• il y a 6 mois
Label Gamelle est une cuisine centrale d’insertion. Sous la forme d’une société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), elle permet à des personnes en difficulté de rebondir grâce à la cuisine. Mais aussi aux plus précaires de bien se nourrir : elle livre notamment des repas à des centres d’hébergement d’urgence. Sa cofondatrice et gérante Christine Merckelbagh est lauréate 2024 du Prix de l’Entrepreneur environnemental et social du Boston Consulting Group.

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Transcription
00:00Des cuisines de palaces aux cuisines d'insertion, c'est le virage plutôt brutal mais audacieux
00:10qu'a décidé de prendre Vincent Dautry, accompagné d'une ancienne cadre du secteur
00:14de l'assurance Christine Merkelbach.
00:16Ensemble, ils se lancent dans l'aventure Labelle Gamelle, cuisine d'insertion professionnelle.
00:20L'objectif donc, ramener vers l'emploi des personnes fragiles qui en sont pour diverses
00:24raisons éloignées.
00:25Nous faisons le point aujourd'hui avec Christine Merkelbach qui nous accompagne, la cofondatrice
00:29et gérante de Labelle Gamelle.
00:30Bonjour Christine.
00:31Bonjour Eva.
00:32Merci beaucoup de nous accompagner aujourd'hui.
00:34Bon, un mot d'abord, je l'ai dit un peu en préambule de l'émission sur votre parcours,
00:38celui de votre associé.
00:39Vous venez tous les deux d'univers très différent de celui-ci.
00:42Comment s'est fait le déclic ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
00:45Alors, là je vais parler pour moi.
00:47Donc moi, ma première partie de carrière, j'étais dans les assurances.
00:51Donc c'est un secteur qui est un petit peu moins savoureux et goûteux que le monde
00:56de la cuisine.
00:57Et puis, je manageais des grosses équipes, j'étais directrice de back-office.
01:02J'aimais vraiment tout ce qui était organisation du travail, management, réfléchir sur comment
01:09accompagner au mieux les collaborateurs et une forte appétence pour tout ce qui est
01:14service au client.
01:15En revanche, j'ai eu envie de donner un peu plus de sens à ma vie professionnelle et d'être
01:22plus en cohérence avec mes valeurs personnelles.
01:25Et j'ai eu envie d'allier deux passions que sont la cuisine et le social.
01:28Et j'ai décidé de passer un CAP Cuisine à l'école Ferrandi.
01:32Vous avez fait un CAP Cuisine pendant combien de temps ? Deux ans ?
01:34Pendant six mois.
01:35Six mois, d'accord.
01:36Un CAP Cuisine pendant six mois.
01:37On va en reparler.
01:38Christine Merkelbach, vous vous êtes lancée en 2020 en parlant à Covid, c'était pas
01:42un peu risqué ça ?
01:43Franchement, avec le recul, c'était complètement kamikaze.
01:47Qu'est-ce qui a fait que ça a marché ?
01:50Qu'est-ce que ça a fait que ça a marché ?
01:52Je crois que c'est peut-être notre côté déterminé qui a un vrai besoin.
01:57Il y a vraiment un gros besoin à la fois pour les personnes qu'on nourrit et à la
02:01fois pour les personnes qu'on embauche.
02:03Alors peut-être que je vous raconte la belle gamelle.
02:05Alors allez-y, racontez-nous la belle gamelle.
02:07Je le disais un peu, cuisine d'insertion professionnelle, vous employez des gens éloignés
02:13de l'emploi, c'est ça ?
02:14Complètement.
02:15Nous, on est une cuisine centrale, on est située à Montreuil dans le 93 et on suit
02:20un double objectif, un premier objectif qui est restauré et le second inséré.
02:25Restauré, on produit des plateaux repas pour des centres d'hébergement d'urgence,
02:29des foyers d'aide sociale à l'enfance, on a également un partenariat avec Sorbonne
02:34Université pour des étudiants en situation de précarité et toute forme de collectivité.
02:39Inséré, on a créé, notre innovation sociale à la belle gamelle, le circuit court de la
02:46solidarité.
02:47C'est-à-dire qu'on embauche les personnes qui vivent dans les centres d'hébergement
02:50d'urgence pour lesquels nous produisons et vendons les repas.
02:53Donc vous allez les chercher là-bas, finalement ?
02:56Exactement, et on mène un travail très étroit en partenariat avec ces centres d'hébergement
03:03d'urgence, avec les travailleurs sociaux de ces centres, pour accompagner ces personnes.
03:07Vous embauchez combien de personnes en ce moment ?
03:08Aujourd'hui, on a 22 personnes en insertion et on est en train d'en recruter deux autres.
03:13On est 32, il y a trois ans et demi, on était six, on devait 80 repas, aujourd'hui on est
03:1832 et on en fait 1500.
03:20Et ces profils que vous allez trouver, chercher dans ces établissements-là, beaucoup ne
03:24travaillaient pas en cuisine avant ? Comment ça se passe, la découverte de ce monde professionnel
03:29?
03:30Au-delà même de la cuisine, beaucoup sont des primo-arrivants, aujourd'hui on a 80%
03:34de réfugiés, qui pour la plupart ne parlent pas français quand on les recrute.
03:38Donc il y a déjà la barrière de la langue ?
03:40Ça c'est la première barrière, on est 18 nationalités différentes et beaucoup avaient
03:45des métiers dans leur pays d'origine, qui sont très éloignés de ceux de la cuisine.
03:51Certains deviennent après cuisinier, mais d'autres pas du tout.
03:55Donc là il y a par exemple Issa, qui va entrer dans une école d'informatique et qui va faire
04:01un apprentissage.
04:02Il y a Jean qui va partir dans un stage pour être coiffeur.
04:06Donc on a vraiment des métiers qui sont leur chemin, leur souhait à eux.
04:11Alors comment on procède concrètement au niveau de l'accompagnement social ? On est
04:16organisé en trois ateliers.
04:17Un atelier, Levez les freins à l'emploi, dans lequel on va travailler sur tout ce qui
04:22est administratif, la sécurité sociale, France Travaille, la CAF, les cours de français,
04:30on les accompagne en collaboration étroite avec les travailleurs sociaux dans leur centre.
04:36Les cours de français, le logement, ce sont vraiment les freins principaux et permis de
04:42conduire.
04:43Ensuite on a un deuxième atelier qui est Lutter contre la fracture numérique.
04:46Donc là ils ont des cours d'informatique avec un conseiller numérique qui est présent
04:49à la belle gamelle.
04:50Et ensuite on a construire son parcours professionnel.
04:53Et là on le fait de deux façons, d'une part avec eux, quel est votre objectif professionnel,
04:58vos envies ? Est-ce que c'est en adéquation avec le marché français ? Est-ce que vos
05:01compétences vous permettront d'y arriver ? Ou quel est le chemin pour y arriver ?
05:07Donc la belle gamelle c'est un point de passage ?
05:08Exactement, c'est un sas.
05:10En fait nous on est une entreprise, quand quelqu'un part, on est hyper heureux.
05:14Paradoxalement.
05:15Est-ce que vous pensez, je ne sais pas vous parliez de générosité tout à l'heure
05:20en parlant de ce secteur-là, de la cuisine, pourquoi ce secteur-là serait particulièrement
05:26moteur de réinsertion selon vous ? Qu'est-ce que ça crée que peut-être d'autres secteurs
05:30ne seraient pas capables de créer justement pour faire cette passerelle pour ces gens
05:33et les ramener vers l'emploi ? Qu'est-ce qu'il se passe en cuisine qui ne se passerait
05:37peut-être pas ailleurs ?
05:38En cuisine déjà c'est une équipe, c'est une équipe et on est obligé d'être solidaire.
05:41On ne peut pas faire 1500 repas avec une seule personne.
05:45Donc on doit travailler ensemble, il y a des tâches qui sont lourdes, il y a des tâches
05:49qui sont difficiles.
05:50Donc il y a aussi la solidarité qui se met en place et puis c'est ce qu'on produit.
05:56Manger, c'est quelque chose d'universel et ce qu'on fait aussi à La Belle Gamelle
06:00c'est qu'on crée les menus avec les personnes qui constituent l'équipe.
06:05Donc notre carte, elle ressemble à notre équipe.
06:07Vos menus sont à l'image, c'est ça des profils qui travaillent pour vous.
06:11Vous parlez de nationalité, vous pouvez nous donner quelques exemples de ce qui m'est
06:14arrivé.
06:15Alors il y a Érythrée, Éthiopie, Somalie, Libye, Roumanie, Haïti, Algérie, Maroc,
06:22Sénégal, Mali, France, Afghanistan, et oui, c'est assez magique.
06:32Alors parfois il y a des tensions, ça reste une cuisine, ça reste un lieu de travail.
06:35Mais il y a une solidarité qui est vraiment très importante.
06:40J'ai vu, Christine, que vous aviez choisi le statut de société coopérative d'intérêt
06:44collectif.
06:45Pourquoi ? Qu'est-ce que ça apporte ça ?
06:46Alors, au-delà de qu'est-ce que ça apporte, pour nous c'est vraiment un choix et on a
06:51eu envie de créer une entreprise qui soit une alternative au monde économique classique,
06:57où on est convaincu que le travail et l'entreprise...
06:59C'est pas vraiment le monde économique, c'est pas vraiment le monde associatif, c'est ça,
07:02c'est une espèce d'entre-deux ?
07:03Alors, c'est pas un entre-deux, on est une entreprise à part entière, nous on travaille
07:07et on produit, et les personnes sont embauchées et ont un salaire, on est tous salariés,
07:12mais l'entreprise appartient à ceux qui travaillent.
07:14Et donc nous on est une CIC, une coopérative d'intérêt collectif, donc on a les différents
07:20partenaires qui sont dans la coopérative, donc en fait la gouvernance elle est collective,
07:27et elle oeuvre à l'intérêt général.
07:29Si vous êtes là aujourd'hui, c'est aussi parce que vous avez remporté le prix de l'entrepreneur
07:33environnemental et social 2024 du Boston Consulting Group, c'est quoi l'objectif maintenant Christine,
07:39c'est de changer d'échelle ?
07:41Exactement, on a un objectif qui est double, d'abord on a 3 ans d'existence, donc c'est
07:50de consolider notre existant, et puis ensuite d'essaimer ce modèle qui aujourd'hui fait
07:56ses preuves à la fois au niveau de la restauration, ce qu'on fait c'est dans un budget restreint
08:01c'est bon et c'est varié, et puis les personnes qu'on insère, on a vraiment un beau taux
08:07de réussite et on a des beaux partenariats à la fois avec le secteur privé et public,
08:12et donc on a un souhait de continuer à faire d'autres belles gamelles, parce qu'on croit
08:18aussi que ce modèle doit avoir une taille limitée pour que ça reste à taille humaine.
08:23Donc pour l'instant on resterait au sein du 93, c'est ça on resterait en Seine-Saint-Denis ?
08:27Non pas forcément, alors au niveau de nos clients on est sur toute l'île de France,
08:31mais on peut très bien avoir une belle gamelle à Paris ou dans d'autres villes de l'île de France.
08:37Qu'est-ce qu'on peut vous souhaiter pour la suite ?
08:39De continuer à bien manger, et plus la marmite boue et plus l'insertion fleurie.
08:45C'est beau cette phrase, merci beaucoup Christine Merkelbach d'avoir été avec nous,
08:49je rappelle vous êtes la cofondatrice et donc gérante de la belle gamelle,
08:52cette cuisine de réinsertion, merci beaucoup d'avoir été avec nous aujourd'hui dans Smart Impact.
08:56Tout de suite c'est donc l'heure du débat RSE.

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