Éric de Riedmatten reçoit un invité dans #LHebdoDeLEco pour approfondir un sujet économique…
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 - Allez, on va reparler du déficit de la France.
00:03 On en parle avec un chef d'entreprise, Marc Varnot,
00:06 l'un des derniers producteurs français de plateau.
00:08 Il est installé dans le Doubs.
00:11 Alors, on va parler de cette dette, de ce déficit.
00:14 Est-ce que vraiment, c'est une menace pour la France, Marc Varnot ?
00:18 - Alors, le déficit et la dette sont une menace existentielle,
00:21 puisque je vous rappelle qu'aujourd'hui, on a 3 100 milliards de dettes.
00:24 Le service de la dette nous coûte 38 milliards.
00:27 38 milliards, c'est trois fois le budget de la justice.
00:29 - Ce sont les intérêts.
00:31 - Ce sont les intérêts de la dette.
00:33 Et que cette dette, aujourd'hui, elle est tenue par des notations d'agence.
00:37 La prochaine notation, on aura lu le 26 avril avec Moody's.
00:40 Et que ces notations font le coût de cette dette ou pas.
00:43 - Oui, d'accord, mais en quoi ça gêne le salarié ou le patron que vous êtes ?
00:47 - Bah, ça gêne déjà les taux d'intérêt.
00:49 C'est-à-dire que la dette, aujourd'hui, elle coûte très cher.
00:51 Il va bien falloir la payer.
00:52 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, l'État a 30 milliards de plus
00:56 qu'elle en avait il y a deux ans pour payer la dette.
00:58 - Mais il n'y a pas plutôt une question d'impôt ?
00:59 Un jour ou l'autre, on ne va pas augmenter les impôts ?
01:02 C'est-à-dire que les entreprises seront un jour exposées, non ?
01:05 - Écoutez, les entreprises en France, comme les particuliers,
01:07 sont les vaches à l'aide d'un système qui, aujourd'hui,
01:10 est celui qui prélève le plus d'impôts en Europe.
01:12 Aujourd'hui, on est au maximum de l'imposition.
01:16 Tout le monde en convient.
01:17 Aujourd'hui, on ne peut plus augmenter les impôts.
01:19 Alors, on va bien être obligés d'enfin voir les dépenses et faire des économies.
01:23 Le grand tabou français, l'État va devoir faire des économies.
01:25 - Et les super profits, alors ? Est-ce qu'ils seront taxés ?
01:28 On laisse entendre que les plus riches payeront.
01:30 - Oui, enfin, les super profits sont faits aujourd'hui principalement hors de France.
01:33 Et on devrait, pour beaucoup de ces entreprises,
01:36 les remercier de payer autant d'impôts en France
01:37 parce qu'elles pourraient très bien partir.
01:39 Et c'est d'ailleurs aussi un des fonds du problème.
01:40 C'est que la fiscalité, aujourd'hui, ne s'est pas adaptée à la mondialisation.
01:44 Ceux qui payent l'impôt sont ceux qui sont coincés.
01:46 - Oui, parce qu'il y a beaucoup de sièges qui sont au Luxembourg,
01:48 d'autres en Irlande et les impôts sont plus bas.
01:51 Donc, ils partiraient, à votre avis, ces patrons ?
01:53 - De toute façon, tous ceux qui peuvent partir partent.
01:55 Et c'est bien un des fonds du problème.
01:57 Parce que ceux qui restent, du coup, sont écrasés d'impôts.
02:00 - Donc, vous pensez que la taxation forfaitaire,
02:03 dont parle Bruno Le Maire, c'est un vœu pieux ?
02:05 - Oui, c'est très compliqué à mettre en place
02:07 puisque les différences de fiscalité en Europe sont de jusqu'à 25 %.
02:10 Si vous prenez la fiscalité en Hongrie et au Portugal sur l'impôt sur les sociétés,
02:14 vous avez d'un côté en Hongrie 9 % et de l'autre côté au Portugal 32 %.
02:17 Est-ce que vous croyez franchement que la Hongrie va accepter de passer à 32 %
02:20 ou le Portugal à 9 ?
02:23 Bien sûr que non.
02:23 - Donc, ça, c'est un peu l'échec de l'Europe au niveau fiscal et social.
02:26 - Évidemment, évidemment.
02:28 - Alors, on va parler de l'État-providence.
02:30 Bruno Le Maire disait dans le journal du dimanche,
02:32 il y a quelques jours, il faut arrêter d'être trop généreux,
02:34 stop à la gratuité de tout.
02:36 Qu'est-ce qu'il veut dire à travers ça ?
02:39 - Il veut dire sans doute que l'État est trop généreux,
02:42 mais c'est le système dans lequel nous vivons aujourd'hui depuis 50 ans.
02:46 L'État est à la fois trop généreux et l'État subventionne beaucoup trop.
02:49 C'est-à-dire que les Français ont été habitués à ne pas payer le vrai prix des choses.
02:52 Lorsque vous prenez le train,
02:54 vous prenez un train, une SNCF,
02:58 42 milliards de chiffre d'affaires, 20 milliards de subventions.
03:01 Quand vous prenez le métro, la RATP,
03:04 4 milliards et demi de coûts, 1 milliard et demi de chiffres.
03:07 C'est-à-dire qu'aujourd'hui, on a habitué les Français
03:10 à payer un coût qui est inférieur à la réalité
03:13 au travers des subventions qui sont financées par l'impôt.
03:16 - Est-ce que ce n'est pas à l'État quand même de faire ça ?
03:18 C'est un service public après tout, non ?
03:19 - Ce qui était service public hier et ne l'est plus forcément aujourd'hui.
03:22 Le transport ferroviaire est aujourd'hui ouvert à la concurrence.
03:25 Les transports publics dans certaines villes sont des sociétés privées.
03:28 Je pense qu'aujourd'hui, il y a un changement de paradigme qui est clair.
03:31 - On sait bien, on parle de Gabgi, on parle de fraude, d'abus, etc.
03:35 On en parlait d'ailleurs il n'y a pas longtemps avec la fraude sociale.
03:37 Mais parlons de la Gabgi.
03:38 C'est un mot qui revient souvent dans la bouche des détracteurs du gouvernement.
03:43 Gabgi, Gabgi, c'est quoi la Gabgi aujourd'hui ?
03:45 - La Gabgi, c'est le budget de l'État qui a été multiplié par deux en 20 ans
03:51 et qui a servi en réalité à déverser des milliards,
03:54 notamment dans l'éducation et la santé, pour obtenir quoi ?
03:57 Un résultat qui est très inférieur à ce qu'on avait il y a 20 ans.
04:00 Aujourd'hui, on a à la fois beaucoup d'argent et des résultats qui sont complètement nuls.
04:04 Et quand on regarde de près le pourquoi du comment,
04:06 on se rend compte que le fond du souci, c'est que c'est jamais géré.
04:10 On ne gère pas. L'État, l'État en France ne gère pas.
04:13 Il y a un problème, voilà des milliards, mais on ne gère pas.
04:16 Aujourd'hui, il faut gérer.
04:17 - Alors gérer, il faut bien aussi servir le public, le service public, comme on dit.
04:22 C'est gaspiller comment ? Vous avez un exemple ?
04:25 - C'est à la fois gaspiller ou c'est une générosité qui est disproportionnelle.
04:29 On prend un cas des congés paternités.
04:31 Prenons juste un cas qui est un cas social.
04:34 Le congé paternité, c'est quoi ?
04:37 En 2021, on dit les papas, les papas des 670 000 enfants qui naissent en France,
04:41 ils auront le droit non plus à 14, mais à 25 jours de congé paternité.
04:46 Vous savez ce que ça coûte ? Ça coûte 9 500 000 jours de travail.
04:49 Ça coûte 42 000 emplois.
04:51 C'est-à-dire que si l'État n'avait pas fait ça,
04:53 mais avait engagé 42 000 fonctionnaires, ça coûterait la même chose.
04:57 C'est ça le problème, c'est qu'on ne se soucie pas de ce que ça coûte.
05:00 - À cause de ça, on se prive de 42 000 personnes au travail ?
05:02 - Oui, absolument, absolument.
05:04 - Alors autre gabgi, il y a aussi, est-ce que c'était utile de faire de rembourser
05:08 ou de prendre en charge la réparation d'électroménagers,
05:11 enfin d'aider les Français à réparer leurs postes de radio ?
05:13 Est-ce que ça peut être un exemple de gabgi à votre avis ?
05:16 - Je pense que c'est un exemple de gabgi parce que d'ailleurs, on en conviendra,
05:19 combien de postes de radio peuvent être réparés aujourd'hui ?
05:21 Qui a encore une radio ?
05:22 Non mais soyons sérieux, tout ça c'est de la com,
05:25 mais derrière il n'y a pas beaucoup d'efficacité.
05:27 Mais là encore, on ne se soucie pas de ce que ça coûte,
05:29 et puis on ne se soucie encore moins de la fraude éventuelle qui peut y avoir.
05:32 - Bon, indemnité chômage, allocation chômage, on va resserrer les vis.
05:35 Qu'en pense le patron que vous êtes ?
05:36 - Je pense que resserrer les vis c'est indispensable,
05:39 mais enfin on est 20 ans en retard.
05:40 On va faire aujourd'hui ce que Schröder a fait en Allemagne en 2003,
05:43 on est en 2023.
05:45 Resserrer les vis, oui, c'est vrai qu'il y a des choses qui interrogent.
05:49 Lorsqu'on a 200 000 personnes qui font des études de sociologie
05:54 et qui arrivent à la fin de leurs études,
05:55 et ça débouche sur 10 000 emplois au maximum,
05:58 il y a 190 000 qui vont aller au chômage,
06:00 est-ce que vous pensez qu'il faut indemniser ces gens-là pendant deux ans ?
06:02 - Oui, donc ça sera 12 mois minimum, paraît-il.
06:05 - Écoutez, je crois que c'est un standard aujourd'hui.
06:07 - On trouve du boulot au bout de 12 mois, c'est sûr ?
06:09 - Alors, je crois qu'il faut faire deux ou trois exceptions.
06:11 Au-delà de 55 ans, c'est difficile, il faut le reconnaître.
06:14 Donc là, il y a peut-être une exception à faire.
06:16 Mais lorsqu'on est jeune,
06:17 et lorsque l'on n'a pas trouvé de travail au bout de 12 mois,
06:20 il y a des vraies questions.
06:21 Est-ce que je suis au bon endroit ?
06:22 On parle de mobilité, enfin.
06:24 Est-ce que je cherche le bon job ?
06:26 Voilà, la réponse ne peut pas être dans un chômage qui est sans fin.
06:29 - Et puis on sait bien qu'il y a la question de la formation,
06:31 et puis l'envie de travailler, et puis avec un salaire décent.
06:33 Merci beaucoup Marc Verneau d'être venu sur CNews.
06:35 - Merci à vous.
06:37 (Générique)