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Addictions aux écrans : RTL reçoit Amine Benyamina, chef du service de psychiatrie et d'addictologie de l'hôpital Paul-Brousse, également co-président du groupe de travail rattaché à l'Élysée, chargé d'une mission sur l'impact de l'exposition des jeunes aux écrans ; Servane Mouton est neurologue et neurophysiologiste.
Regardez L'invité de RTL du 19 janvier 2024 avec Amandine Bégot.

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Transcription
00:00 Vous êtes sur RTL.
00:02 RTL matin
00:06 RTL 7h43, excellente journée à vous tous qui nous écoutez.
00:10 Armandine, vous recevez ce matin les deux co-présidents de la mission sur les écrans mise en place par l'Elysée,
00:15 le professeur Amine Benyamina et le docteur Servan Mouton.
00:18 Bonjour à tous les deux et merci beaucoup d'être avec nous ce matin sur RTL.
00:23 Professeur Benyamina, vous êtes psychiatre, spécialiste des addictions,
00:26 vous dirigez le service de psychiatrie et d'addictologie de l'hôpital Paul Brousse à Villejuif.
00:30 Docteur Servan Mouton, vous êtes, vous, à Lyon en direct avec nous ce matin,
00:35 médecin, neurologue, neurophysiologiste et vous avez publié "Humanité et numérique, les liaisons dangereuses".
00:42 On est en plein dedans, vous co-présidez tous les deux cette mission qui a été mise en place par Emmanuel Macron.
00:47 Professeur Benyamina, vous constatez tous les jours les écrans, c'est un casse-tête pour les parents, les grands-parents et j'allais dire même pour les enfants ?
00:54 Je pense qu'on n'a pas besoin d'être médecin pour le voir, c'est en tant que père que je peux vous répondre,
00:59 c'est très juste et Servan vous dira la même chose.
01:02 Et juste un point, c'est vrai que cette commission, la co-président des deux médecins, c'est quasiment un effet écran.
01:08 C'est une commission qui est composée en dehors de Servan et moi par des non-médecins.
01:12 Et donc c'est important de dire que ce n'est pas du tout une commission médicale.
01:15 Docteur Servan Mouton, vous le constatez vous aussi au quotidien ce problème des écrans ?
01:21 Oui, comme l'a dit Amine, c'est quelque chose qui concerne toute la société et nous sommes très heureux de la mise en place de cette commission
01:27 qui permet de réunir, comme Amine vient de le souligner, des compétences très variées en termes de droit, de médecine, de science,
01:35 avec chacun ses spécialités très ciblées, avec un niveau d'expertise élevé qui nous permettra d'analyser les données qui sont déjà très abondantes
01:47 sur ces sujets en termes d'enjeux de santé, de société, de l'usage des écrans au cours des dernières années,
01:53 afin de pouvoir préciser des recommandations, d'évaluer ce qui a déjà été mis en œuvre et que des régulations puissent avoir lieu,
02:04 bien sûr pour les usagers que nous sommes tous, mais aussi pour les industriels, les GAFA, mes consorts, qui sont un petit peu aux commandes de cette technologie.
02:16 - Et qui exerce sans doute un certain lobby aussi. Professeur Benyamina, c'est devenu une addiction comme l'alcool ou la cigarette ou pas ?
02:22 - Ça peut l'être pour un certain nombre de jeunes ou d'où moins jeunes qui consomment de la même manière qu'on peut consommer un produit,
02:29 en respectant finalement la définition d'une addiction, c'est le fait d'évidemment avoir comme point central la consommation du produit,
02:38 ça peut être l'alcool, du tabac, du cannabis, c'est l'écran, c'est d'avoir des dommages qui s'installent, c'est-à-dire je m'occupe plutôt de mon écran mais pas de mon école,
02:46 je saute les repas, lorsque je suis en vacances avec les parents et je pense qu'un certain nombre de parents vont se retrouver au lieu d'aller en bord de mer,
02:53 de Barbotel dans la piscine et d'être avec mes copains, je suis dans la chambre de l'hôtel avec mon écran, c'est ça les dommages.
02:58 Évidemment, je ne ferai pas de cirrhose du foie, je ne vais pas avoir un problème de cancer du poumon mais je vais avoir des dommages différents.
03:04 Donc c'est très important d'avoir ça. Rapidement, je rassure les parents qui écoutent RTL, ça ne concerne pas 100% des gamins qui reçoivent...
03:13 - C'est à dire qu'il y a un temps d'écran qui fait qu'on est addict ou non ? C'est même pas ça ?
03:17 - Non, le principe de l'addiction, c'est la rencontre entre un produit, un environnement et une personne.
03:21 Donc c'est un génie hélas qui s'installe malgré soi.
03:26 Donc ce que dit Servan et je veux le redire aussi, nous ne nous concentrons pas sur l'addiction,
03:31 nous nous concentrons sur le phénomène de société dans lequel l'addiction est un épiphénomène de la consommation de l'écran, c'est ce qu'il faut avoir en tête.
03:38 - Concrètement, docteur Mouton, quels sont les effets des écrans sur le cerveau ?
03:43 Je vais être ultra simpliste mais est-ce que ça empêche vraiment au cerveau de se développer ?
03:47 Est-ce que par exemple ça tue des neurones ? Est-ce que physiquement ça agit sur notre cerveau ?
03:51 - Les effets sont très étudiés mais justement l'objectif de cette commission,
03:57 c'est d'aller au-delà de ce que nous avons pu chacun de notre côté dans la commission réunir comme élément
04:03 pour nous mettre d'accord sur une sorte de consensus scientifique et pouvoir donner des...
04:11 - Et vous neurologue, qu'est-ce que vous constatez comme effet sur notre cerveau ?
04:15 Les conclusions de la mission, elles seront fin mars et vous allez en discuter et je pense que les choses vont évoluer.
04:19 Mais qu'est-ce que vous, vous constatez ?
04:22 - Pour l'instant, je vous dis, ce serait très long de rentrer dans les détails.
04:26 Soit je vous réponds en deux minutes et c'est fragmentaire et insuffisant,
04:30 soit je préfère vous dire que la méthodologie de nos travaux sera d'analyser cette littérature scientifique
04:36 qui est très abondante, des rapports institutionnels qui ont aussi été publiés en France et à l'étranger
04:41 depuis plus de dix ans et qui se mettent dans le corpus des documents que nous aurons à analyser.
04:47 Nous allons aussi auditionner d'autres experts des différentes thématiques sur la santé, sur l'éducation,
04:54 en termes de droit. Nous allons auditionner également des entreprises, des acteurs de la société civile,
04:59 des associations, tout ça pour parvenir à quelque chose qui soit robuste sur le plan de la science
05:07 et des données que nous pouvons aujourd'hui réunir.
05:10 - On parle des faits sur l'apprentissage, sur le développement du langage...
05:13 - Oui, bien sûr, de toutes les façons, Savanne a produit un document de référence,
05:17 elle n'en parle pas mais c'est plus facile, c'est parce qu'elle le dit.
05:20 Et puis nous, on a produit et un certain nombre de collègues...
05:23 Non, ça existe, il y a évidemment beaucoup de productions, beaucoup de consensus qui existent
05:30 mais qui ne constituent pas, qui ne sont pas dans l'ambition de cette commission.
05:34 Je crois que ce qui est important c'est de dire que cette commission, le président l'a voulu
05:39 comme une commission ambitieuse pour arriver à un consensus scientifique.
05:43 - Mais on sent une certaine prudence quand on vous entend.
05:45 - Oui, parce que... - Vous ne voulez pas nous dire "oui, il faut tout interdire",
05:49 "oui, c'est, j'allais dire, dangereux"... - Dans deux mois pour peut-être une clash d'âges,
05:55 pour un problème... Si on le dit maintenant, évidemment, personne ne va attendre
05:59 les faits annoncés dans deux mois. - Alors vous reviendrez nous le dire dans deux mois ?
06:03 - Avec plaisir. Je pense que si on devait vous le dire maintenant,
06:06 ce n'est même pas la bonne heure, une commission, vous le savez parfaitement.
06:08 Mais il y a des choses qui existent, ce n'est pas ce qu'elles sont,
06:10 des choses qui existent, qui parfois sont contradictoires, qui ne sont pas applicables.
06:14 L'idée, évidemment, c'est de faire émerger une convergence et un consensus scientifique,
06:19 mais surtout, partir d'une doctrine et en même temps proposer des outils,
06:24 proposer des solutions. C'est ça qui est important.
06:27 - Et les solutions, elles sont compliquées. On pense bien sûr à interdire,
06:29 par exemple, jusqu'à un certain âge... - Mais c'est le premier réflexe.
06:32 - Mais, sauf que j'allais vous dire, l'alcool, la cigarette, la vente est interdite
06:35 aux moins de 18 ans, et aujourd'hui, on a tous vu des ados aller acheter
06:38 un paquet de cigarettes ou de l'alcool, et on ne voit pas ce qui se passe chez les gens.
06:41 - Eh bien, vous voyez, c'est le raisonnement auquel on aboutit tous.
06:46 Évidemment, le premier des raisonnements, c'est le raisonnement réflexe des parents.
06:51 Il a son écran devant la main, je lui prends, je m'engueule avec lui,
06:54 et globalement, à la fin, c'est lui qui gagne, parce que son addiction est plus forte que vous et que lui.
06:58 En parlant d'addiction, je pense qu'il faut vraiment sortir quelque chose qui doit être appliqué.
07:03 - D'autant qu'à l'école, ils ont tous un téléphone pour leurs devoirs,
07:07 pour les tablettes qui ont été distribuées.
07:09 Je pense que si on n'avait pas l'écran aujourd'hui à la radio,
07:12 on ne pourrait pas faire de radio, par exemple.
07:14 C'est un outil fantastique qui a émancipé l'humain et qui a rendu plus intelligents les enfants.
07:20 À leur âge, on était plus bêtes, il y a 30 ans.
07:23 - On était plus bêtes, donc il y a aussi du bon dans les écrans ?
07:25 - J'espère bien que oui, sinon on ne serait pas en train de parler de commission,
07:29 sinon dans ces cas-là, on leur interdit des choses très très mauvaises.
07:33 - Professeur Benyamina, on a sans doute aussi nous tous une responsabilité,
07:35 je ne veux pas du tout culpabiliser les parents,
07:37 je suis la première à être effectivement scotché à mon téléphone.
07:40 Mais quand on est tous allés au restaurant, en voyant une famille,
07:44 il y a 4 personnes, 2 parents qui sont sur leur téléphone, les ados aussi,
07:48 on a un rôle à jouer tous en fait ?
07:50 - Dans la commission, un des éléments sur le Canada 23, c'est l'environnement.
07:54 Le premier des environnements, c'est l'adulte.
07:56 Les parents, les enseignants, les grands frères, les grandes sœurs,
07:59 donc évidemment, on a beaucoup de travail, on a conscience de ça.
08:05 - Docteur Servan-Mouton, pas de solution pour l'instant,
08:08 vous allez bien sûr en discuter,
08:09 en attendant, vous avez une petite règle qui peut nous aider peut-être ?
08:12 C'est la règle des 4 repas.
08:14 - En effet, c'est une règle qui a été diffusée par Sabine Duflot,
08:17 qui est une psychologue qui travaille beaucoup sur le sujet depuis des années,
08:21 et c'est un bon moyen mnémotechnique en effet de s'en souvenir,
08:23 et ça on peut l'appliquer dès maintenant sans aucune restriction.
08:26 Ce n'est pas d'écran avant d'aller à l'école,
08:28 pas d'écran dans la chambre à coucher,
08:30 pas d'écran avant d'aller se coucher,
08:32 et pas d'écran pendant les repas.
08:34 Je ne m'avance pas trop en disant que c'est quelque chose
08:36 que les parents peuvent utiliser dès aujourd'hui,
08:40 sans restriction encore une fois.
08:41 - Voilà, on va l'afficher dans toutes nos maisons,
08:44 enfin on va essayer de l'afficher et de l'appliquer.
08:46 Un grand merci à tous les deux, et je compte sur vous
08:48 pour revenir nous voir au mois de mars, fin mars,
08:51 pour les résultats de cette...
08:52 !

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