Le philosophe Michel Onfray était l’invité de #LaGrandeInterview de Sonia Mabrouk dans #LaMatinale sur CNEWS, en partenariat avec Europe 1.
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00:00 - Et place donc à la grande interview sur CNews et Europe 1.
00:02 Bonjour à vous Michel Onfray.
00:04 - Bonjour.
00:04 - Et bienvenue.
00:05 Philosophe, auteur de très nombreux ouvrages à succès,
00:07 dont le dernier en date s'intitule "Le fétiche et la marchandise"
00:11 aux éditions Bouquins.
00:12 Michel Onfray, quel bilan d'étape faites-vous du voyage d'Emmanuel Macron ?
00:16 Tel Aviv, Ramallah, Pays arabes, Jordanie, Egypte.
00:19 Le président français a-t-il trouvé dans ce contexte inflammable
00:22 les bons mots et la position qui doit être celle de la France ?
00:26 - D'abord, c'est l'affaire de l'Emmanuel Macron.
00:29 C'est-à-dire on ne se change pas.
00:30 Et qui plus est, dans des moments comme ceux-là
00:32 qui sont des moments un peu révélateurs.
00:33 C'est-à-dire qu'il parle, il parle beaucoup.
00:36 Simplement, c'est quoi la voix de la France aujourd'hui ?
00:39 Depuis 1992 et le traité de Maastricht, nous n'avons plus de souveraineté.
00:42 Donc, on n'a même pas de politique particulière.
00:47 Elle n'est pas lisible, elle n'est pas visible cette politique particulière.
00:50 Donc, c'est le personnage qui l'incarne, qui donne l'impression
00:52 que la politique de la France, c'est ce que dira Emmanuel Macron.
00:55 Et il dit quoi ? Tout ce qu'on veut bien entendre.
00:58 Qu'est-ce qu'il fait à Ramallah ? Il s'en prend plein la figure.
01:00 Il entend finalement une espèce de loge du Hamas.
01:03 Et puis, il est là. Il est sur son siège. Il écoute.
01:06 Et puis, il y a Mahmoud Abbas qui est en train de lire ses pages.
01:08 Et puis, il nous dit que finalement, la thèse de Mélenchon, je dirais.
01:11 C'est-à-dire que le Hamas est un mouvement de résistance qui a une occupation.
01:15 Enfin, on connaît le logiciel de ces gens-là.
01:18 Et il ne peut rien faire. Il ne peut rien dire.
01:21 Par ailleurs, la diplomatie, elle est secrète, elle est discrète.
01:24 On ne se montre pas comme ça. On travaille.
01:27 Sauf si on a besoin de sécuriser sa propre banlieue.
01:31 Je pense qu'il faisait un voyage de politique intérieure quand il allait là-bas.
01:34 – A Tidor ? – Ah, sûrement pas.
01:37 Puisque effectivement, moi, ça fait 20 ans que je le dis.
01:40 Nous sommes dans une guerre civile à bas bruit.
01:42 On se moque de moi depuis un certain temps.
01:44 J'ai des unes de journaux contre moi.
01:45 Je passe pour un fasciste, pour un nazi, pour un type d'extrême droite.
01:48 Je dis simplement, maintenant, j'enlève juste à bas bruit.
01:52 Donc, effectivement, le président de la République,
01:54 c'est aujourd'hui qu'il faut faire attention avec des gens qui, eux,
01:56 défendent la Palestine, le Hamas, qui s'en viennent nous expliquer
01:59 que ça n'est jamais que la réponse du berger à la bergère,
02:01 que les vieilles théories sartriennes, la contre-violence,
02:05 en disant "c'est Israël qui a commencé".
02:07 Mais on pourrait aussi remonter jusqu'au grand moufti de Jérusalem
02:11 qui collaborait avec le régime nazi, si vraiment on veut expliquer les choses.
02:14 Et la création de l'État d'Israël peut sembler un dommage de guerre,
02:18 un genre de Yalta. En son genre, il y a une légitimité.
02:21 Pour les juifs, il y a une disposition d'une terre,
02:23 et une légitimité pour Israël à exister.
02:25 Maintenant, si on veut faire de l'histoire, faisons de l'histoire.
02:27 Ils ont toujours été du côté des nazis.
02:29 Mais je le dis vraiment, parce qu'aujourd'hui on traite tout le monde de nazi.
02:32 Mais là, le grand moufti de Jérusalem a rencontré Adolf Hitler.
02:35 Donc il y a un moment donné où il faut accepter le partage du monde.
02:38 Il y a combien ? 57 pays musulmans sur la planète ?
02:40 - Mais à quel partage, Michel ? Quand vous avez hier,
02:42 et il me semble que c'est une déclaration très importante,
02:45 d'Erdogan, le leader turc, qui affirme que le Hamas est un groupe de libérateurs.
02:50 Est-ce qu'on est aujourd'hui dans une sorte de guerre de civilisation ?
02:53 C'est ce qu'a dit Peau-Proulx à Benjamin Netanyahou.
02:55 Il dit "civilisation, barbarie".
02:57 - Mais je suis très étonné qu'on pose encore la question.
03:00 Et j'entends même parfois, même sur votre plateau, des gens qui se demandent
03:03 "C'est pas une guerre de civilisation, monsieur,
03:05 qu'est-ce qu'il va leur falloir à ces gens pour qu'ils puissent consentir au fait que
03:08 oui, c'est une guerre de civilisation, il y a des juifs, il y a des musulmans."
03:11 Je rappelle qu'en Arménie, c'est exactement la même chose.
03:13 On a des chrétiens et on a des musulmans.
03:15 Je le dis depuis des années.
03:17 Je n'ai pas attendu le conflit au Karabakh.
03:19 Ça fait 20 ans que j'écris par exemple dans les nouvelles d'Arménie.
03:22 Arat Oranyan m'avait demandé des articles il y a très longtemps.
03:24 Et je disais "c'est un conflit de civilisation, c'est une guerre de religion".
03:29 On me dit "mais pas du tout, c'est du nationalisme".
03:31 Et j'entends les gens qui me disaient ça il y a 20 ans qui aujourd'hui commencent à dire
03:34 "Ah oui, c'est peut-être un conflit de civilisation quand même".
03:36 Qu'est-ce qu'il va falloir pour que les gens comprennent que oui,
03:38 Samuel Huntington avait raison quand il écrivait "Le choc des civilisations".
03:42 Moi, j'en me souviens des discussions que j'avais avec mon éditeur de l'époque,
03:45 Grassey, qui me disait que Huntington en gros créait les conflits qu'il annonçait ou qu'il décrivait.
03:51 Je dis "mais il ne les crée pas, il explique juste ce qu'il faut voir".
03:55 Donc c'est quoi ? C'est un bloc judéo-chrétien avec à la pointe Israël ?
03:59 Islamiste, l'Ummah, la communauté, cette communauté est unie derrière le Hamas aujourd'hui.
04:03 La totalité, presque la totalité des pays, c'est quoi ?
04:06 57 pays, je crois, 2 milliards de musulmans sur la planète, Israël, 22 000 km².
04:12 Derrière qui ? Derrière la Palestine ou le Hamas ?
04:14 Vous faites une différence.
04:15 Oui, ce n'est pas la même chose.
04:16 Je pense qu'on ne devrait plus entendre les Palestiniens qui sont contre le Hamas.
04:20 On devrait nous expliquer aussi ce que c'est que le régime du Hamas.
04:22 Parce que depuis 2005, qu'Israël a quitté la bande de Gaza, c'est le Hamas qui pilote, qui dirige, avec l'argent européen.
04:28 Je dénonce ça aussi depuis des années, depuis 20 ans.
04:31 Je fais savoir qu'Arafat a récupéré beaucoup d'argent et que c'est sa veuve qui est aujourd'hui héritée
04:37 de l'argent que l'Europe a donné, mais pas les Palestiniens.
04:40 Et que les Palestiniens sont trahis et trompés par leur gouvernement.
04:43 Et que, évidemment, ce n'est pas la même chose de parler du Hamas, de parler de la Palestine, la Palestine vraiment.
04:48 Et puis l'espèce de Palestine avec un P majuscule qui est devenue une occasion pour la planète entière de cristalliser de l'antisémitisme.
04:55 Donc c'est notre guerre à tous, si je vous entends, Michel Onfroy.
04:57 C'est-à-dire que si le Hamas, c'est Daesh, c'est ce qui est en train d'être dit, c'est notre guerre à tous, civilisation versus barbarie.
05:04 C'est-à-dire contre combien de pays ? Rappelez-le.
05:06 Je crois 57.
05:07 2 milliards d'habitants, 22 000 km², je crois.
05:10 Je ne suis pas très bon pour les chiffres, mais pour Israël.
05:12 Et puis quoi, 9 millions d'habitants ?
05:14 C'est-à-dire que vous prenez le globe et vous regardez l'ensemble des pays musulmans et vous dites,
05:19 vous avez un tout petit point d'aiguille, là ici c'est Israël.
05:21 Est-ce qu'on ne pourrait pas imaginer que cette terre soit possible pour le peuple juif,
05:26 après qu'il y eut la Shoah et que, je le rappelle, le grand moufti de Jérusalem avait pris le parti d'Adolf Hitler ?
05:31 Parce qu'on fait une grande histoire en disant, quand le général de Gaulle,
05:35 vous avez beaucoup fait voir sur votre chaîne le discours du général de Gaulle sur Israël,
05:39 avec cette petite phrase dont on oublie qu'elle est dans un contexte.
05:42 Et le général de Gaulle, quand il dit d'Israël ce qu'il dit,
05:45 et qui n'est pas audible en dehors du contexte, il dit,
05:48 "Attention Israël, vous êtes une victime, si vous attaquez, vous serez un bourreau
05:53 et ce serait problématique dans le monde arabe que vous soyez devenu le bourreau."
05:57 Que n'a-t-il eu raison à cette époque ?
06:00 On entend ce qu'il disait à cette époque,
06:02 alors qu'on a tout de suite imaginé, pour des raisons de politique politicienne,
06:04 qu'il fallait attaquer le général de Gaulle.
06:06 - Michel Onfray, quand aujourd'hui vous entendez des pays européens,
06:09 dont la France, affirmer évidemment Israël a le droit légitime de se défendre,
06:13 toutefois il faut respecter le droit international,
06:15 c'est-à-dire attention aux bombardements dans Gaza,
06:18 qu'est-ce que vous répondez à cela ?
06:20 C'est important de rappeler cette mesure ?
06:22 - Écoutez, moi j'ai fait une thèse de philosophie politique et juridique,
06:25 et ma directrice de thèse voulait que je travaille sur le droit de la guerre.
06:28 Et je lui ai dit, mais ça n'existe pas le droit de la guerre.
06:30 - Ah, il y a quand même des règles.
06:31 - Bien sûr, mais à partir de quel moment vous pouvez dire,
06:34 vous avez le droit de tuer, mais là vous n'avez plus le droit de tuer.
06:37 Comment est-ce qu'on imagine que vous pouvez tuer ?
06:39 Alors oui, c'est un soldat qui tire sur un autre soldat,
06:42 et puis en même temps, vous avez des dommages collatéraux,
06:45 et vous avez tué des civils, mais vous ne l'avez pas voulu,
06:47 vous avez juste simplement, quand on bombarde, on bombarde.
06:49 - C'est le beau président.
06:50 - Mais je pense que ça fait plaisir de parler d'un droit international,
06:53 d'un droit de la guerre, mais quelque chose d'oxymorique.
06:55 Le droit de la guerre, il y a un moment donné, on se dit, non, la guerre,
06:58 d'une certaine manière, c'est toujours de la barbarie,
07:00 tuer quelqu'un parce qu'on n'est pas d'accord avec lui, ça n'a aucun sens.
07:03 Mais il y a un moment donné où effectivement,
07:05 vous êtes bien obligé de tuer si on vous agresse.
07:07 - Mais vous entendez la petite musique, comment dire,
07:10 c'est une pensée qui circule, selon laquelle il n'y aurait pas d'équivalence
07:13 aux yeux de l'Occident entre une vie israélienne et une vie palestinienne.
07:17 - Ce n'est pas là quel problème.
07:19 Ce sont les victimes innocentes.
07:21 Il y a des victimes innocentes aujourd'hui en Palestine.
07:25 Dénonçons ce régime, et puis dénonçons ceux qu'ils ne dénoncent pas.
07:28 C'est-à-dire que je vois la France insoumise voir la Nupes,
07:31 parce que la Nupes, d'un seul coup, elle se dit,
07:34 ah, ce n'est pas très bien ce que dit Jean-Luc Mélenchon.
07:36 Moi, ça fait des années que je dénonce Jean-Luc Mélenchon.
07:38 Eux, ils ont juste découvert que c'était un peu trop gros
07:40 et que ça se voyait comme le nez au milieu de la figure.
07:42 Mais enfin, quand ils ont fait leur Nupes,
07:44 Mélenchon était déjà sur des positions islamo-gauchistes
07:47 et déjà sur des positions antisémites.
07:49 Il y a de l'antisémitisme en permanence.
07:51 On le voit, les jeux de mots...
07:53 - Est-ce qu'il y a de l'antisémitisme ?
07:55 Jean-Luc Mélenchon est coupable d'être antisémite ?
07:58 - J'entends qu'il flirte avec les codes antisémites.
08:02 Les éléments de langage.
08:04 Enfin, c'est quoi, Hitler, il flirtait avec les codes antisémites aussi ?
08:07 Il y a un moment donné où il y a des antisémites,
08:09 et puis il faut le dire, clairement.
08:10 Il faut faire une histoire de l'antisémitisme
08:12 qui n'est pas le même suivant...
08:13 - Vous l'avez faite, hein ?
08:14 - Bien sûr, ça fait 20 ans que je fais tout ça.
08:16 - "Articles sans concession" est édifiant dans le Figaro magazine.
08:18 - Récemment, mais dans le traité de la théologie,
08:21 il y a 20 ans, dans "Décadence", un autre livre
08:24 qu'on m'a beaucoup reproché, et que j'assume pleinement.
08:27 Je dis "mais lisez-le, vous verrez que je dis ça depuis toujours".
08:30 Donc il y a juste un moment donné où il faut nommer l'antisémitisme "antisémitisme".
08:35 Il prend la forme aujourd'hui de l'antisionisme,
08:37 parce qu'on ne peut plus aujourd'hui défendre l'inégalité des races
08:40 comme le faisaient Gobineau et puis Hitler.
08:43 Donc la Shoah est passée par là.
08:45 Et puis il y a la loi Guesso, ces gens-là sont malins.
08:47 Ils savent très bien que si vous tenez un propos antisémite,
08:49 vous allez tout de suite au tribunal.
08:50 - Mais si Jean-Luc Mélenchon, pour reprendre ce que vous dites,
08:53 antisémite Michel Onfray, imaginons, c'est un scénario de politique fiction,
08:57 mais l'est-il vraiment de fiction ?
09:00 Jean-Luc Mélenchon face à Marine Le Pen, qui ici même à votre place,
09:03 affirme être le rempart aujourd'hui, le bouclier des Français juifs.
09:07 Donc vous avez un candidat antisémite face à qui ?
09:10 - C'est l'erreur de Jean-Luc Mélenchon, il est obsédé par lui-même.
09:14 Il est infatué comme ça n'est pas possible,
09:16 et il veut absolument être "is no good",
09:18 il veut être le calife à la place du calife,
09:20 et il veut être au second tour.
09:22 C'est son truc, il veut dans son CV qu'on ait un truc
09:24 anti-mastrichien, pro-mastrichien, émitterandiste,
09:27 Robespierrist, défenseur de Castro, de Chavez, etc.
09:32 Maintenant il ajoute une ligne en disant "voilà défenseur du Hamas", etc.
09:35 Il veut être au second tour, mais il sera battu.
09:38 Il se dit, par Marine Le Pen, ça me paraît évident.
09:40 - Pourquoi ? Parce que beaucoup vont...
09:42 - Moi je rencontre plein de gens qui me disent "mais moi je vais voter pour elle, c'est terminé".
09:45 J'ai même encore eu des amis hier qui me disaient "j'ai rien compris au discours de Zemmour",
09:49 mais maintenant j'ai compris.
09:51 Je dis juste que les cartes sont en train d'être rebattues,
09:54 et que cette idée d'être au second tour et de battre Marine Le Pen,
09:58 si elle s'y trouve, mais il a juste 30 ans de retard.
10:01 - Parce que par rapport à ces personnes que vous citez,
10:03 il ne peut pas y avoir de choix pour elles,
10:05 entre un candidat qu'ils qualifieraient d'être antisémite,
10:07 et puis une candidate qui, pour reprendre vos mots,
10:10 Michel Onfray vous dit "elle n'est plus d'extrême droite, elle n'est pas d'extrême droite".
10:13 - Mais moi je veux aussi expliquer ce qu'était l'extrême droite,
10:15 en disant, j'ai relu, rebatté à l'époque, j'avais lu "Les mémoires d'un fasciste"
10:18 et "Les décombres" quand c'était paru chez Jean-Jacques Pauvert,
10:20 il y a une trentaine d'années, une quarantaine d'années,
10:23 et j'ai relu, parce que Jean-Luc Barret avait refait une édition pour les éditions bouquins,
10:26 et justement une édition qui n'était pas expurgée pour le coup,
10:29 en disant "voilà ce qu'est l'extrême droite".
10:31 L'extrême droite, elle ne croit pas en la République, elle déteste la République.
10:35 Elle croit en la violence, elle estime que le Parlement n'est pas utile,
10:39 qu'on n'a pas besoin de régimes représentatifs,
10:41 elle est antisémite, l'extrême droite, etc.
10:44 Et je lui dis "mais Marine Le Pen, elle fait l'éloge du chaos,
10:47 elle fait l'éloge des black blocs, elle fait l'éloge des voitures renversées,
10:50 elle fait l'éloge de l'islamo-gauchisme, elle fait l'éloge de la haine de la République".
10:54 Parce qu'on déteste la République quand on se comporte comme les députés de la France Insoumise
10:58 se comportent à l'Assemblée Nationale.
11:00 Il y a un moment donné on se dit "mais il n'y a même pas de décence,
11:02 il y a une espèce d'avachissement généralisé, cet homme n'est même pas député,
11:05 il n'est même pas député et il pilote les députés de la France Insoumise
11:10 avec probablement des textos, des tweets ou des éléments de langage,
11:13 en regardant sa propre télévision, mais qu'est-ce que c'est que cette façon de faire de la politique ?
11:17 Et il aura peut-être une place au second tour, encore que j'y crois de moins en moins,
11:22 juste parce qu'il dit "il m'a manqué 400 000 voix".
11:25 Et si on est à 19% on peut être élu,
11:27 mais il a un logiciel mitterrandien des années 70 dans la tête,
11:31 ça ne fonctionne pas comme ça.
11:32 Plein de gens disent "mais Marine Le Pen, où sont les condamnations pour antisémitisme de Marine Le Pen ?
11:36 C'est tout. Où sont ces condamnations ?"
11:38 Alors qu'on est si pronds aujourd'hui à porter plainte contre quelqu'un...
11:41 - Donc contre Le Pair, Jean-Marie Le Pen et Marine Le Pen, c'est une rupture, une césure...
11:45 - Il y a exactement la même chose qu'entre Maurice Thorez et Fabien Roussel.
11:48 Moi je ne reprocherais pas à Fabien Roussel de défendre le pacte germano-soviétique,
11:52 je dis simplement qu'il s'est passé des choses.
11:54 Il s'est passé des choses entre le parti socialiste de Fort aujourd'hui
11:57 et celui de Mitterrand qui disait, 74 je crois,
12:00 "quiconque ne veut pas rompre avec le capitalisme ne peut pas être dit socialiste".
12:03 On a vu Mitterrand quoi.
12:05 Donc effectivement les partis ont changé.
12:07 Ou Chirac qui arrivait en faisant des signes derrière des portraits immenses du général de Gaulle
12:11 et puis aujourd'hui Éric Ciotti,
12:12 où il est le gaullisme de ces gens qui ont abandonné la souveraineté de la France en 1992.
12:16 Donc tous ces partis ont changé. Ils ont tous changé.
12:19 - Mais qui est capable de parler à tous les Français aujourd'hui ?
12:22 Parce que Front Populaire, dont vous êtes le co-fondateur avec Stéphane Simon,
12:27 consacre sa une et beaucoup de dossiers au général de Gaulle.
12:30 Qui est capable ?
12:31 - Un gaullien, il nous faudrait effectivement un gaullien.
12:34 - Existe-t-il ? Existe-t-elle ?
12:35 - Il y a des gens qui se réclament.
12:37 Il y a des gens qui se réclament du général de Gaulle mais qui ne sont pas crédibles.
12:39 - Bien sûr, beaucoup.
12:40 - Presque tout le monde, vous avez raison.
12:42 Mais simplement, quand on a voté oui à Maastricht,
12:44 on ne peut pas se réclamer du général de Gaulle.
12:45 Il y a un moment donné où il faut faire un nettoyage.
12:47 Tous ceux qui ont voté oui à Maastricht en 1992 ne sont pas gaullistes.
12:51 Vous avez en revanche De Villiers, vous aviez Pascua, vous aviez Chevènement,
12:54 qui eux étaient des gens qui disaient non à l'époque, à l'Europe de Maastricht,
12:58 et qui eux seraient crédibles.
12:59 Bon, simplement, ils ont quitté la politique politicienne.
13:03 - Michel Onfray, si on ne trouve pas cette personne,
13:06 je ne sais pas si c'est un homme ou une femme, providentielle,
13:08 vous avez dit quand même, ça m'a interpellé,
13:10 parce que c'est vrai que vous dénoncez avec cohérence depuis quelques années
13:13 une guerre civile à bas bruit.
13:14 Vous enlevez le bas bruit ?
13:15 C'est-à-dire que c'est une guerre civile en ce moment ?
13:17 - Le jour où vous avez un président de la République qui s'en va à Canossa,
13:20 pour le coup c'est le cas de le dire,
13:22 et qui dit "oh là là, il faut que je marche sur des oeufs,
13:24 il faut que je sois extrêmement prudent, un petit coup avec Netanyahou,
13:27 un petit coup avec Mahmoud Abbas,
13:28 il faut absolument que dans les banlieues on m'écoute,
13:30 et il ne faut pas que dans les banlieues on se décide à descendre dans la rue
13:33 en allant brûler des voitures".
13:35 Et ils ont fait quoi quand il y a eu les émeutes dans la rue l'autre fois ?
13:40 Ils ont juste attendu que les cahiers disent "bon, attendez,
13:43 c'est mauvais pour le business, donc maintenant vous rentrez à la maison".
13:45 Mais s'ils estiment que ce sera encore mieux pour le business
13:48 et qu'il ne faut pas rentrer à la maison parce que ça pourrait par exemple
13:51 pousser Mélenchon aux portes du pouvoir,
13:54 il n'attend que ça lui, il a l'impression que l'homme providentiel c'est lui.
13:58 Emmanuel Macron n'a-t-il pas raison de tenir compte d'un contexte ?
14:01 Je voudrais rappeler quelque chose en 2015-2016,
14:03 Michel Onfray vous affirmait que face à la vague de terrorisme en France,
14:06 qu'il fallait replacer tout ça dans un contexte plus large,
14:09 que c'était une politique étrangère menée par la France depuis 91
14:12 qui fait que nous avons ces ennemis-là.
14:15 Est-ce que ça veut dire qu'aujourd'hui le Hamas est un monstre qui a été créé ?
14:19 - J'ai fait un tweet à une époque au moment du Bataclan
14:23 en disant que nous avions récolté nationalement ce que nous avions semé internationalement.
14:28 Évidemment quand vous faites un texto comme ça, tout le monde dit,
14:31 il y avait un monsieur Raisky qui avait dit que je crachais sur les morts du Bataclan.
14:35 Je disais simplement "je fais juste mon travail de philosophe".
14:39 On peut toujours dire "les nounours, les bougies, plus jamais ça, on chante".
14:44 D'accord on peut faire ça, ça s'appelle de la moraline,
14:47 c'est ce que Nietzsche appelait de la moraline.
14:49 Nietzsche il appelle ça la généalogie, le fait de rechercher les causes.
14:51 En disant "mais pourquoi des gamins peuvent arriver et rafaler à la Kalachnikov
14:55 des gens qui sont juste en train de danser ?"
14:57 - Alors pourquoi le Hamas en arrive là ?
14:59 - Parce qu'il y a une politique internationale qui n'est pas à la hauteur.
15:03 Ça fait des années que nous sommes islamophiles à l'intérieur du pays
15:07 et islamophobes sur le restant de la planète.
15:09 - Nous sommes islamophobes à l'extérieur ?
15:11 - À part de vilpins, c'est un moment de grâce et un peu mythique.
15:15 Mais nous avons été derrière les Etats-Unis à chaque fois qu'il a fallu massacrer des musulmans sur la planète.
15:21 Nous avons massacré des Irakiens, nous avons massacré des Libyens,
15:24 nous avons massacré un certain nombre d'autres pays, détruits un certain nombre de pays.
15:29 Donc il y a un moment donné où il ne faut pas imaginer non plus
15:32 qu'il y ait plusieurs millions de musulmans morts sur la planète,
15:35 avec la politique américaine.
15:37 Et maintenant les Américains nous disent "attention, il ne faut pas refaire l'erreur qu'on a pu commettre en Irak".
15:40 Moi je disais que c'était une erreur à l'époque de l'Irak,
15:43 je suis pris plein de la figure quand je disais que c'était une erreur.
15:45 Maintenant ce sont les Etats-Unis qui disent que c'était une erreur.
15:47 Ce serait bien de les éviter ces erreurs.
15:49 Donc évidemment actuellement ce qui se passe en Israël,
15:52 c'est susceptible de générer, je passe mes mots, une guerre mondiale.
15:56 Vous avez la totalité des pays, presque entiers, des pays arabes,
16:00 on peut parler de l'Algérie aussi, le Qatar, on parle du Qatar, c'est très lointain,
16:04 mais l'Algérie, qui défend le Hamas, nous avons des binationaux aujourd'hui,
16:08 je crois qu'on ne peut pas renoncer à cette nationalité quand on est Algérien.
16:13 Un binational franco-algérien aujourd'hui défend le Hamas,
16:16 théoriquement, je ne peux pas faire un amalgame en disant "ils sont tous ainsi".
16:21 Il y a juste un moment donné, comment on gère ça quand on est chef de l'État ?
16:24 On n'est pas crédible depuis, ça fait des années qu'on n'est pas crédible.
16:27 Et moi j'en ai moins contre la force de ce peuple-là
16:30 que contre la faiblesse de cet État qui a laissé cette force instable.
16:34 Je pense que cette grande interview va faire réfléchir et réagir.
16:37 En tout cas, je vous remercie.
16:38 Je vais citer votre dernière ouvrage une nouvelle fois,
16:41 "Le fétiche et la marchandise et front populaire"
16:43 avec ce dossier consacré au général de Gaulle.
16:46 D'actualité comme toujours.
16:47 Absolument.
16:48 Merci Michel Onfray.
16:49 Merci à vous.
16:50 [Musique]
16:54 [SILENCE]