Debrief de la table ronde Doc en Stock à la Sofcot
Quand on parle de compagnonnage, surtout en chirurgie, on pense tout de suite, geste clinique, mais le compagnonnage ne s’arrête pas là, mais alors pas du tout, le métier de chir ortho n’est pas qu’un geste, mais une indication, une manière de s’adresser au patient, mais aussi parfois comment on gère une clinique en libéral, l’administratif, les RH, alors nous avons décidé d’en parler avec plusieurs chirurgiens, le Pr Philippe Wicart qui exerce à Necker, le Dr Roger Badet nouveau président du CNP en libéral autour de Lyon, Dr Pierre Emmanuel Chamas, qui termine son clinicat au CHU de Monpellier et le Pr Pierre Martz PUPH au CHU de Dijon.
Quand on parle de compagnonnage, surtout en chirurgie, on pense tout de suite, geste clinique, mais le compagnonnage ne s’arrête pas là, mais alors pas du tout, le métier de chir ortho n’est pas qu’un geste, mais une indication, une manière de s’adresser au patient, mais aussi parfois comment on gère une clinique en libéral, l’administratif, les RH, alors nous avons décidé d’en parler avec plusieurs chirurgiens, le Pr Philippe Wicart qui exerce à Necker, le Dr Roger Badet nouveau président du CNP en libéral autour de Lyon, Dr Pierre Emmanuel Chamas, qui termine son clinicat au CHU de Monpellier et le Pr Pierre Martz PUPH au CHU de Dijon.
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00:00 Le compagnonnage, clairement, c'est le sel de la formation en chirurgie,
00:07 parce que comme on l'avait dit tout à l'heure, c'est vraiment un artisanat de précision,
00:11 et donc évidemment, tout se transmet, que ce soit les connaissances, les compétences pratiques,
00:16 et puis toutes les soft skills autour, et donc c'est vraiment grâce, je pense,
00:21 à cette formation de type compagnonnage qu'on parvient à faire des chirurgiens,
00:26 finalement, compétents à la fin de leur formation.
00:29 Les générations changent, l'environnement change, les moyens également,
00:33 à la fin, l'objectif reste le même, ça veut dire qu'il faut qu'on ait des chirurgiens qui soient compétents,
00:37 il faut s'adapter aux nouvelles réglementations, par exemple, et à ce qu'on peut faire aujourd'hui,
00:43 et puis trouver les leviers chez les plus jeunes qui fonctionnent,
00:46 qui n'étaient peut-être pas les mêmes que les nôtres,
00:48 et qui n'étaient certainement pas les mêmes que les générations précédentes.
00:50 La formation, ça fait partie, c'est notre fonction, qu'on fête plaisir,
00:55 et donc c'est formé à un geste diagnostique, ou un geste thérapeutique,
01:00 ou à un geste plus global de prise en charge générale d'un enfant, en l'occurrence, je suis pédiatre,
01:06 ça c'est la formation qu'on peut donner de façon ponctuelle à un jeune collaborateur,
01:11 à un interne, à un étudiant, ou même à quelqu'un de plus âgé.
01:15 Formation, je pense que c'est bien à distinguer du compagnonnage.
01:19 Le compagnonnage, l'étymologie, c'est "on mange le pain avec",
01:23 c'est-à-dire que le compagnonnage c'est quelque chose au long cours,
01:28 qui se fait avec une personne ou deux personnes, mais c'est souvent assez étroit,
01:34 et c'est adapté à l'enseignement d'une activité qui est celle de chirurgien,
01:42 qui n'est pas facile, qui ne s'apprend pas à clinquer des doigts,
01:45 qui ne s'apprend pas en un semestre, ou en deux semestres, ou en cinq semestres,
01:49 qui est une affaire de toute la vie. Et là, le compagnonnage se passe avec quelqu'un,
01:54 avec lequel il se passe une cohésion, une espèce de relation qui va jusqu'à l'amitié avec le temps,
02:06 et qui permet de transmettre ce que nous ont transmis nos maîtres précédemment.
02:12 Donc voilà, il ne faut pas confondre, à mon avis, c'est galvauder la notion de compagnonnage
02:21 en le réduisant à la simple activité d'enseigner.
02:26 Les temps changent, et je ne vais pas être du genre à dire "ouais, c'était mieux avant,
02:31 les jeunes ne sont plus bien maintenant", je ne suis pas du genre à me laisser abattre
02:37 par ce genre de considérations, et je me remets en cause, moi, d'ailleurs à l'époque,
02:42 je le confesse, on a travaillé, moi et beaucoup de mes collègues,
02:45 on travaillait beaucoup trop au péril de nous, de nos familles,
02:49 donc je me remets en cause face à cet élément, et puis face aussi au fait que la société change,
02:55 et donc il faut qu'on réfléchisse à faire en sorte que la vie du chirurgien-pédiatre en formation
03:02 et puis du chirurgien-pédiatre confirmé deviennent compatibles avec une vie normale
03:06 ou aussi normale que possible, et donc il faut en tenir compte parce que c'est vrai que le temps
03:12 de formation est un peu diminué, le repos de garde, la durée d'activité dans les services
03:18 qui est plus courte, la durée de formation d'internat qui est plus courte,
03:21 même si c'est remplacé par le docteur junior, ça fait quand même un internat qui est plus court,
03:24 et puis pour celles et ceux qui brèguent une carrière universitaire,
03:27 ils vont avoir la mobilité, donc ils vont partir un an à l'étranger,
03:30 donc tout ça hache un peu le compagnonnage, donc il faut qu'on réfléchisse un peu à trouver des solutions,
03:37 ce qui est en cours, mais ne vous inquiétez pas, on en a sous le pied.
03:41 Donc le compagnonnage en chirurgie orthopédique est quelque chose d'extrêmement important
03:46 parce que nous avons un métier de transmission.
03:50 Notre travail en chirurgie orthopédique et en chirurgie d'une façon générale est un travail
03:55 où le geste technique est l'aboutissement d'une réflexion,
04:00 et en fait il faut qu'au fur et à mesure de notre formation,
04:05 on soit formé à la fois sur la décision, mais aussi sur la réalisation d'un accès technique.
04:11 Et donc du coup, tout ça se transmet.
04:15 Donc on va avoir une première étape de transmission qui va concerner toute la partie liée à la prise de décision,
04:24 qui concerne la prise en charge du malade,
04:27 et puis on a une deuxième partie qui sera liée à la réalisation de l'acte technique lui-même.
04:32 Donc ça c'est pour la partie, je dirais métier, de notre activité.
04:37 Puis ensuite on a l'environnement qui nous entoure, et on vit dans un environnement qui change beaucoup.
04:43 Et là encore, il est très important d'être accompagné dans l'environnement.
04:48 C'est-à-dire qu'un chirurgien orthopédiste, par exemple, quand il va s'installer en activité libérale,
04:54 il va se retrouver dans une fonction de chèque d'entreprise,
04:57 sans avoir automatiquement été formé à ça,
05:00 et il va falloir donc que des gens soient autour de lui,
05:03 pour lui apprendre à circuler dans cet environnement changeant.
05:09 Donc on fait un métier où il est très important de transmettre de l'un à l'autre,
05:17 et où les générations les plus anciennes doivent transmettre aux générations les plus jeunes.
05:24 Et c'est pour ça que, dans le cadre de notre organisation,
05:27 on a des relations extrêmement fortes et privilégiées avec les plus jeunes, et notamment le CGO.
05:33 Moi j'ai une anecdote assez marquante.
05:36 Premier semestre, première garde CH périphérique, avec une équipe de vieux semestres,
05:41 une très bonne équipe de chirurgiens du CH,
05:44 et forcément au bout de dix jours, première garde, tout seul,
05:48 deux heures du matin, au milieu de l'hôpital.
05:50 Et il y a un gros dilemme au niveau d'une prise en charge de patient.
05:53 Et là je me dis, bon, là s'il faut l'opérer en urgence, il faut que je prévienne le chef,
05:57 et puis forcément, en premier semestre, on n'a pas d'expertise,
06:00 donc on se dit, il faut vraiment que mon seigneur de garde soit au courant,
06:03 qu'il me donne son avis.
06:05 Alors je l'appelle, et en fait, il a à peine décroché,
06:10 et il me dit, écoute, appelle ta mère, et il me raccroche au nez.
06:14 Et là, moi, combiné de téléphone à l'oreille, complètement estomaqué,
06:19 de me dire, bon, j'appelle quand même à deux heures du matin
06:21 pour avoir une information sur peut-être un bloc en urgence,
06:24 et il ne m'écoute même pas, et il me raccroche au nez.
06:28 Alors, un peu déstabilisé, il me pose une question,
06:31 est-ce qu'il fallait vraiment que je l'appelle, quelle est la situation clinique,
06:34 au final, qu'est-ce que je voulais lui dire,
06:36 et en fait le chirurgien me rappelle cinq minutes après.
06:38 Il me dit, bon, écoute, là, vas-y, explique-moi, qu'est-ce qui se passe ?
06:41 Et donc, ça, pour dire que le compagnonnage,
06:45 mon point de vue, c'est, bien sûr, il faut accompagner les personnes au maximum
06:49 dans une zone de confort, mais il faut, à certains moments aussi,
06:52 arriver à ne pas être dans quelque chose de trop difficile,
06:57 mais il faut arriver à mettre les gens légèrement au niveau de la limite
07:00 du légère inconfort qui leur permet de se remettre en question,
07:03 et qui vont en fait leur permettre d'aller de l'avant, de progresser,
07:06 bien sûr, en termes de compétences théoriques,
07:08 mais bien sûr, également, parce que c'est le cœur de notre métier,
07:10 c'est avant tout une prise de décision.
07:11 Donc, dans la prise de décision, dans l'autonomie,
07:13 parce qu'après, quand on est chirurgien, on est face au patient,
07:16 on est dans le site opératoire, et voilà, c'est nous qui avons les instruments en main,
07:20 c'est nous qui devons prendre des décisions, parfois assez importantes,
07:24 et qui peuvent soit déterminer les résultats post-opératoires,
07:27 soit parfois se prendre trois, quatre heures de temps opératoire dans la vue,
07:30 si jamais on a fait une fracture pré-opératoire ou une complication.
07:33 [SILENCE]