Avec Henri Leclerc, avocat, président d'honneur de la Ligue des Droits de l'Homme (LDH).
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00:00 [Musique]
00:04 L'ancien garde d'Esso, celui à qui on doit l'abolition de la peine de mort en France.
00:09 On en parle avec l'un de ses confrères et l'un de ses amis. Bonjour Henri Leclerc.
00:13 Bonjour.
00:14 Avocat, président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme,
00:17 vous avez plaidé avec Robert Badinter, vous avez parfois plaidé contre lui
00:22 et vous avez aussi été son avocat. Vous perdez un ami aujourd'hui.
00:26 Bien sûr je perds un ami, un ami proche et un ami...
00:31 Avec le cas que je partageais beaucoup de choses.
00:33 Beaucoup de choses et notamment beaucoup de combats.
00:36 Oui, des combats. Nous étions d'accord, je dirais, sur...
00:42 non pas forcément sur tout, mais sur les grands principes,
00:45 sur la déclaration des droits de l'homme que nous chahissions toujours,
00:49 tous les deux, nous aimions ce texte magnifique.
00:52 Et Robert a partagé des combats et surtout a mené des combats
00:59 qui sont les combats que j'estime essentiels.
01:03 Alors des combats évidemment qui nous reviennent tous,
01:05 parce que c'est aussi une page d'histoire que la France tourne
01:09 avec une certaine émotion ce matin.
01:11 Je vous propose de réécouter ce discours de Robert Badinter à l'Assemblée nationale.
01:15 Aussi terrible, aussi odieux que soient leurs actes,
01:19 il n'est point d'homme en cette terre dont la culpabilité soit totale
01:25 et dont il faille pour toujours désespérer totalement.
01:30 Et quant à la justice, aussi prudente soit-elle,
01:35 aussi mesurée, angoissée que soient les femmes et les hommes qui jugent,
01:42 rien ne peut changer que cette justice soit humaine et par conséquent faillible.
01:49 Alors Robert Badinter, garde des Sceaux à l'époque, on est en 1981,
01:53 était minoritaire, tout comme vous qui étiez d'accord avec lui dans l'opinion publique
01:57 pour prôner l'abolition de la peine de mort.
02:00 Est-ce qu'aujourd'hui, plus de 40 ans après, vous vous dites que l'opinion publique vous suit ?
02:06 Je ne sais pas, je ne sais pas, j'entends des murmures, je lis des comptes rendus,
02:15 il semblerait qu'il y ait une hésitation.
02:18 Alors, bien sûr, le problème est posé ici comme partout, toujours,
02:23 cependant je crois que ce progrès de l'humanité qui a consisté à arrêter cette barbarie
02:30 qui consiste à livrer un homme, un homme désarmé, au moment où il est jugé,
02:36 un homme qui n'a rien, qui est un homme dans toute sa plénitude,
02:41 quelles que soient les horreurs qu'il ait faites,
02:43 le livrer à un bâlin bourreau qui va le couper en deux, mais qui pourrait aussi le fusiller, le pendre,
02:49 que sache encore le nombre de méthodes pour mettre à mort les gens dans des conditions barbares,
02:57 qui existent depuis l'antiquité, et cependant je pense que si l'humanité fait quelques progrès,
03:06 en voilà un qui est important.
03:08 Certes, nous n'évitons pas par la peine de mort que des actes barbares soient commis,
03:14 mais répondre à ces actes barbares par le massacre d'un homme, à ce moment-là, désarmé, déludé,
03:22 c'est quelque chose d'insupportable.
03:24 - Et pourtant prenons un exemple tout récent, que n'a-t-on pas lu dans les commentaires,
03:29 que n'a-t-on pas entendu en parlant autour de nous, lorsque cette information surprenante était parvenue à nos oreilles,
03:37 le condamné Nord-Hollandais qui a réussi à concevoir un enfant en prison,
03:43 la première remarque qu'on a vue par tous c'était "il aurait mérité la peine de mort".
03:46 Un jour ou l'autre, croyez-vous que la peine de mort puisse être rétablie en France Henri Leclerc ?
03:52 - Ma conviction et celle de Robert était que le pas fait était indispensable et nécessaire,
04:01 et que chacun allait s'en apercevoir.
04:04 L'impression que nous avions tous les deux, d'ailleurs, je me rappelle la dernière fois que nous en avons parlé,
04:10 l'impression que nous avions c'est que le public, l'opinion publique,
04:15 s'était rendu compte que la suppression de la peine de mort n'avait rien changé avec la criminalité,
04:22 et que la criminalité, sur un certain nombre de sujets, avait continué à m'avoir reculé légèrement.
04:33 Donc elle était inutile.
04:36 La peine de mort n'a jamais sauvé quelqu'un, contrairement à ce qu'on dit.
04:41 Je ne vais pas reprendre l'argument que Robert a si bien développé dans son discours.
04:48 - Je vous propose qu'on l'écoute d'ailleurs.
04:50 Il parlait du procès Buffet-Bontemps parmi les deux derniers condamnés à mort en France.
04:56 - Sachez bien que dans la foule qui a trois criait au passage de Buffet-Bontemps autour du palais de justice
05:05 à mort Buffet, à mort Bontemps, se trouvait un jeune homme qui s'appelait Patrick Henry.
05:12 Croyez-moi, à ma stupéfaction quand je l'ai appris, j'ai compris ce que ce jour-là pouvait signifier
05:18 la valeur dissuasive de la peine de mort.
05:22 - Et en d'autres termes, un futur meurtrier était partisan de la peine de mort pour d'autres meurtriers.
05:27 C'est ce que disait ce jour-là à l'Assemblée nationale Robert Badinter.
05:31 Parlons aussi un petit peu du Robert Badinter plus intime que vous avez connu.
05:36 Je le dis, c'était votre ami, vous avez aussi été son avocat,
05:38 notamment dans un procès célèbre que lui avait intenté le négationniste Robert Faurisson.
05:43 Il l'attaquait en diffamation parce que Robert Badinter l'avait traité de faussaire de l'histoire.
05:48 Ça faisait quoi d'être l'avocat de son ami et en même temps l'avocat de Robert Badinter ?
05:53 - C'est un très grand honneur.
05:57 Mais en outil par l'amitié, c'est-à-dire que nous étions côte à côte.
06:04 Et moi je me rappelle bien sûr ce mot, je l'ai défendu, mais il n'était pas très difficile à défendre.
06:13 Et bien entendu, Faurisson a été non seulement perdu son procès,
06:16 mais a été condamné à dénommage d'intérêt.
06:19 Mais l'intervention de Robert Badinter lui-même dans ce procès, je m'en souviendrai toujours.
06:28 Brusquement, alors qu'il était en train de parler, les souvenirs lui sont revenus.
06:33 Et il a parlé de sa grand-mère, non pas celle sur laquelle il avait écrit, mais l'autre.
06:39 Il a dit, je me souviendrai toujours, j'avais 14 ans.
06:42 Ils sont venus la chercher, ils l'ont descendu sur une civière.
06:46 Ils l'ont envoyé à Nancy, on ne sait plus après ce qu'elle est devenue.
06:51 On le sait aujourd'hui, elle est morte au choui.
06:54 Mais c'est ce moment où il a dit, il s'est tendu le doigt vers Faurisson.
07:00 Il a dit, c'est la raison pour laquelle jamais je ne cesserai le combat contre les hommes,
07:06 contre vous, qui misent l'essentiel de notre vie.
07:10 C'est absolument extraordinaire.
07:13 Et ce moment pathétique où il se défendait lui-même, mais sortant lui-même,
07:19 il accusait ceux qui nient l'horreur, c'est bien entendu lui qui a gagné son procès.
07:26 - Un des nombreux combats qui sont restés dans l'histoire, en quelque sorte, des combats de Robert Beninter.
07:31 Merci Henri Leclerc d'être intervenu ce matin sur Sud Radio.
07:35 Je rappelle que vous êtes avocat, évidemment, vous étiez un ami de Robert Beninter.
07:39 Vous êtes par ailleurs le président d'honneur de la Ligue des droits de l'homme.
07:42 Un hommage national sera donc rendu à l'ancien garde des Sceaux, Robert Beninter.
07:45 Et tous les Français qui le souhaitent peuvent d'ailleurs lui rendre hommage ce week-end.
07:49 C'est ce qu'on a appris récemment.