Dialogue Citoyen - Smic : une épidémie française

  • il y a 6 mois
« Il faut désmicardiser la France. (…) On ne peut accepter une France où beaucoup sont condamnés à rester proches du smic toute leur carrière » : lancée à la tribune de l’Assemblée nationale lors de sa déclaration de politique générale, le 30 janvier dernier, l’ambition de Gabriel Attal est-elle réalisable ? Avec 3,1 millions de salariés payés au smic, aujourd’hui, ce ne sont pas moins de 17 % des salariés français qui touchent la rémunération minimum. Pourquoi le SMIC touche-t-il de plus en plus de monde ? Son indexation sur l’inflation permet-elle aux salariés de s’en sortir ? Et au fond pourquoi les patrons ont du mal à payer leurs employés au-delà ? Ce mois-ci Tâm Tran Huy ouvre le débat, avec des citoyens et des parlementaires dans un nouveau numéro de Dialogue citoyen.
Année de Production : 2023

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00:00 [Musique]
00:10 Bonjour, bonjour et bienvenue dans Dialogue Citoyen.
00:13 Nous sommes ensemble pendant près d'une heure pour faire échanger
00:16 de façon franche et directe, citoyens et parlementaires
00:21 sur un sujet qui concerne de plus en plus de Français.
00:24 Aujourd'hui, on va s'intéresser au SMIC, le salaire minimum légal,
00:29 17% des salariés français.
00:31 3 millions de Français sont aujourd'hui concernés à une véritable épidémie.
00:36 C'est trop, en tout cas, pour le Premier ministre Gabriel Attal
00:39 qui a déclaré vouloir désmicardiser la France,
00:42 qui veut que les petits salaires progressent.
00:45 Alors, comment vit-on aujourd'hui au SMIC en France ?
00:49 Est-ce que ce sont les mêmes problèmes partout ?
00:52 Pourquoi certains chefs d'entreprise ne voient pas comment augmenter leurs salariés ?
00:57 Et que disent enfin ceux qui ne touchent même pas le SMIC en France aujourd'hui ?
01:01 Dans cette émission, 5 citoyennes et citoyens connectés un petit peu partout en France
01:06 vont venir nous livrer leurs témoignages, leurs points de vue.
01:10 Ils sont SMICards, chefs d'entreprise, salariés du public ou du privé.
01:15 Et tout de suite, notre premier témoignage.
01:18 On va aller voir Océane Cousseau.
01:20 Bonjour, vous avez 27 ans, Océane.
01:23 Vous vivez en région parisienne à Noisy-le-Grand
01:25 et vous avez beau être en CDI mais au SMIC,
01:28 vous avez le sentiment de n'avoir pas commencé votre vie d'adulte.
01:32 Est-ce que vous pouvez tout simplement, pour commencer,
01:34 nous raconter votre quotidien avec un peu moins de 1400 euros net par mois ?
01:40 C'est ça, je vis chez mes parents,
01:43 qui eux-mêmes ont déménagé pour se rapprocher de leur lieu de travail.
01:46 À presque 27 ans, j'aimerais bien enfin partir de chez eux
01:50 pour qu'eux puissent aussi vivre leur vie.
01:53 Donc j'aimerais bien m'installer, commencer à fonder ma famille et tout ça,
01:56 mais c'est compliqué parce qu'il y a beaucoup de frais en fait
02:02 et le SMIC ne suffit pas pour s'installer.
02:05 Ça ne suffit pas pour s'installer.
02:07 Et aujourd'hui, vous le dites, vous vivez aussi loin de votre travail.
02:11 Les journées sont longues.
02:13 On va regarder le témoignage que vous avez enregistré.
02:16 Alors voilà, j'ai fini le travail à 7h45
02:18 et j'ai bien arrivé à ma station de bourse avant de rentrer chez moi.
02:22 Voilà, presque deux heures de trajet.
02:25 Océane, on a vu, vous mettez deux heures et demie à les retours
02:29 pour vos trajets jusqu'au travail,
02:31 mais avec la faiblesse de vos revenus aujourd'hui,
02:34 c'est impossible de trouver un logement plus proche.
02:38 C'est exactement ça.
02:40 La plupart, en fait, c'était l'appartement que j'ai regardé
02:43 sur les sites de location, tout ça.
02:46 Les propriétaires demandent un salaire de trois fois le montant du loyer.
02:51 Et j'ai regardé du coup, en moyenne, avec les primes,
02:54 c'est important de le préciser, je touche 1 400 net.
02:59 Et le problème, c'est que la plupart du coup,
03:01 des propriétaires demandent un salaire de trois fois le montant,
03:05 ce qui veut dire que je peux demander un loyer de près de 480 euros.
03:10 Et on ne trouve rien en région parisienne à ce prix-là ?
03:14 Non, ça correspond à peu près à un studio de 15 mètres carrés.
03:19 La chambre est dans la cuisine.
03:23 Et vous préférez rester du coup chez vos parents ?
03:25 C'est vraiment des conditions de vie que vous pensez être trop compliquées aujourd'hui ?
03:29 Oui. J'ai fait un petit calcul des frais que ça apporte de vivre au Ciel,
03:36 donc avec le loyer, les factures, les courses, tout ça.
03:40 Avec le salaire que j'ai aujourd'hui, il me reste 50 euros après avoir tout payé
03:46 pour les imprévus ou éventuellement les sorties avec les amis, tout ça.
03:50 Est-ce que vous avez l'impression d'être prise au piège ?
03:53 Alors que je le disais, vous travaillez depuis quelques années,
03:56 ça fait quand même un an que vous êtes en CDI.
04:00 Ça va faire deux ans que je suis au CDI,
04:01 et je n'ai pas l'impression de pouvoir avancer.
04:04 Je me retrouve coincée chez mes parents,
04:07 parce que je n'ai pas de possibilité de partir.
04:10 Oui, et c'est une situation bien sûr qui impacte l'ensemble de votre famille.
04:15 Vos parents aussi, j'imagine que ça joue sur leur morale et pas qu'eux.
04:20 Ils sont un peu contents, pour l'instant, que je sois encore à la maison,
04:24 mais c'est vrai qu'ils aimeraient bien que je puisse avancer,
04:27 devenir une adulte à part entière.
04:32 Merci, merci beaucoup aussi, Ana, de nous raconter comme ça votre quotidien
04:35 avec autant de sincérité, pour réagir à votre témoignage.
04:38 Il y a trois élus ici sur ce plateau, je vous les présente.
04:41 Frédéric Puissa, bonjour.
04:43 Sénatrice Les Républicains de l'ISER, à côté de vous, Martin Lévrier,
04:48 sénateur Renaissance des Yvelines,
04:50 et Alexandre Ouisy, sénateur socialiste de l'Oise.
04:54 Tout simplement, qu'est-ce que vous inspire ce témoignage,
04:56 quand on voit qu'à 27 ans, pour Océane, ce n'est pas possible de commencer
05:01 une vie d'adulte indépendante en région parisienne,
05:03 alors qu'elle est pourtant en CDI ? Frédéric Puissa.
05:06 Qu'est-ce que ça nous inspire ? D'abord, merci, Océane, de témoigner.
05:08 Alors, c'est vrai que peut-être qu'il a fallu beaucoup de courage pour le faire,
05:12 mais je pense que c'est important de le faire.
05:15 Vous le faites dans un contexte aussi qui est un contexte,
05:18 si je puis me permettre, parisien, parce que je pense que ce que vous vivez
05:22 est aussi lié à la crise du logement qu'on peut rencontrer,
05:25 au coût du logement qu'on peut rencontrer sur la région parisienne,
05:27 mais pas que, mais pas que.
05:29 Mais en l'occurrence, vous témoignez à la fois de trajets qui sont longs,
05:35 dans un contexte de travail, la vente, avec parfois des horaires qui sont compliqués,
05:39 des horaires les week-ends, et surtout dans une région parisienne
05:43 où les coûts de loyer sont extrêmement élevés,
05:45 avec des garanties qui sont demandées parce que le bien est rare,
05:48 qui sont des garanties qui sont excessives,
05:50 et du coup vous vivez une frustration qui est tout à fait compréhensible
05:54 et tout à fait audible, en tout cas par la parlementaire que je suis,
05:58 mais je pense bien au-delà de moi-même.
06:01 Oui, bien sûr. Martin Lévrier, également, votre réaction.
06:03 Un grand merci, Océane, de votre participation
06:07 et de tout ce que vous nous avez dit, qui est effectivement très important aujourd'hui.
06:12 Je partage exactement ce que dit Frédéric Puissa,
06:15 c'est-à-dire cette difficulté que vous rencontrez.
06:18 Pour déplacer un peu le sujet, je voudrais vous poser quelques questions
06:20 qui m'ont un petit peu étonné, parce que vous avez dit
06:24 « tout cumuler avec les aides, j'arrive à 1400 euros net,
06:27 or le SMIC plus la prime d'activité normalement doit donner au moins 200 euros de plus.
06:33 Donc est-ce qu'il y a quelque chose que vous ne touchez pas ?
06:36 Est-ce qu'il y a des éléments que nous, parlementaires, nous croyons et qui sont faux ? »
06:40 C'est un sujet important aussi.
06:41 Oui, bien sûr.
06:42 Un autre sujet connexe, qui est le logement,
06:44 parce que bien sûr qu'en région parisienne, c'est un flux excessivement tendu,
06:48 mais il y a aussi les possibilités de logement sociaux.
06:51 Est-ce que vous avez regardé de ce côté-là,
06:53 ou est-ce que c'est là aussi impossible dans votre…
06:55 je ne sais pas dans quel coin vous êtes de la région parisienne ?
06:58 Voilà, c'est un peu des questions qui permettent peut-être
07:00 de trouver des débuts de commencement de solutions,
07:02 mais qui ne résolvent pas le problème du SMIC tel qu'il est aujourd'hui en région parisienne.
07:05 Océane, allez-y.
07:06 Alors, je touche la prime d'activité, une centaine d'euros par mois.
07:11 Et les primes dont moi je vous parlais pour mon salaire,
07:14 c'est les primes de remplacement gérant, les primes des dimanches travaillés,
07:18 les heures supplémentaires.
07:21 Donc non, je ne comptais absolument pas les primes d'activité là-dedans.
07:25 Et ça, c'est des primes tantôt que normalement, je ne les touche pas.
07:29 C'est juste un surplus.
07:33 Concernant les primes de logement social, j'en ai fait une,
07:36 mais je ne suis pas enceinte, je ne suis pas handicapée,
07:38 je ne suis donc pas prioritaire.
07:42 Donc j'ai au moins trois à quatre ans d'attente minimum.
07:47 Donc voilà.
07:48 Alexandre Wizzy, votre réaction ?
07:51 Alors, renoncer un petit peu plus maintenant sur la situation aussi d'Océane.
07:54 Oui, merci beaucoup de ce témoignage.
07:56 Moi, je viens d'un département, l'Oise,
08:00 qui est aussi finalement aux abords de ce grand soleil qu'est l'île de France,
08:03 où des dizaines de milliers de personnes tous les jours font un travail pendulaire,
08:07 où ils passent le temps que vous passez aussi, vous, dans les transports.
08:11 Et je sais à quel point c'est difficile.
08:13 En fait, il faut regarder les choses pièce par pièce.
08:16 En fait, il y a la question du loyer.
08:18 Et on l'a dit, le logement en région parisienne, à Paris,
08:22 en moyenne, pour un 30 mètres carrés, donc ce n'est pas du luxe,
08:25 20 mètres carrés, en moyenne, c'est, je parle avec le parc social compris,
08:28 c'est 1 100 euros.
08:30 Donc, par contre, moins inaccessible à un SMIC.
08:32 Exactement.
08:32 Et en île de France, si vous élargissez un petit peu le périmètre,
08:36 on est à 930 euros.
08:39 Je ne sais pas si vous corroborez ce que je dis, Océane,
08:40 si vous êtes d'accord avec ce que vous voyez.
08:43 Sur les demandes de logement social,
08:45 je prends le cas de mon agglomération à laquelle je vis,
08:47 il y a 13 000 demandes de logement social en attente.
08:49 Donc, vous êtes en effet dans des schémas
08:51 où il y a des droits au logement opposables,
08:53 il y a des priorités qui existent dans le logement social qu'on peut comprendre,
08:56 mais qui font qu'il n'y a pas d'accès au logement.
08:57 Donc, moi, finalement, si je vais au bout du raisonnement,
09:01 en fait, s'il n'y a pas un travail sur le SMIC,
09:03 et nous, nous l'avons proposé,
09:05 nous avons proposé de dire qu'il fallait ramener le SMIC à hauteur de 1 600 euros,
09:09 c'est une possibilité qui est à la main du gouvernement,
09:12 c'est une possibilité que je trouverais cohérente,
09:14 parce que pendant des années,
09:15 il y a eu un soutien public très fort aux entreprises, très fort.
09:18 Il y a eu une baisse des impôts de production,
09:20 une baisse des impôts de société.
09:22 C'était une manière de rendre aussi ce qui a été donné aux salariés
09:26 qui sont aujourd'hui dans la difficulté et dans la situation que décrit Océane.
09:29 Donc, moi, je pense qu'il y a un travail à faire sur le salaire.
09:31 Ce n'est pas qu'une question d'aide et de prime,
09:32 c'est aussi une question de salaire.
09:33 Nous sommes également avec Cindy Gard, qui a 29 ans.
09:37 Vous êtes médiatrice sociale à Nevers.
09:39 Cindy, tout simplement pour commencer,
09:41 est-ce que vous reconnaissez dans les difficultés d'Océane,
09:44 vous qui êtes aussi au SMIC, mais pas en Ile-de-France ?
09:48 Je suis maman de deux enfants en étant seule.
09:53 Et je n'ai pas le droit à la prime d'activité,
09:55 parce que ma fille vient d'avoir trois ans,
09:57 donc on m'a tout retirée en fait.
09:59 J'ai eu une nette descente de budget en très peu de temps.
10:04 C'est-à-dire que de cet été à aujourd'hui,
10:08 on va dire par exemple au mois de juin,
10:12 j'étais à 2 500 euros de ressources mensuelles,
10:14 donc salaire et aide sociale.
10:17 À l'heure d'aujourd'hui, je suis à 1 700 euros.
10:18 Vous avez repris une activité professionnellement il y a un an et demi,
10:24 vous vous en sortiez finalement mieux avant,
10:26 c'est ça votre situation aujourd'hui ?
10:29 Je m'en sortais très bien pendant que ma fille avait passé trois ans,
10:32 où j'avais beaucoup d'aide de la CAF,
10:35 ce qui est la BAGE,
10:38 j'avais la prime d'activité pour personne seule,
10:42 c'était la prime d'activité majorée pour personne seule.
10:44 À l'heure d'aujourd'hui, on m'a tout retirée.
10:46 Là, en deux mois, j'ai perdu un peu plus de 400 euros.
10:49 Oui. Vous vous dites avoir...
10:51 Oui.
10:52 Je ne sais pas du tout comment faire en fait.
10:54 Vous dites que vous avez l'impression parfois de plus survivre que vivre,
10:58 de quoi vous privez-vous aujourd'hui ?
11:01 C'est simple, je n'achète pas de vêtements,
11:04 je n'achète pas de chaussures, je passe en priorité mes enfants.
11:08 Cet été, je ne pourrais pas les emmener en vacances
11:11 parce qu'en plus de ça, je n'ai pas le droit à certaines aides
11:14 du fait que je dépasse le barème.
11:17 Donc moi, les aides de la CAF, je n'y ai pas le droit.
11:21 Donc, enfin, aucun loisir en fait, vraiment aucun loisir.
11:25 C'est vraiment pour survivre, on va dire.
11:28 Cindy, vous voulez interpeller nos parlementaires sur ce plateau.
11:31 Quelle question voulez-vous leur poser ?
11:33 En fait, quand on se rend compte qu'on y arrive mieux en ne pas travaillant,
11:36 c'est honteux, vraiment.
11:41 Moi, je me lève tous les matins, je laisse mes enfants à l'école,
11:44 je les laisse le soir à la garderie pour faire ma journée de 7h ou 8h,
11:50 ça dépend des jours, tout ça pour au final gagner moins
11:54 que quand je ne travaillais pas et que j'étais mère au foyer.
11:58 Ça pose question, je pense.
11:59 Ça pose question, Martin Lévrier.
12:01 Pourquoi n'aident-on pas davantage les gens qui veulent travailler ?
12:05 Et voilà, comment répondre à ce type de situation ?
12:07 D'abord, avant tout, là aussi, un grand merci de votre témoignage
12:10 qui est très, très important et qui montre cette difficulté
12:13 qu'on a dans nos systèmes en France
12:15 où il y a toujours des plafonds ou des planchers
12:17 et qui font que quand on les dépasse,
12:18 on se retrouve très, très rapidement, et c'est votre cas, c'est vous.
12:21 Parce qu'au début, je ne comprenais pas
12:22 comment vous aviez pu perdre 400 euros d'un coup comme ça.
12:24 Vous l'avez expliqué très simplement, votre enfant a 3 ans et boum,
12:28 vous changez immédiatement de catégorie.
12:31 Et c'est toute cette difficulté des différentes aides
12:33 qui sont, j'allais dire, mises en silo les unes par rapport aux autres,
12:37 qui ne concernent pas les mêmes cas.
12:39 Donc là, c'était pour votre enfant que vous touchiez une aide,
12:41 ou une participation, qui n'avait rien à voir avec le travail,
12:44 je le mets entre guillemets, mais c'est la somme de tout qui fait vivre.
12:47 Et quand on enlève une part, on tombe sur cette grande difficulté
12:50 et on a le sentiment que travailler est moins rémunérateur que ne pas travailler.
12:56 Et ça, c'est dramatique.
12:57 C'était vraiment un grand drame sur lequel nous travaillons
12:59 depuis le début avec ce gouvernement,
13:01 mais qui est un travail en profondeur, de très longue haleine,
13:04 parce qu'il touche énormément d'aides
13:06 et que ces aides, il va falloir les retravailler ensemble
13:08 pour éviter ce genre de planchers qui sont,
13:10 je le dis très clairement, inadmissibles.
13:12 - Cindy, vous êtes à un tel point de difficulté
13:14 que vous hésitez même à continuer à travailler à plein temps aujourd'hui.
13:18 Vous avez même commencé à avoir cette discussion avec votre employeur.
13:21 - Je lui ai demandé si elle pouvait me passer un temps partiel
13:24 pour que j'aie le droit à plus d'aide, c'est-à-dire la prime d'activité,
13:28 c'est-à-dire, en fait, je ne serai plus au-dessus du barème
13:31 parce que là, je dépasse le montant de 11 euros.
13:34 Mon quotient familial dépasse de 11 euros.
13:38 - Frédérique Puissa, à 11 euros près, on perd une grande partie des aides.
13:44 C'est sûr que ce n'est pas encourageant pour reprendre un travail à plein temps.
13:47 - Bien sûr.
13:48 Alors, ce que je vais vous dire, ça ne va pas vous rassurer, Cindy,
13:50 mais j'allais dire, vous avez une valeur essentielle qui est la valeur travail.
13:53 Et ce que vous apportez à vos enfants,
13:54 c'est quand même une valeur qui est essentielle en termes de référence.
13:57 Donc, ne perdez pas pied, ne lâchez pas tout ça.
13:59 Pour autant, ce que vous expliquez est juste.
14:02 Et ce que vous vivez est effectivement dramatique.
14:04 Alors, quand on a eu dernièrement un texte de loi,
14:07 une réflexion sur la réforme de l'assurance chômage,
14:09 moi, j'étais rapporteure du texte de loi,
14:11 et mon premier objectif a été de me dire
14:13 comment est-ce qu'on peut effectivement mieux rémunérer
14:16 des personnes qui travaillent versus des personnes qui sont dans une situation
14:20 qui est plus liée à une redistribution sociale,
14:23 soit parce qu'on est demandeur d'emploi,
14:24 soit parce que pendant un temps, on doit arrêter son activité.
14:28 Mais c'est très compliqué.
14:29 Pourquoi c'est très compliqué ?
14:30 Parce que ça ne dépend pas nécessairement que des ressources,
14:32 ça dépend aussi des charges.
14:34 Vous, vous allez travailler, vous avez des charges.
14:36 C'est-à-dire que vous devez payer, effectivement, peut-être une voiture,
14:38 vous devez payer le métro, vous devez payer un train, je ne sais quoi,
14:41 mais que vous ne payiez pas quand vous étiez effectivement à domicile avec vos enfants.
14:45 Donc tout ça fait qu'on a du mal à pouvoir monter quelque chose,
14:48 en tout cas à pouvoir avoir la main en tant que législateur.
14:52 Après, pour revenir sur ce que disait Martin tout à l'heure,
14:54 sur le fameux revenu universel qui avait été prôné par le président Macron
14:58 quand il est arrivé en 2017, je dois dire quand même que...
15:02 Non, mais c'était à peu près ça.
15:05 Mais en tout cas, on était effectivement sur quelque chose
15:07 qui ramenait à des seuils un peu similaires
15:10 pour qu'on n'ait pas ces effets de 11 euros
15:12 qui font qu'on soit contraints de bricoler.
15:14 Parce que quand vous demandez effectivement à votre employeur
15:17 de réduire votre temps de travail pour pouvoir bénéficier d'une aide,
15:20 franchement, ce n'est pas satisfaisant pour vous,
15:21 ce n'est pas satisfaisant pour la société.
15:23 Et du coup, vous le vivez mal et tout le monde le vit mal.
15:26 Donc je ne suis pas sûre qu'on y arrive,
15:29 parce que je pense que c'est très compliqué.
15:30 C'est très compliqué.
15:31 En même temps...
15:32 Vous ne voyez pas ce problème que vous avez identifié,
15:34 mais au niveau des textes de loi, pour l'instant, on n'arrive pas à gérer ?
15:39 À date, notamment sur les charges qu'impose le travail.
15:41 Parce que travailler, ça impose des charges.
15:44 Ça impose de se déplacer, ça impose de faire garder ses enfants,
15:46 ça impose de payer une cantine.
15:49 Et du coup, on a du mal en tant que législateur
15:51 à pouvoir, à un moment donné, tenir ce bout-là.
15:54 Mais je comprends parfaitement ce que vous vivez,
15:56 parce que plusieurs personnes nous l'ont exprimé,
15:57 notamment quand j'étais rapporteure du texte de loi
15:59 sur la réforme de l'assurance chômage.
16:01 Alexandre Wizi, on voit que même à Nevers,
16:03 on a des problèmes très importants.
16:06 Il n'y a pas que la région parisienne, comme on le voyait tout à l'heure.
16:08 Bien sûr.
16:09 Est-ce que je peux juste vous demander une précision ?
16:10 Vous êtes une maman seule ?
16:13 Vous êtes seule ?
16:14 D'accord.
16:15 Et je pense que c'est là qu'il faut aussi travailler,
16:17 et c'est là qu'il y a aussi un trou dans la raquette.
16:20 C'est-à-dire qu'il faut qu'on travaille sur les familles monoparentales,
16:24 qui à 90% sont des familles avec des mamans seules, avec leurs enfants.
16:29 Et dans ces familles, vous avez un taux de pauvreté qui est le double,
16:32 et de fragilité, qui est le double de celui qui existe dans le reste de la population.
16:37 Donc nous, on a essayé d'initier un travail sur...
16:41 Vous avez raison de dire que c'est compliqué,
16:42 mais on a essayé d'initier un travail sur ces familles.
16:46 Et je vous apporte vraiment tout mon soutien,
16:48 et on va essayer d'avancer plus vite,
16:49 parce que c'est vraiment révoltant, en fait, ce que vous nous racontez.
16:52 Et évidemment, moi, en tant que parent, je sens ça en moi,
16:56 et voilà, je voulais juste vous en témoigner.
16:58 On va essayer d'avancer sur ces sujets.
17:00 Je vois les effets de seuil qui sont décrits,
17:01 mais je pense qu'il y a une action spécifique à faire sur vos situations,
17:05 sur la question de la monoparentalité et des charges qui y sont associées,
17:07 parce qu'en fait, les relais sont très difficiles.
17:09 Vous avez de la famille en proximité qui vous accompagne, quand même ?
17:13 Ils me gardent mes enfants les jours où il n'y a pas d'école ou pendant les vacances.
17:18 Mais j'ai trouvé le moyen de les mettre à l'école,
17:21 juste à côté de mon travail, pour la semaine.
17:23 Donc ça veut dire qu'ils font 30 minutes de garderie le soir, à peu près,
17:26 mes enfants, plus la cantine le midi.
17:29 Juste ça, ces frais-là, je suis à 150 euros par mois.
17:32 De gasoil pour venir, je suis à peu près à 200 à 250 euros mensuels.
17:36 Donc là déjà, on part sur une moyenne de 400 euros par mois,
17:39 uniquement pour les frais de déplacement et de garde pour mes enfants.
17:43 C'est ce que j'ai perdu là, en prestations.
17:46 Donc là, s'il faut, le mois prochain,
17:48 je ne pourrai même pas payer la cantine et la garderie de mes enfants.
17:50 Parfois, il y a des aides des municipalités.
17:52 Est-ce que vous avez été voir de ce côté-là ?
17:55 Ou est-ce que ce n'est pas quelque chose que vous avez exploré encore
17:58 sur le soutien potentiel des municipalités de la ville de Nevers ?
18:02 Ou est-ce qu'il y a du soutien là-dessus ou pas du tout ?
18:05 Alors pour l'instant, je n'ai rien fait en démarche,
18:07 ne serait-ce que de prendre rendez-vous avec mon assistante sociale.
18:11 Ou je lui ai déjà dit, carte sur table,
18:15 que je pensais arrêter de travailler clairement ou me mettre en mi-temps.
18:19 Ou elle m'a répondu, non mais Madame Garde, ce n'est pas la solution,
18:21 il faut penser à votre retraite, il faut penser à votre situation.
18:24 Oui d'accord, mais qui pense à qui nourrir mes enfants à la fin du mois ?
18:28 Qui pense à comment je paie mon loyer ?
18:30 Qui pense à comment je paye 230 euros d'électricité, de chauffage tous les mois ?
18:34 Et je suis en logement social, je tiens à le préciser.
18:38 Donc je ne fais vraiment aucun écart de vie en fait.
18:41 Les vacances, je n'en prends pas.
18:42 Des vêtements, oui j'en achète à mes enfants.
18:45 Mais j'estime que si on fait des enfants, c'est pour pouvoir les habiller.
18:47 Là j'arrive à un stade où je ne pourrais même plus les habiller en fait.
18:51 Parce que là, lors d'aujourd'hui, mon budget, j'ai fait des calculs,
18:54 je suis à 140 euros hors budget.
18:58 Ça veut dire que j'ai 150 euros qui vont rester à découvert tous les mois
19:01 et donc je vais retourner en Banque de France.
19:03 Je ne sais pas s'ils se rendent compte de la difficulté qu'ils mettent les gens en fait.
19:07 Et oui, je pense encore plus précisément aux mamans célibataires, c'est catastrophique.
19:12 Oui, je reviens sur cette question d'augmentation du SMIC en fait.
19:14 Ce n'est pas… c'est une nécessité aujourd'hui.
19:17 Voilà, augmenter de 200 euros le SMIC…
19:21 On va rappeler qu'il a quand même été augmenté…
19:22 Bien sûr, à hauteur de l'inflation, je ne dis pas, c'est automatique.
19:25 Voilà, à hauteur de l'inflation, 12% en deux ans.
19:26 Ce que je dis juste, c'est qu'au niveau de…
19:28 En fait, à la fin, il y a une question de répartition, si vous voulez.
19:31 Et quand vous avez une situation où on a beaucoup donné aux entreprises,
19:34 il y a une restauration des marges sérieuse dans tous les secteurs de l'économie française,
19:38 à un moment, il faut qu'on accompagne la montée en puissance de salaire
19:41 parce que le SMIC, c'est vrai, il y a un effet de…
19:44 quand on monte le SMIC, il y a un effet de tassement au niveau du salaire,
19:45 on ne va pas dire le contraire,
19:46 mais il y a aussi un effet d'entraînement sur le reste des salaires.
19:49 Donc il faut pousser ça, sinon les gens ne s'en sortent pas.
19:52 On en a le témoignage aujourd'hui aussi.
19:54 Allez, merci beaucoup pour votre témoignage.
19:57 Tu me dis merci beaucoup.
19:58 On va rejoindre Océane, que nous avions laissée tout à l'heure,
20:01 car elle aussi a une question, une interpellation à vous adresser.
20:06 Quelle était la question que vous vouliez poser ?
20:08 Le pouvoir d'achat d'un SMIC n'est pas le même en province et en Ile-de-France.
20:12 Pourquoi ne serait-il pas différent selon les régions ?
20:16 Martin Lévrier, un SMIC régional.
20:18 Parce que si on…
20:19 Pourquoi régional et pourquoi pas départemental et pourquoi pas communal ensuite ?
20:23 Il y a déjà eu une différence faite pour la région parisienne,
20:25 qui est le fameux indemnité de logement de 3 %,
20:28 qui est en soi ridicule quand vous êtes salarié.
20:30 Normalement, vous avez une indemnité de logement de 3 %,
20:33 qui était justement cette logique de compensation.
20:35 On a essayé de le faire dans les années 2018-2019,
20:39 et juste avant le Covid, pour les infirmières,
20:41 parce qu'il y avait un véritable problème de recrutement
20:43 pour les infirmières, qui existe toujours d'ailleurs.
20:45 Et on avait fait une prime comme ça pour attirer les jeunes infirmières
20:48 qui voulaient venir en région parisienne,
20:50 et ça n'a quasiment pas fonctionné.
20:52 Donc la réponse d'un SMIC en fonction…
20:55 On revient à la valeur travail.
20:57 Qu'est-ce que la valeur travail ?
20:58 Pourquoi serait-elle différente à un point A ou un point B ?
21:01 Le problème, c'est comment organiser la région parisienne,
21:04 comment rendre les choses moins tendues dans la région parisienne,
21:06 comment aussi créer du travail en province,
21:08 parce que finalement, il y a ce vrai problème d'un pays
21:11 qui a été désindustrialisé pendant plus de 30 ans,
21:14 qui fait qu'il y a quasiment plus de travail en province,
21:16 qu'il faut recréer ce travail pour redonner envie de repartir en province.
21:19 La mobilité doit fonctionner dans les deux sens.
21:21 Mais le régional, je n'y crois pas, je vous l'avoue franchement.
21:24 Alexandre Wysse, ça a déjà existé un SMIC régional,
21:28 différent sur les régions de 1950 à 1968, en précision.
21:32 Moi, je partage un peu l'avis de mon collègue,
21:34 parce qu'en fait, en réalité, si vous commencez à rentrer,
21:37 il va y avoir aussi le SMIC de ceux qui sont dans le logement social
21:40 et ceux qui sont dans le parc privé.
21:41 Vous voyez ce que je veux dire ?
21:41 En fait, on peut aller dans l'infini…
21:43 Le SMIC a cette "vertu" qui couvre tout le monde,
21:46 en plus vous pouvez vous déplacer sur le territoire national.
21:48 Donc je pense que c'est très compliqué de re-rentrer dans des logiques régionales.
21:52 Mais par rapport aussi au problème d'Océane,
21:54 moi j'attire l'attention sur le fait qu'il y a 400 000 logements
21:58 vacants en Ile-de-France.
22:01 Ce n'est pas rien.
22:02 Si vous remettiez ces logements sur le marché,
22:04 forcément ça aurait un effet sur les prix.
22:07 Et moi, je considère que le logement,
22:09 ce n'est pas un actif financier comme un autre.
22:11 C'est-à-dire que vous pouvez avoir un logement,
22:13 mais vous ne pouvez pas le laisser de vide indéfiniment.
22:16 Donc il y a une question de la manière dont on traite.
22:18 En effet, il y a des gens qui peuvent redéménager,
22:19 mais peut-être qu'Océane a envie de faire sa vie…
22:21 Je sais bien que ce n'était pas pour Océane.
22:23 C'était bébé, elle a peut-être envie de faire sa vie,
22:24 pas loin de sa famille, etc.
22:26 On peut la comprendre.
22:27 Pas chez ses parents, mais pas loin.
22:29 Pas chez ses parents, exactement, puisque l'objectif c'est d'en sortir.
22:31 Ce qui est tout à fait normal, mais pas loin.
22:32 Donc du coup, il y a aussi un travail à faire sur le parc de logements
22:37 qui existe en Ile-de-France et qui, à mon avis, est très important.
22:39 Frédéric Puissa, ce SMIC régional,
22:42 c'est même une proposition qu'a faite Valérie Pécresse,
22:44 la présidente de la région Ile-de-France,
22:47 pour essayer de répondre à ce problème
22:49 qui est celui de la vie sans doute plus chère en Ile-de-France
22:52 que dans d'autres régions.
22:54 Parce que le SMIC, il faut quand même se rappeler ce qu'est le SMIC.
22:57 C'est ce que nous considérons tous être comme un salaire décent.
23:00 C'est ça le SMIC.
23:01 C'est différent du coût du travail et de la rentabilité du travail,
23:04 je le disais parce qu'on assiste effectivement entre le SMIC
23:08 et les salaires qui sont liés à la rentabilité du travail,
23:10 à un écart qui est de plus en plus fin.
23:12 Et c'est vrai que vous n'avez pas tort,
23:14 quand on est dans la région parisienne,
23:16 la décence, elle se mesure à l'aune des dépenses.
23:19 Et vos dépenses sont plus onéreuses qu'elles ne peuvent l'être effectivement.
23:23 Alors je vais citer un département qui est très rural,
23:25 le Cantal par exemple, où il y a peut-être moins…
23:28 L'Isère c'est très cher.
23:30 Mais en l'occurrence, je dis le Cantal parce que c'est très rural.
23:32 Donc j'entends ce que vous dites,
23:33 mais je ne suis pas sûre que ce soit effectivement la solution.
23:35 Mais il n'empêche quand même que je reviens sur la problématique
23:37 que vous pointez, Océane, et que nous évoquions.
23:40 Mais le problème est réel.
23:41 Mais le problème est réel, on est bien d'accord.
23:43 Mais la vraie problématique, c'est le logement.
23:45 C'est la crise de demain.
23:46 Et je suis désolée de le dire.
23:48 Voilà, je suis désolée de le dire.
23:49 C'est qu'on a effectivement, depuis ces dernières années,
23:53 tout fait, que ce soit effectivement en matière de problématiques de construction
23:58 ou de problématiques d'occupation des sols,
23:59 on a tout fait pour que le logement soit dans des rails rares
24:02 et du coup, il y aura une dent de rail chère.
24:04 Et c'est ce que vous y vivez aujourd'hui.
24:05 Allez Océane, restez avec nous.
24:07 On va prendre tout de suite la direction de la Somme.
24:11 On va aller voir Benjamin Rapico.
24:13 Bonjour, vous, vous n'êtes pas au SMIC.
24:16 Est-ce que vous vous sentez privilégié par rapport aux deux témoignages
24:19 que l'on vient d'entendre ?
24:20 Oui, bonjour à toutes et à tous.
24:24 Non, moi, je suis un petit peu au-dessus du SMIC.
24:27 Donc, privilégié, je ne pense pas que ce soit le mot qui correspond.
24:32 J'ai l'opportunité d'encontrer énormément d'agents
24:35 et qui pour eux, par contre, c'est extrêmement compliqué.
24:38 Qu'est-ce que ça veut dire ?
24:39 Qu'est-ce qui vous remonte eux aussi comme problème ?
24:44 Le problème, c'est que tous les mois,
24:49 leurs salaires fondent comme neige au soleil.
24:52 Je veux dire, là, au 1er janvier,
24:55 nous avons eu une augmentation de 5 points.
24:58 5 points, c'est équivaut à 20 euros net.
25:01 Ce n'est clairement pas suffisant pour les petits salaires.
25:03 20 euros net, ce n'est rien.
25:05 Moi, quand je vois mes factures de janvier 2023 et de janvier 2024,
25:10 j'ai une augmentation de 100 euros de facture,
25:14 sans compter l'essence, sans compter l'alimentation,
25:17 sans compter tout le reste.
25:18 Donc, 20 euros, on est encore vraiment loin du compte.
25:22 Tout à l'heure, M. le sénateur parlait de la prime d'activité.
25:27 Oui, c'est très bien la prime d'activité, ça aide énormément d'argent,
25:31 mais ça prouve aussi que les salariés ne vivent pas dignement de leur travail.
25:36 Je pense qu'il y a un gros travail à faire là-dessus.
25:39 – Et vous, concernant votre situation spécifique,
25:42 Benjamin, vous gagnez 1 700 euros, donc vous êtes au-dessus du SMIC.
25:48 Est-ce que vous vous sentez rattrapé aujourd'hui ?
25:51 Parce qu'on le disait, il y a quand même eu des hausses du SMIC aussi,
25:54 ces dernières années.
25:57 – Oui, je suis très heureux pour les agents en début de carrière au SMIC
26:04 qui vont forcément gagner un petit peu plus.
26:06 Le problème dans la fonction publique, c'est un problème de grille.
26:09 Ce qu'il faut savoir, c'est que quand on arrive dans la fonction publique
26:13 en catégorisé, sur les 7 premiers échelons, c'est-à-dire 9 ans,
26:18 on n'a aucune augmentation d'indices, donc on reste exactement au même salaire.
26:22 Et à partir de 12 ans d'ancienneté, on prend 2 pointes,
26:25 et le point est un simple euro, donc ce qui fait 10 euros net d'augmentation
26:31 pour 12 ans de service.
26:33 – Qu'est-ce qui n'est pas accessible aujourd'hui avec vos moyens, Benjamin ?
26:36 – Par exemple, un achat immobilier.
26:37 Clairement, vu mon salaire, je ne peux pas être propriétaire.
26:41 Dans la Somme, c'est vrai qu'on n'a pas les mêmes contraintes
26:44 au niveau loyer qu'en région parisienne,
26:46 mais c'est vrai que pour acheter une maison,
26:49 maintenant même les banques ont beaucoup plus de mal à prêter de l'argent,
26:53 et avec un salaire de 1700 euros, ce n'est clairement pas possible.
26:56 – Martin Lévrier, votre réaction à la situation de Benjamin ?
26:59 – Deux réactions, je les partage, d'autant plus que dans mon ancienne vie,
27:03 qui était il y a 6 ans, 7 ans, je travaillais aussi avec des grilles
27:06 qui fonctionnaient un peu du même type, c'était dans le privé,
27:08 mais on avait aussi un système de grille avec régulièrement un SMIC
27:11 qui dépassait le plus bas de la grille, négociation annuelle pour changer la grille,
27:16 c'était une négociation nationale, donc 6 mois de retard,
27:19 donc un temps fou pour rattraper, ne serait-ce que le SMIC.
27:22 Je vous rejoins d'autant plus sur ce que vous dites sur la prime d'activité
27:25 qui est effectivement une bonne solution,
27:28 mais qui est une solution qui ne règle pas le problème,
27:31 puisqu'on l'a dit tout à l'heure, le SMIC c'est normalement le salaire décent
27:35 qui permet de vivre, et comme le SMIC ne suffit pas,
27:37 on a créé la prime d'activité.
27:39 Donc c'est l'État qui se substitue quelque part à l'incapacité,
27:43 entre guillemets, des entreprises d'augmenter ou de pouvoir augmenter,
27:46 parce qu'il y a les deux.
27:47 – Il faudrait que ce soit le travail qui paye.
27:48 – Et on revient à cette notion de travail que je partage complètement
27:51 avec Frédéric Puissant, c'est comment retrouver en France
27:54 cette capacité de donner au travail sa vraie valeur ?
27:57 Est-ce qu'il faut baisser les charges ?
27:58 Est-ce qu'il faut réaménager les aides ?
28:01 Est-ce qu'il faut donner du temps ?
28:02 Il y a une idée toute bête qui n'est pas rentrée dans le sujet,
28:04 mais qui est pour moi essentielle, sur laquelle je travaille depuis des années,
28:07 je l'avais mis en place là où j'étais en partie,
28:09 c'est l'idée du travail à temps plein sur 4 jours.
28:11 Quand vous gagnez une journée à ne pas aller dans votre entreprise,
28:14 ça fait une économie de transport, ça fait une économie,
28:17 ça fait du gain de temps, ça fait une économie de garde d'enfants, etc.
28:19 C'est des choses comme ça qui parfois permettent de trouver des solutions
28:22 qui peuvent être intéressantes.
28:23 C'est une idée parmi d'autres, mais qui ne répond pas du tout à votre problématique.
28:26 – Oui, ça ne répond pas du tout à votre problème,
28:28 ou vous vous dites si ça pourrait limiter certains frais, certaines journées par exemple ?
28:32 – Ce que je veux dire par là, c'est que ces aides coûtent beaucoup d'argent.
28:35 Si on les réinjectait directement dans une baisse de charges sur le travail,
28:39 c'est peut-être là qu'on trouverait des solutions,
28:40 on permettrait peut-être aux entreprises d'avoir moins de charges,
28:42 d'augmenter les salaires, mais il faudrait du donnant-donnant.
28:44 Et là, je vous rejoins sur une partie,
28:46 il faut que les entreprises jouent vraiment le jeu.
28:47 – On va avoir un chef d'entreprise tout à l'heure, vous pourrez échanger avec lui,
28:50 mais juste, je voudrais avoir le point de vue de Benjamin sur ce que vous venez d'évoquer.
28:54 – En fait, moi, en étant dans la fonction publique,
28:58 le problème, c'est qu'indirectement, mon chef d'entreprise, c'est l'État.
29:02 Donc voilà.
29:05 – Oui, Alexandre Wizzy, ça prouve aussi que les hausses du SMIC,
29:10 ça n'a pas poussé les salaires qui étaient un petit peu au-dessus ?
29:14 – Alors, dans la fonction publique, c'est un cas particulier,
29:17 où la grille du salaire n'est pas exactement la même.
29:20 Et vous avez raison de dire qu'en fait, il y a quelque chose de bien qui s'est passé,
29:23 c'est que globalement, maintenant, le SMIC s'applique,
29:25 ce qui n'était pas le cas partout dans la fonction publique,
29:26 mais du coup, ça crée des échelons pendant des années où votre salaire ne bouge pas.
29:33 La réalité, c'est quoi ?
29:34 C'est que, quand même, depuis des années, les grilles de la fonction publique,
29:37 le point d'indice, n'ont pas suivi l'évolution du coût de la vie.
29:41 Vous avez des enseignants qui, par rapport à il y a 20 ans,
29:43 je prends les enseignants, je suis désolé, je n'ai pas pour vous-même le chiffre en tête,
29:46 mais pour les enseignants, c'est une baisse de 20% de leur pouvoir d'achat.
29:51 Et donc, qu'est-ce que vous retrouvez ? Dans quelle situation ?
29:54 Vous vous retrouvez dans la situation où vous faites des speed dating
29:56 pour recruter des enseignants, ou vous avez du mal,
29:58 moi, j'étais premier adjoint d'une collectivité avant de devenir sénateur,
30:01 je peux vous dire que quand on est en plus à côté de l'île de France,
30:03 comme moi, dans l'Oise, et monsieur Épicard, je le salue,
30:06 pour trouver des collaborateurs, c'est extrêmement difficile,
30:10 compte tenu de ce que sont nos grilles,
30:11 donc on joue sur le fonctionnement, sur les primes de fonction,
30:15 les indemnités de fonction, mais en fait,
30:17 s'il n'y a pas un travail sur les salaires aussi dans la fonction publique,
30:21 qui là, pour le coup, sont déconnectés de la question des charges sociales,
30:24 ce n'est pas la question des charges patronales qui ont lieu,
30:27 ce que vous appelez charges, et par ailleurs, je me permets de redire
30:30 que les cotisations sociales, c'est du salaire différé,
30:33 les gens se payent eux-mêmes leur retraite,
30:35 leur système d'assurance chômage, leur système d'assurance santé,
30:38 et qu'au niveau du SMIC, les cotisations patronales sont à 65 euros.
30:43 65 euros.
30:45 Donc on a déjà fait l'effort de baisse des cotisations sociales
30:47 au niveau du SMIC, à un niveau très important.
30:50 Et on va voir que c'est peut-être même un piège pour les augmentations.
30:53 C'est sûr que c'est une difficulté.
30:55 Frédéric Pussard, quand même, sur ce sentiment de déclassement,
30:59 d'être rattrapé, et sur cette vie un peu compliquée,
31:03 en étant quand même 300 euros au-dessus du SMIC.
31:05 Mais je le comprends parfaitement.
31:07 On scotche le SMIC qui, effectivement, est désocialisé,
31:11 mais du coup, les salaires qui sont juste au-dessus,
31:13 on a du mal à les augmenter.
31:14 Alors la fonction publique est un cas très particulier,
31:17 mais effectivement, comme l'augmentation est liée à la rentabilité,
31:20 on est sur un autre verset qui est celui de la dépense publique,
31:23 qu'on doit baisser.
31:24 – Vous avez mentionné la prime de pouvoir d'achat sur ce sujet,
31:28 et un peu plus large même.
31:29 Vous avez une question, vous voulez interpeller les sénateurs, Benjamin.
31:34 – Oui, tout à fait.
31:37 En fait, la mise en place de la prime exceptionnelle pouvoir d'achat
31:41 suite au décret du 31 octobre 2023,
31:44 où cette fameuse prime a été versée automatiquement
31:47 à la fonction publique d'État et à la fonction publique hospitalière,
31:52 et au bon vouloir des collectivités, pour la fonction publique,
31:55 donc cet aliment collectivité ne la verse pas aux agents.
31:58 Et moi, ma question est la suivante,
32:00 comment est-ce qu'on peut expliquer l'augmentation des frais de mandat
32:04 des sénateurs de 700 euros par mois,
32:07 et dire en même temps aux agents de la fonction publique territoriale,
32:10 ce sera à vos communes de décider si vous aurez ou non cette prime,
32:14 alors qu'elle est donnée automatiquement aux autres fonctions publiques.
32:17 – Oui, allez-y.
32:19 – Moi, je ne me l'explique pas, je le dis sincèrement,
32:22 je ne me l'explique pas, et moi j'avais rencontré,
32:25 comme le font les jeunes sénateurs, le président Larcher,
32:27 la seule chose que je lui avais demandé,
32:29 et la seule chose que nous lui avions demandé,
32:30 les jeunes sénateurs qui étaient avec moi du groupe socialiste,
32:32 c'était d'augmenter les frais des collaborateurs,
32:35 pour pouvoir augmenter les salaires de nos collaborateurs.
32:37 Vous pouvez soupirer, mais c'est ce que nous avions demandé.
32:40 Voilà, donc je le dis avec calme et tranquillité,
32:43 et donc moi je ne me l'explique pas tout à fait.
32:45 – Frédéric Pulsard ?
32:46 – Non mais je pense qu'il faut, pardon,
32:47 du terme un peu violent, chers collègues,
32:49 mais il ne faut pas être démagogue.
32:50 – Ah, ce n'est pas de la démagogie ?
32:52 – Ce monsieur a raison, c'est compliqué à expliquer.
32:54 Alors, moi je veux dire, ça a été voté par le bureau du Sénat,
32:59 et à partir du moment où c'est voté par le bureau du Sénat,
33:01 tout groupe politique confondu, les socialistes, l'opposition,
33:05 la majorité et notre groupe LR, la votiste.
33:07 – Vous voulez dire le bureau du Sénat ?
33:08 – Le bureau du Sénat et le composite,
33:10 qui représente effectivement des écologistes,
33:14 juste effectivement aux Républicains.
33:17 Il y a eu une augmentation, principalement appuyée par le fait
33:20 qu'il y a une augmentation des hôtels.
33:23 Moi je fais des déplacements toutes les semaines,
33:26 je suis logée à l'hôtel, quand je dors trois nuits à l'hôtel,
33:29 alors c'est peut-être difficile à comprendre,
33:32 mais effectivement ça coûte trois fois 200 euros.
33:35 Et du coup cette augmentation a justifié cette augmentation de 700 euros.
33:38 Voilà comment les choses ont été expliquées, et moi je l'assume.
33:41 Et je l'assume parce qu'effectivement, à un moment donné,
33:43 il y a une augmentation du coût de la vie,
33:44 mais c'est très compliqué à comprendre.
33:46 Je comprends parfois pas comment il se fait.
33:47 – Vous comprenez que ce soit un symbole,
33:48 que ce soit un ressenti ?
33:49 – Absolument, absolument.
33:50 – Un deux points deux mesures ?
33:51 – Absolument.
33:52 – Benjamin Rapico, vous voulez réagir ?
33:54 – Oui bon d'accord, vous avez répondu sur l'augmentation des frais de mandat,
33:58 c'est très bien, mais dans la deuxième partie de ma question de mot,
34:01 je vais vous demander pourquoi la fonction publique territoriale,
34:05 et encore une fois la cinquième roue du carrosse,
34:07 la fonction publique d'état hospitalière,
34:09 l'on l'a eu obligatoirement, c'est très bien,
34:11 mais pourquoi mettre la fonction publique territoriale
34:13 au bon vouloir des collectivités ?
34:15 – Pour le coup, enfin je sais pas qui veut répondre mais…
34:17 – Oui, allez-y, à peu près Martin Lévrier qui voudrait la parole.
34:20 – Non, non, non, je ne le dis pas tout simplement,
34:22 mais c'est qu'en fait, pour le coup, on est sous la constitution,
34:25 et la constitution c'est l'autonomie des collectivités territoriales,
34:29 et donc on ne peut pas…
34:31 oui je vois que ce n'est pas agréable comme réponse et je partage,
34:34 mais on est… il n'y a pas…
34:37 enfin la règle c'est que les collectivités s'administrent librement,
34:41 et donc de ce point de vue-là,
34:42 c'est pour ça que cette solution a été la solution obtenue.
34:45 – Et le résultat c'est donc que…
34:47 – C'est au bon vouloir des collectivités.
34:49 – C'est au bon vouloir des collectivités,
34:51 donc il y a des collectivités qui le font et des collectivités qui ne le font pas.
34:53 – Martin Lévrier.
34:54 – J'allais dire la même chose concernant ce point-là,
34:56 donc oui effectivement ce n'est pas agréable à entendre,
34:58 mais c'est le principe même de la constitution, de l'autonomie des collectivités.
35:01 Je reviens juste très rapidement sur les fameux 700 euros,
35:03 où nous ne mélangeons pas ce qui est un salaire de ce que c'est cette fameuse AFM.
35:09 Quelque part, c'est comme si nous étions des chefs d'entreprise,
35:12 et cet argent-là, ces 700 euros,
35:14 ça correspond au budget de fonctionnement de l'entreprise que nous représentons chacun.
35:19 C'est uniquement ça.
35:20 Et si on ne le dépense pas, on le rend.
35:22 On le rend au Sénat, donc à l'État par d'ailleurs.
35:25 – Ce n'est pas du salaire.
35:26 – Donc ce n'est absolument pas du salaire,
35:27 et c'est vraiment la logique d'un chiffre d'affaires entre guillemets.
35:30 Ça n'a pas été augmenté, moi je n'ai jamais connu augmenter,
35:33 mais je suis là que depuis 6 ans, voilà.
35:34 Donc après je ne dis pas que c'est bien, que c'est mal,
35:36 moi je ne l'ai pas demandé, j'étais comme mon collègue de droite,
35:39 j'ai été partisan de travailler plus sur le rôle de nos collaborateurs
35:43 qui ont de plus en plus de boulot,
35:46 parce que quelque part on pense que les parlementaires ne font pas beaucoup de travail,
35:49 mais moi je fais 60 000 km par an par exemple.
35:51 Donc vous voyez dans mon chiffre d'affaires, 60 000 km par an,
35:53 pourtant je suis dans les Yvelines, je ne suis pas très loin,
35:54 mais c'est un grand département.
35:56 Voilà, ça sert à ça, ça ne sert qu'à ça, et ce n'est pas du salaire.
35:59 Je tenais vraiment à le dire,
36:00 parce qu'on fait tellement de mélange sur cette histoire-là,
36:02 que oui on a été augmenté, certes, mais ça n'a rien à voir,
36:04 on ne peut pas mélanger ces sujets-là.
36:06 – C'est un moment de clarification aussi.
36:08 Merci beaucoup Benjamin pour votre témoignage et pour votre interpellation.
36:12 – Votre interpellation et votre engagement.
36:14 – Et de votre engagement également comme syndicaliste.
36:19 On a beaucoup parlé augmentation de salaire,
36:22 on a parlé du fait qu'on allait avoir un chef d'entreprise,
36:24 c'est le moment, Yann Orpin, vous êtes chef d'une entreprise de 300 salariés,
36:29 spécialisée dans le nettoyage à Lille,
36:32 la majorité de vos agents d'entretien sont au salaire minimum.
36:36 Déjà, comment est-ce que vous réagissez quand vous entendez les témoignages,
36:41 et peut-être la façon dont vivent certaines personnes au SMIC
36:45 et qu'on a pu entendre dans cette émission ?
36:47 – Bonjour à tous, je trouve ça assez triste de voir que le flux de travail ne paye pas,
36:53 qu'on ne puisse pas en tout cas se loger décemment,
36:55 qu'on ne puisse pas éduquer non plus les enfants tel qu'on le souhaite.
36:57 Il n'y a pas que le SMIC pour moi, il y a aussi l'ensemble des frais,
37:01 on en a parlé, qui sont inhérents à la vie,
37:03 et notamment sur le coût du logement qui est important,
37:06 l'inflation a impacté aussi le coût de l'alimentation,
37:09 et donc tous ces frais sont en effet ennuyeux pour pouvoir vivre décemment en France.
37:13 – Pourquoi est-ce si compliqué pour vous d'augmenter vos salariés au SMIC aujourd'hui,
37:21 parce que c'est ce que vous estimez aujourd'hui ?
37:23 – Oui c'est ça, juste pour bien comprendre le sujet pour l'entreprise,
37:28 c'est que j'ai calculé ce qui me coûtait 100 euros net aujourd'hui en charge,
37:32 et comme le sénateur Wysi le disait, ça nous coûte 130 euros pour 100 euros net.
37:37 Mais si j'augmente juste 100 euros net de plus que le SMIC,
37:40 ces 100 euros ne me coûtent plus 130 euros mais 240 euros en charge.
37:44 Et si j'intègre, parce que c'est ce qu'il faut, c'est dans le pouvoir d'achat,
37:47 la prime d'activité du salarié, ces 100 euros là en plus,
37:50 en plus de la prime d'activité que je dois payer, me coûterait 370 euros.
37:54 Donc vous imaginez bien que dans une compétitivité par rapport aux concurrents,
37:58 de passer de 1 à 3 le coût auprès de mon client, ça ne passe pas.
38:02 Donc en fait, on dépend aussi des coûts de nos clients,
38:07 et dans une compétitivité, une concurrence importante dans la partie propreté,
38:11 eh bien on a du mal à augmenter les prix, sinon ils vont voir la concurrence.
38:15 – Ça ferait quoi concrètement, vous pensez, si vous deviez, je ne sais pas,
38:19 augmenter par exemple de 100 euros vos salariés au SMIC,
38:23 ça aurait quelle conséquence sur votre entreprise ?
38:26 Vous devriez licencier, augmenter vos prix, qu'est-ce que vous feriez ?
38:29 – Non, je vous dis, on a à peu près 7% de marge.
38:32 Alors juste pour répondre au sénateur Weezy,
38:35 c'est faux que les impôts de production ont baissé, vous pouvez vérifier,
38:38 on est repassé de 3,8% à 4%, on pense que les impôts ont baissé,
38:42 mais en réalité on est toujours champion du monde par l'OCDE,
38:45 de tout ce qui est fiscalité et social, donc en fait on est toujours au maximum,
38:48 on a même augmenté de 5,5% en deux ans.
38:51 Donc l'entreprise est plus fiscalisée encore qu'on ne l'imagine.
38:54 Si j'augmente de 100 euros net mon salarié, ça augmente son salaire de 7,5%,
38:59 moi en charge ça augmente de 20%.
39:01 Avec 7% de charge, vous imaginez bien que je ne peux pas réussir
39:04 à augmenter tous les salariés de 100 euros, puis il y a un autre effet.
39:07 Si on augmente, on désmicardise en effet les salariés,
39:09 c'est-à-dire qu'on va plus être à 17% de SMIC, mais on va monter peut-être à 30%,
39:13 puisque si on veut avoir un vrai Delta, il faut augmenter tout le monde de la même manière,
39:16 si on veut garder une grille de salaire qui est cohérente,
39:18 et pour motiver aussi les gens qui vivent vraiment du fruit du travail.
39:22 Je ne peux juste pas le faire, sinon je ne gagnerais plus d'argent, j'en perdrais,
39:27 et l'entreprise pour être bien gérée doit avoir du résultat.
39:29 Donc désmicardiser votre entreprise,
39:32 comme le Premier ministre a annoncé vouloir désmicardiser la France,
39:35 vous ne voyez pas trop comment faire ?
39:37 Il y a peut-être deux choses à travailler.
39:40 La première, c'est de créer une linéarité des charges,
39:43 puisque vous voyez bien, il y a un décrochage,
39:45 si je veux augmenter de 100 euros le collaborateur,
39:47 donc si on le linéarise, ce sera peut-être plus simple.
39:49 Et la deuxième chose, c'est qu'on a aussi les charges salariales.
39:53 Les sénateurs pourraient peut-être voter dans une loi de finances
39:56 un élément qui permettrait d'alléger les charges salariales des salariés,
40:00 pour augmenter le net, sans que ça ne m'impacte sur les charges patronales.
40:04 Et puis c'est un sujet dont on parle depuis longtemps, c'est la télévénie sociale.
40:07 C'est que c'est l'ensemble des personnes qui profitent aussi d'un certain nombre
40:11 de la maladie haute qui est payée uniquement aujourd'hui par l'entreprise,
40:14 pour que l'effort national soit fait par l'ensemble des personnes,
40:16 au profit des salariés qui travaillent,
40:19 et donc qui permettraient d'avoir un salaire net plus important.
40:21 Vous l'avez cité deux fois, donc je donne d'abord la parole à Alexandre Wizi,
40:24 puisqu'il vous interpelle cet entrepreneur aussi.
40:27 Il a raison. Bonjour monsieur.
40:29 Je vois plusieurs éléments dans ce que vous avez évoqué.
40:34 La première chose, c'est que lorsque vous dites,
40:36 ma question c'est d'abord la question de la concurrence qu'il y a autour de moi.
40:40 Et ça je veux évidemment bien l'entendre,
40:42 et ça fait partie des données qu'il faut prendre en compte.
40:44 Mais justement, j'ai envie de dire, lorsque vous augmentez le SMIC,
40:48 vous avez le même niveau de « terrain de jeu » que vos concurrents,
40:52 puisqu'en fait vous mettez tout le monde sur le même point de départ.
40:56 Donc c'est ça que permet aussi cet outil qui est l'augmentation du SMIC,
41:00 c'est qu'elle permet de remettre tout le monde au même niveau de terrain de jeu.
41:04 Vous avez dit un truc qui est très juste, me semble-t-il,
41:06 c'est en effet la manière dont on lisse les baisses de cotisation
41:10 entre 1 et 1,6 SMIC et au-delà, qui crée des effets de seuil,
41:13 donc sans doute qu'il faut retravailler ça.
41:16 Moi je veux bien entendre ça avec vous,
41:18 de dire qu'en fait à des endroits ça va commencer à coûter beaucoup plus cher à l'entreprise.
41:22 Et ça augmente d'un coup en fait.
41:24 Alors c'est pas d'un coup, parce qu'en fait c'est déjà lissé,
41:26 enfin il y a déjà une tentative de lisser, ce serait malhonnête de le dire autrement,
41:28 mais il y a quand même un travail à faire sur la manière dont les choses vont être,
41:32 mais vous voyez en fait il y a aussi une logique un peu macro-économique
41:36 qu'il faudrait qu'on entende, c'est-à-dire qu'en fait,
41:38 si les salariés sont bien payés, ils consomment des choses,
41:41 ça fait de la production, enfin il y a un cercle vertueux de l'augmentation de salaire.
41:45 Et vous avez raison de dire qu'il y a un effet de tassement quand on augmente le SMIC,
41:49 mais il y a aussi un effet d'entraînement, toutes les études le montrent, sur les salaires.
41:54 Donc ça se tasse un peu, mais ça crée aussi une dynamique salariale sur le reste de la chaîne,
41:58 parce qu'au niveau de la branche, je ne sais pas d'ailleurs,
42:00 vous n'avez pas tellement évoqué la question de la branche et des négociations,
42:02 ça pourrait être intéressant de nous dire comment les négociations salariales se passent au niveau de la branche,
42:06 si vous savez ou si vous voyez ça, mais ce serait intéressant de voir,
42:10 parce qu'en fait s'il y avait une volonté collective du secteur,
42:12 ça peut aussi accompagner des augmentations de salaire.
42:15 Voilà moi, je suis pour vous répondre.
42:16 Comment ça se passe les négociations de branche ?
42:18 Aujourd'hui nous, on est un peu au-dessus du SMIC en termes de salaire de nos collaborateurs,
42:25 mais le sujet n'est pas là, c'est si j'augmente le salaire de mes salariés,
42:28 non je ne vais pas avoir un effet d'entraînement,
42:30 c'est qu'aujourd'hui j'ai des clients qui réduisent la partie propreté,
42:33 nettoyage, en disant voilà moi j'ai un budget que je ne vais pas bouger,
42:36 donc vous allez faire moins, et donc en faisant moins,
42:38 notre chiffre d'affaires ne bouge pas, et la marge non plus.
42:41 Donc théoriquement en effet vous avez raison,
42:42 mais pratiquement nos clients ne réagissent pas de la même manière.
42:45 Alors avant de vous passer la parole, il y a Océane qui est resté avec nous,
42:48 qui a témoigné tout à l'heure, et qui voudrait aussi vous interpeller,
42:53 Yann Orpin, allez-y Océane.
42:56 J'entends bien vos difficultés et tout ça pour augmenter le salaire de vos employés,
43:01 mais le problème c'est que nous derrière, ça ne suit pas.
43:05 On galère et on fait des économies sur des trucs où on ne pourrait pas faire d'économie en temps normal.
43:11 Je sais que mes parents actuellement sont pareils au SMIC,
43:15 là la voiture elle a plein de problèmes, il n'y a plus de voiture.
43:19 On ne peut même plus s'en racheter une, on ne peut pas faire des réparations ni quoi que ce soit,
43:22 c'est des imprévus dont on a besoin.
43:25 Il faut augmenter le SMIC en fait, pour qu'on puisse pallier aux imprévus.
43:29 C'est comme ça.
43:30 Alors vous avez raison, je comprends votre situation,
43:32 on n'est pas forcément obligé d'augmenter le SMIC,
43:34 mais peut-être que si, avec l'endettement public qu'on a, qui est quand même colossal,
43:38 si l'État faisait des efforts, il pourrait aussi de cette baisser les charges salariales.
43:41 Et sans modifier le salaire brut, vous pourriez avoir un salaire net plus important.
43:45 Il faut aussi que l'État qui veut dé-SMICardiser, prenne ses responsabilités
43:49 et puisse travailler sur cette partie de charges salariales,
43:51 avec d'autres moyens de le financer, avec la collectivité, avec une TVA sociale par exemple,
43:55 qui permettrait d'augmenter uniquement la partie nette du salaire,
43:59 sans toucher aux charges maternelles.
44:01 Martin Lévrier, vous vouliez répondre. L'État qui veut dé-SMICardiser,
44:04 doit prendre ses responsabilités.
44:05 Alors, deux choses, dans le mot dé-SMICardiser, je n'ai pas compris ce que vous dites.
44:09 Je ne crois pas qu'il ait, je suis même certain que Gabriel Attal a clairement dit
44:12 qu'il ne voulait pas toucher au SMIC en tant que tel.
44:15 Mais c'était justement toute cette logique de mouvements, de flux, de plafonds,
44:18 qui créent les conséquences de ce tassement avec l'augmentation du SMIC
44:22 qui fait qu'on tasse les salaires et que ça n'augmente pas, c'est ça le problème.
44:25 La progression des bas salaires.
44:26 C'est la progression des bas salaires qui fait qu'il y a tellement d'exonération en bas
44:28 que dès qu'on veut passer, vous l'avez dit d'ailleurs, pour une personne au SMIC
44:32 que vous augmentez de 100 euros, ça vous coûte, alors je n'ai pas très bien compris votre calcul
44:35 parce que vous avez rajouté la prime d'activité, ça m'a échappé, je n'ai pas compris pourquoi.
44:38 Moi j'étais à 240 euros, mais ce que vous n'avez pas dit,
44:40 c'est que le salarié, lui, perd une part de sa prime d'activité.
44:44 Mais c'est ça qu'il disait, pour pouvoir compenser cette perte.
44:46 Au lieu d'avoir 100 euros, non mais il ne perd pas tout là, il ne perd pas tout, il perd 40 euros.
44:49 Donc globalement, il a une augmentation de 60 euros, là où on veut lui donner 100
44:53 et vous, ça vous coûte 250 de plus pour faire vite.
44:55 Et ça, ce n'est plus possible, on ne peut pas continuer comme ça.
44:58 Si je m'attends au poids d'achat du salarié, ça me coûte 370 euros
45:00 si je veux maintenir la prime d'activité qu'il perd.
45:02 Et c'est donc moi qui dois lui rendre pour qu'il ait vraiment son augmentation.
45:06 Il ne perd pas tout, il ne perd que 40 euros, pas la totalité,
45:08 puisque là aussi, ça marche par palier.
45:10 J'ai compté que cette partie-là aussi.
45:12 C'est pas grave.
45:14 Pour ce qui est de la baisse des charges, ça a été fait en 2018.
45:18 On l'a oublié, c'est même passé quasiment inaperçu, c'est assez étonnant comme principe,
45:22 mais on a baissé de 3% les charges sociales en transférant la Sédic, etc. sur la CSG.
45:28 Pour les actifs, le salaire net sans que l'entreprise mette un centime a été augmenté de 3%.
45:34 Donc ça a été fait, le résultat n'a pas été vraiment à la hauteur.
45:38 Et après, quand on dit l'État doit prendre en charge, etc.
45:40 Moi, je rappelle, on en a parlé tout à l'heure des collectivités,
45:43 que dans les charges de l'État et globalement des collectivités,
45:48 je pense au monde hospitalier ou aux enseignants,
45:50 depuis 2020, on a augmenté considérablement des salaires
45:53 qui n'avaient jamais été augmentés depuis tellement longtemps qu'on ne pouvait plus recruter.
45:57 C'est 9 milliards de mémoire de salaire par an en plus dans la fonction hospitalière.
46:05 9 milliards.
46:06 Chez les enseignants, on a dépassé le milliard et demi,
46:10 parce que les salaires étaient tellement bas.
46:11 Donc ça, il faut bien le payer aussi.
46:13 Et l'État, il a peut-être 300 milliards, 3 000 milliards, pardon, d'emprunts.
46:18 Il ne peut pas tout faire.
46:19 Donc l'entreprise doit aussi avoir son rôle, doit aussi avoir une dynamique sur les salaires.
46:23 Et je pense chez vous aussi, une grande dynamique sur le problème de la précarité liée au temps partiel.
46:27 Mais ça, c'est votre activité qui le veut.
46:29 Un dernier mot, Frédéric Puissa, sur cette situation.
46:31 Je pense qu'il faut vraiment déconnecter le SMIC,
46:35 qui est ce qu'on appelle le salaire décent,
46:37 qui est, je le rappelle, c'est difficile à entendre,
46:39 mais un des plus hauts d'Europe.
46:41 C'est le salaire décent, et il faut le déconnecter de ce qu'on appelle le revenu
46:45 qui correspond au travail, qui renvoie une notion de rentabilité.
46:48 Vous, monsieur, vous êtes chef d'entreprise,
46:50 vous avez une notion de rentabilité, non pas pour effectivement vous enrichir,
46:54 mais pour pouvoir garder votre société et pouvoir continuer votre activité.
46:58 Et c'est en ce sens où je ne partage pas votre point de vue.
47:00 C'est-à-dire qu'à un moment donné, ce salaire décent,
47:03 effectivement, il ne permet pas à chacun de vivre dans une période de forte inflation,
47:07 mais après tout ce qui relève effectivement du monde économique,
47:10 c'est renvoyé à des branches, c'est renvoyé à des notions de rentabilité.
47:13 Et très honnêtement, je ne vois pas bien comment le Premier ministre
47:16 va pouvoir mettre en application ce qu'il indique.
47:19 Parce que moi, sur la partie d'espicardisation,
47:21 vous avez peut-être compris des choses différentes, moi je n'ai rien compris.
47:24 Je ne vois pas du tout ce qu'il veut en faire. Je vous dis comme je le pense.
47:26 Vraiment en quelques secondes, Alexandre Wisy.
47:28 En deux mots.
47:29 Parce qu'on a encore un témoignage.
47:31 Pas de problème. Le salaire décent, c'est le salaire qui permet de vivre décemment.
47:35 Vous avez entendu les gens qui ont témoigné il y a quelques instants.
47:38 Ils ne peuvent pas vivre décemment.
47:40 Donc si c'est le salaire décent, aujourd'hui au niveau où il est, il n'est pas décent.
47:44 En plus, je dis un mot sur ce qui a été dit sur la dépense publique, monsieur.
47:47 On a un désaccord, je le reconnais.
47:50 Aux Etats-Unis, il y a 110 % d'aides dans le PIB,
47:53 ils font 8 % de déficit public par an et ils font repartir leur croissance à fond les ballons
47:56 parce qu'ils ont décidé de réindustrialiser et de travailler comme ça.
47:59 Au Japon, il y a 250 % d'aides publiques et personne n'est mort.
48:02 La question, c'est la stratégie de l'État.
48:04 Ce qu'il fait, ce qu'il fait pour réussir à faire repartir l'économie.
48:08 Parce que quand vous avez un plan de relance massif,
48:10 ça fait aussi quelque chose de bénéfique pour les entreprises comme la vôtre.
48:14 Allez, on va conclure cette émission avec cette semaine, vous le savez,
48:18 l'agriculture qui est encore une fois au premier plan
48:21 et nous sommes en vision avec un chef d'exploitation,
48:24 nous sommes avec Denis Lelouvier.
48:26 Vous êtes producteur de lait et de fromage,
48:28 vous êtes l'un des derniers à fabriquer du camembert fermier dans le Calvados.
48:32 Et vous, si vous pouviez vous payer un SMIC, ça serait déjà une grande avancée.
48:38 Quelle est votre situation aujourd'hui ?
48:41 Bonjour à tous.
48:45 Ma situation aujourd'hui, elle est compliquée
48:48 du fait d'avoir fait des investissements conséquents sur l'entreprise.
48:53 Et aujourd'hui, nous on ne se verse pas un salaire,
48:57 on se verse un prélèvement que l'on prend sur l'exploitation pour essayer de faire vivre.
49:03 Je suis associé avec ma conjointe
49:06 et tous les deux on prélève 2000 euros par mois pour vivre avec trois enfants.
49:13 Et vous avez en même temps trois salariés que vous payez au SMIC.
49:19 Et tout cela sachant que vous travaillez entre 50 et 70 heures par semaine,
49:24 parce que c'est 10 heures par jour et parfois le week-end compris.
49:27 Alors on travaille avec du vivant, les vaches il faut qu'elles soient traites,
49:31 en tout cas dans mon activité à moi.
49:34 Et donc cela nous oblige c'est vrai à travailler 7 jours sur 7.
49:38 Alors avec une organisation, puisqu'il faut quand même essayer de vivre
49:43 et de profiter un peu avec nos enfants et de cette vie de famille.
49:47 Oui on a trois salariés qui nous permettent de se libérer un peu le week-end,
49:52 mais que je dois payer en plus de leur semaine et qu'ils le font de leur plein gré.
50:03 – Vous êtes surpris par les témoignages qu'on a pu entendre de tous ceux qui expliquent
50:08 et très clairement qu'ils ne s'en sortent pas au SMIC,
50:11 vous qui gagnez encore moins même si c'est un prélèvement comme vous l'avez dit ?
50:17 – Alors je n'ai pas eu l'occasion d'entendre tous les témoignages,
50:21 je ne sais pas il y a eu un problème avec les oreillettes,
50:24 le 2 et le 3 je n'ai pas pu entendre.
50:27 Après je compatis, chacun a son portefeuille
50:31 et doit faire avec ce qu'il gagne.
50:35 Maintenant il faut aussi, je pense que le coût de la vie il a changé,
50:39 il a augmenté mais aussi notre façon de vivre a augmenté
50:43 qui fait qu'on paie certaines choses beaucoup trop cher.
50:48 – Vous pensez à quoi ? Vous parlez des abonnements VOD
50:52 pour reprendre une phrase qu'Emmanuel Macron n'a pas dite ?
50:55 – Aujourd'hui c'est clair qu'on incite quand même les gens à aller consommer
51:01 plutôt du loisir que de faire dépenser de l'argent en plus,
51:08 alors qu'avant, quand je prends certaines années,
51:13 on ne partait qu'une seule fois en vacances, une semaine et c'était tout.
51:17 Aujourd'hui peut-être qu'on part deux fois en vacances,
51:21 il y a des choses qui sont peut-être un petit peu,
51:24 quand on regarde le schéma, les gens profitent quand même de certaines choses.
51:31 – Estimer que les gens ont besoin de superflu aujourd'hui,
51:34 je tiens à dire quand même que les femmes que nous avons écoutées tout à l'heure,
51:38 notamment la deuxième nous a bien expliqué qu'elle ne pouvait pas partir en vacances aujourd'hui,
51:42 mais de façon plus… dans l'ensemble vous estimez qu'on a plus besoin de superflu ?
51:48 – Oui, on consomme beaucoup plus de superflu et c'est un peu révoltant
51:54 parce que je pense qu'on n'a pas besoin de tout ça,
51:58 enfin pas besoin, quand on voit justement des gens qui n'ont pas non plus les moyens,
52:04 moi je suis en dessous du niveau du SMIC, on a dit 2000 euros pour nous deux
52:10 et pour 140 heures dans la semaine,
52:13 donc on se serre les coudes et on se fait des sacrifices pour…
52:18 on ne va pas faire non plus de prêts famille pour partir en vacances,
52:24 on va se sacrifier pour essayer de gagner plus,
52:28 et puis si je peux à un moment donné, je vais aussi,
52:32 même si mes trois salariés sont au SMIC,
52:34 à un moment donné ils vont vouloir évoluer dans l'entreprise,
52:38 ils vont vouloir une augmentation,
52:40 et donc je vais encore plus me sacrifier,
52:43 on va encore plus se sacrifier avec mon épouse
52:45 pour pouvoir éventuellement aujourd'hui garder nos salariés,
52:50 alors par contre c'est clair que si on augmente le SMIC à 1600 euros,
52:55 moi aujourd'hui je ferme la porte.
52:57 – Oui, si vous demandiez une augmentation, vous leur demanderiez quoi ?
53:02 de travailler un petit peu plus aussi ?
53:04 ou est-ce que vous pensez que vous êtes en position de leur demander ça ?
53:07 – Eh bien c'est ce que aujourd'hui moi je fais,
53:10 dans notre organisation on a besoin donc,
53:14 comme je l'ai dit, de travailler vache le samedi et le dimanche,
53:19 c'est soit je fais tous les week-ends, je travaille 7 jours sur 7,
53:24 soit aujourd'hui j'ai demandé pour essayer d'être un peu avec mes enfants et en famille,
53:30 je demande à mes salariés de faire un week-end,
53:33 et donc de payer ce week-end,
53:35 ils prennent une journée de repos en semaine juste avant,
53:39 et le dimanche est payé en heures supplémentaires,
53:43 donc il y a forcément un gain d'argent supplémentaire dans un premier temps.
53:50 – Frédéric Puissa, c'est ça la solution,
53:52 travailler un peu plus ou travailler le week-end du coup ?
53:55 – Il y a beaucoup de gens, enfin Océane le disait tout à l'heure,
53:58 quand elle disait, elle est dans le commerce, elle travaille le dimanche,
54:00 donc elle essaie effectivement de bricoler des solutions pour améliorer son salaire,
54:04 mais moi j'entends ce que vous dites,
54:06 quand vous dites si on augmente à 1 700 euros le SMIC, je ferme la porte,
54:10 et c'est vrai, c'est bien ça, c'est la difficulté entre décorréler le SMIC
54:14 de la notion de rentabilité de l'activité,
54:16 vous trouvez, retrouvez une rentabilité,
54:18 et c'est ça l'enjeu qui vous permettra d'augmenter vos salariés,
54:21 je suis sûre que vous serez le premier heureux à augmenter vos salariés,
54:23 je n'ai pas de doute là-dessus.
54:25 – Alexandre Wouizy, et aussi sur le sentiment que nous a livré Denis,
54:28 sur l'idée que pour lui certains vivent aussi avec du superflu,
54:33 aujourd'hui lui qui se contente de très peu.
54:36 – En tout cas moi quand j'entends les témoignages d'Océane
54:41 qui racontent ce que sont ses trajets quotidiens,
54:43 et quand j'entends, je ne sais plus le nom de notre deuxième…
54:45 – Cindy.
54:46 – Cindy, notre deuxième intervenante qui raconte comment elle se prie
54:49 elle-même pour ses enfants et qu'ils ne peuvent tout de même pas partir en vacances,
54:52 je n'ai pas l'impression qu'on soit dans le superflu,
54:54 je le dis comme je le pense, et donc ça je suis très clair là-dessus.
54:58 En revanche j'entends ce qui est dit sur la question du revenu
55:01 et de la manière dont on peut payer des salariés.
55:04 On voit que dans l'agro-industrie, il y a des marges assez vérifiées
55:08 qui se font alors que les prix agricoles sont très bas.
55:12 Donc il y a quand même toute une économie à repenser dans votre secteur,
55:15 je ne sais pas si vous en êtes d'accord, sur le partage de la valeur
55:18 entre les différentes banques, et peut-être que tout ça vous permettrait
55:20 d'augmenter vos salariés si vous souhaitez le faire,
55:22 si vous pensez qu'il faut le faire, voilà.
55:25 Il y a quand même une question de partage de la valeur dans le secteur.
55:27 Allez, Martin Lévrier, votre réponse qui sera aussi une forme de conclusion à cette émission.
55:31 Alors si je dois conclure, d'abord je vous remercie,
55:34 parce que vous êtes un passionné monsieur,
55:36 et comme vous êtes passionné, vous aimez éperdument votre travail
55:40 et tout ce qui est autour de votre travail,
55:42 et c'est peut-être pour ça que vous avez eu ces réactions de dire
55:44 que les gens qui gagnent le SMIC pourraient peut-être avoir,
55:47 ou dépenser leur argent parfois sur des besoins qui ne sont pas essentiels.
55:51 Vous avez la chance d'être passionné et d'avoir un métier passionnant.
55:54 Je crains malheureusement que beaucoup de gens aujourd'hui n'aient plus cette chance
55:57 et aient un travail pour vivre ou pour survivre,
56:00 et que donc le regard qu'ils ont par rapport à leur travail n'est pas tout à fait le même
56:03 et cherchent obligatoirement un peu autre chose à côté
56:06 parce qu'ils n'ont pas cette passion, parce qu'ils n'ont pas la chance d'avoir cette passion.
56:08 Allez, pour conclure, je vous demande chacun un petit mot,
56:11 mais sur l'ensemble de l'émission, pas forcément pour revenir seulement sur le cas de Denis.
56:16 Non, non, mais globalement vous avez eu des intervenants qui étaient remarquables de dignité
56:20 et qui posent un vrai problème,
56:22 mais tant que nous n'aurons pas baissé la dépense publique,
56:25 laissé la latitude aux chefs d'entreprise d'augmenter leur salaire,
56:28 nous n'améliorerons pas le pouvoir d'achat. Voilà ma philosophie.
56:31 Alexandre Ouisy, le mot de la fin.
56:33 Le mot de la fin, c'est que moi j'ai trouvé cette émission incroyablement intéressante, vraie,
56:38 et moi j'en reviens à la question du salaire, de la dignité du salaire,
56:42 du partage de la valeur entre les uns et les autres,
56:45 sans lesquels il n'y aura pas d'émancipation possible pour les uns et pour les autres
56:49 pour pouvoir vivre dignement avec ses enfants, pour pouvoir aller travailler,
56:52 pour pouvoir avoir un logement. Sans ça, ça n'existe pas.
56:55 Merci. Merci à nos cinq citoyennes et citoyens d'avoir joué le jeu du témoignage et de l'interpellation.
57:02 Merci à nos trois élus d'avoir joué celui de l'échange franc et direct.
57:05 Merci à vous d'avoir suivi cette émission.
57:08 On se retrouve le mois prochain pour un nouveau numéro de Dialogue Citoyen.
57:11 Alors oui, ils ont répondu. Est-ce que c'est la réponse que j'attendais ? Pas vraiment, non.
57:17 Mais ça fait du bien quand même d'avoir un débat, de pouvoir en discuter avec des personnes qui ont le pouvoir quand même,
57:24 d'avancer les choses.
57:25 Je n'ai pas l'espoir que les choses changent, et de toute façon, ça ne va pas changer rapidement.
57:30 Donc quoi qu'il arrive, ma situation pour l'instant, elle reste au stand-by, on va dire.
57:36 Sur la réponse des sénateurs, j'ai été un petit peu déçu forcément sur la réponse à ma question.
57:43 Qu'on me dise que les hôtels augmentent, mais moi je suis désolé, pour un agent qui travaille au SMIC,
57:48 son 40 ans, il augmente aussi.
57:50 [Musique]

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