• il y a 11 mois
A priori, toute stratégie a pour objectif le succès : construire un avantage concurrentiel décisif, durable et défendable, qui se mesure par une rentabilité significativement supérieure à celle des concurrents, voire par la mise en place d'une forme de concurrence déloyale dont vous serez le bénéficiaire. En théorie, on ne peut qu'envier ceux qui atteignent le succès stratégique. [...]

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00:00 [Générique]
00:08 A priori, toute stratégie a pour objectif le succès.
00:12 Construire un avantage concurrentiel décisif, durable et défendable,
00:15 qui se mesure par une rentabilité significativement supérieure à celle de vos concurrents,
00:20 voire par la mise en place d'une forme de concurrence déloyale dont vous serez le bénéficiaire.
00:25 En théorie, on ne peut qu'envier ce qui atteigne le succès stratégique.
00:30 En réalité, ce n'est pas aussi simple, et le succès semble inéluctablement mené à l'échec.
00:36 Regardez par exemple Nokia, dont la capitalisation boursière en 2000 à 198 milliards d'euros
00:43 était la première en Europe et qui a été rachetée par Microsoft en 2013 pour 40 fois moins.
00:49 Regardez BlackBerry, l'inventeur du smartphone professionnel,
00:52 dont le prix de l'action a été divisé par 20 en 5 ans.
00:55 Regardez Kodak, l'inventeur de l'appareil photo numérique, qui a pourtant été incapable de lui survivre.
01:02 Tous ces exemples semblent montrer que le succès attire l'abîme.
01:06 C'est ce que l'on appelle en stratégie le paradoxe d'Icare,
01:09 suite aux travaux du chercheur canadien Danny Miller
01:12 et en référence au célèbre mythe d'Icare, mort d'avoir réussi à voler.
01:17 En fait, le phénomène est assez redoutable.
01:20 Lorsque vous avez du succès, lorsque vous avez trouvé une stratégie gagnante,
01:23 vous avez tendance à la répéter, à vous spécialiser sur ce qui marche.
01:27 Tous les signaux sont au vert, l'environnement vous confirme que vous avez raison de faire ce que vous faites
01:32 et vous vous spécialisez encore.
01:34 C'est là que les ennuis commencent.
01:36 Le management de l'innovation nous apprend en effet que le pire ennemi de l'innovation, c'est la spécialisation.
01:42 L'innovation naît de l'ouverture, elle se développe à la marge, dans les interstices.
01:46 Elle ne découle certainement pas ni de l'excellence opérationnelle, ni de la spécialisation.
01:51 Or, quel est le principal moteur de la spécialisation ?
01:55 Le succès.
01:57 En effet, on se spécialise rarement dans l'échec.
02:00 En revanche, lorsque vous avez trouvé une recette qui marche,
02:02 vous la répétez, vous la répétez, jusqu'à en devenir le grand spécialiste.
02:06 Peu à peu, vous abandonnez toutes les ressources et les compétences
02:09 qui ne sont pas au service de ces stratégies gagnantes,
02:12 car vous les considérez comme un gâchis inutile.
02:15 Non seulement vous savez très bien faire ce qui marche,
02:18 mais bientôt vous ne savez faire plus que cela.
02:20 Vous creusez un sillon jusqu'au jour où, du fait d'une innovation, l'environnement change.
02:26 Vous devenez alors le grand spécialiste de ce qui ne marche plus,
02:29 et le sillon que vous avez creusé devient une ornière et bientôt votre tombe.
02:34 En fait, le succès assèche.
02:37 Il assèche votre portefeuille de ressources et de compétences.
02:40 Il assèche votre vision de l'environnement.
02:42 Il assèche votre créativité jusqu'à ce que vous deveniez votre propre caricature
02:47 et qu'il soit trop tard.
02:50 Alors comment éviter ce syndrome du succès ?
02:52 Eh bien en laissant, même dans les stratégies les plus abouties,
02:55 même dans les réussites les plus éclatantes,
02:57 une part à l'imprévu, à l'émergent, à l'imparfait, à la dissidence,
03:03 à l'éventualité d'un échec.
03:07 Mais c'est d'autant plus difficile lorsque vous êtes convaincu
03:09 que vous avez la meilleure stratégie et qu'il suffit de la parfaire
03:14 plutôt que d'en changer.
03:16 [Musique]

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