,
11:40 et tu vas avoir de nouvelles mesures protectionnistes.
11:43 Donc qui va être la principale victime de ça ?
11:46 Ça va pas être l'économie américaine.
11:48 Je pense pas qu'en relatif, ça soit beaucoup plus le reste du monde,
11:51 ça va être l'Europe.
11:53 D'ailleurs, Trump s'attaque surtout aux faibles, d'une manière générale.
11:56 Il comprend rien à l'Europe, l'organisation européenne,
11:59 ça l'intéresse pas, puis on apparaît ce qu'on est.
12:02 - Franchement, ouais. Quel numéro de téléphone ?
12:04 Ça date de Kissinger, mais je pense que ça a jamais été aussi vrai.
12:07 - Bien sûr, on est beaucoup plus.
12:09 Et c'est difficilement compréhensible,
12:11 parce que c'est une accumulation de normes bureaucratiques
12:14 qui se met en place.
12:16 En fin de compte, au niveau mondial,
12:19 indépendamment de ce qui se passe à Gaza.
12:21 Parce que ce qui se passe à Gaza, ce qui va être fondamental,
12:23 c'est la durée de l'intervention de Tsahal,
12:25 l'ampleur des destructions, évidemment, humaines et matérielles,
12:28 la situation des otages,
12:30 et puis l'état de la crise humanitaire au Sud.
12:33 - Alors je rajouterais, moi,
12:35 ce qui est pour moi un élément encore plus fondamental,
12:37 c'est la réaction des États arabes au-dessus, autour.
12:40 Ils parlent haut, ils ne font rien.
12:42 Absolument rien. Les Palestiniens sont seuls.
12:44 - Ah ben bien sûr ! - Absolument seuls.
12:46 S'ils restent seuls, tous à masquillison,
12:48 ça ira pas très loin.
12:50 - Mais tu n'empêches pas, un, l'opinion publique
12:52 du monde arabo-musulman de réagir
12:54 de façon beaucoup plus véhémente
12:56 que les gouvernements eux-mêmes.
12:58 - Ouais, on verra combien de temps.
13:00 - Et tu n'empêches pas les gouvernements de certains pays
13:02 d'utiliser cela à des fins géopolitiques.
13:04 L'Iran, ça me paraît évident.
13:06 - Oui, mais avec un impact limité.
13:08 - Avec un impact limité, s'il n'y a que l'Iran.
13:10 Attention quand même, hein.
13:12 Dormouz, c'est 20% de la production mondiale
13:14 qui y passe, quand même. Donc, il faut faire attention.
13:16 Et si c'est l'Arabie Saoudite, parce que là,
13:18 pour l'instant, hélas, le coup du Hamas
13:20 a réussi pour l'instant.
13:22 Le rapprochement entre Israël et l'Arabie Saoudite,
13:24 pour l'instant, c'est cuit.
13:26 Voilà. Et donc,
13:28 il y a aussi des gens, enfin des gens,
13:30 des autorités, il faut bien le dire, des États
13:32 qui utilisent ces événements
13:34 pour leurs ambitions stratégiques.
13:36 Donc c'est ça. Et derrière ça,
13:38 il y a quand même le risque de compartimentation du monde.
13:40 - Alors voilà, je voulais qu'on en vienne là-dessus.
13:42 C'est la confirmation du retour des frontières et des États.
13:46 - Oui. Alors, parce qu'il y avait quand même un espoir, d'ailleurs,
13:50 le fait qu'Israël se rapproche de l'Arabie Saoudite,
13:54 des autres pays du Golfe, du Maroc, etc.
13:56 Ben ça, tout ça, maintenant, tout ça est tombé
13:58 comme un château de cartes.
14:00 Et cette année, en 2014... - Mais c'était un château de cartes, Jean-Pierre.
14:02 - Ben, on va voir.
14:04 - Mais non, mais ce que je veux dire...
14:06 - On le jugera. On va lire leur rapprochement.
14:08 - Mais là-dessus, c'est exactement comme, finalement,
14:10 ce qui s'est passé en Afghanistan, mais il y a 60-70 ans.
14:16 C'est-à-dire qu'à un moment, tu peux décider tout ce que tu veux
14:18 entre rois et princes et président élu.
14:20 Les peuples n'avancent pas au même rythme que toi.
14:24 - Je suis d'accord. Je suis d'accord.
14:26 Mais cette année, il y avait quand même eu des évolutions.
14:28 Il y avait eu quand même l'intermédiation de la Chine, pour la première fois dans la région,
14:32 pour le rapprochement entre l'Iran et l'Arabie Saoudite, au mois de mars dernier.
14:36 Il y a eu l'adhésion de l'Iran, de l'Arabie Saoudite, ainsi que l'Egypte et les Émirats, dans les BRICS.
14:40 Donc il y a eu un début de...
14:42 - Le sud global.
14:44 - Le sud global, voilà.
14:46 - L'émergence du sud global.
14:48 - Tu peux même y mettre un peu d'Inde, parce que si tu regardes les réactions de Narand Ramadi,
14:50 elles sont quand même, bon, un petit peu négatives à l'égard d'Israël.
14:56 C'est pas très clair.
14:58 - Des experts géopolitiques qui viennent ici me disent "c'est de la fou...".
15:00 Alors, mais c'est intéressant, parce que c'était, peut-être,
15:02 avant ce qui est en train de se passer, effectivement, en Proche-Orient,
15:04 de la foutaise, finalement, ce sud global.
15:06 C'était une sorte d'union de circonstances,
15:10 sous haute autorité chinoise,
15:12 et il ne fallait pas plus s'inquiéter de ça.
15:14 Effectivement, là, il y a peut-être l'émergence de quelque chose qui pourrait être...
15:16 - Il faut bien dire ce que c'est que la compartimentation.
15:18 Ce n'est pas la démondialisation.
15:20 C'est la création de plusieurs mondes.
15:22 En termes juridiques,
15:24 en termes commerciaux,
15:26 en termes technologiques et en termes monétaires.
15:28 Système de paiement.
15:30 C'est l'ancien monde, d'avant la chute du mur de Berlin.
15:32 Parce qu'il y avait trois mondes.
15:34 Il y avait le monde soviétique, en gros,
15:36 et ses satellites. Le monde occidental.
15:38 L'Union Européenne, les États-Unis,
15:40 enfin, l'OTAN, etc.
15:42 Et puis, il y avait le monde des non-alignés,
15:44 qui était plus ou moins proche de l'Union Soviétique
15:46 ou de l'Occident. Ça dépendait un petit peu des circonstances.
15:48 Voilà, c'était un monde complètement compartimenté.
15:50 Et là, ce qu'on peut dire,
15:52 c'est qu'au fur et à mesure des événements,
15:54 le monde, progressivement...
15:56 Alors, ça, c'est vrai, je suis d'accord, pour l'instant,
15:58 on n'a pas de signaux très tangibles.
16:00 Mais il y a quand même des...
16:02 des avertissements qui nous sont
16:04 adressés par les événements.
16:06 - Ce qui nous amène par là où on avait commencé, c'est parfait.
16:08 Ça veut dire qu'il faut absolument, nous,
16:10 qu'on reste cohérents
16:12 dans notre ensemble européen.
16:14 Il a beau être de briques et de brocs,
16:16 c'est peut-être un salaud, mais c'est notre salaud,
16:18 disaient les Américains, à la grande époque
16:20 du siècle dernier.
16:22 On ne peut pas faire autrement
16:24 que faire ensemble.
16:26 - De toute façon, nous, sans... - Oui, mais plus que jamais !
16:28 - Plus que jamais ! Alors, on réagit un peu,
16:30 on se débarrasse de Merkel et de tout ça,
16:32 progressivement, du marché unique, etc.
16:34 Mais c'est lent.
16:36 Des velléités de réindustrialisation,
16:38 il y a quand même eu, durant Covid,
16:40 les premières émissions de dette commune,
16:42 le plan Next Generation.
16:44 Bon, la crise gazière,
16:46 un an après, enfin, 15 mois après,
16:48 disons qu'on l'a pas mal gérée, voilà,
16:50 il y a quand même... - On arrive à trouver un accord sur le marché de l'énergie
16:52 alors qu'on pensait que c'était impossible !
16:54 - Absolument ! - Bah, voilà !
16:56 - Vive l'Europe ! - Vive l'Europe !
16:58 - Il l'a dit ! Vive l'Europe !
17:00 Allez, merci à vous, et puis,
17:02 on se retrouve la semaine prochaine.
17:04 (Générique)
17:06 ---
17:08 ♪ ♪ ♪

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