• il y a 10 mois
"Il va y avoir une stabilisation des prix", juge Jean-Philippe André, président de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania) alors que les négociations entre les enseignes de supermarchés et une partie de leurs fournisseurs de l'agro-industrie se sont achevées lundi soir.

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Transcription
00:00 Il est 6h21, le panier de course va-t-il coûter moins cher dans les prochaines semaines ?
00:04 C'est tout l'enjeu des négociations commerciales qui se tiennent jusqu'à la fin du mois
00:08 entre la grande distribution et leurs fournisseurs.
00:10 Fournisseurs dont je reçois l'un des représentants.
00:12 Bonjour Jean-Philippe André.
00:14 Bonjour.
00:14 Vous êtes le président de l'AGNA, c'est la principale organisation représentative
00:18 des agro-industriels.
00:20 Donc avec vous, c'est la farine et la moutarde, c'est pas la javel et pas les shampoings.
00:24 Le premier volet de ces négociations annuelles s'est achevé hier soir, celui qui concerne
00:29 les petits fournisseurs.
00:30 Pour les gros, les multinationales notamment, les discussions vont continuer pendant encore
00:34 deux semaines.
00:35 Pour le moment, Jean-Philippe André, au vu des accords qui ont été conclus hier soir,
00:41 est-ce que le montant du ticket de caisse de supermarché va baisser ?
00:44 Alors, votre question est extrêmement directe et je ne voudrais pas vous décevoir dès
00:48 le matin au petit déjeuner.
00:49 Parce que d'abord, on n'a pas les résultats définitifs, vous imaginez.
00:52 Moi, je discutais hier soir avec des collègues.
00:54 À 20h, ils n'avaient encore rien signé.
00:57 Donc vous voyez, ça s'est joué dans les tout derniers instants, ce qui est tout à
01:00 fait normal.
01:01 Je pense que raisonnablement, on peut dire qu'il va y avoir une stabilisation des prix.
01:07 Alors, je ne sais pas si ça rassure beaucoup les gens qui nous écoutent, mais en tout
01:10 cas, par rapport à ce que nous avons collectivement connu jusqu'à il y a peu de temps, où on
01:15 évoquait ensemble des inflations à 16%, puis maintenant à 7%.
01:19 On a eu 20% en deux ans.
01:21 20% en deux ans et après un rythme vraiment de désinflation.
01:24 Je pense qu'on va arriver à une globalement une stabilisation qui devrait se jouer entre
01:28 0, 2, 3%.
01:29 Donc ça veut dire que les prix vont continuer à augmenter, mais plus faiblement.
01:33 Plus faiblement.
01:34 Voilà.
01:35 Et il n'y a pas de déflation.
01:36 Les prix ne vont pas baisser.
01:37 Je crains que par rapport à votre question, on ne puisse pas aujourd'hui dire qu'il
01:40 va y avoir de la baisse généralisée.
01:42 Il peut y avoir de la baisse sur certains produits parce qu'il y a une vraie logique.
01:46 On va donner justement des exemples concrets.
01:49 Pour quels produits, il peut y avoir une baisse ?
01:50 Il peut y avoir des baisses pour tous les produits qui ont dans leur composition du
01:55 blé, qui ont dans la composition de certaines huiles, de colza, de tournesol.
02:01 La volaille va continuer à baisser parce que le marché baisse et que grosso modo
02:06 les autres intrants industriels dont on a besoin pour produire restent à peu près
02:11 au même niveau.
02:12 Et puis, il faut aussi dire qu'il y a encore des phénomènes haussiers.
02:17 Phénomène haussier en français, ça veut dire que ça va augmenter parce que le sucre
02:21 continue à augmenter.
02:22 Tout ce qui touche autour de l'orange, que vous mettiez ça dans votre jus de fruits
02:27 ou dans les biscuits avec de l'orange, l'orange a augmenté de 90%.
02:30 C'est une explosion.
02:31 Il faut comprendre que le riz est en train d'augmenter.
02:33 D'accord.
02:34 Donc le prix des pâtes va baisser puisque vous nous dites que le blé baisse, mais par
02:37 contre le riz, ça augmente.
02:38 Et l'ensemble de l'équilibre devrait se jouer aux alentours d'une inflation, on l'espère,
02:42 très modérée, de l'ordre de 0,2%.
02:44 Et concrètement, dans combien de temps ça va se voir en rayon ?
02:46 Ce sera juste après ces négociations ?
02:48 Alors les négociations, là aussi, vous l'avez bien expliqué, elles sont en deux temps.
02:52 Première phase, on dit les petits.
02:55 Alors il ne faudrait pas dire les petits, il faudrait dire la très très grande majorité
03:01 de nos adhérents, des industriels.
03:02 C'est 95% des entreprises françaises.
03:07 Mais est-ce que c'est 95% de ce qu'il y a dans les supermarchés ?
03:10 Alors j'allais y arriver, c'est 95% du numérique.
03:13 Donc c'est 95% des 17 000 entreprises.
03:15 Il faut avoir en tête que sans doute, ce qui va se jouer maintenant, sur les 15 prochains
03:19 jours, c'est près de 80% cette fois-ci du chiffre d'affaires.
03:23 Donc les grosses entreprises, ce qu'on appelle les entreprises intermédiaires, les grands
03:28 champions nationaux et évidemment les grands champions internationaux vont signer entre
03:32 maintenant et la fin du mois.
03:33 Et c'est avec eux que les négociations sont plus difficiles généralement ?
03:37 Mais ce n'est pas anormal, parce que quand vous faites 30 millions de chiffres d'affaires
03:41 et que vous avez en face de vous le Clerc, Carrefour, chiffre d'affaires 50 milliards,
03:47 il est normal que le rapport de domination, même de dépendance, soit très fort.
03:52 D'un autre côté, il faut accepter l'idée, en tout cas j'invite nos clients distributeurs
03:57 à accepter l'idée, mais ils le savent très bien, que quand vous avez une marque
04:00 qui est installée depuis très longtemps, des dizaines d'années, la négociation est
04:04 plus compliquée simplement parce que ce sont des marques qui sont voulues et demandées
04:08 par les consommateurs dans les rayons.
04:10 Et c'est pour mettre une pression justement sur ces industriels que parfois il y a certains
04:15 supermarchés qui déréférencent des produits.
04:18 Il y a des produits qu'on ne trouve plus parfois dans les rayons, qui reviennent, qui
04:21 s'en vont.
04:22 Ça fait partie du jeu des négociations ?
04:24 Ça fait partie, mais je n'aime pas du tout.
04:25 Oui, j'imagine bien, parce que vous êtes du côté des fournisseurs.
04:28 Je ne peux pas le dire.
04:29 Le déréférencement, c'est du billard à quatre bandes.
04:32 Les supermarchés disent que c'est parce que les produits sont tout simplement trop
04:34 chers et que ce n'est pas normal.
04:35 Oui, mais je pense que ça fait partie d'une tactique.
04:39 C'est un billard à quatre bandes.
04:41 La première bande, je fais pression sur la marque concernée.
04:43 La deuxième, en faisant ça, c'est que je fais pression sur tous les autres fournisseurs
04:48 en disant "regardez ce que je peux faire".
04:50 La troisième, c'est de dire en termes de communication à vous, les consommateurs,
04:54 "regardez, je suis aussi un des champions, un des chevaliers blancs de l'inflation".
04:58 Et dernière chose, ça me permet de me positionner à la quatrième bande par rapport à mes
05:02 propres concurrents.
05:03 Alors, ce qu'on a dit jusqu'à présent, Jean-Philippe André, c'est ce qui est
05:07 tacté directement entre les supermarchés et les distributeurs.
05:10 C'est baisse pour certains produits, stagnation, voire hausse pour d'autres.
05:15 Mais il reste encore à voir ce que vont faire les supermarchés, ce qu'ils vont répercuter.
05:19 Parce que par exemple, un supermarché peut dire "je t'achète ta compote 15 centimes
05:22 au lieu de 20".
05:23 Il n'est pas obligé de la vendre 15 centimes, il peut continuer à la vendre 20 voire 25.
05:26 Les prix sont libres.
05:28 L'industriel, ça c'est compliqué à comprendre.
05:30 L'industriel ne fixe pas le prix.
05:32 L'industriel fixe un prix de cession.
05:34 Je vais vous vendre mon produit A et effectivement c'est vous, parce que vous êtes M.Systemu,
05:38 vous êtes Casino, vous êtes Auchan, c'est vous qui allez fixer le prix en rayon.
05:42 C'est-à-dire après un mix entre le gain que vous voulez avoir en termes de marge et
05:45 la compétition.
05:46 Donc nous, on ne peut pas préjuger, ce n'est pas à nous de dire quel sera le prix en rayon.
05:51 Donc les accords conclus hier et sans doute ceux à la fin du mois ne vont pas dire exactement
05:58 quel sera le niveau de l'inflation ?
06:01 Il y a quand même un lien logique, puisqu'en ce moment il y a une compétition très vive
06:07 entre tous.
06:08 Donc il y a un lien quand même.
06:09 Et s'il n'y a pas d'accord, il se passe quoi ? C'est amende pour les deux côtés ?
06:11 Il y a pratiquement impossibilité à ne pas avoir d'accord, parce que d'abord l'amende
06:16 est trop élevée.
06:17 Ça peut atteindre 5 millions d'euros.
06:18 Mais plus que l'amende, si vous représentez et vous représentez dans mon chiffre d'affaires
06:24 près de 20% de mon activité, vous comprenez bien que si je suis une PME, je ne peux pas,
06:29 même un grand champion, me passer de vous.
06:31 Donc j'ai toujours l'habitude de dire qu'on est à la limite condamné à signer avec tout
06:35 le monde.
06:36 L'enjeu c'est qu'il ne faut pas signer à n'importe quelle condition.
06:38 (JF André, président de l'ANIA, l'association nationale des industries alimentaires, vous
06:42 étiez l'invité du 5/7)

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