Dans son édito du 28/02/2024, Paul Sugy revient sur Emmanuel Macron.
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00:00 Oui, Romain, alors je vais laisser à ceux dont c'est le métier d'analyser la justesse ou la pertinence de cet effet de manche,
00:05 deux ans après le début de l'invasion russe en Ukraine,
00:07 mais qu'Emmanuel est tort aux raisons sur le fond,
00:10 politiquement la forme est désastreuse.
00:12 Après avoir fait bondir l'ensemble des oppositions d'abord,
00:15 le président de la République a mis lui-même en scène son isolement diplomatique.
00:18 Il avait été celui qui, jusqu'au bout presque,
00:21 disait qu'il fallait dialoguer avec Vladimir Poutine.
00:24 Il avait même dévoilé, sans l'avis du président russe,
00:26 le contenu de certains de ses échanges téléphoniques pour les besoins de ses clips de campagne.
00:30 Emmanuel Macron était déjà seul lorsqu'il disait qu'il ne fallait pas humilier la Russie.
00:34 Il est encore seul à présent à dire que les pays occidentaux pourraient aller se battre sur le sol ukrainien.
00:39 L'effet semble contre-productif.
00:41 Plutôt que d'impressionner le Kremlin, Emmanuel Macron rassure Vladimir Poutine
00:44 en forçant tous les pays occidentaux à déclarer l'un après l'autre qu'ils ne mourront pas pour Kiev.
00:49 C'est l'inverse d'une démonstration de force, mais surtout aux yeux des Français,
00:52 il est difficile de ne pas passer une fois de plus pour un président trop bavard.
00:56 Le président du bavardage, vous pensez qu'Emmanuel Macron devrait parler moins ?
01:00 - Alors, moins, pas forcément, mais en tout cas mieux.
01:02 Emmanuel Macron a toujours été subjugué par l'effet de sa propre parole.
01:06 Il sait que le charme opère par elle, et plusieurs fois, d'ailleurs, le miracle s'est produit.
01:09 En privé, tous ses interlocuteurs vous disent qu'il a du charisme,
01:13 et en public, ses envolées lyriques de campagne ont contribué,
01:16 notamment à le faire élire président en 2017.
01:18 Mais Emmanuel Macron y a pris goût,
01:20 et l'exercice de la présidence se fait en usant et en abusant de cette figure rhétorique qui est l'hyperbole.
01:26 Quand il faudrait dire un peu, le président de la République pense beaucoup, et il dit énormément.
01:30 La forme supplante le fond, le plaisir du verbe, ou plus encore l'éclat de voix,
01:34 parfois le coup de colère, on l'a vu, ou la transgression, finit par tout emporter.
01:37 Un jour, il dit qu'il veut donc emmerder les non-vaccinés,
01:40 un autre, il demande avec naïveté qui aurait pu prédire l'arrivée de la crise climatique,
01:43 et je vous passe le fleurilège bien connu désormais,
01:46 des petites phrases des débuts sur ceux qui ne sont rien, etc.
01:49 Chaque fois Emmanuel Macron pense flatter une partie, une grande partie de la majorité silencieuse
01:53 qui pense supposément comme lui,
01:55 mais à force de maladresse ou même d'exagération dans le propos,
01:58 il finit par faire l'unanimité contre lui.
02:00 Reste que, en politique intérieure, c'est une maladresse, en diplomatie c'est grave.
02:04 Un président ne devrait donc pas dire tout ça ?
02:08 Non, et vous avez raison de faire allusion dans votre formule à François Hollande,
02:11 car on a un peu l'impression que tout ceci nous ramène à François Hollande.
02:15 La différence peut-être, c'est que lorsque François Hollande est piégé par ses propos
02:18 sur l'ascendant, ou lorsqu'il commet l'erreur d'avouer à des journalistes
02:21 qu'il a fait tuer des personnes à l'étranger par ses services secrets,
02:24 tout ceci se passe dans un contexte privé,
02:26 dans lequel le président n'a pas compris que ses propos pourraient être cités,
02:29 soit par son ex-épouse, soit par des journalistes qui ont endormi sa confiance.
02:33 Alors qu'Emmanuel Macron, lui, se piège lui-même en public,
02:36 lorsqu'il est bien certain que tous les micros sont ouverts et l'enregistre.
02:39 [Musique]
02:43 [SILENCE]