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Manuel Valls, ministre des Outre-mer et ancien Premier ministre, est l'invité du Face à Face sur BFMTV et RMC ce lundi 10 mars 2025.

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00:00Bonjour Manuel Valls. Bonjour Apolline de Malherbe. Merci d'être dans ce studio pour répondre à mes questions, vous êtes ancien Premier ministre, vous êtes ministre d'Etat, ministre des Outre-mer.
00:07On va évidemment parler de Mayotte, de la Nouvelle-Calédonie et de la Réunion, puisque vous en revenez, vous êtes revenu ce week-end.
00:13On va parler aussi de la menace existentielle que représente désormais, selon les mots d'Emmanuel Macron, la Russie.
00:20Mais je voudrais d'abord parler de ce qu'il se passe en Allemagne, parce que je ne sais pas si vous avez entendu, il y a le nouveau plan de gouvernement qui a été dévoilé
00:26ce week-end par le nouveau chancelier, le chancelier Merz, une remise en cause totale de la politique migratoire d'Angela Merkel, qui avait accueilli
00:35un million de migrants, principalement issus de Syrie, alors même que vous étiez Premier ministre, Friedrich Merz, qui parle du chaos, je cite,
00:43d'une politique d'asile et d'immigration mal orientée depuis dix ans. J'ai retrouvé les titres des journaux à l'époque, lorsque Angela Merkel a décidé d'accueillir
00:52tous ces migrants, et que vous, vous l'aviez critiqué. Le Figaro, Manuel Valls charge la chancelière allemande et resserre l'accueil des réfugiés.
01:00Les échos pour Manuel Valls, la politique de Merkel n'est pas tenable dans la durée. L'opinion, le Premier ministre Manuel Valls critique sévèrement la politique migratoire de Merkel.
01:09Et Libération, le plus beau pour la fin, face au courage de Merkel, la lâcheté de Valls. Qu'est-ce que vous en dites aujourd'hui ?
01:15D'abord, vous m'envoyez il y a dix ans, mais sur ce sujet, j'avais raison. Et j'avais été un des rares dirigeants européens à interroger et à critiquer donc
01:28la politique d'ouverture absolue et totale d'Angela Merkel, alors qu'elle était en effet saluée par toute la presse nationale et européenne. Et je souligne d'ailleurs
01:38qu'avec François Hollande et Bernard Cazeneuve, qui étaient ministres de l'Intérieur, nous n'avions pas mené la même politique. Nous avions mené une politique d'accueil, évidemment, des réfugiés syriens,
01:48mais nous n'avions pas ouvert les frontières parce que nous craignions les conséquences sur nos sociétés. Rappelez-vous quelques temps après de cet article de cet intellectuel franco-algérien
01:59Kamel Daoud, qui dans un long papier avait souligné la violence et les agressions sexuelles d'un certain nombre de migrants un 31 décembre à Cologne, comment il avait été lui-même accueilli.
02:10Et puis, soulignons aussi peut-être les changements que l'Allemagne est en train d'opérer. Elle doit sortir de la dépendance...
02:18Mais sous la pression de l'extrême droite, c'est-à-dire qu'aujourd'hui, on le sent bien, il y a une montée de l'extrême droite en Allemagne, et c'est aussi à cela que répond le nouveau chancelier.
02:26Oui, bien sûr, c'est un de ses engagements de campagne, mais pas seulement. L'Allemagne est en train de sortir maintenant depuis 2-3 ans de la dépendance du gaz russe.
02:34Elle s'interroge évidemment sur les changements de la politique américaine et le fait qu'elle ne pourrait plus bénéficier du parapluie militaire et nucléaire américain.
02:45Et le chancelier, le nouveau chancelier, celui qui va être désigné comme chancelier, va être, je crois, un allié très structurant, très important pour la France et pour l'Europe face aux nouvelles menaces.
03:01Nous en dirons peut-être un mot. Il change aussi d'une certaine manière les équilibres financiers, puisqu'ils vont investir dans la défense, mais aussi dans les infrastructures dont l'Allemagne a besoin.
03:12Donc c'est des changements importants, et donc sur l'immigration aussi, bien évidemment.
03:15Vous parlez de la menace, Manuel Valls. Vous avez entendu sans doute les mots d'Emmanuel Macron, qui dit que nous ne toucherons plus les dividendes de la paix.
03:22Sous-entendu, on en a quand même bien profité. Vous en avez profité, vous, tous les hommes politiques qui jusqu'alors trouvaient sans doute confortable que les Américains payent et que nous en puissions dépenser ?
03:31Pas que les politiques, nos sociétés, d'une certaine manière. La France, grâce au général de Gaulle, et tous les présidents de la République ont suivi la même doctrine, a toujours eu une attitude différente.
03:42Nous avons une véritable indépendance, grâce notamment à la dissuasion nucléaire. Nous sommes, avec les Britanniques, une des rares armées européennes capables de se projeter à l'extérieur.
03:51Mais c'est vrai que l'ensemble de l'Europe est en train de sortir d'une forme de naïveté.
03:56L'ensemble de l'Europe qui sort d'une naïveté, d'accord. Mais c'est vrai que la France, et la question désormais se pose, elle se pose même aux partenaires sociaux qui sont en conclave pour réformer la réforme des retraites.
04:06Et la question désormais, c'est est-ce qu'on peut faire à la fois des pensions et des canons ? Et pendant longtemps, peut-être le fait que les canons soient payés par les Américains était bien confortable pour notre politique sociale.
04:16Est-ce que vous aviez conscience de cela ?
04:18Oui, moi je pense que je fais partie de ceux. Je suis venu souvent sur ce plateau, notamment depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, pour dire que nous étions en train de changer d'époque.
04:28J'étais il y a un an et demi à Kiev et j'étais revenu marqué par le fait que tout le monde s'interroge là-bas. Mais il faut un plan B si Donald Trump est élu.
04:36Eh bien, nous y sommes. Et au fond, la première question, la question fondamentale à Pauline de Malherbe, c'est est-ce que nous sommes capables, nous, Européens, de construire une puissance pour sauvegarder la liberté et la démocratie face, au fond, à la vacillité, au renoncement, à la lâcheté qu'on retrouve, y compris dans la classe politique française.
04:56La lâcheté, vous voulez dire, plutôt des Américains ou d'une partie ? C'est quoi cette partie de la classe politique française dont vous parlez ?
05:03C'est ceux qui renoncent, qui sont prêts aujourd'hui à accepter d'abord le fait établi, c'est-à-dire ce que Poutine représente en termes de menaces existentielles pour la liberté et la démocratie.
05:14Vous reprenez ces mots. Pour vous, la menace existentielle aujourd'hui, c'est la Russie, c'est Poutine ?
05:19Oui, il y en a beaucoup, mais en tout cas celle-ci, elle est évidente, et par aussi une guerre, parce que ce n'est pas uniquement la guerre militaire qui est menée, c'est une guerre idéologique, c'est une guerre hybride.
05:28Vous voyez ce qui s'est passé en Roumanie il y a quelques semaines au moment de l'élection présidentielle, la déstabilisation, elle nous concerne, à chaque élection en Europe et dans le monde.
05:38Parlez avec les Polonais, avec les Baltes, avec les Moldaves, avec les Roumains, ce que cela peut représenter comme menace.
05:44Donc cette menace, elle est là, et face à cela, il y a toujours ceux qui d'une certaine manière s'accommodent de la puissance, de la violence, de la remise en cause de l'État de droit.
05:56Et ce qui est en train de changer au fond, ce n'est pas la menace russe, elle est présente déjà depuis un certain nombre d'années, c'est le comportement erratique, l'imprévisibilité de l'administration Trump.
06:06Mais pardon d'insister, mais Emmanuel Macron, quand vous dites qu'il y a une partie de la classe politique, vous parlez de qui ?
06:13Quand je lis l'entretien de François Fillon à Valeurs Actuelles, quand je vois un certain nombre de déclarations de responsables politiques du Rassemblement National,
06:23il y a une partie de la gauche qui est aussi du côté de la France insoumise depuis déjà longtemps, et dans ses relations, dans sa vision du monde marquée par sa relation avec la Russie ou par l'anti-américanisme.
06:34Bref, tout cela nous oblige d'une manière ou d'une autre à une réaction, et c'est vrai en termes d'investissement pour la défense, et donc à revisiter d'une manière ou d'une autre nos modèles.
06:46Quand François Fillon dit on se trompe de guerre, la menace existentielle immédiate ce n'est pas Poutine, c'est l'islamisme ?
06:52L'islamisme représente aussi une menace, d'ailleurs le 26 mars prochain au Dôme avec plusieurs milliers de personnes, nous allons nous réunir intellectuels, politiques,
07:01nous allons nous mobiliser contre cette menace que représente l'islamisme pour la démocratie et nos valeurs, ça fait partie évidemment de mes combats,
07:10et nous l'avons vu avec cette montée, cette déferlante de la haine des juifs et d'Israël, mais il y a aussi, ce n'est pas parce qu'il y a la menace islamiste qu'on ne doit pas regarder,
07:20François Fillon il en minimise la menace russe ?
07:24On ne peut pas le minimiser pour nous du fait du changement que représente, je suis prudent, le caractère imprévisible de la politique américaine.
07:32Vous savez que dans le monde aujourd'hui, au fond il y a, je ne veux pas simplifier les choses parce que c'est évidemment toujours beaucoup plus complexe,
07:38mais d'un côté il y a la brutalité, le règne de l'argent, la remise en cause de l'état de droit, et de l'autre côté cette vieille Europe, nos valeurs universelles,
07:47mais nous partageons aussi avec le Canada, menacé par les Etats-Unis, avec l'Australie qui travaille aussi avec nous sur ces questions-là,
07:55la vieille Europe, la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la France et la Grande-Bretagne ont une vision du monde, une vision stratégique, possèdent l'arme nucléaire,
08:04eh bien il faut un réveil, et ce réveil il est autour, pardon, des valeurs de la démocratie, de l'état de droit, de la liberté, pour moi et pour nous ça doit compter.
08:12Manuel Valls, est-ce que vous iriez jusqu'à dire qu'il y a une forme de traîtrise dans les propos d'un François Fillon, ou de certains des politiques dont vous venez de parler ?
08:20Non, c'est des mots qui vont trop loin, et je fais attention, je suis prudent, enfin prudent, mais il y a une forme de renoncement, ça c'est clair, c'est pas nouveau,
08:32il y a toujours eu au fond une fascination vis-à-vis de la Russie, qui est évidemment un grand peuple, une grande culture, avec qui nous avons toujours eu des liens,
08:41il y a une fascination toujours par rapport à la puissance, à la brutalité, les mêmes qui sont fascinés par Poutine le sont aujourd'hui par Donald Trump.
08:49Non, je pense que la remise en cause de l'ordre international qui a été conçu depuis la dernière guerre mondiale, d'un certain nombre de valeurs, de la démocratie,
08:58enfin menacer le Canada, menacer le Groenland, menacer le Panama, on voit bien qu'il y a quelque chose qui est en train de changer,
09:05et au-delà de la critique que nous pouvons apporter à l'administration américaine, cela nous oblige surtout nous à réagir, et c'est ce qu'impulse le Président de la République, et je m'en félicite.
09:15Vous avez eu cette expression, nous nous préparons à la guerre, encore un mot là-dessus, les Français qui se disent favorables à un retour du service militaire obligatoire, 61%,
09:23c'est un sondage du journal Ouest France, est-ce que ça veut dire que les Français eux sont dans une attitude presque aujourd'hui de capacité de défense,
09:32ou de prendre à un moment les armes s'il le faut pour défendre la France ?
09:35Mais ce peuple est très intelligent, nos compatriotes sont très intelligents, ils ont le sens de l'histoire, ils savent ce qu'a pu représenter deux guerres mondiales,
09:43ils connaissent le prix de la liberté et de la démocratie, donc il faut expliquer, c'est ce que fait le Président de la République, c'est ce que fait le Premier ministre,
09:52c'est ce que font les ministres de la Défense et les affaires étrangères, c'est ce que nous devons tous faire, quels sont les enjeux, pourquoi il faut investir,
09:58demain sans doute 100 milliards dans la défense, l'Europe prend ses responsabilités, il y a une course contre la montre,
10:04parce que l'Ukraine et son Président Volodymyr Zelensky représentent précisément cette liberté et cette démocratie,
10:10on cherche aussi évidemment un cessez-le-feu, la possibilité pour éventuellement des armées européennes de préserver ce cessez-le-feu demain
10:19face à d'éventuelles nouvelles agressions de la Russie, donc il y a un débat aussi qui implique les diplomates,
10:24parce qu'on veut que cette guerre s'arrête, mais pas à n'importe quel prix, pas au prix de la vacillité, pas au prix du renoncement, pas au prix de la fin de l'Ukraine.
10:31Vous rentrez, Manuel Valls, de la Réunion, où vous étiez notamment, pour répondre évidemment au cyclone Garance, qui avez-vous vu et quelle réponse vous allez apporter ?
10:40D'abord vous avez raison de me ramener à ma mission, et ma mission c'est d'être ministre des Outre-mer, j'ai le sentiment, je comprends avec l'actualité que nous venons de décrire,
10:51j'ai le sentiment qu'ici à Paris, pas du côté du gouvernement, croyez-moi, mais on n'a pas pris conscience de l'impact de ce nouveau cyclone, un an après un autre cyclone,
11:00quelques mois après une sécheresse très dure, le cyclone a impacté très durement l'île, il y a cinq morts, des blessés, des écoles, des établissements publics détruits,
11:12toute l'agriculture, notamment celle de la Canne qui est totalement détruite, c'est plusieurs centaines de millions d'euros de dégâts,
11:18et puis des Réunionnais qui certes ont une culture des phénomènes de ce type depuis des années, mais qui ont le sentiment vraiment que le dérèglement climatique est bien là,
11:27et qu'ils vont subir de nouveau dans les mois, dans les années qui viennent, de nouveaux phénomènes de ce type.
11:33Ça veut dire qu'on n'est pas que dans la reconstruction, on doit être aussi dans l'anticipation ?
11:36J'ai proposé donc, nous travaillons très vite sur un plan de reconstruction, de développement, de relance de la Réunion qui anticipe évidemment tous ces phénomènes,
11:45c'est vrai notamment dans le domaine du logement, de l'économie, donc il y a des investissements importants à faire.
11:51Est-ce que 200 millions ça va suffire ?
11:53C'est déjà important ces 200 millions, ce fonds que j'ai annoncé pour reconstruire les écoles, les bâtiments publics, l'agriculture, il y a beaucoup de force heureusement à la Réunion,
12:04il y a une vision aussi de la place du territoire dans l'océan Indien, il y a des élus très impliqués, mais il faut les soutenir, il faut les aider.
12:11D'une manière générale dans les Outre-mer, nous sommes au cœur de ces changements climatiques, de ces dérèglements climatiques,
12:17ce qui nous oblige là aussi à une autre vision, la montée des océans, le réchauffement de la planète, la montée des eaux,
12:26tout ça nous oblige à des changements profonds et à les traduire dans les actes alors qu'il y a d'autres défis dans les Outre-mer.
12:34Mayotte, trois mois après, est dans quel état aujourd'hui ? Est-ce que la reconstruction commence à se voir pour les habitants ?
12:42Elle est lente, elle est trop lente, elle est difficile.
12:45Moi je présenterai dans quelques semaines en Conseil des ministres puis au Parlement un nouveau projet de loi,
12:49mais là c'est pour la reconstruction à long terme. Il reste encore des problèmes, je pense notamment à celui de l'eau,
12:55qui est rare, qui est difficile d'accès, même si nous faisons tous les efforts pour y arriver.
12:59C'est lent et c'est difficile, mais j'y retourne dans quelques semaines.
13:03Il y a un général, le général Facon, qui est à mes côtés et qui dirige la mission Mayotte pour mettre les bouchées doubles.
13:09Nous le devons aux Mahorais qui ont été non seulement touchés par ce cyclone Chido il y a quelques semaines,
13:14mais qui vivent aussi d'autres problèmes, les problèmes d'immigration, de violence, d'inégalité sociale, d'écoles qui sont bondées.
13:22Donc non, il faut continuer, il y a un énorme travail.
13:25J'avais reçu une d'Akebab sur ce même plateau qui revenait de dix jours à Mayotte et qui disait qu'elle avait honte, c'était ses mots,
13:32honte parce qu'elle avait le sentiment que ce n'était pas aider et accompagner comme un département français, mais plutôt comme une colonie, c'était ses mots.
13:40Je pense que ce sont des mots de trop, mais il y a beaucoup de retard qui a été pris, bien évidemment.
13:45Et puis la marche forcée de la départementalisation qui est utile, qui est attendue par les Mahorais n'a pas toujours répondu aux exigences de ces derniers.
13:55Mais il y a les écoles, il faut les développer, il y a les services publics, il faut les renforcer,
13:59la nécessité de reconstruire la forêt, l'agriculture, l'industrie.
14:03Le cyclone a été terrible, il a tout balayé.
14:06Je peux comprendre d'ailleurs le sentiment d'exigence et même d'agacement et de colère même des Mahorais vis-à-vis de l'éternelle colonie.
14:13Non, c'est un département français, ils sont français, ils sont patriotes et ils attendent donc beaucoup de la France.
14:20Manuel Valls, la Nouvelle-Calédonie, l'épisode d'extrême violence qu'a traversé la Nouvelle-Calédonie,
14:26est-ce que aujourd'hui, et c'était l'une de vos missions, vous y avez passé plusieurs jours,
14:31est-ce qu'aujourd'hui, vous estimez qu'il y a une forme de cohésion à nouveau et que l'épisode de violence est vraiment derrière nous ?
14:39Non. Vous savez, dans la coutume canaque, il y a deux mots qui sont prononcés à chaque fois.
14:43C'est l'humilité et le respect.
14:46Moi, je vais continuer à travailler avec beaucoup d'humilité parce que même si nous avons réussi à rassembler toutes les forces politiques à ce qu'elles se reparlent,
14:53nous sommes encore loin d'un accord.
14:56Quand vous dites non, c'est quand même non, la situation n'est pas apaisée.
15:00Non, parce qu'elle est tendue, parce qu'il y a eu beaucoup de violence, beaucoup de peur, du racisme,
15:05des gens qui ne se parlent plus, qui se regardent en chien de faïence.
15:10Il faut comprendre la peur qu'ont éprouvés tous nos compatriotes là-bas, sur place, et notamment ceux d'origine européenne, à Nouméa.
15:18Il faut comprendre aussi l'aspiration à l'émancipation, à la décolonisation des canaques.
15:25Ce sont, au fond, deux logiques qui maintenant cheminent et il faut réussir,
15:31et c'est évidemment la mission que m'a confiée François Bayrou,
15:34il faut réussir à ce que le dialogue permette de trouver un accord politique.
15:39Vous parliez tout à l'heure à propos de la Russie, de la manière dont il s'infiltrait,
15:44y compris dans une forme d'influence ou de tentative de déstabilisation de la démocratie.
15:48On sait qu'au moment de la violence en Nouvelle-Calédonie, la question de l'influence étrangère avait été posée.
15:54A posteriori, est-ce que vous diriez aujourd'hui que ça a été en effet un lieu, un espace, un moment d'influence étrangère ?
16:01La France est présente sur trois océans et cinq continents.
16:04C'est une des rares puissances encore qui est ainsi présente dans le monde.
16:08Nous le disions tout à l'heure, il y a cette guerre hybride que nous mènent un certain nombre d'États.
16:12On avait évoqué l'Azerbaïdjan.
16:14L'Azerbaïdjan en fait partie et un certain nombre d'élus néo-indépendantistes en Calédonie, aux Antilles, en Guyane,
16:20où depuis d'ailleurs également les Comores jouent avec ça contre Mayotte.
16:25Oui, il y a des gens qui s'y prêtent.
16:27Je ne veux pas l'exagérer, ça n'était pas ça le facteur déclenchant des violences,
16:32mais j'ai averti les uns et les autres, et je le fais encore à votre micro,
16:36que nous n'accepterons pas que cet État d'abord se livre à ses ingérences, notamment sur les réseaux sociaux,
16:42mais également en organisant des colloques, en soutenant un certain nombre de leaders indépendantistes,
16:47très minoritaires, bien évidemment condamnés souvent par les autres formations,
16:50mais nous ne l'accepterons pas, et je l'ai dit aux intéressés aussi,
16:53à ses élus, à ses responsables politiques qui s'y prêtent.
16:56Une chose est la liberté d'opinion, pour proférer évidemment des idées à l'indépendantisme,
17:00mais on ne peut pas atteindre aux intérêts stratégiques de la France.
17:03Est-ce qu'on a les moyens de lutter, y compris en termes de réseaux sociaux comme vous dites ?
17:07Bien sûr, sur les réseaux sociaux, en s'exprimant, rappelant quelle est l'histoire de la Calédonie,
17:12ce que nous sommes en train de faire tout de même depuis 1988, avec Michel Rocard, Lionel Jospin,
17:17ce que j'essaie de faire d'une certaine manière dans leurs traces,
17:20c'est-à-dire en respectant les uns et les autres, en trouvant le consensus,
17:24en rassemblant la société calédonienne, en créant les conditions d'un peuple calédonien,
17:28en gardant ce lien évidemment très étroit avec la France,
17:33mais bon, nos services de renseignement, TRACFIN,
17:35tous ces moyens doivent être déployés pour lutter contre ces ingérences.
17:39Elles sont inacceptables.
17:41Un dernier mot, Manuel Valls, sur ce qu'il se passe en Syrie,
17:44où c'est probablement autour de 1000 civils, chrétiens d'Orient, halawites,
17:49qui ont été littéralement massacrés ces dernières 48 heures.
17:53Est-ce qu'on ne s'est pas réjoui trop vite ?
17:55Vous savez, le concept d'islamiste modéré est à réétudier.
17:59Ça n'existe pas.
18:01Mais de l'autre côté, ce pays a subi une telle violence,
18:04sans doute des pulsions de vengeance terribles,
18:09le pouvoir actuel est sur un réduit,
18:11la guerre est passée par là, les massacres, les civils,
18:14ce qui s'est passé évidemment inacceptable,
18:16et moi aussi je m'inquiète sur le sort des halawites,
18:19des chrétiens d'Orient, bien évidemment,
18:21qui ont tellement subi au cours de ces dernières années,
18:25un peu partout en Irak et en Syrie,
18:27donc la communauté internationale doit être présente,
18:29doit rappeler le nouveau pouvoir à ses obligations,
18:31il y a une commission d'enquête qui est en place,
18:33mais faisons attention, nous sommes sur une poudrière là-bas,
18:37et là aussi, n'oublions pas quels sont nos véritables alliés.
18:40Nos alliés là-bas, ce sont les Israéliens et les Kurdes,
18:43nous ne l'oublions jamais.
18:44Est-ce que vous êtes inquiet sur la situation aujourd'hui ?
18:46Est-ce que vous faites partie de ceux qui vous dites
18:47qu'on est en train de vivre un point de bascule, globalement ?
18:50D'une certaine manière, au cours de ces 20 dernières années,
18:52depuis le 11 septembre 2001, nous sommes rentrés dans une nouvelle ère,
18:56et chaque moment nous y apporte.
18:58Ce qui évidemment est redoutable, c'est que la grande puissance américaine,
19:02notre allié, je continue de penser que ce sont nos alliés,
19:05c'est une grande démocratie, semble préférer d'autres types d'alliances,
19:09et cela nous oblige à un réveil, à une très grande responsabilité,
19:13donc ceux qui partagent d'ailleurs les mêmes visions du monde,
19:16de l'Europe et de la démocratie, dans la vie politique française,
19:19doivent être capables de se rassembler sur l'essentiel.
19:21Nous sommes sur l'essentiel, nous sommes l'un de ces moments majeurs,
19:24j'avais écrit un petit livre sur le courage,
19:26je terminais d'ailleurs avec un portrait sur Volodymyr Zelensky,
19:29qui incarne ce courage, mais nous sommes dans ces moments
19:32où il faut relire Churchill et de Gaulle,
19:35pour nous rappeler à nos obligations et notre responsabilité.
19:37Merci Manuel Valls d'avoir répondu à mes questions,
19:40ministre d'Etat, ministre des Outre-mer, il est 8h52 sur RMC-BFM TV.

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