Vers un retour à la déflation rampante ! [Olivier Passet]

  • il y a 5 mois
C’est un fait, l’inflation revient en Europe comme aux États-Unis, sans qu’il ait fallu pour cela déployer une thérapie de choc. Le mouvement patine et va continuer à patiner encore quelques mois. Il doit lutter contre l’inertie des salaires, la faiblesse de la productivité en Europe, et les stress géopolitiques sur le marché du pétrole, mais fondamentalement, l’ancien régime de la grande modération, traversé de forces déflationnistes latentes, se remet doucement mais sûrement en place. [...]

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00:00 [Générique]
00:09 C'est un fait, l'inflation retourne dans son tube en Europe comme aux Etats-Unis, sans qu'il ait fallu pour cela déployer une thérapie de choc.
00:17 Le mouvement patine et va continuer à patiner encore quelques mois.
00:21 Il doit lutter contre l'inertie des salaires, la faiblesse de la productivité, notamment en Europe,
00:27 et le stress géopolitique qui demeure sur le marché du pétrole.
00:31 Mais fondamentalement, l'ancien régime de la grande modération, traversé de forces déflationnistes latentes,
00:37 se remet doucement, mais sûrement en place.
00:41 Les grands opérateurs financiers n'en ont jamais vraiment douté.
00:45 Leurs projections ne sont jamais sorties de l'orbite d'inflation qui caractérise ce que l'on appelle le régime de la grande modération.
00:54 Une grande modération qui était synonyme pour l'Europe d'un ancrage de l'inflation sur la cible des 2% jusqu'à la crise financière de 2008,
01:02 puis d'une phase prolongée que l'on a pu qualifier de déflation rampante,
01:08 où l'inflation a longtemps navigué sous sa cible, frôlant parfois les territoires négatifs.
01:14 L'histoire est quasi similaire aux Etats-Unis, avec néanmoins un écart structurel positif de 0,3 à 0,4 points par rapport à l'Europe.
01:23 Alors certes, les anticipations de marché croient à la modération et non au retour d'une déflation rampante, mais la messe n'est pas dite.
01:33 Ces fameuses anticipations peuvent se déduire de l'écart entre le taux d'intérêt servi sur les titres publics standards et celui des titres indexés sur l'inflation.
01:43 C'est ce que l'on appelle dans le jargon financier le point mort de l'inflation.
01:47 Et cet indicateur confirme qu'aux Etats-Unis comme en Europe, les opérateurs pensent qu'à long terme l'inflation va demeurer ancrée sur 2, 2,5%.
01:57 Mais pourquoi les turbulences récentes nous auraient-elles guéris comme par enchantement de la déflation rampante ?
02:04 On peut en douter.
02:05 Il a fallu d'une part une conjonction d'événements difficilement reproductibles pour que l'inflation fasse l'embardé que l'on sait entre 2021 et 2023.
02:16 Un stop and go inégalé de l'activité liée à la crise sanitaire qui a perturbé fortement les chaînes d'approvisionnement.
02:24 Le conflit ukrainien qui a fait flamber les énergies fossiles.
02:28 Une surchauffe des prises alimentaires liées au conflit et au désordre climatique.
02:33 Et enfin une accumulation inégalée à travers le monde de stimuli budgétaires massifs.
02:38 Et il aura suffi en fin de compte d'un durcissement très modéré de la politique monétaire, ayant une faible prise sur l'activité et l'emploi, pour en venir à bout.
02:48 Rien à voir avec le dosage massif de l'époque volcaire au début des années 80.
02:53 A se demander quelle part revient à la politique monétaire et quelle part revient à un phénomène de reflux spontané.
03:01 Bref, l'incendie ne s'est pas propagé en dépit de l'intervention molle des pompiers, semblant suggérer que le terrain n'était pas si propice à un embrasement.
03:11 Et pour cause, les raisons qui soutendaient le régime de très faible inflation ne se sont pas dissipées, voire ont gagné en ampleur.
03:20 Il y a d'abord la surproduction chinoise, qui a encore élargi son champ en termes de montée en gamme et de spectre de spécialisation.
03:28 Cette surproduction inonde les marchés internationaux, à défaut que la Chine ait réussi son recentrage sur sa demande nationale.
03:38 Avec un accès aux énergies et matières premières russes bradées et des subventions massives qui favorisent la baisse de ces prix de production.
03:49 La secrétaire américaine au Trésor, Jeannette Yellen, a récemment laissé entendre que l'essor des exportations chinoises de véhicules électriques, d'énergie solaire et de batteries,
04:00 était un problème à un moment où les États-Unis investissent également massivement dans la relance de leur propre secteur manufacturier.
04:08 Et derrière cela, il y a une stratégie délibérée de la Chine d'étendre son emprise industrielle sur des niveaux de gamme toujours plus élevés,
04:17 bousculant les positions concurrentielles de l'Allemagne notamment.
04:22 Il y a ensuite l'accélération de l'IA qui intensifie encore plus la pression technologique sur le travail.
04:29 Ce n'est plus seulement le travail peu qualifié qui se trouve pris sous la pression du capital, mais le travail qualifié, voire très qualifié.
04:37 Avec de surcroît une éradication des barrières de langue via l'IA,
04:41 qui étend toujours plus la mise en concurrence géographique de la force de travail dans les professions intellectuelles au plan international.
04:48 Bref, la grande modération reprend son cours.
04:52 Mais peut-être plus que cela.
04:53 La déflation rampante est aux aguets et pourrait plus rapidement qu'on ne le croit revenir dans le paysage économique.
05:02 (Générique)

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