• il y a 11 mois
Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, est l'invitée de Mathilde Munos à 6h20. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-du-lundi-22-janvier-2024-5823650

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Transcription
00:00 Je vous souhaite une bonne fin de journée et à la prochaine !
00:04 Merci d'avoir regardé cette vidéo !
00:09 [Musique]
00:37 6h21, faisons du sexisme de l'histoire ancienne !
00:42 C'est le slogan que lance aujourd'hui le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes,
00:46 le HCE qui publie aujourd'hui son sixième rapport annuel sur l'état du sexisme en France.
00:51 Et les conclusions ne sont pas encourageantes !
00:54 Bonjour Sylvie Pierre-Broussolette, présidente du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes,
00:58 merci de venir nous donner en exclusivité sur France Inter les résultats de votre étude.
01:03 Le sexisme en France en 2024, ce n'est malheureusement pas de l'histoire ancienne, au contraire, il s'enracine.
01:09 À quoi le voyez-vous ?
01:11 Nous avons établi un diagnostic très poussé grâce à l'Institut Via Voice sur 3500 personnes
01:17 qui malheureusement confirme le diagnostic de l'année dernière, c'est-à-dire que le sexisme reste très puissant
01:23 et en particulier, paradoxalement, dans la tranche d'âge des jeunes adultes de 25-34 ans.
01:30 L'année dernière, notre slogan, c'était le sexisme, on ne sait pas très bien comment ça commence,
01:35 mais on sait comment ça se termine, sous-entendu par de la violence et parfois la mort.
01:40 Cette année, nous avons voulu, grâce à la commission Stéréotypes, très bien co-présidée par Marianne Bernard et Xavier Alberti,
01:49 qui sont très engagés, essayer de mettre en évidence quelles étaient les causes de ce sexisme endémique, systémique, structurel.
01:59 Et donc, trouver les racines du mal. Pourquoi ?
02:02 Nous avons mis en lumière les trois racines.
02:06 Ça commence à la maison, ça continue à l'école et ça explose dans le numérique.
02:11 À la maison, parce que les parents ne se rendent même pas compte qu'ils élèvent différemment les filles et les garçons,
02:16 mais quand on leur demande leur avis, eux, ils s'en rendent compte très bien.
02:19 Puis l'école qui reproduit les biais sexistes au point que les filles n'ont même pas l'idée de faire une carrière scientifique ou technique.
02:27 Et enfin, le numérique où j'insisterais une seconde, c'est terrifiant parce que ça décuple tout.
02:33 92% des vidéos les plus vues destinées aux enfants contiennent des stéréotypes sexistes y compris physiques.
02:41 Et deux tiers des jeunes adultes de 25-34 ans disent s'inspirer du porno pour leur activité sexuelle.
02:49 Et quand on sait que le porno contient 90% de contenu dont les violences sont passibles du code pénal, il y a de quoi être inquiet.
02:56 Et alors, le résultat de ces trois incubateurs, c'est comme ça ce que vous appelez la famille, l'école et le numérique,
03:04 c'est par exemple qu'aujourd'hui, encore en France, en 2024, plus de la moitié de la population trouve normal qu'une femme cuisine tous les jours pour toute la famille.
03:12 Il y a un quart des jeunes hommes qui pensent qu'il faut parfois être violent pour se faire respecter.
03:16 Je vais redonner un dernier chiffre, ça ne sert à rien d'inonder, il vaut mieux en retenir quelques-uns.
03:20 Plus d'un jeune homme sur cinq pense qu'il est normal d'avoir un salaire supérieur à sa collègue.
03:25 Comment expliquez-vous que la situation régresse dans cette catégorie d'âge spécifique, les 25-34 ans ?
03:30 Pour moi, c'est le numérique, c'est l'école du sexisme.
03:33 Vous avez bien sûr le milieu familial qui perpétue les stéréotypes appris de génération en génération, qui sont en même coup qu'on.
03:41 Les poupées pour les filles à Noël, les petits légalions pour les garçons.
03:43 Les parents leur demandent, ils sont sympas, on leur dit ce que vous avez eu l'impression d'élever vos filles comme vos garçons,
03:48 mais oui, mais oui, et puis quand on demande aux filles, 74% d'entre elles ne disent pas du tout.
03:53 Bon, il y a une vraie différence. La preuve, est-ce que vous avez donné les mêmes jouets ?
03:57 Non, non, pas du tout. 3% des filles ont reçu des petites voitures et 4% des garçons, des poupées.
04:03 Donc, il y a des différences. L'école les perpétue fatalement.
04:07 Et puis, là, on peut agir parce qu'à l'éducation nationale, quand même, on peut enfin appliquer la loi qui a été votée il y a 20 ans.
04:16 J'ai eu le plaisir d'entendre le Premier ministre répondre favorablement à la demande du HCE samedi soir à Lyon
04:21 en disant qu'enfin, les premiers cours prévus par la loi allaient être mis en place à la rentrée 24, mais ça ne suffit pas, il faut en faire plus.
04:30 C'est à quel niveau scolaire ?
04:31 Primaire et secondaire, c'était ce qui était dans la loi votée il y a 20 ans, 22 ans.
04:35 Et donc, enfin, ça va commencer, mais il faut faire de l'éducation à l'égalité, au respect, revoir les manuels scolaires,
04:42 que les professeurs n'aient pas des biais sexistes dans leur manière d'interroger ou d'orienter les élèves.
04:46 Enfin, il y a toute une action. Et puis, il y a l'action sur le numérique, où vraiment, les femmes subissent des propos dégradants,
04:54 des images monstrueuses et le porno qui, malheureusement, biberonne des générations entières
05:02 et de jeunes garçons qui disent aujourd'hui à 12 ans que oui, la moitié des jeunes garçons de 12 ans disent que c'est normal
05:09 de pratiquer de la violence pendant l'acte sexuel et d'ailleurs que les filles s'y attendent et aiment ça.
05:14 Alors, vous comprenez, si on continue à ne pas réguler le porno, on pourra toujours faire des politiques de lutte contre les violences,
05:22 essayer de protéger les femmes et mettre les auteurs de violences à l'écart.
05:27 Si des générations entières arrivent et déboulent complètement imprégnées, les mentalités forgées de stéréotypes de sexisme et de violence,
05:35 c'est le tonneau des Danaïdes.
05:37 Mais même en dehors du porno, vous le disiez tout à l'heure, 92% des vidéos pour enfants contiennent des stéréotypes genrés.
05:42 Comment on agit concrètement sur un espace numérique qui est si vaste avec des millions et des millions de vidéos ?
05:47 On peut très bien agir.
05:49 On disait déjà quand j'étais au CSA que j'ai dû agir sur la télé, mais c'est très compliqué, la liberté de création, la liberté de communication.
05:56 Il y a eu la loi Najat, le Belkacem, on nous a donné le pouvoir au CSA, j'ai mis en route, on l'a fait en disant qu'il y a des progrès gigantesques.
06:03 Donc, moi ce qu'on propose pour le numérique, d'une part, les mesures spécifiques pour le porno, de retirer les scènes de torture et de barbarie.
06:11 Je remercie le Parlement, en tout cas l'Assemblée nationale, d'avoir voté cet amendement qui peut-être du coup va entrer en vigueur assez vite et ça sera déjà une bénédiction.
06:20 Mais sur ce qu'on appelle le sexisme ordinaire, les stéréotypes ordinaires véhiculés par les grandes plateformes du numérique, nous avons reçu les grands patrons.
06:30 Ils ont été d'accord pour faire comme les chaînes de radio et télévision, s'auto-évaluer le degré de stéréotypes et de sexisme chaque année sur les contenus les plus vus.
06:39 Et si on le met, si on le grave dans le marbre dans la loi et que ça se fait chaque année sous l'égide de l'ArkHom, on fera des progrès.
06:45 Et sur le sexisme ordinaire, une dernière question très rapidement Sylvie Pierre-Brosolette.
06:49 On a entendu beaucoup de personnes défendre Gérard Depardieu justement en justifiant cet esprit gaulois ou ce plaisir de la gaudriole. Qu'est-ce que ça vous inspire ?
06:57 Écoutez, ça montre qu'on a encore beaucoup de travail au HCE, que le sexisme est tellement répandu qu'on se croit à tout permis.
07:08 Ces propos sont vraiment d'un sexisme grossier et je dois dire qu'ils ont été prononcés par ce qu'on appelle l'élite artistique de ce pays et soutenue par une certaine élite culturelle menavre.
07:25 Et moi j'ai d'abord une pensée et un mot d'ordre à toutes ces femmes victimes du sexisme grossier, victimes des violences.
07:33 N'ayez pas peur, allez-y, plaignez-vous, il faut que ça se termine, il faut que le sexisme soit de l'histoire ancienne.
07:39 C'est notre campagne financée par BETC, gracieusement, cette année qui nous le dit et que je remercie et qui sera diffusée, je vous le remercie, sur Radio France, France Télévision, TF1 et RTL.
07:48 Et pour les auditeurs qui veulent en savoir plus, il y a tous les détails de votre rapport sur franceinter.fr.
07:53 Merci Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes.

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