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Frédéric Taddeï et ses invités débattent des grandes questions du XXIe siècle dans les #VisiteursDuSoir

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00:00:00 Ils sont déjà quatre autour de moi, ils seront huit en tout au cours de la soirée.
00:00:06 Les visiteurs du soir, ça commence juste après le rappel des titres.
00:00:10 Mathieu Deveze.
00:00:11 Emmanuel Macron se rendra mardi à Tel Aviv.
00:00:17 Le chef de l'État y rencontrera notamment le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.
00:00:21 Ce déplacement intervient plus de deux semaines après les attaques meurtrières du Hamas.
00:00:25 30 ressortissants français ont été tués et sept sont toujours portés disparus.
00:00:30 Un nouveau convoi humanitaire de 17 camions est entré dans la bande de Gaza.
00:00:34 Il s'agit du deuxième convoi destiné au territoire palestinien.
00:00:38 Le premier est arrivé hier par le terminal de Rafah,
00:00:40 le seul point de passage du territoire qui ne soit pas contrôlé par Israël.
00:00:45 Enfin, l'Iran avertit Israël et les États-Unis
00:00:47 que la situation risque de devenir incontrôlable au Moyen-Orient.
00:00:51 Le ministre iranien des Affaires étrangères demande, je cite,
00:00:54 de mettre un terme aux crimes contre l'humanité et aux génocides à Gaza.
00:00:58 Et de leur côté, les États-Unis ont annoncé le renforcement
00:01:00 de leurs moyens militaires dans la région.
00:01:04 [Générique]
00:01:16 – Bonsoir, bienvenue sur le plateau des visiteurs du soir, il est 22h,
00:01:20 c'est la fin de la semaine, on peut prendre un peu de recul sur l'actualité.
00:01:24 On va s'intéresser à partir de 22h20 au projet de loi immigration
00:01:27 du ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin qui a occupé l'actualité
00:01:31 toute cette semaine et qui sera discuté au Sénat à partir du 6 novembre.
00:01:35 Annoncé en juin 2022, il avait été repoussé,
00:01:38 puis à journée il vient d'être relancé après l'attentat
00:01:41 qui a fait un mort de Dominique Bernard et de blessés à Arras,
00:01:44 il y a huit jours.
00:01:45 On en débattra pendant une heure sur tous ces aspects,
00:01:48 avec Pierre Conesa, avec Yves Mamouz, Maïne Lachère,
00:01:52 tous les trois sont déjà là, Dries Ghali et Yvan Guesto seront en duplex,
00:01:57 Gérard Chalian nous rejoindra à 23h, mais on ne parlera pas que de ça non plus,
00:02:01 à 23h30 on reviendra avec Rachel Khan sur la folle histoire du rouge à lèvres
00:02:06 et l'on commence tout de suite l'émission avec Marcela Iacoub,
00:02:10 écrivain et juriste qui publie "Pénis Horribilis",
00:02:14 une critique du néo-féminisme et de ses conséquences en France
00:02:18 depuis l'apparition du mouvement #MeToo en 2017,
00:02:21 il y aurait d'après vous une véritable croisade contre la sexualité dans notre pays.
00:02:25 On a voté en effet un grand nombre de lois dont le but n'est plus de punir les auteurs de violence,
00:02:30 dites-vous, mais de protéger la société contre la sexualité elle-même.
00:02:34 Vous n'exagérez pas un peu ?
00:02:36 - Non, je crois pas, je pense que c'est eux qui exagèrent.
00:02:39 C'est les politiques et c'est aussi le féminisme radical
00:02:43 qui s'est installé en France à partir des #MeToo.
00:02:48 Parce que la sexualité, je peux continuer ?
00:02:51 - Je vous en prie.
00:02:53 - Parce qu'effectivement la notion du sexisme
00:02:57 avec laquelle ils font une lutte pour l'égalité entre les hommes et les femmes
00:03:02 est fondée sur la question sexuelle comme étant le grand point de discorde
00:03:08 entre les hommes et les femmes, les hommes étant censés soumettre les femmes,
00:03:12 les habilire, etc.
00:03:14 Et la sexualité c'est le moyen principal par lequel cet habilissement a lieu.
00:03:20 Et voilà.
00:03:23 Pourquoi ?
00:03:25 Moi ma critique, je continue ?
00:03:27 - Oui, oui, mais je peux vous interrompre ?
00:03:29 - Bien sûr, non, non, j'ai pas fait. Moi je suis trop bavarde alors...
00:03:32 - Vous dites que le droit pénal est devenu un outil de prévention
00:03:35 et plus seulement de répression des comportements.
00:03:38 Si bien qu'au fond le champ d'intervention du droit pénal
00:03:42 est beaucoup plus large aujourd'hui qu'il ne l'était il y a 15 ans par exemple.
00:03:46 - Oui, il y a...
00:03:48 En fait, moi je pense que les nouvelles lois qui ont été votées,
00:03:53 les lois pénales qui sont...
00:03:56 Je pense que les seules lois qui ressemblent à celles-là
00:03:59 sont les lois américaines dont on s'est moqué jusqu'il y a 15 ans en disant
00:04:02 "on va pas devenir comme les Américains ici, nous les Français on aime le sexe"
00:04:06 et là, c'est exactement les mêmes lois que aux Etats-Unis.
00:04:10 Les lois qui sont très proches du droit canonique
00:04:13 plus que du droit laïque par ailleurs.
00:04:16 Par exemple, il y a des interdictions comme le fait par exemple
00:04:20 d'avoir une attente sexuelle contre un animal.
00:04:23 Par exemple, l'azophilie n'était pas pénalisée.
00:04:26 Après la révolution française, on a dit "c'est des lois qui sont liées au péché" etc.
00:04:32 Là, l'azophilie par exemple à nouveau,
00:04:35 si vous touchez un chien, votre chien,
00:04:37 peu importe si vous avez une...
00:04:40 En plus, c'est pas très bien précisé, c'est 7 ans de prison par exemple.
00:04:43 Ou par exemple, épier par le trou, si il y a quelqu'un qui s'échange...
00:04:47 Il se trouve qu'il y a des lois que j'ai découvertes en lisant votre livre,
00:04:50 effectivement par le trou de la serrure.
00:04:52 Je vous ai expliqué que maintenant, si on épie quelqu'un par le trou de la serrure,
00:04:57 même si cette personne est habillée,
00:05:00 si on regarde ses fesses, ses seins, ses parties intimes,
00:05:03 qu'on l'expione par exemple dans une cabine d'essayage,
00:05:07 on est...
00:05:09 Il y a un délit de voyeurisme.
00:05:12 - Oui, c'est ça. - Ça n'existait pas.
00:05:14 - Ça n'existait pas. Ce qu'il y avait avant, c'était le délit d'exhibitionnisme en fait.
00:05:18 Alors non seulement l'exhibitionnisme aujourd'hui est devenu...
00:05:21 Je cite la nouvelle loi qui est quand même incroyable.
00:05:24 Le fait par exemple de simuler...
00:05:26 Avant, il fallait que les parties sexuelles soient exposées etc.
00:05:30 ou avoir une relation sexuelle explicite.
00:05:33 Là, le fait de simuler un acte sexuel,
00:05:38 y compris même quand les parties du corps ne sont pas exposées,
00:05:42 ça vous peut être puni pour exhibition sexuelle.
00:05:47 Vous avez un casier judiciaire avec...
00:05:50 - Ce que vous dites, c'est qu'en fait, par exemple, on se souvient qu'aussi bien
00:05:54 Madonna que Jim Morrison ou beaucoup plus longtemps,
00:05:58 le danseur Nijinsky ont fait scandale
00:06:01 en mimant la masturbation sur scène, par exemple.
00:06:05 C'est des grands scandales qu'on connaît, mais qui nous semblent dater d'il y a très très longtemps.
00:06:09 Vous dites qu'aujourd'hui, en fait, on ne peut plus le faire en France.
00:06:13 - Exact. Et c'est passé en fait...
00:06:14 Moi, j'étais étonnée qu'on ne peut plus mimer l'acte sexuel sur scène.
00:06:17 - On ne peut plus mimer l'acte sexuel dans un lieu public.
00:06:19 - Sur scène, c'est autre chose.
00:06:20 - Non. En public.
00:06:22 - Parce que là, il y a des...
00:06:24 L'exhibition sexuelle, ça ne concerne pas forcément les théâtres etc.
00:06:28 Dans lesquels il suffit d'émettre interdit en moins de 18 ans et c'est légal.
00:06:31 Je parle de la rue, par exemple, de lieux exposés à la rue publique.
00:06:34 C'est-à-dire que si on pouvait faire des performances avant avec des...
00:06:38 Ça, ces performances-là vont être interdites, en fait.
00:06:40 Il n'y aura pas une excuse pour l'art, en fait.
00:06:42 En fait, l'art n'a jamais été aussi persécuté qu'aujourd'hui, par ailleurs.
00:06:45 Je pense que c'est la... On vit la fin de l'art.
00:06:48 Mais cette loi ne va pas, disons, contribuer à la renforcer.
00:06:52 Il y a des interdits comme ça qui sont très étranges,
00:06:56 qui relèvent vraiment...
00:06:58 Et des...
00:06:59 Enfin, il y a beaucoup d'autres que je cite qui sont très étonnants,
00:07:03 où la personne ne fait rien, il n'y a aucune victime.
00:07:06 Et il semblerait que la loi voudrait
00:07:10 épier les pulsions malsaines de la personne avant qu'elle ne s'exprime.
00:07:14 - La prévention, donc. - Pardon ?
00:07:16 - C'est de la prévention. Enfin, c'est ce qu'on veut faire.
00:07:19 - Oui, c'est comme si... Finalement, c'est les pulsions qui sont en question,
00:07:22 pas les comportements humains, en fait.
00:07:23 C'est... Voilà, c'est la prévention.
00:07:27 C'est des lois dictatoriales, en fait.
00:07:30 On ne peut pas les accepter.
00:07:31 Je pense qu'on ne peut pas les accepter, mais bon, tout le monde les a bien acceptées.
00:07:34 Moi, je pense que les gens ne s'étaient pas au courant.
00:07:36 Et tout est ébloui par les harcèlements sexistes, etc.
00:07:41 Et des rues et compagnie.
00:07:43 Et tous les...
00:07:45 J'explique aussi toutes les présomptions, par exemple,
00:07:48 irréfragables des viols, qui sont copiées des lois américaines directement.
00:07:52 C'est-à-dire qu'on ne fait pas la distinction entre un mineur qui a 14 ans
00:07:56 et un autre qui a 5 ans.
00:07:58 C'est-à-dire que la pédophilie disparaît comme infraction spécifique.
00:08:02 - Depuis qu'on a mis la majorité sexuelle à 15 ans,
00:08:05 parce qu'en France, il n'y avait pas de majorité sexuelle,
00:08:07 au contraire de ce qu'on croit. Il n'y en avait pas.
00:08:09 Et donc, depuis qu'on en a mis une à 15 ans,
00:08:12 c'est vrai qu'une fille de 14 ans
00:08:17 peut faire l'amour avec un garçon qui a 5 ans de plus que lui.
00:08:20 C'est ça, mais pas 6.
00:08:21 Pas 5 ans et demi.
00:08:23 Si un garçon qui ferait l'amour avec une fille de 14 ans,
00:08:26 alors qu'il a 5 ans de plus qu'elle,
00:08:28 serait considéré comme un pédophile,
00:08:30 exactement comme s'il avait couché avec un enfant.
00:08:32 - Oui, c'est ça.
00:08:33 Et du coup, à force d'exagérer les traits,
00:08:37 les choses importantes, comme par exemple,
00:08:39 le fait que la pédophilie soit quelque chose de clairement établi,
00:08:43 l'interdiction, par exemple, d'avoir une relation avec quelqu'un de moins de 12 ans.
00:08:49 Là, maintenant, il y a une sorte de flou.
00:08:52 En même temps, le consentement ou pas, ça n'a aucune importance.
00:08:57 Je dis que c'est une révolution pénale.
00:08:59 Vous avez vu la quantité d'infractions, c'est plus du tout les mêmes.
00:09:02 Et surtout, la chose la plus intéressante, à mon avis,
00:09:05 c'est qu'en 1980, quand on a créé les crimes sexuels modernes,
00:09:11 en fait, on a mis la barrière entre ce qui est un viol le plus grave,
00:09:14 c'est la pénétration sexuelle.
00:09:16 Et l'agression sexuelle serait les autres attentes
00:09:18 qui ne sont pas la pénétration.
00:09:20 Là, aujourd'hui, il n'y a plus cette barrière.
00:09:22 Pourquoi ? Parce qu'un grand-père a fait une connie linguiste
00:09:25 une fois à sa petite fille, un fait divers.
00:09:28 Alors, on a mis, c'est grave, alors c'est viol.
00:09:30 Alors, ils ont mis acte d'agression sexuelle et connie linguiste,
00:09:33 ils vont continuer à ajouter, c'est l'autre effet divers.
00:09:36 - Le viol, c'est ce que c'est, c'est dans le sens où il y a pénétration.
00:09:39 - Là, non, maintenant, il y a pénétration plus certains actes,
00:09:44 non, connie linguiste, ce n'est pas une pénétration,
00:09:46 mais on sait qu'on viole.
00:09:47 C'est considéré que c'est grave.
00:09:49 Alors, c'est complètement...
00:09:51 - C'est grave, reconnaissez-le.
00:09:52 - OK, c'est grave, mais l'agression sexuelle, c'est grave aussi.
00:09:55 Mais je veux dire qu'il y avait cette barrière.
00:09:58 Le fait d'être violé, c'est qu'on rentre dans votre intimité corporelle.
00:10:01 Ce n'est pas la même chose qu'on ne rentre pas dans votre intimité corporelle.
00:10:04 Ou même, par exemple, considérer qu'il y a viol
00:10:07 quand une personne est pénétrée ou quand elle est obligée à pénétrer.
00:10:09 Alors que moi, avec les doigts, par exemple,
00:10:11 si vous vous obligez à pénétrer avec...
00:10:13 Enfin, je parle des choses considérées nettes, excusez-moi,
00:10:15 je suis habituée à parler des choses comme ça.
00:10:17 Mais par exemple, si on vous oblige à pénétrer quelqu'un avec un objet,
00:10:22 c'est comme un viol.
00:10:25 Enfin, c'est n'importe quoi.
00:10:27 Et il y a la seule...
00:10:29 Comment dire ?
00:10:30 La seule rationalité que l'on trouve,
00:10:33 c'est effectivement le fait de chercher des gens qui sont comme malsains à l'intérieur.
00:10:38 Ils cherchent cette personne qui va jouir de quelque chose de malsain,
00:10:42 de voir la victime dans une situation...
00:10:45 Des vulnérabilités.
00:10:46 C'est compliqué à...
00:10:48 Moi, je pense que pour certains, à certains égards,
00:10:50 ça correspond un peu avec la théorie du sexisme,
00:10:52 mais c'est autre chose, non.
00:10:54 C'est quelque chose qui va au plus profond de l'être
00:10:56 pour voir est-ce qu'on est des pervers, en fait ?
00:10:58 Est-ce qu'on est des malades ?
00:11:00 - Mais vous parlez d'une croisade contre la sexualité,
00:11:02 mais celles et ceux que vous visez ne se réclament pas du puritanisme.
00:11:08 Ils considèrent qu'au contraire, ils sont pour que
00:11:10 on vive tous une sexualité très libre du moment qu'elle est consentie.
00:11:15 - Oui, le problème, c'est que...
00:11:17 Si vous voulez, moi, dans ce livre, j'essaye de...
00:11:21 Il n'y a, par exemple, pas consentie,
00:11:22 parce que la prostitution, par exemple, elle est interdite maintenant.
00:11:26 - Et même si elle est consentie ?
00:11:28 - Sinon, ce n'est pas prostitution.
00:11:29 La prostitution, par définition, elle est consentie, en fait.
00:11:31 Et là, par exemple, il n'y a pas...
00:11:34 Il y a toutes des présomptions irréfragables,
00:11:35 comme je disais tout à l'heure, de non-consentement, même quand il s'agit...
00:11:39 - Je suis obligée de vous corriger, la prostitution n'est pas interdite,
00:11:41 c'est le client qui n'a pas le droit d'être au client.
00:11:44 Mais la prostitution, c'est vrai qu'on considère
00:11:47 que une prostituée ne peut pas consentir à louer ou à vendre son corps.
00:11:52 - Il y a une part de la part de bonhomme illégal,
00:11:54 une sorte de mise en question de ça,
00:11:56 avec l'effet d'interdire l'achat et le service sexuel aussi.
00:11:59 Toutes les présomptions irréfragables des viols, d'inceste, etc.
00:12:02 qu'il y a...
00:12:03 Et tous les délits sans victime aussi.
00:12:05 C'est-à-dire qu'ils sont des actes qui n'ont pas de victime.
00:12:10 Par exemple, le fait d'une attente sur un animal,
00:12:14 l'animal ne souffre pas, il n'est pas révélant,
00:12:17 c'est un exemple de caresse par exemple pour un animal.
00:12:20 Et voilà, alors là, on peut dire qu'on n'est pas exactement dans l'assistance entre consenti et non consenti.
00:12:28 On est entré dans une autre ère, disons.
00:12:31 Mais il y a encore autre chose.
00:12:34 - Pour vous, en fait, il y a l'idée sous-jacente que tous les hommes sont des prédateurs
00:12:40 et que toutes les femmes sont assignées, au fond, à une éternelle place de victime.
00:12:47 - Oui, parce que, disons que, peut-être qu'il faudrait dire qu'elles sont assignées à...
00:12:52 C'est ça qui m'échoque le plus de ces mouvements,
00:12:55 c'est le fait que les femmes soient...
00:12:57 Ça ne leur pose pas de problème, le fait que les femmes soient des objets sexuels.
00:13:00 Pourquoi la place des objets sexuels,
00:13:04 pourquoi les femmes sont toujours considérées comme étant la chose qui va dire "tu veux de moi, tu veux pas de moi,
00:13:09 tu m'as choisi, moi j'ai dit oui, etc." ?
00:13:12 C'est elles qui souffrent, c'est elles qui...
00:13:15 C'est comme s'il n'y avait pas une égalité dans les désirs, en fait.
00:13:19 Alors qu'on est dans une ère dans laquelle normalement, on aurait dû...
00:13:22 Nous, les femmes, on a les mêmes droits, on aspire au même poste, etc.
00:13:27 Et même il y a une mise en cause aussi de la famille, dont je vais parler après.
00:13:32 Et du coup, j'ai l'impression que le mouvement #MeToo est en train de...
00:13:36 de vouloir faire en sorte que la femme reste dans ses rôles d'objet,
00:13:40 mais il faut qu'elle soit un objet protégé,
00:13:41 alors qu'il ne veut pas mettre en question le rôle d'objet.
00:13:45 Alors que les femmes devraient être des sujets de leur sexualité, comme les hommes.
00:13:47 Par exemple, je disais comme un exemple, c'est un peu cocasse, mais...
00:13:50 Par exemple, Sandrine Rousseau, c'est plein qu'il y a quelqu'un qui harcèle une femme sexuellement,
00:13:57 mais c'est plein pas si c'est une personne qui harcèle une personne qui...
00:14:01 Pardon, qui ne fait pas jouir une femme, par exemple.
00:14:03 Ça, c'est pas un problème, parce que la jouissance féminine, ça pose des problèmes.
00:14:07 Le fait qu'une femme n'ait pas de jouissance, c'est pas du tout un problème politique,
00:14:10 alors que ça devrait l'être quand même, un problème politique.
00:14:13 - Vous imaginez si maintenant, la politique se mêlait à ce point de la sexualité des individus ?
00:14:18 - Moi, si vous voulez, il y a une époque où ça s'est mêlé.
00:14:20 Par exemple, au XVIIIe siècle, les prêtres veillaient d'une manière très minutieuse
00:14:29 à ce qu'il y ait de la jouissance en ce moment dans les couples matrimoniales,
00:14:32 sinon ils disaient qu'il n'y avait pas d'enfants, en fait.
00:14:34 Alors, il peut y avoir des contrôles comme ça.
00:14:37 Ce serait plus sympa aussi qu'une contrôle...
00:14:39 Enfin, moi, je pense que tant qu'à faire si on nous contrôle comme ça,
00:14:42 qu'on contrôle aussi, qu'on dise "non, c'est un homme, voilà,
00:14:44 tu ne fais pas jouir ta femme, et pas seulement quand il la fait".
00:14:48 C'est ça, être un sujet, être la foi.
00:14:50 Voilà. Alors pourquoi cette question ?
00:14:55 Moi, je pense que c'est ça la principale critique qu'on peut adresser à ces mouvements,
00:14:58 c'est que pourquoi la femme est un objet toujours ?
00:15:01 Parce qu'elle est toujours dans la famille.
00:15:03 Je montre des cinquettes de l'INSEE dans mon livre,
00:15:05 je fais des... Enfin, c'est un peu peut-être ennuyeux,
00:15:08 tous ces trucs de l'INSEE, mais bon, c'est important quand même.
00:15:10 - Ce que vous dites, c'est qu'en fait...
00:15:11 Parce que votre critique, si vous voulez, n'est pas une critique conservatrice,
00:15:15 comme on pourrait l'imaginer. - Exact.
00:15:17 - C'est au contraire...
00:15:19 Le but de tout ça pour vous, c'est de maintenir les femmes
00:15:22 dans le carcan de la famille traditionnelle.
00:15:25 - Exact. - Et au fond,
00:15:26 vous, vous avez l'impression qu'il pourrait y avoir d'autres formes.
00:15:29 La famille traditionnelle pourrait rester parmi d'autres modèles.
00:15:33 - Exact. - Et qu'on pourrait tout aussi bien
00:15:35 être très heureux et très heureuses dans des familles monoparentales,
00:15:40 dans des familles à plusieurs. Enfin, tout est possible
00:15:45 du moment que tout le monde travaille, tout le monde est content
00:15:47 et tout le monde peut vivre avec ses enfants.
00:15:50 Mais il y aurait plein de modèles possibles.
00:15:54 Et vous avez l'impression qu'au fond, tout ça,
00:15:56 c'est pour enfermer les femmes dans le carcan.
00:15:58 - Exact. - Ce qui, pour vous,
00:15:59 est un carcan de la famille traditionnelle.
00:16:01 - Exact. Je pense que c'est comme les modèles hégémoniques
00:16:03 qui sont en train de s'effondrer.
00:16:05 Par ailleurs, ce que j'essaie de démontrer,
00:16:07 vous l'avez très bien... Vous l'avez...
00:16:08 Vous l'avez... Pardon.
00:16:09 Vous l'avez dit mieux que moi, excusez-moi.
00:16:13 Je parle trop vite et mal. Et du coup, effectivement,
00:16:16 moi, je pense qu'il y a quelque chose, si vous voulez,
00:16:18 qui est très étonnant, c'est que ces mouvements-là,
00:16:22 au lieu de dire... Bon, ils savent très bien
00:16:24 que la cause principale des inégalités entre les hommes et les femmes,
00:16:28 c'est la maternité, c'est le rôle de la femme
00:16:30 dans la famille traditionnelle, pas la maternité,
00:16:33 parce que maternité intégritale n'est pas un problème.
00:16:35 C'est le fait d'avoir mère et père,
00:16:36 et avec tout ce qui s'applique comme conséquence
00:16:40 en termes d'emploi pour les femmes,
00:16:41 en termes d'investissement dans le marché du travail, etc.
00:16:44 Bon, ce qui est clair, c'est qu'il y a ça comme problème,
00:16:49 le principal problème pour l'égalité entre les hommes et les femmes,
00:16:51 il y a ça.
00:16:53 Et on n'évite pas que, par exemple,
00:16:54 aujourd'hui, 20% de la population vit seule,
00:16:57 c'est-à-dire seule sans un adulte.
00:16:58 C'est-à-dire qu'il y a un mouvement qui s'est énormément accéléré
00:17:02 depuis en gros une quinzaine d'années, même dizaine d'années,
00:17:05 que chaque année, il y a plus de familles monoparentales,
00:17:08 plus de personnes qui vivent seules,
00:17:10 plus les pays riches et démocratiques,
00:17:11 plus il y a des personnes qui vivent seules, etc.
00:17:13 Et la famille monoparentale continue d'être en France
00:17:17 une sorte de truc misérable.
00:17:19 Là, les pauvres familles, on imagine que c'est toujours une pauvre mère
00:17:22 qui a été abandonnée horriblement par un homme, etc.
00:17:24 Et là, les femmes choisissent, et même les hommes aussi peuvent faire le même,
00:17:28 mais en général, c'est les femmes qui...
00:17:29 C'est des femmes dont je parle
00:17:31 qui sont en train complètement d'éroder la famille traditionnelle.
00:17:36 Et alors, du coup, on lui a parlé de ces formes.
00:17:39 nouvelles qui, peut-être, vont finir effectivement
00:17:41 avec les égalités entre les hommes et les femmes.
00:17:44 Ils vont construire une société dans laquelle il n'y a pas d'hommes et des femmes.
00:17:48 On ne sert tous peut-être non-binaires.
00:17:50 Enfin, tout est possible parce que s'il n'y a plus de famille traditionnelle,
00:17:53 il n'y a plus tous les carcans qui vont avec l'hétérosexualité,
00:17:57 enfin, les visions des genres, etc.
00:17:59 Alors, au lieu de parier sur ce mouvement merveilleux
00:18:02 qui est en train d'avoir lieu,
00:18:03 que je pense que c'est comme une sorte de révolution silencieuse
00:18:06 qui est l'œuvre des femmes par ailleurs,
00:18:08 on est complètement fixé sur la question de la violence sexuelle.
00:18:16 Moi, je pense que c'est un formidable outil de régression sociale.
00:18:24 - Oui, mais c'est aussi ce qui se traduit le plus facilement dans la loi.
00:18:27 C'est contre quoi on peut légiférer.
00:18:29 On ne peut pas tellement légiférer sur le reste.
00:18:31 C'est peut-être aussi pour ça qu'il y a cette inflation que vous décrivez
00:18:34 que j'ai réellement découvert en lisant votre livre.
00:18:36 Je ne savais pas qu'il y avait autant de lois qui avaient été votées depuis...
00:18:39 - C'est vraiment monstrueux.
00:18:40 Mais en fait, effectivement, oui, mais il y a des choses.
00:18:43 Par exemple, dans les pays, disons comme la Suède,
00:18:45 on peut me prendre l'exemple de la Suède ou certaines villes américaines, etc.
00:18:50 On imagine, par exemple,
00:18:52 que faire dans une société dans laquelle les familles sont monoparentales,
00:18:55 où il y a beaucoup plus d'adultes qui vivent seules.
00:18:58 Notre société est construite pour les familles,
00:19:00 alors que la famille, c'est des agrèges chaque année.
00:19:03 Alors, est-ce que notre société est capable d'assumer
00:19:05 ce qui est en train de se passer ?
00:19:06 Non, elle ne veut pas les voir.
00:19:07 Les médias n'en parlent jamais.
00:19:10 Ils essaient toujours de cacher ce qui se passe,
00:19:12 parce qu'on a l'impression que l'amour est toujours victorieux,
00:19:15 comme dans les comédies dramatiques, que l'amour triomphe
00:19:17 et que finalement, ce sont des pauvres gens qui sont seuls.
00:19:20 Alors, être seul, c'est dangereux parce qu'on peut être isolé,
00:19:22 on peut se suicider, etc.
00:19:23 Alors que non, c'est au contraire, les sociétés les plus riches et les plus...
00:19:27 - C'est vrai que le cinéma a fait beaucoup de publicité du conjugalisme.
00:19:31 C'est ça que vous avez l'air d'envraiter.
00:19:33 - Sur la famille et l'amour ?
00:19:35 - À la fin des films, on se marie toujours.
00:19:36 Enfin, on se marie ou on vit ensemble.
00:19:38 - C'est une idéologie, je pense, qui fait beaucoup souffrir les gens,
00:19:43 parce qu'on souffre du fait qu'on n'est pas conforme aux normes.
00:19:46 En réalité, ce n'est pas une raison.
00:19:48 La norme, ça ne fait allusion à rien.
00:19:51 - On s'arrête là.
00:19:53 On fait une pause et on se retrouve tout de suite après,
00:19:57 sur la loi Immigration.
00:20:00 Le projet de Gérald Darmanin.
00:20:02 Depuis 1980, il y a eu 28 lois sur l'immigration votées en France,
00:20:11 une tous les 17 mois.
00:20:13 La dernière, c'est la loi Asile et Immigration du 10 septembre 2018,
00:20:17 sous Emmanuel Macron.
00:20:19 La loi Darmanin devrait donc être la 29e.
00:20:22 Pour débattre de ses principaux aspects,
00:20:24 il est au tour de moi Marcel Ayakou, qui est écrivain et juriste,
00:20:28 qui est né en Argentine, qui est immigré en France en 1989.
00:20:32 Elle vient de publier "Penis Horribilis".
00:20:34 Il y a Pierre Conesa, auteur de nombreux essais.
00:20:37 Le dernier, c'est "État des lieux du salafisme en France,
00:20:40 du séparatisme au terrorisme".
00:20:42 Smaïd Lacher, qui est sociologue,
00:20:45 professeur émérite à l'Université de Strasbourg
00:20:48 et directeur de l'Observatoire du fait migratoire et de l'asile
00:20:52 à la Fondation Georges Ress.
00:20:53 Vous avez beaucoup écrit sur l'immigration.
00:20:55 Le plus récent de vos ouvrages est paru l'année dernière,
00:20:57 c'est "Le fait migratoire et les sept péchés capitaux".
00:21:01 Yves Mamoud, vous avez été journaliste à Libération,
00:21:04 au Canard Enchaîné de peu de temps,
00:21:06 au Monde pendant 20 ans.
00:21:07 Vous êtes l'auteur du "Grand abandon,
00:21:10 les élites françaises et l'islamisme et des dix petits mensonges
00:21:13 et leurs grandes conséquences,
00:21:14 Auschwitz, Israël, la Palestine et nous".
00:21:17 Et en duplex, il devrait y avoir Yvan Gastaut,
00:21:21 qui est historien spécialisé dans l'immigration,
00:21:24 mais pour l'instant, on a un problème de liaison.
00:21:27 En revanche, il doit y avoir Driss Ghali,
00:21:31 dont le dernier livre, c'était "Contre-histoire
00:21:34 de la colonisation française".
00:21:35 Vous êtes venu en parler dans cette émission,
00:21:37 mais vous êtes également l'auteur de "Français,
00:21:40 ouvrez les yeux, une radiographie de la France par un immigré".
00:21:44 On en parlera tout à l'heure de l'aspect lutte antiterroriste
00:21:47 du projet de loi.
00:21:48 Commençons par l'article 3, qui prévoit de régulariser
00:21:53 des travailleurs sans papier en créant une carte de séjour
00:21:56 d'un an pour les métiers empénurés de main-d'œuvre,
00:21:58 le BTP ou l'hôtellerie.
00:22:01 Le gouvernement a déclaré, Gérald Darmanin,
00:22:05 "Etat achèt des mesures de justice envers ceux qui produisent
00:22:08 dans notre pays sans jamais poser de problème d'ordre public".
00:22:11 Les Républicains ne veulent pas de cette mesure.
00:22:12 Ils menacent de déposer une motion de censure.
00:22:17 Pierre Conesa, un mot ?
00:22:20 - Sur l'état de la vie politique française.
00:22:22 - Non, je ne sais pas sur le fait que les Républicains
00:22:24 veulent y parler.
00:22:25 - Il y a un débat sérieux pour adapter la loi de l'immigration.
00:22:30 On débat d'un article.
00:22:32 On ne dit pas qu'on menace de déposer une motion de censure.
00:22:35 Ça veut dire que le parlementaire n'aurait même
00:22:38 de sert à rien.
00:22:39 On ne peut faire que des motions de censure
00:22:41 ou éventuellement du 49-3.
00:22:43 Moi, je suis assez un peu désespéré sur l'état
00:22:45 de la vie politique française.
00:22:47 Donc, c'est plus que sur l'immigration.
00:22:48 - Eh bien, nous, on va en discuter tout de suite après.
00:22:51 Le rappel des titres, Mathieu Deveze.
00:22:54 Emmanuel Macron se rendra mardi à Tel Aviv.
00:22:59 Le chef de l'État y rencontrera notamment
00:23:01 le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.
00:23:03 Ce déplacement intervient plus de deux semaines
00:23:05 après les attaques meurtrières du Hamas.
00:23:07 30 ressortissants français ont été tués
00:23:10 et 7 sont toujours portés disparus.
00:23:12 15 000 personnes ont manifesté aujourd'hui à Paris
00:23:15 lors d'un rassemblement pro-Palestine.
00:23:17 Israël, assassins, Macron, complices,
00:23:19 les participants ont multiplié les slogans pro-palestiniens.
00:23:22 Ils demandent l'arrêt des opérations militaires d'Israël à Gaza.
00:23:26 Enfin, 10 personnes ont été interpellées.
00:23:29 Plusieurs affrontements sont à déplorer
00:23:31 lors de l'évacuation de la ZAD dans le Tarn.
00:23:33 Le ministre de l'Intérieur remercie les forces de l'ordre
00:23:35 qui ont fait face à des individus violents.
00:23:37 Et de leur côté, les organisateurs de la mobilisation anti-A69
00:23:41 dénoncent, je cite, "une attaque brutale de la police
00:23:43 sur le campement et les bâtiments occupés le long du chantier".
00:23:47 [Musique]
00:23:59 Alors faut-il effectivement, pour ce qui concerne les métiers en tension,
00:24:05 que ce soit dans le BTP, dans l'hôtellerie,
00:24:07 mais aussi dans les professions médicales,
00:24:10 faut-il créer des cartes,
00:24:15 alors soit annuelles, soit puréannuelles,
00:24:20 dans les métiers médicaux, des cartes de séjour spéciales ?
00:24:24 Faut-il régulariser les travailleurs clandestins ? Yves Mamoud.
00:24:29 Je suis contre la régularisation des travailleurs clandestins,
00:24:32 mais surtout ce que je voudrais faire remarquer,
00:24:34 c'est que cette notion de métier en tension,
00:24:37 c'est une notion nouvelle d'ailleurs,
00:24:39 c'est apparu assez récemment parce que jusqu'à présent,
00:24:42 quand on parlait d'immigration, quand vous étiez contre,
00:24:45 on vous disait que vous étiez raciste.
00:24:46 Aujourd'hui, il y a une espèce de retrait par rapport à cette situation,
00:24:50 c'est que donc on commence à dire,
00:24:52 oui, mais il y a des problèmes économiques, etc.
00:24:54 Tout ça, c'est une vaste mascarade qui est destinée à justifier
00:24:57 de toute façon un flux migratoire qui est aujourd'hui absolument vital
00:25:00 pour l'économie française, mais pas vital parce que
00:25:03 la France a besoin de main d'œuvre.
00:25:05 La France n'a pas besoin de main d'œuvre.
00:25:06 Et là, je reprends les thèses du professeur Pierre Vermeuren,
00:25:10 c'est que la France a besoin de consommateurs.
00:25:13 Et c'est au titre de la consommation qu'on fait rentrer
00:25:15 des centaines de milliers de migrants chaque année dans ce pays
00:25:19 parce que c'est ça qui tire la croissance française.
00:25:23 Ce pays s'est délesté de son industrie.
00:25:25 Elle est partie en Chine ou bien elle est partie,
00:25:27 elle a été achetée par des Américains ou des Allemands.
00:25:30 Et donc, il reste quelques industries de consommation,
00:25:32 de la distribution, les télécoms, etc.
00:25:34 Et qu'il faut faire tourner.
00:25:36 Et c'est pour le compte de résultats de ces grandes entreprises
00:25:40 qu'on fait rentrer une population nouvelle
00:25:41 parce que les Français ne font plus d'enfants.
00:25:44 C'est une population qui décroît.
00:25:45 Et donc, comme nos gouvernements sont très sensibles
00:25:48 à la bonne humeur des grands patrons de l'industrie française,
00:25:52 on fait rentrer des consommateurs.
00:25:54 Et c'est ça la première fonction de cette immigration.
00:25:58 La deuxième, elle est tout aussi importante.
00:26:00 Elle est entièrement liée à la première.
00:26:02 C'est qu'on donne à cette immigration une fonction de repeuplement du pays.
00:26:07 Il s'agit de faire participer à la croissance démographique française
00:26:13 parce que, justement, naturellement, en France,
00:26:16 mais comme partout ailleurs dans le monde,
00:26:17 d'ailleurs dans les pays développés,
00:26:19 la population tend naturellement à décroître.
00:26:21 Et donc, c'est à ces deux aspects que la question démographique répond.
00:26:28 La question migratoire répond.
00:26:30 - Spain Lecher ?
00:26:31 - Oui, alors, peut-être qu'il faut introduire quelques distinguos
00:26:36 qui ne sont pas du tout subtils,
00:26:38 mais qui sont absolument nécessaires
00:26:39 pour produire un minimum d'intelligibilité sur tout ça.
00:26:44 D'abord, vous savez que le titre de ce projet de loi,
00:26:48 dont on ne connaît pas du tout les résultats par avance,
00:26:51 on ne sait pas du tout quelle va être la nature des marchandages,
00:26:55 des négociations entre les partis politiques,
00:26:58 les partis de la majorité et l'opposition.
00:27:00 - Dans le but de la faire voter, évidemment.
00:27:02 - Dans le but de la faire voter,
00:27:04 dans le but de la faire voter,
00:27:06 mais bon, attendons le résultat dans un premier temps
00:27:10 du rapport de force entre les uns et les autres sur cette question.
00:27:14 Le titre de ce projet de loi, c'est "Contrôler l'immigration
00:27:21 et favoriser l'intégration".
00:27:23 Et il y a beaucoup d'aspects pour ce projet de loi.
00:27:26 Il n'y a pas simplement que l'article 3.
00:27:28 - Non, non, non.
00:27:30 J'en ai évoqué quelques-uns.
00:27:31 - Non, non, vous l'évoquez parce qu'on a cessé de l'évoquer
00:27:37 depuis février 2022,
00:27:41 bon, au moment où on a déposé ce projet de loi.
00:27:47 Je voudrais simplement,
00:27:50 et ce n'est pas du tout pour faire le petit professeur,
00:27:53 mais un clandestin n'est pas un sans-papier.
00:27:57 Ce n'est pas du tout la même chose.
00:27:58 Ce n'est pas du tout les mêmes conditions.
00:28:03 Les sans-papiers qui sont dans un certain nombre de secteurs
00:28:08 sans autorisation de travailler,
00:28:11 il n'y a pas plus public que ces gens-là.
00:28:15 Un clandestin, par définition, c'est surtout,
00:28:19 vous ne vous dérangez pas, je ne fais que passer.
00:28:22 Je n'ai pas à décliner mon nom,
00:28:24 je n'ai pas à décliner mon prénom,
00:28:26 ni ma profession, ni mon âge.
00:28:27 Je n'ai pas à vous dire ce que je fais là.
00:28:29 Je ne fais que passer.
00:28:30 Mais ce que l'on appelle couramment,
00:28:33 ordinairement, le sans-papier,
00:28:35 lui, il vous dit, je suis là, je reste et je travaille.
00:28:39 En réalité, depuis 81, il y a eu deux grandes régularisations.
00:28:44 Il y en a eu une en 81-82 et il y en a eu une en 95.
00:28:48 C'est des régularisations massives, très importantes.
00:28:51 Bon, mais depuis, en réalité, on n'arrête pas de régulariser.
00:28:58 On régularise constamment au fil de l'eau.
00:29:01 Bon, et ce sont des gens qui travaillent,
00:29:04 pour un certain nombre d'entre eux, depuis plusieurs années.
00:29:09 Alors, qu'est-ce qu'on fait de ces gens-là
00:29:13 qui travaillent depuis plusieurs années,
00:29:15 qui cotisent, qui se conduisent de manière tout à fait ordinaire,
00:29:21 sans trouble à l'ordre public ?
00:29:24 Qu'est-ce qu'on fait ?
00:29:25 Il y en a encore qui ont des enfants, qui sont scolarisés.
00:29:29 Qu'est-ce qu'on fait de cette population
00:29:31 qui, visiblement, est embarrassante pour tout le monde
00:29:34 et pour les sans-papier et pour les autorités,
00:29:36 pour les partis politiques, etc.
00:29:37 Qu'est-ce qu'on fait ?
00:29:38 Eh bien, je pense qu'il faut tout simplement régulariser,
00:29:45 selon un certain nombre de critères,
00:29:47 qui auront fait consensus dans la société française.
00:29:52 Donc, vous êtes d'accord avec Gérald Darmanin,
00:29:54 avec le gouvernement ?
00:29:55 Non, mais non, non, je ne suis pas d'accord avec lui,
00:29:58 parce que lui ne sait même pas ce qu'il va faire de ces personnes.
00:30:03 Il ne sait pas, encore aujourd'hui, s'il va régulariser,
00:30:07 qui il va régulariser, dans quelles conditions il va régulariser.
00:30:10 Parce que ça dépend de qui votera sa loi,
00:30:11 c'est ça que vous voulez dire, qu'il va devoir le négocier ?
00:30:13 Entre autres, oui, entre autres.
00:30:15 Mais les critères qui vont être produits pour savoir
00:30:20 qui on doit régulariser, qui on ne doit pas régulariser,
00:30:23 font aujourd'hui encore l'objet de marchandages et de négociations.
00:30:28 Je salue l'arrivée d'Ivan Gastaut, qui nous a rejoint,
00:30:33 historien spécialisé dans l'immigration.
00:30:35 Vous enseignez à l'université de Nice, Sophia Antipolis.
00:30:38 Vous êtes le co-auteur de l'Atlas des Immigrations en France,
00:30:41 avec Pascal Blanchard et Adrien Dubus.
00:30:46 Et alors, votre sentiment sur la régularisation,
00:30:52 annoncée par Gérald Darmanin, d'un certain nombre de sans-papiers
00:30:58 qui travaillent dans des métiers en tension, que ce soit le BTP,
00:31:06 la restauration, merci de m'avoir aidé Pierre Conesa,
00:31:09 ou les professions médicales.
00:31:10 Et je poserai la même question à Dries Ghali d'ailleurs,
00:31:12 parce que l'Afrique s'inquiète de la fuite des cerveaux possible,
00:31:16 en matière de médecins d'ailleurs.
00:31:18 Mais d'abord, Ivan Gastaut.
00:31:21 Oui, je pense qu'effectivement cette discussion est une discussion
00:31:25 qui pose la question du rapport que la société française a
00:31:30 avec la question de l'immigration,
00:31:31 et ce qui est un rapport totalement ambiguë,
00:31:34 parfois même contradictoire,
00:31:36 parce qu'on a des discours qui sont des discours
00:31:37 de fermeture hermétique absolue.
00:31:39 Et puis, on se rend compte que dans la réalité,
00:31:41 il y a besoin d'être aussi dans quelque chose
00:31:44 qui soit aussi pragmatique.
00:31:46 Il me semble, comme le disait tout à l'heure Smayen Lacher,
00:31:48 qu'il y a cette nécessité de s'adapter
00:31:54 à certaines réalités de la société française,
00:31:57 qui montrent qu'effectivement les sans-papiers
00:32:00 sont une réalité depuis bien longtemps.
00:32:02 On peut considérer que, en tant qu'historien,
00:32:04 le point de départ de la question des sans-papiers en France
00:32:06 date de 1972.
00:32:08 1973, c'est une vieille question,
00:32:10 une question qui a été une sorte de serpent de mer
00:32:13 de notre société,
00:32:14 et le fait qu'on puisse envisager que des personnes
00:32:17 qui sont parfois ici sans-papiers
00:32:19 depuis des années, voire des décennies,
00:32:22 qu'elles trouvent, je dirais, une régularisation,
00:32:28 en tout cas l'officialisation de leur présence en France,
00:32:31 me semblerait de nature à apaiser la société française.
00:32:33 Donc moi, je suis tout à fait favorable à cette idée,
00:32:36 et je pense que c'est une idée de bon sens
00:32:39 dans la mesure où, comme on le voit très souvent,
00:32:41 des sans-papiers travaillent depuis des années
00:32:43 et ont une vie tout à fait banale,
00:32:46 même si leur statut est totalement, je dirais,
00:32:49 parfois ubuesque ou contradictoire.
00:32:51 - Dries Ghelly ?
00:32:54 - Bien, je suis toujours surpris par M. Darmanin,
00:32:57 et cette fois, il confirme qu'il est très surprenant,
00:33:01 puisque l'article 3 va couronner,
00:33:05 va rendre très profitable le business model des passeurs,
00:33:10 puisque les passeurs auront un argument de plus
00:33:12 pour faire passer les gens en France et en Europe
00:33:15 pour entre 5 000 euros, 6 000 euros par tête,
00:33:18 via Lompedusa ou ailleurs,
00:33:19 puisque la régularisation finira par arriver,
00:33:22 cette fois au motif des métiers inconscients.
00:33:25 Autre chose, je pense aussi aux millions d'immigrés
00:33:29 qui ont fait la queue devant les consulats de France,
00:33:32 du Maroc, de Tunisie et de l'Algérie,
00:33:33 qui ont eu des visas, qui ont été humiliés pour avoir ces visas,
00:33:36 parce que souvent l'obtention de visa
00:33:38 officiellement relève de l'humiliation,
00:33:40 je suis passé par ça, mais qui ont fait le job,
00:33:43 qui ont suivi les règles.
00:33:44 Quand vous régularisez des cendres papiers
00:33:46 par un centaine de milliers,
00:33:47 vous donnez une claque aux bons élèves
00:33:48 qui ont suivi vos lois, les lois de la République.
00:33:51 Enfin, il y a un non-dit que M. Darmanin et M. Macron
00:33:54 ne veulent pas et ne peuvent pas formuler,
00:33:58 c'est la panne du travail en France.
00:34:00 Bien sûr que les cendres papiers, dans leur majorité,
00:34:03 comme le dit le professeur de Slime, travaillent,
00:34:05 mais pourquoi ils travaillent dans ces métiers ultra précaires,
00:34:09 ultra dégradants du BTP et de la restauration ?
00:34:14 Parce que vous avez des patrons qui ne respectent pas la loi
00:34:16 et vous avez un ministre du Travail,
00:34:18 une inspection du travail qui ne fait pas son job.
00:34:20 Parce que vous avez une grève de la part de certains Français
00:34:24 qui ne veulent plus travailler dans des métiers qui sont mal payés.
00:34:27 Nous avons une grève du travail depuis le corona dans ce pays.
00:34:30 Ça, c'est un problème de société.
00:34:32 Malheureusement, nous faisons toujours appel à l'immigration par facilité.
00:34:38 Nous ne voulons pas former de médecins au nombre suffisant
00:34:40 pour ne pas énerver le lobby des médecins.
00:34:42 Eh bien, nous appelons des médecins marocains.
00:34:44 Eh bien, moi, je me demande qui va soigner ma grand-mère marocaine
00:34:47 si tous les médecins marocains, si tous les médecins béninois
00:34:50 se retrouvent dans les CHU français ?
00:34:52 Qui va soigner les Africains ?
00:34:54 Vous voyez donc, ce sera mon dernier mot,
00:34:55 que l'abdication de la société française,
00:34:58 qui ne veut plus regarder les problèmes en face,
00:35:00 le capitalisme qui est devenu complètement fou,
00:35:02 qui a besoin maintenant de semis-esclaves
00:35:04 pour livrer les Uber, les Deliveroo et faire la cuisine à Paris,
00:35:08 des entrecôtes à 25 euros cuisinées par des sans-papiers.
00:35:12 C'est un scandale.
00:35:13 Vous avez une société où il y a une grève du travail.
00:35:15 Les gens ne veulent plus travailler.
00:35:17 J'exagère, bien sûr, je suis dans l'outrance,
00:35:19 mais vous m'avez compris.
00:35:20 Ces problèmes-là, on ne les regarde pas et on importe des immigrés.
00:35:24 Bon.
00:35:25 - Alors, très vite réaction, Thaïla Chéa.
00:35:27 - C'est très factuel.
00:35:29 Je voudrais dire à Driss, c'est ça ?
00:35:35 - Driss Ghali.
00:35:36 - Driss Ghali, que les sans-papiers
00:35:39 qui pourront possiblement faire l'objet d'une régularisation
00:35:46 n'ont strictement, mais strictement,
00:35:48 rien à voir avec les passeurs.
00:35:50 Les passeurs, non, les passeurs ne sont pas à l'arrivée.
00:35:56 Les passeurs sont au départ.
00:35:58 Et ils sont au départ des flux migratoires.
00:36:00 Je voudrais aussi signaler, et c'est très factuel,
00:36:03 que l'écrasante majorité des sans-papiers
00:36:06 sont entrés régulièrement en France avec un visa.
00:36:09 90% des sans-papiers qui travaillent aujourd'hui
00:36:13 dans les secteurs dits en tension sont entrés avec un visa.
00:36:18 Alors, ils ne sont pas repartis, ils sont restés.
00:36:22 - Moi, ce que je voudrais remarquer,
00:36:24 c'est qu'il y a une dimension très importante
00:36:25 dans ce projet de loi.
00:36:27 C'est le contexte actuel.
00:36:29 C'est que, comme l'exprimait l'historien Georges Bensoussan
00:36:34 dans "Le Point" cette semaine, il disait,
00:36:36 en apportant les travailleurs immigrés,
00:36:39 avec l'immigration, ce qu'on a apporté, c'est de l'islamisme.
00:36:42 Je veux dire, ce projet de loi, il arrive au moment
00:36:44 où un professeur s'est fait poignarder mortellement en France.
00:36:49 Il se fait, ce projet de loi, il arrive au moment
00:36:52 où il y a 15 000 personnes qui manifestent en faveur
00:36:54 d'une organisation terroriste qui s'appelle le Hamas,
00:36:57 à Paris aujourd'hui.
00:36:58 Et ce n'est pas seulement à Paris, c'est à Düsseldorf,
00:37:01 c'est à Francfort, c'est à Madrid, c'est à Bruxelles.
00:37:04 Donc, il y a une espèce de contexte général
00:37:06 de tension avec l'islam qui me paraît difficile
00:37:13 d'accepter un projet de loi qui est destiné...
00:37:15 D'ailleurs, c'est très intéressant,
00:37:18 le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin,
00:37:20 a donné une longue interview au JDD aujourd'hui,
00:37:22 trois pages entières.
00:37:24 On a l'impression, en lisant cette interview,
00:37:27 que le ministre de l'Intérieur s'apprête à dire
00:37:30 "l'immigration, c'est terminé".
00:37:31 Parce qu'il multiplie en permanence les mises en garde,
00:37:35 "oui, mais là, on va les expulser,
00:37:37 on va réformer le droit pour permettre les départs,
00:37:39 et je vous garantis que ça ne va plus se passer
00:37:41 comme ça se passait".
00:37:42 Enfin, on a vraiment l'impression...
00:37:44 Mais en fait, non, tout le projet de loi immigration,
00:37:46 il est fait pour que les flux continuent d'arriver.
00:37:48 Donc, mais le gouvernement est pris entre deux feux
00:37:52 parce qu'il a besoin de cette démigration,
00:37:55 parce que, comme je l'ai dit, la croissance française en dépend.
00:37:58 Il y a l'économiste Patrick Artus qui expliquait
00:38:01 dans "Challenge" il y a sept semaines que
00:38:04 ces 15 dernières années, la croissance française
00:38:06 aurait été négative sans l'immigration.
00:38:09 C'est simple, si les immigrants ne consomment pas,
00:38:12 et ils viennent pour qu'on leur donne des aides
00:38:15 qui vont leur permettre de consommer,
00:38:17 la croissance s'étiole et se tombe en dessous de zéro.
00:38:21 Donc, ce gouvernement est coincé entre le besoin
00:38:25 de satisfaire les grandes entreprises
00:38:27 et le besoin de sentir...
00:38:28 Il sent qu'il y a une opinion publique
00:38:29 qui est quand même aujourd'hui un peu mécontente.
00:38:32 Yves-Angastau, est-ce que vous répondez à Yves Mamoud ?
00:38:37 Oui, alors moi, je pense qu'il faut peut-être distinguer...
00:38:42 Vous avez sans doute raison de faire le lien
00:38:44 entre la manière dont, d'un côté, cette loi est accélérée
00:38:48 dans la mesure où la situation, le contexte est ce qu'il est.
00:38:52 En revanche, moi, je pense qu'il faut quand même distinguer
00:38:56 les drames qui se sont déroulés ces derniers jours
00:39:00 et la question de l'immigration,
00:39:01 dans la mesure où les terroristes ne sont pas tous des étrangers
00:39:06 et que, quelque part, la dimension immigrée
00:39:10 est une dimension très aléatoire.
00:39:11 Et moi, je pense que c'est assez dangereux.
00:39:13 Alors, ne rien faire serait coupable,
00:39:15 je suis d'accord avec vous,
00:39:16 mais il est assez dangereux de considérer qu'en résolvant
00:39:20 le "problème de l'immigration",
00:39:22 on pourrait résoudre la question du terrorisme.
00:39:24 Je pense que, malheureusement, c'est beaucoup plus compliqué que ça
00:39:27 et que cette situation est une situation
00:39:29 qui peut troubler les Français sur une fausse solution.
00:39:32 Alors, c'est vrai que mettre à l'agenda politique
00:39:36 cette loi au moment où le drame vient de survenir,
00:39:38 alors que les choses étaient plus ou moins, je dirais, en suspens,
00:39:43 me semble être aussi très maladroit.
00:39:45 Il y a un volet intégration aussi dans cette loi,
00:39:49 on ne va pas l'observer en détail,
00:39:52 mais il y a un des articles que je voulais vous soumettre.
00:39:57 Le projet de loi dit qu'on devra obligatoirement parler français
00:40:00 pour avoir un titre de séjour.
00:40:02 Avant, il fallait juste prendre des cours de français.
00:40:06 Maintenant, il faut déjà parler français.
00:40:07 Je voulais poser la question à Marcela Iacoub.
00:40:11 Quand vous êtes arrivée en France,
00:40:12 est-ce que vous parliez déjà français ?
00:40:14 J'ai toujours mal, mais c'était bien pire que maintenant.
00:40:19 Mais moi, je trouve que c'est absurde de me poser cette condition
00:40:24 parce qu'il y a beaucoup de personnes qui sont illettrées à l'origine
00:40:28 et qui ont le plus grand mal à apprendre.
00:40:34 Et voilà, par exemple, moi, je n'ai jamais appris.
00:40:36 Je me débrouille. Je ne sais pas.
00:40:37 Je pense que c'est très...
00:40:42 - On sait qu'au moment des grandes vagues d'immigration,
00:40:44 je crois que vos grands-parents sont arrivés en Argentine, en Russie.
00:40:48 À l'époque, des grandes vagues d'immigration,
00:40:49 on arrivait dans des pays dont on ne parlait pas la langue.
00:40:52 Aujourd'hui, c'est vrai que tout communique
00:40:54 et on s'attend à ce que les gens aient déjà appris avant d'arriver.
00:40:59 - Oui, mais c'est ridicule.
00:41:01 Je trouve que c'est très difficile d'apprendre une langue
00:41:03 quand on n'est pas encore dans les pays.
00:41:07 Moi, j'avais fait plein d'efforts pour apprendre.
00:41:09 Quand je suis arrivée, j'avais fini mes cours,
00:41:11 tout ça, la langue française.
00:41:13 Et quand je suis arrivée, je ne comprenais absolument rien.
00:41:17 Et ça m'a pris à peu près...
00:41:19 Je me rappelle, trois ans, quand j'ai pu lire "Le Canard enchaîné",
00:41:24 j'ai dit "j'ai appris la langue".
00:41:26 C'était un test parce que même les journaux,
00:41:28 au début, c'était très compliqué.
00:41:29 Même une personne qui avait fait beaucoup d'études comme moi,
00:41:31 c'était vraiment...
00:41:32 C'est compliqué de parler.
00:41:34 - C'est une vraie intégration parce que "Le Canard enchaîné",
00:41:36 c'est plein de sous-entendus.
00:41:37 Donc, avoir compris les sous-entendus,
00:41:40 ça veut dire que vous êtes une parfaite intégration.
00:41:41 - Pierre Connaissas, sur le volet intégration, justement.
00:41:44 - Écoutez, quand on entend la somme de volets de bois verts
00:41:47 qui est tombée sur Darmanin, il ne doit pas dormir cette nuit.
00:41:49 Il fait une loi.
00:41:51 Une loi, c'est un texte qui doit être débattu.
00:41:54 Il ne faut pas, comme les Républicains, dire "ça, on n'en veut pas".
00:41:56 Il faut que le Parlement, qui éclaire l'opinion publique,
00:41:59 participe à l'élaboration de cette loi.
00:42:01 Bon, s'ils ne veulent pas le faire,
00:42:02 ça veut dire que le Parlement ne sert à rien.
00:42:04 Ensuite, c'est une loi qui, évidemment,
00:42:05 essaye de réguler l'immigration avec des procédures de choix,
00:42:09 mais qui essaye également de réguler les procédures d'expulsion.
00:42:12 - Oui, on va y venir.
00:42:13 - C'est pour dire que si on ne dit pas les deux volets,
00:42:16 si vous voulez, on dit oui.
00:42:17 - Justement, le côté intégration d'abord,
00:42:19 régularisation, intégration après le côté expulsion.
00:42:22 - Oui, mais justement, il a bien choisi un point d'équilibre
00:42:24 qui est de mélanger dans un même texte
00:42:26 une immigration intelligente, consentie,
00:42:30 préparée quand il impose le français.
00:42:32 Ça veut dire, en gros, commencer par réfléchir
00:42:33 avant de venir, effectivement, dans ce pays,
00:42:35 parce que vous risquez de débouter.
00:42:37 Certains pays ont quasiment extradé, si vous voulez,
00:42:38 leur demande de visa.
00:42:40 Il y a en Allemagne, je crois que c'est au Rwanda qu'ils l'ont mis.
00:42:42 Bon, vous voyez, on n'est pas dans ce point-là.
00:42:43 Mais demander un certain nombre de conditions minimum,
00:42:45 ça veut dire ne vous embarquez pas dans un bateau
00:42:47 parce que vous n'êtes pas sûr que vous allez arriver.
00:42:49 Ensuite, le fait qu'effectivement, il est équilibré
00:42:51 sur les métiers en tension.
00:42:52 On va discuter, les métiers en tension,
00:42:54 qu'est-ce qui est en tension, qu'est-ce qui dépend.
00:42:55 Mais enfin, remarquez qu'il y a quand même des médecins.
00:42:58 C'est-à-dire ça, ce n'est pas parce qu'il y a eu du numerus clausus
00:43:01 qu'on manque de médecins.
00:43:02 Ce n'est pas le fait qu'effectivement, ils arrivent clandestinement.
00:43:05 Donc, il y a à la fois des problèmes propres à la société française
00:43:08 et puis un flux d'immigration qui est une immigration de la misère,
00:43:10 effectivement, qu'on va légitimer avec le fait qu'effectivement,
00:43:14 certains métiers manquent de main d'œuvre.
00:43:16 Et encore une fois, on arrivera ensuite à quelque chose
00:43:18 qui est une régulation de l'immigration.
00:43:21 On sait que de toute façon, c'est impossible.
00:43:22 Ça fait 40 ans qu'on vit comme ça.
00:43:24 Mais il reste que la multiplication des textes de loi
00:43:26 qui finalement n'aboutissent pas pose un sérieux problème
00:43:29 de volonté politique.
00:43:32 Oui, je pense que le droit des étrangers,
00:43:35 c'est à peu près l'équivalent du code de la sécurité sociale.
00:43:38 C'est quelque chose d'absolument incompréhensible.
00:43:42 Il faut être juriste et ne pas s'atteler tout seul à décoder
00:43:48 tous les règlements, les circulaires, les lois, les décrets
00:43:53 qui se sont amoncelés depuis 1980.
00:43:57 Je rappelle qu'entre 1945 et 1980, il n'y a eu aucune loi.
00:44:03 Aucune loi.
00:44:04 C'est à partir de 72 qu'on observe un tournant
00:44:06 avec cette fameuse circulaire Marcelin-Fontanet
00:44:11 qui conditionne l'entrée au séjour et la délivrance
00:44:17 d'une carte de séjour au fait d'avoir un travail,
00:44:20 au fait de travailler.
00:44:22 Je voudrais juste...
00:44:25 Je pense que sur ce plateau, nous sommes des gens raisonnables.
00:44:28 Bon.
00:44:30 Dire...
00:44:32 Je sais que vous ne pensez pas à mal,
00:44:37 mais dire "avec l'immigration s'introduit l'islamisme"
00:44:42 me paraît inexact.
00:44:44 - Ah bon ? - Oui, me paraît inexact.
00:44:46 Non, me paraît inexact.
00:44:48 Parce que la seule chose que vous pouvez m'opposer
00:44:51 et avec laquelle je suis d'accord,
00:44:53 c'est de me dire "tel être singulier est arrivé en France
00:44:57 et a commis un attentat".
00:44:58 Mais l'immigration comme totalité,
00:45:04 l'immigration comme collectif,
00:45:07 l'immigration comme processus historique,
00:45:09 l'immigration comme données historiques,
00:45:12 ce n'est pas vrai.
00:45:13 L'immigration ne produit pas du terrorisme.
00:45:19 Le terrorisme correspond...
00:45:21 - Ce n'est pas dit du terrorisme, c'est dit de l'islamisme.
00:45:24 - L'islamisme.
00:45:25 Ce qui revient...
00:45:26 Franchement, entre nous, c'est à peu près la même chose.
00:45:30 Terrorisme, islamisme, les islamistes produisent du terrorisme,
00:45:33 les islamistes sont des terroristes.
00:45:36 On l'entend à longueur de journée.
00:45:39 Alors par ailleurs, les flux migratoires...
00:45:41 Oui, on l'entend, franchement.
00:45:43 - Ce n'est pas faux.
00:45:44 - Non, non.
00:45:47 Ce n'est pas ça du tout que je conteste.
00:45:48 Je conteste le fait qu'on dise que l'immigration
00:45:53 comme processus collectif, comme données historiques,
00:45:55 produit ipso facto, automatiquement, quasi.
00:45:59 - Je suis tout à fait d'accord.
00:46:01 Mais là, effectivement, c'est tellement petit
00:46:04 par rapport à tous les phénomènes de richesse
00:46:07 qui apportent l'immigration à un pays.
00:46:10 On s'est content de dire qu'il y a peut-être une possibilité
00:46:14 d'augmenter un tout petit peu plus
00:46:17 le nombre de terroristes.
00:46:19 - Vous n'allez pas me faire le coup de dire
00:46:20 que l'immigration est une chance pour la France.
00:46:22 - Vous n'allez pas accepter Bernard Stasi,
00:46:25 il faut le renvoyer.
00:46:26 - Moi, je dis que c'est une donnée historique
00:46:29 et il faut faire avec.
00:46:31 - Moi, je dis que quand on importe des populations
00:46:33 sans contrôle, quand on laisse rentrer des millions de gens,
00:46:37 on importe leurs problèmes avec eux.
00:46:39 Et donc, ce qui arrive avec l'immigration musulmane,
00:46:42 principalement, ce sont tous les conflits internes à l'islam.
00:46:45 Et parmi tous ces conflits internes à l'islam,
00:46:47 il y a les conflits inter-islamistes
00:46:50 et qui sont extrêmement importants.
00:46:52 Donc, on a aujourd'hui les frères musulmans,
00:46:54 le tablig, les salafistes et tout ça,
00:46:56 qui sont aujourd'hui implantés sur le territoire national
00:46:58 parce qu'ils sont arrivés avec l'immigration.
00:47:00 - Mais ils sont implantés sur le territoire national.
00:47:02 En France, ils sont implantés sur le territoire,
00:47:04 sur tous les territoires nationaux.
00:47:05 En Europe, ils sont implantés.
00:47:07 Ils sont implantés dans les pays musulmans.
00:47:09 - Bien entendu, c'est pour ça.
00:47:11 - Non, en Arabie Saoudite, ils ne sont pas implantés.
00:47:14 - Moi, je voudrais faire une remarque
00:47:16 parce qu'effectivement, vous utilisez le concept d'immigration.
00:47:19 La France est le pays qui a accueilli
00:47:20 la plus grosse communauté juive,
00:47:21 la plus grosse communauté arménienne,
00:47:23 la plus grosse communauté musulmane,
00:47:24 la plus grosse communauté chinoise
00:47:26 des pays de l'Union européenne.
00:47:28 Nous n'avons des problèmes qu'avec une partie
00:47:29 de la communauté musulmane.
00:47:30 Donc, on ne peut pas parler de l'immigration en général.
00:47:33 Vous avez raison de le dire.
00:47:34 Oui, c'est ça.
00:47:35 C'est-à-dire qu'il faut bien reconnaître qu'aujourd'hui,
00:47:36 on a quand même un phénomène de terrorisme
00:47:38 et que ce terrorisme, il est surtout islamisme.
00:47:40 Il est du côté de Corse, mais ça, c'est endogène.
00:47:43 Donc, vous voyez ce que je veux dire ?
00:47:44 Si on ne prend l'immigration comme un concept global,
00:47:46 on oublie la partie de cette loi
00:47:48 qui est justement le problème de l'expulsion
00:47:50 et donc de la réduction de ce flux qui est non maîtrisé
00:47:54 et pour lequel on entre dans des degrés de dangerosité,
00:47:56 donc sur lesquels on reviendra.
00:47:57 - On va y revenir juste après 23h.
00:47:58 Je voudrais redonner la parole à Adries Ghali
00:48:01 parce qu'il ne sera plus là après 23h.
00:48:05 Donc, effectivement, sur le côté,
00:48:09 est-ce qu'il y a un lien mécanique entre immigration et terrorisme ?
00:48:15 C'est un sujet qu'on abordera tout à l'heure,
00:48:17 mais il a été abordé là.
00:48:18 Votre réaction ?
00:48:22 - Je voulais revenir sur l'intégration d'abord.
00:48:25 Le français, c'est bien.
00:48:26 Il faut parler français, c'est très bien,
00:48:28 mais l'intégration, c'est plus compliqué que ça.
00:48:31 On s'intègre toujours à une force.
00:48:32 On s'intègre à un pays qui se fait respecter.
00:48:35 Or, quand on voit des commissariats de police
00:48:37 attaquer aux mortiers en toute impunité,
00:48:39 quand on voit la dégradation des Champs-Elysées
00:48:41 pour un oui, pour un non,
00:48:42 après qu'une équipe de foot ait gagné ou perdu un match,
00:48:45 ça, ça réduit l'intégration.
00:48:46 Parce que l'être humain s'accroche,
00:48:50 s'intègre à une force, à un pays qui se fait respecter.
00:48:53 Ensuite, évidemment qu'il y a un lien évident, brutal,
00:48:57 malheureusement qu'il ne me plaît pas en tant que musulman,
00:48:59 mais qui est réel,
00:49:00 entre une partie de l'immigration venant du Maghreb
00:49:03 et du pays des musulmans et le terrorisme.
00:49:06 Par respect pour les victimes du Bataclan
00:49:09 et les victimes des attentats,
00:49:11 nous devons le reconnaître.
00:49:12 Maintenant, il faut aller plus loin et essayer de régler ça.
00:49:15 Il ne faut pas rester juste à l'indignation.
00:49:17 Et voilà ma réponse.
00:49:19 Évidemment.
00:49:19 Même question, Yvan Gastaut.
00:49:23 Oui, moi je me placerai sur un autre plan.
00:49:26 Le premier, c'est de considérer...
00:49:28 Alors, il ne s'agit pas de dire que l'immigration
00:49:29 est une chance pour la France.
00:49:30 Je pense que oui, effectivement,
00:49:31 c'est une donnée historique et qu'il faut faire avec.
00:49:34 Et cette donnée historique,
00:49:35 elle met en scène le fait que...
00:49:38 Moi, j'aurais tendance à dire "garros amalgame",
00:49:40 dans la mesure où oui, il y a la problématique du terrorisme,
00:49:43 il y a la problématique d'une menace
00:49:46 qui peut tout à fait être grave pour la société française.
00:49:51 Elle l'est déjà, d'une certaine façon.
00:49:53 Mais de notre côté, c'est trop facile,
00:49:56 je pense que c'est trop simple de considérer
00:49:58 qu'en ayant la possibilité de résoudre
00:50:00 le "problème de l'immigration",
00:50:03 on aurait résolu tous ces problèmes.
00:50:05 Et j'aurais tendance à considérer que l'immigration,
00:50:08 quand on dit "immigration",
00:50:10 tout de suite, ça engendre une sorte d'émotion.
00:50:13 C'est de la politique autour de la notion d'émotion.
00:50:16 Et c'est vrai que depuis le début des années 80,
00:50:19 les choses se sont un peu enlisées sur ce sujet.
00:50:22 C'est-à-dire qu'effectivement,
00:50:23 quand on évoque le thème de l'immigration,
00:50:25 c'est immédiatement une sorte de débat national
00:50:29 autour de quelque chose qui est sensible.
00:50:30 Et pourquoi est-ce qu'on est sensible à ça ?
00:50:32 Parce qu'on a eu tendance,
00:50:33 et on a encore tendance à le faire aujourd'hui
00:50:35 et même sur ce plateau,
00:50:36 à séparer le "e" du "nous".
00:50:38 L'immigration, c'est à la fois des flux, effectivement,
00:50:40 qui arrivent vers la France ou vers l'Europe,
00:50:43 mais c'est aussi une question de personnes.
00:50:44 On parlait des sans-papiers tout à l'heure,
00:50:45 qui sont des personnes installées depuis parfois des années,
00:50:48 voire des décennies.
00:50:50 Et ce n'est pas tout à fait la même chose.
00:50:53 Parce que ces personnes installées, c'est du "nous",
00:50:55 ce n'est pas que du "e".
00:50:56 Et donc, il me semble que c'est difficile de créer une barrière
00:51:00 qui serait ce d'un côté et ce de l'autre.
00:51:02 À ce titre-là, il me semble qu'il faut justement
00:51:04 éviter les amalgames.
00:51:05 - Pardon.
00:51:06 - Oui, Marcela Yacoub.
00:51:07 - Non, mais moi, je trouve...
00:51:09 Juste une question.
00:51:10 Pourquoi...
00:51:10 Moi, je suis très étonnée.
00:51:13 Pourquoi...
00:51:13 Si ce n'est pas une chance pour un pays,
00:51:16 l'effet d'avoir une immigration,
00:51:18 est-ce que vous pensez que c'est une malchance,
00:51:19 comme le Front national...
00:51:20 Enfin, vous avez les mêmes idées que l'extrême droite,
00:51:23 si c'est une malchance.
00:51:24 Alors, si ce n'est pas une chance, l'immigration,
00:51:25 c'est une malchance pour un pays.
00:51:27 Est-ce que vous me posez la question à moi ?
00:51:29 - Non, je crois que c'est à Yves Mamoud.
00:51:32 Répondez vite, parce qu'il nous reste 40 secondes.
00:51:34 - L'immigration peut être une chance,
00:51:36 mais elle peut être aussi une malchance.
00:51:37 Je veux dire, quand on fait rentrer
00:51:39 un demi-million de personnes par an dans ce pays
00:51:42 et que ces personnes viennent principalement
00:51:44 des pays musulmans,
00:51:46 qui sont eux-mêmes traversés par des conflits assez terribles,
00:51:48 je trouve que ce n'est pas forcément une chance.
00:51:50 - Oui, mais là, vous m'avez dit
00:51:52 que l'immigration n'est pas une chance.
00:51:53 Moi, je pense que...
00:51:54 - Non.
00:51:54 - Si vous dites que ce n'est pas une chance,
00:51:55 c'est une malchance.
00:51:55 Alors, vous avez une position claire ?
00:51:57 - C'est un slogan en France qui a existé à un moment donné.
00:51:59 - C'était Bernard Saint-Denis.
00:52:00 - L'immigration, c'est une chance pour la France.
00:52:02 Donc, vous êtes un salopard si vous ne pensez pas comme moi.
00:52:07 C'est ça que ça voulait dire.
00:52:09 - On s'interrompt là provisoirement.
00:52:12 On va laisser le rappel des titres à Mathieu Devez.
00:52:15 Je remercie Yves Mamoud, Driss Ghali et Yves Gastaut.
00:52:20 Gérard Chalian va nous retrouver.
00:52:22 Mais d'abord, Mathieu Devez, le rappel des titres.
00:52:25 Emmanuel Macron se rendra mardi à Tel Aviv.
00:52:31 Le chef de l'État y rencontrera notamment
00:52:32 le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.
00:52:35 Ce déplacement intervient plus de deux semaines
00:52:37 après les attaques meurtrières du Hamas.
00:52:39 30 ressortissants français ont été tués
00:52:41 et 7 sont toujours portés disparus.
00:52:44 15 000 personnes ont manifesté aujourd'hui à Paris
00:52:46 lors d'un rassemblement pro-Palestine.
00:52:48 Israël, assassins, Macron, complices,
00:52:51 les participants ont multiplié les slogans pro-palestiniens.
00:52:54 Ils demandent l'arrêt des opérations militaires d'Israël à Gaza.
00:52:58 Enfin, plusieurs affrontements sont à déplorer
00:53:00 lors de l'évacuation de la ZAD dans le Tarn.
00:53:02 Le ministre de l'Intérieur remercie les forces de l'ordre
00:53:04 qui ont fait face à des individus violents.
00:53:06 Et de leur côté, les organisateurs de la mobilisation anti-A69
00:53:10 dénoncent, je cite, "une attaque brutale de la police sur le campement".
00:53:14 (Générique)
00:53:28 -Bienvenue, si vous nous rejoignez maintenant.
00:53:31 Les visiteurs du soir, c'est tous les dimanches
00:53:33 de 22h jusqu'à minuit.
00:53:35 À 23h30, on s'intéressera à la folle histoire du rouge à lèvres
00:53:39 avec Rachel Khan, qui vient d'arriver sur le plateau.
00:53:44 Mais d'abord, on continue de débattre du projet de loi immigration
00:53:48 de Gérald Darmanin, qui doit être discuté au Sénat
00:53:51 à partir du 6 novembre, notamment sur son aspect
00:53:54 lutte contre le terrorisme, alors avec Gérard Chalian,
00:53:57 qui vient de nous rejoindre, géostratège,
00:53:59 spécialiste des conflits armés, vous revenez d'Arménie.
00:54:02 Vous êtes l'auteur, entre autres, de "Terrorisme et politique",
00:54:05 et d'une histoire du terrorisme de l'Antiquité à Daech,
00:54:09 et sont avec nous depuis le début de l'émission.
00:54:11 Pierre Conesa, l'auteur d'"État des lieux du salafisme en France",
00:54:15 du "Séparatisme au terrorisme",
00:54:16 Smaïne Lachère, sociologue, professeure émérite
00:54:20 à l'Université de Strasbourg et directeur de l'Observatoire
00:54:23 du fait migratoire et de l'asile à la Fondation Jean Jaurès.
00:54:26 Votre livre le plus récent, c'est "Le fait migratoire
00:54:29 et les sept péchés capitaux", et Marcela Iacoub, écrivain,
00:54:33 juriste, qui vient de publier "Penis horribilis".
00:54:36 Alors ma première question, Gérard Chalian,
00:54:39 parce qu'on l'a posée juste avant le rappel des titres,
00:54:42 c'est y a-t-il pour vous un lien mécanique entre immigration
00:54:45 et terrorisme, comme on le dit de plus en plus souvent ?
00:54:48 Si on limitait les flux migratoires,
00:54:51 réduirait-on par la même occasion le risque terroriste ?
00:54:54 Ecoutez, ma réponse, c'est non.
00:54:56 Je veux dire, lier les deux de façon mécanique, c'est absurde.
00:55:01 Par contre, ce qu'on aurait pu améliorer,
00:55:06 c'est par exemple, il y a des années et des années de ça,
00:55:09 quand on a accepté les prêcheurs saoudiens ou turcs
00:55:15 venir démocratiquement en France et fabriquer un "eux et nous",
00:55:20 et qu'on les a laissés faire, alors ça, c'était à nous de lutter contre.
00:55:26 Mais autrement, quand quelqu'un veut rentrer dans ce pays
00:55:29 en se disant "moi je cherche du travail",
00:55:31 et du travail on en a, particulièrement dans un certain nombre de secteurs
00:55:35 où nous ne voulons plus le faire,
00:55:38 c'est pas pour ça qu'il va déboucher de façon directe
00:55:41 dans le terrorisme dont vous parlez.
00:55:46 Et même pour une question, Pierre Connaissan ?
00:55:48 Oui, je voudrais qu'on ressorte, si vous voulez,
00:55:50 de cette idée "immigration, dangerosité", etc.
00:55:53 Pourquoi ? Parce que les terroristes qu'on a sur le territoire
00:55:57 sont des deuxième ou troisième génération.
00:56:00 Ce n'est pas du tout les parents, ce sont les enfants,
00:56:02 c'est-à-dire ceux qui ont eu du mal à trouver dans cette société leur place.
00:56:07 Ceux qui sont nés ici, vous voulez dire ?
00:56:08 Oui, ceux qui sont nés ici, ce n'est pas du tout les migrants,
00:56:11 ça a été au contraire des gens qui ont la nationalité française, etc.
00:56:14 Deuxième remarque, qui ne touche pas à la question de l'immigration
00:56:17 mais qui touche au droit d'asile,
00:56:19 les deux cas d'assassinat qu'on a eus, ce n'étaient pas des migrants,
00:56:22 c'étaient des gens qui demandaient le droit d'asile.
00:56:24 Et on les prenait pour des gens ayant droit au droit d'asile
00:56:26 parce qu'ils venaient de Tchétchénie et Nigouchi,
00:56:28 alors que vous savez, les hors-russes, les massacres, etc.
00:56:31 On est dans une situation où le droit d'asile est devenu une nouvelle porte ouverte
00:56:34 à des gens dont on ne vérifiait pas du tout la dangérosité.
00:56:37 Alors ceux-là, effectivement, ils avaient été refusés, c'est déjà quelque chose.
00:56:40 Mais enfin, ils étaient toujours sur le territoire français
00:56:42 et donc on va aboutir à quelque chose que je souhaiterais qu'on examine,
00:56:45 c'est-à-dire le blocage de l'expulsion.
00:56:48 C'est aussi ce que Gérald Darmanin voudrait faciliter,
00:56:51 c'est l'expulsion des étrangers
00:56:54 qui représente une menace grave pour l'ordre public.
00:56:56 Absolument.
00:56:58 Sméing, tu veux faire ?
00:56:59 Oui, non, non, moi je suis tout à fait d'accord avec Gérard Chalion.
00:57:03 Donc je l'avais dit et je le répète,
00:57:05 il n'y a pas de rapport mécanique naturel
00:57:09 entre immigration et terrorisme.
00:57:13 Mais c'est vrai que les autorités françaises
00:57:16 auraient dû être beaucoup plus regardantes
00:57:19 sur des gens qui s'autorisaient d'une parole légitime
00:57:24 en matière de religion et qui avaient réellement un poids
00:57:30 dans certaines fractions de l'immigration.
00:57:32 Mais moi j'irais même encore un peu plus en arrière historiquement.
00:57:40 En fait, il s'agit d'une vraie croyance dans le fait, par exemple,
00:57:45 que dans les années 70,
00:57:49 on valorisait quasiment à l'extrême
00:57:53 la culture et la langue d'origine étrangère
00:57:57 à l'intérieur de l'école,
00:58:00 faisant d'une fraction de la population scolaire
00:58:03 issue de l'immigration,
00:58:05 des gens aux propriétés biographiques tout à fait spécifiques.
00:58:09 Et surtout, on disait cela,
00:58:11 surtout, on disait explicitement, textuellement cela.
00:58:16 Ils sont là, au fond, comme leurs parents,
00:58:18 c'est-à-dire de manière provisoire.
00:58:21 Et tôt ou tard, ils finiront par retourner dans leur pays d'origine
00:58:27 et ils constitueront des ponts entre l'Occident
00:58:31 et les pays du Maghreb.
00:58:33 Alors, on peut dire, et je termine là-dessus,
00:58:36 on peut dire que les institutions ont contribué,
00:58:40 les institutions, pas les personnes,
00:58:42 les institutions, d'une certaine manière,
00:58:45 ont contribué à chahuter,
00:58:49 à empêcher une intégration quasi générale.
00:58:55 - C'est exact, il y a eu une période
00:58:57 où on a parlé de multiculturalisme.
00:59:00 Bon, ça, c'était, à mon avis, une erreur,
00:59:02 c'est-à-dire qu'à partir du moment où quelqu'un rentre
00:59:05 et qu'il n'a pas l'intention de retourner,
00:59:07 il faut autant que faire, l'intégrer le mieux possible.
00:59:11 Et là, la langue joue un rôle essentiel.
00:59:15 Pierre Connaissain ?
00:59:17 - Moi, ce qui me frappe, et j'ai essayé de développer
00:59:20 dans mon bouquin, c'est qu'on n'est pas seulement
00:59:21 sur de l'acte violent.
00:59:23 On est maintenant, avec cette partie de la communauté musulmane,
00:59:25 dont je répète qu'elle est de la deuxième ou troisième génération,
00:59:27 ce ne sont pas les parents, dans des actes de séparatisme.
00:59:30 C'est-à-dire qu'on va se heurter à l'école,
00:59:33 on va se heurter aux droits de la femme,
00:59:34 on va se heurter à des pratiques de prière
00:59:36 dans des lieux d'administratif, etc.
00:59:40 Et c'est ce séparatisme-là qui constitue un véritable danger.
00:59:43 Parce que quand il aboutit à l'acte de violence,
00:59:45 il est malheureusement trop tard.
00:59:47 Donc on est obligé, je crois, et c'est un peu l'idée
00:59:49 de la loi d'Armada, c'est qu'il faut passer
00:59:53 d'une loi de la répression pénale à une loi de la prévention.
00:59:56 Et c'est très compliqué dans une démocratie
00:59:58 de faire une loi de la prévention.
00:59:59 Ça veut dire qu'il faut expulser des gens dont on suppose
01:00:02 que la dangérosité est telle que ça légitime qu'on les expulse.
01:00:05 - Jusqu'à présent, on le suit.
01:00:07 - Pardon ?
01:00:07 - Et c'est la loi du soupçon.
01:00:09 - Oui, mais ça veut dire que quand l'attentat s'est passé,
01:00:12 on dit "ah, malaise, c'est trop tard".
01:00:14 - Voilà, ce n'est pas ce que dit la loi de Gérald Darmanin.
01:00:18 Pour l'instant, on peut expulser ceux qui menacent
01:00:23 les intérêts fondamentaux de l'État.
01:00:25 Ce que veut changer la loi, c'est qu'on puisse étendre ça
01:00:29 à ceux qui troublent l'ordre public,
01:00:31 les violences contre les femmes, les cambriolages,
01:00:33 le trafic de drogue, etc.
01:00:35 C'est ça ce qui est aujourd'hui sous autant de risques.
01:00:37 - C'est tout ce qui crée le fossé entre eux et nous.
01:00:41 Voilà, c'est ça qu'il faut arrêter.
01:00:44 Et là, il ne faut pas craindre d'expulser.
01:00:47 - Ça, c'est à partir du moment où on est radicalisé soi-même.
01:00:50 Si on adhère à une association radicale,
01:00:53 ça peut faire partie effectivement de ce qui est discuté.
01:00:57 - Mais dans le "nous", tout le monde n'est pas conforme
01:01:02 aux valeurs de la République.
01:01:03 - C'est ça, c'est ça.
01:01:04 Qu'une démocratie, c'est forcément une entité en tension
01:01:07 avec des opinions différentes, qui est tout le temps en mouvement.
01:01:09 Justement, le propre démocratie n'est pas avoir quelque chose
01:01:12 de fixe comme une substance.
01:01:16 Alors, moi, ce que je trouve problématique,
01:01:17 c'est qu'effectivement, on est en train de vouloir punir
01:01:21 les opinions.
01:01:21 En fait, j'ai vu que Darmanin s'est allé vers ce type de dispositions.
01:01:29 Et comment est-ce qu'on va faire dans un pays comme la France
01:01:32 avec les gens qui ont des opinions différentes ?
01:01:34 Est-ce qu'on va les traiter à partir de ça différemment ?
01:01:36 Parce qu'on traite comme ça les immigrés,
01:01:39 les gens qui ont demandé asile.
01:01:41 En fait, moi, je trouve ça très compliqué.
01:01:42 - On parle constamment de l'adhésion aux valeurs républicaines,
01:01:47 ce qui est un phénomène assez récent.
01:01:48 Avant, on n'en parlait pas.
01:01:49 Est-ce qu'un monarchiste, par exemple,
01:01:52 est-ce que ça va poser problème ?
01:01:54 - Mais non, on n'est pas du tout dans ce domaine-là.
01:01:56 On a des fichés S.
01:01:57 Le haut de gamme de ces fichés S, c'est les classements dans l'FSPRT,
01:02:01 c'est-à-dire les gens qui sont considérés
01:02:03 comme potentiellement dangereux.
01:02:04 Il y en a environ 4000.
01:02:05 C'est la police qui fait son travail.
01:02:07 Après, une fois que l'attentat s'est passé,
01:02:09 on dit qu'il était signalé.
01:02:10 Regardez celui-là, celui de Dominique Bernard,
01:02:13 il avait été contrôlé il y a deux jours.
01:02:14 Alors arrêtons de faire comme si on allait expulser des Italiens ou des Espagnols.
01:02:18 On est sur une population qui est au contraire
01:02:21 dans une posture de rupture avec la République.
01:02:23 Et donc, on a des postures de prière dans des lieux administratifs.
01:02:27 - Vous parlez des fichés S, mais il y a aussi des écolos dans les fichés S.
01:02:30 - Oui, mais jusqu'à maintenant,
01:02:32 je considère que les écolos font moins d'attentats directs.
01:02:34 Il y a quand même 80 personnes qui sont aujourd'hui sous protection policière
01:02:38 pour avoir reçu des menaces physiques de meurtre sur leur personne.
01:02:41 Donc, combien de fois on va mobiliser de policiers ?
01:02:44 Parce qu'on ne veut pas régler la question en se posant des concepts de droit.
01:02:46 Le concept de droit, c'est que la sécurité des citoyens prévaut sur le statut des citoyens.
01:02:52 - Mais là, vous parlez d'expulser les fichés S, pas de les enfermer.
01:02:56 Parce que ça aussi, c'est un concept de droit qui est quand même assez important.
01:03:00 C'est qu'on ne met pas en prison des gens qui n'ont encore rien fait.
01:03:02 - Non, non, non. - Je parle de l'expulsion.
01:03:04 - Pour l'instant, il n'est pas question de ça dans la loi immigration de Gérald Darmanin.
01:03:07 - Non, non, il n'en est pas question.
01:03:08 On vit dans une situation qui est tellement absurde.
01:03:11 Je vais vous citer un exemple.
01:03:12 Quand vous avez quelqu'un qui est condamné pour un acte de terrorisme,
01:03:16 qui a fait sa peine, qui sort de prison,
01:03:18 qui est expulsable par une voie judiciaire française,
01:03:21 il est inexpulsable au regard du droit européen,
01:03:23 parce qu'effectivement, depuis la loi de l'accord de justice européenne de 2011-2012,
01:03:28 il faut que l'État expulseur vérifie qu'il va être bien traité dans son pays d'accueil.
01:03:32 Un exemple absurde, on a accueilli des gens des groupes d'islamiques armés
01:03:35 pendant des années noires en Algérie,
01:03:37 parce qu'ils étaient menacés par leur gouvernement, donc droit d'asile.
01:03:41 Et ensuite, vous voulez les expulser en Algérie ?
01:03:44 Donc on sait qu'on va les garder sur le ventre.
01:03:46 Donc on est dans cette situation absurde où quand vous avez un terroriste condamné,
01:03:49 expulsable, inexpulsable, il est au frais de la République.
01:03:53 C'est-à-dire qu'il est mieux logé, nourri, blanchi qu'un SDA français qui n'a droit qu'au RSA.
01:03:57 J'arrête là-dessus. Donc on est dans ce système absurde.
01:04:00 Et ce système absurde, il ne peut se résoudre que si on vide le stock.
01:04:04 – Je suis tout à fait d'accord avec ça.
01:04:06 Je trouve que c'est parfaitement rationnel, c'est tout.
01:04:09 Je veux dire que nous sommes incohérents.
01:04:12 – Et il manque le courage politique.
01:04:14 – Encore une fois, se posent des questions de droit.
01:04:17 En l'occurrence là, la CODH, la Cour européenne des droits de l'homme,
01:04:23 stipule qu'il est interdit d'expulser quelqu'un qui risque la peine de mort dans son pays.
01:04:29 C'est ça qui fait qu'on ne peut pas expulser un certain nombre de gens.
01:04:32 – Mais ça c'est élémentaire.
01:04:36 C'est quelque chose de… c'est les droits d'asile.
01:04:38 Vous voulez annuler les droits d'asile comme s'il n'y avait pas une humanité.
01:04:41 L'espèce humaine qui serait une unité qui a des droits,
01:04:45 qui ne peut pas être maltraitée n'importe comment.
01:04:47 Et que si on est dans un pays qui peut protéger un être humain…
01:04:51 Pour vous, l'humanité comme entité n'est pas une unité
01:04:55 qui vaudrait la peine qu'on puisse protéger ?
01:04:57 Parce que le droit d'asile c'est ça ?
01:04:59 – Non, je suis pour réserver le droit d'asile à des gens
01:05:01 qui défendent la démocratie dans le monde.
01:05:03 Pas pour prendre des assassins, sinon il aurait fallu accueillir Wittner en 1923.
01:05:06 – Non, non, non, c'est pas ça le droit d'asile.
01:05:07 – Non, c'est pas ça du tout le droit d'asile.
01:05:08 – C'est les gens qui sont ménagés…
01:05:10 – Le droit d'asile c'est solliciter une protection internationale
01:05:15 pour motif de persécution.
01:05:18 – Oui. – Pour motif de persécution.
01:05:19 On peut parfaitement ne n'avoir jamais fait de politique de sa vie
01:05:23 mais par exemple appartenir à une minorité religieuse,
01:05:26 par exemple être chiite au Pakistan.
01:05:29 Voilà, donc il n'y a pas de corrélation directe, mécanique entre…
01:05:34 – Ne restons pas sur les principes, descendons dans la machinerie.
01:05:37 – Ah non, non, mais attendez, attendez…
01:05:39 – Mais il faudrait que vous alliez un peu sur les principes, j'ai l'impression.
01:05:42 – Les chéchens, j'en ai parlé avec des gens de la commission nationale du droit d'asile,
01:05:45 ils me disent "si on a refusé les tchéchens,
01:05:47 ce n'est pas parce que leur situation n'est pas menacée là-bas,
01:05:50 c'est parce qu'effectivement ils récitent tous la même leçon,
01:05:52 ils l'ont mal travaillé ceux-là parce qu'ils sont aidés par des ONG
01:05:54 qui veulent leur faciliter l'accès.
01:05:56 Quand on leur refuse la chose, bon, évidemment ils vivent dans cette situation.
01:05:59 Mais regardez le cas en Zorov, le fils ne connaissait pas le prof,
01:06:04 Samuel Paty, elle avait entendu dire qu'il avait fait une leçon sur les caricatures,
01:06:08 il vient jusqu'à Maison Lafitte je crois pour venir se le faire désigner,
01:06:13 le tuer et le décapiter, fin de l'histoire, le père le félicite
01:06:16 et toute la famille rentre en Tchétchénie.
01:06:18 Alors quelle était la menace sur cette famille ?
01:06:20 La menace, elle était sur la société française.
01:06:22 - Mais moi je veux rappeler juste une chose,
01:06:24 il ne faut pas oublier qu'Hitler n'aurait pas commis le massacre qu'il a commis
01:06:28 sur les juifs et sur d'autres...
01:06:30 Si par exemple les autres pays avaient appliqué les droits d'asile en fait,
01:06:34 les juifs qui sont morts, enfin les victimes de la Shoah,
01:06:37 la plupart ont voulu fuir, aucun pays ne leur a donné les droits d'asile.
01:06:41 Et ça ne fait pas si longtemps que ça, il ne faut pas oublier ça.
01:06:45 - Madame, je ne vais pas vous refaire la Shoah,
01:06:47 je vous fais un cas exemple français.
01:06:49 - Mais les horribles pays dont les gens échappent
01:06:51 sont des pays où il y a des dictatures horribles,
01:06:56 qui torturent les gens, les massacrent, etc.
01:06:58 Vous allez laisser faire tout ça ?
01:06:59 - Non, mais encore une fois vous n'êtes pas obligé d'accepter des gens
01:07:02 qui sont eux-mêmes considérés...
01:07:04 Regardez le cas, Georges Bush, à partir du 11 septembre,
01:07:08 décide de la guerre globale contre le terrorisme.
01:07:10 Alors le terrorisme c'est un moyen d'action,
01:07:12 ce n'est pas un ennemi le terrorisme, mais enfin ça ne fait rien.
01:07:14 Donc on met tout et rien.
01:07:15 On va faire une guerre, deux guerres,
01:07:18 plutôt l'Afghanistan puis ensuite l'Irak,
01:07:20 pour aller finalement servir les intérêts d'Israël,
01:07:22 c'est-à-dire on va enfin débarrasser du Moyen-Orient
01:07:24 les gens qui résistent à la paix au Moyen-Orient.
01:07:27 Je veux dire, on est sorti complètement de l'histoire du droit d'asile.
01:07:29 Les Syriens ou les Irakiens qui arrivent aujourd'hui,
01:07:32 c'est nous qui les avons créés.
01:07:33 Et si on est obligé d'accueillir aujourd'hui les Tchétchènes et les Zingoues,
01:07:36 c'est parce qu'on s'est refusé de considérer
01:07:38 que si les gens étaient dangereux pour la population française,
01:07:41 qu'ils avaient des difficultés d'intégration, on les refuse.
01:07:43 C'est ce qui s'est passé pour la famille,
01:07:45 le machin, comment il s'appelle, celui de Dominique Bernard.
01:07:48 La famille avait été refusée parce qu'encore une fois,
01:07:50 on commence à toucher du doigt le fait
01:07:52 que le droit d'asile ne peut pas être universel.
01:07:55 - Jean-Archalian, vous qui avez beaucoup bourlingué,
01:08:00 écoutez, moi je trouve qu'il ne faut pas donner ni dans l'angélisme,
01:08:04 du style "nous sommes tous des humains,
01:08:08 il faut être tout gentil avec tout le monde", etc.
01:08:10 C'est-à-dire qu'on about à rien.
01:08:12 Et d'un autre côté, il ne s'agit pas non plus,
01:08:15 comment dirais-je, de façon rigoureusement drastique,
01:08:19 de penser que tout type qui demande l'asile
01:08:23 est potentiellement déjà un terroriste sous prétexte
01:08:26 qu'il ne va pas réussir à s'intégrer comme il aimerait s'intégrer.
01:08:29 Donc de la souplesse, mais aussi de la cohérence et du courage politique.
01:08:35 Et du courage politique, on en a plusieurs fois manqué.
01:08:38 - Justement, Gérald Darmanin, lui, dit que ce projet de loi
01:08:43 est particulièrement courageux parce qu'il prend tous les aspects du problème
01:08:47 et en plus, lui, considère qu'il est très dur.
01:08:50 - C'est le 29e projet, c'est ça que vous disiez ?
01:08:52 - C'est le 29e.
01:08:53 - Et il ne règle pas la question de l'expulsion ?
01:08:55 Parce qu'encore une fois, on est sur un blocage européen ?
01:08:58 - Oui, parce qu'il y a des traités.
01:08:59 - Il ne règle pas le problème de l'expulsion,
01:09:01 mais dans ce projet de loi,
01:09:04 il y a quelque chose qui est relativement important.
01:09:07 On verra à l'usage si ça marche.
01:09:10 C'est le contentieux administratif des étrangers.
01:09:14 Bon, vous savez que c'est 40% du contentieux des tribunaux administratifs,
01:09:21 ce qui est énorme.
01:09:23 Alors, le projet...
01:09:25 - Vous parlez des recours, là ?
01:09:26 - Oui, absolument.
01:09:28 - On fait des recours ?
01:09:29 - Oui, tout à fait.
01:09:30 On vous refuse un titre de séjour, vous pouvez faire un recours.
01:09:37 Alors, il y aurait comme ça, je crois, 12 procédures permettant...
01:09:42 - Montant jusqu'à l'Europe, hein ?
01:09:44 - Absolument, absolument.
01:09:45 Jusqu'à la Cour européenne des droits de l'homme.
01:09:48 Bon.
01:09:51 Donc, en mobilisant cette procédure de réduire de 12 à 4
01:10:01 les autorités françaises, et d'Armena en premier lieu,
01:10:05 ils voient un moyen très, à la fois franc et décisif,
01:10:11 de faciliter l'expulsion.
01:10:15 On verra.
01:10:16 On verra comment ça se passe, puisque passer de 12 à 4,
01:10:24 vous le voyez bien, ça permet de réduire considérablement les recours,
01:10:30 et en plus, ça peut accélérer très vite les conditions de l'expulsion.
01:10:34 Bon.
01:10:35 Donc, retrouvons-nous un an ou deux après le vote de la loi,
01:10:43 allez en décembre ou en janvier, et puis on verra à l'usage
01:10:47 si effectivement ça peut stopper, un, les flux migratoires,
01:10:52 ce qui est important, et deux, si ça permet de passer
01:10:58 outre les pays d'origine des gens qui sont expulsés
01:11:03 et qui, croyez-le bien, ne vont pas accepter comme ça
01:11:07 de quété de cœur qu'on leur renvoie leurs ressortissants,
01:11:11 en particulier, quand, en particulier, je parle des autorités,
01:11:14 en particulier quand ils sont qualifiés ou quand on les qualifie d'islamistes.
01:11:19 Bon.
01:11:20 Attendons de voir.
01:11:21 Oui, connaissez-vous, vous avez raison de signaler le nombre de recours
01:11:24 qui étaient ouverts avec toutes les strates successives jusqu'à l'Europe,
01:11:27 parce qu'effectivement, au bout de quelqu'un qui avait un peu d'assises
01:11:29 et avec l'aide d'une ONG en général,
01:11:32 s'il avait jusqu'au bout, il s'était passé plusieurs années,
01:11:34 donc finalement on est obligé de le régulariser ou de le garder
01:11:37 parce qu'on disait "oui, mais entre temps il s'est marié,
01:11:39 entre temps il avait des enfants, etc."
01:11:40 Donc le réduire à quatre est effectivement une preuve d'efficacité
01:11:44 qu'il faut espérer.
01:11:45 Moi, j'ai été cinq ans dans les tribunaux administratifs à la sortie de l'ENA.
01:11:48 Donc j'appliquais une jurisprudence qui était assise du Conseil d'État.
01:11:52 Vous savez, quand vous avez un arrêté d'expulsion,
01:11:54 vous avez un dossier de sursis, un dossier au fond,
01:11:57 parce que si la mesure administrative appliquée
01:11:59 crée un préjudice difficilement réparable,
01:12:01 effectivement le juge administratif peut suspendre la mesure
01:12:03 jusqu'à ce qu'il puisse anonymiser le fond.
01:12:06 Le sursis est prononcé dans deux conditions.
01:12:08 D'abord, si effectivement l'application de la mesure
01:12:09 crée un préjudice difficilement réparable,
01:12:11 c'est le cas d'une expulsion,
01:12:13 et surtout s'il y a un argument de droit qui tient debout
01:12:14 dans le dossier au fond.
01:12:16 La dernière affaire que j'ai eue était effectivement
01:12:18 une affaire très intéressante parce que justement,
01:12:20 ça ne posait aucun problème.
01:12:21 L'homme était expulsé,
01:12:23 trafic de drogue, délinquance, sous-explication,
01:12:26 et on avait le dossier de sursis.
01:12:27 Le dossier de sursis, ce type était père d'un enfant né en France,
01:12:30 après la loi Mitterrand, donc il était inexpulsable.
01:12:33 Simplement, quand on regardait le dossier de police,
01:12:35 on s'apercevait que ce type, quand il voyait son enfant,
01:12:37 d'abord il ne s'occupait pas de son fils,
01:12:39 et quand il voyait son ex-femme, il la frappait.
01:12:41 Alors, vous êtes face à une situation où vous avez le droit,
01:12:44 et puis vous avez la réalité.
01:12:45 Alors moi, j'ai plaidé que le préjudice,
01:12:48 ce n'est pas à lui qu'on le crée,
01:12:48 puisqu'il n'a pas le droit constitutionnel de frapper sa femme.
01:12:50 J'ai dit que c'était la femme la victime,
01:12:52 et donc je refusais de prononcer le sursis.
01:12:54 On a eu trois heures de délibéré,
01:12:56 comme je ne voulais pas lâcher, on n'a pas prononcé le sursis.
01:12:58 Mais vous voyez combien cette conjonction
01:12:59 entre le droit théorique et la réalité est un problème grave.
01:13:03 Il faut que les juges, de temps en temps, redescendent un peu sur terre.
01:13:06 – Mais le problème, je reviens au fiché S,
01:13:09 parce que ça revient toujours, il se trouve que là, il était fiché S,
01:13:13 il avait d'ailleurs été contrôlé peu de temps avant.
01:13:16 La question qui revient constamment,
01:13:18 c'est faut-il les enfermer ou faut-il les expulser ?
01:13:23 – Le problème de l'expulsion, on l'a déjà évoqué,
01:13:26 on sait que ce n'est pas toujours facile
01:13:27 et pas toujours possible d'expulser les gens à tout prix.
01:13:31 La possibilité de les enfermer est constamment remise sur le terrain.
01:13:36 Or c'est une ligne rouge qu'on s'est toujours refusé à franchir,
01:13:39 à savoir les fichés S n'ont encore rien fait.
01:13:42 On les soupçonne, mais ils n'ont encore rien fait.
01:13:44 Peut-on enfermer des gens qui n'ont rien fait ?
01:13:47 – Je suis d'accord avec vous, il y a un problème effectivement
01:13:49 de basculement du droit des étrangers, qui est un droit pénal acte commis,
01:13:56 il faut passer dans un droit pénal préventif.
01:13:59 Et c'est ça qui juridiquement est très difficile à appliquer.
01:14:01 – Soyez démocrate, c'est complètement contre la démocratie ce que vous dites.
01:14:04 – Mais non, ça ne va pas contre la démocratie.
01:14:05 – Vous devenez aussi peu démocrate que les personnes
01:14:07 que vous ne voulez pas recevoir en France.
01:14:09 – Mais non, pas du tout.
01:14:10 – Vous voyez, ça c'est la victoire de vos ennemis sur vous.
01:14:12 – Madame, quand on a un dossier consistant avec des pratiques radicales,
01:14:17 la fréquentation d'une mosquée intégriste,
01:14:20 des déclarations sur Internet, etc.
01:14:22 Vous pouvez toujours dire que ce pratique va devenir républicain,
01:14:25 je ne le pense pas.
01:14:26 Et donc si vous mettez par là même dans ce principe général,
01:14:30 vous ne discutez pas des dossiers, vous ne les connaissez pas,
01:14:32 vous vous contentez de dire on va basculer dans une dictature, arrêtons.
01:14:36 – Attention, pas en l'expulsant, mais en l'enfermant.
01:14:39 – Non mais justement, il y a des centres de rétention administrative,
01:14:42 qui est une espèce de substitut à la prison,
01:14:43 mais parce qu'encore une fois, c'est théoriquement une étape
01:14:46 dans la procédure d'expulsion.
01:14:48 Mais simplement, la procédure d'expulsion est devenue quasiment impossible.
01:14:51 Alors maintenant, comme on fait beaucoup plus de pression diplomatique,
01:14:53 les chiffres augmentent, si vous voulez.
01:14:55 Mais encore une fois, je n'ai jamais vu un type expulsé
01:14:57 venir ensuite réclamer devant le Conseil d'État d'être à revenir en France.
01:15:01 Il sait très bien qu'il n'y a pas droit.
01:15:03 – J'ai un chemin en prostance, il faut qu'une société puisse se défendre
01:15:07 et ne pas être, comment dirais-je, prisonnière de données juridiques
01:15:16 qui la baillonne.
01:15:18 – On appelle ça des principes…
01:15:20 – Alors mais là, c'est quoi le…
01:15:21 – C'est par principe, et la démocratie, c'est un baillonnement par principe, vous voyez.
01:15:25 – Il faut quand même qu'une société puisse se défendre.
01:15:27 C'est-à-dire qu'il n'y a aucune raison que vous soyez sous une menace permanente
01:15:35 et que vous ne fassiez rien, sauf d'attendre que l'acte soit condit.
01:15:38 – Vous savez, votre société va s'abîmer, monsieur.
01:15:41 – On aurait dû faire quelque chose.
01:15:42 – Excusez-moi, mais ce que vous dites, je fais l'histoire du droit,
01:15:45 je connais bien un peu le…
01:15:46 Et tous les régimes autoritaires, y compris fascistes du XXe siècle,
01:15:51 ils avaient cette idée des droits pénales préventifs.
01:15:54 Ils disaient que toutes les règles de l'état des droits étaient des baillonnements,
01:15:58 exactement comme vous l'avez dit, qu'il fallait qu'il y ait le sang du peuple allemand,
01:16:04 italien, etc., qui puisse s'exprimer sans les contraintes des régimes démocratiques.
01:16:08 Alors, vous êtes en train de nous enlever le plus précieux que nous avons,
01:16:12 que c'est notre régime démocratique.
01:16:13 Qu'est-ce que nous avons de plus précieux que ça, sinon ?
01:16:16 – Mais madame, il y a déjà dans la loi française
01:16:19 la possibilité d'arrêter une préparation d'un acte terroriste, ça existe.
01:16:23 Donc ne nous racontez pas qu'on va basculer dans le fascisme demain.
01:16:26 C'est ignoble de nous accuser de ça.
01:16:28 Quand on sait qu'un attentat se prépare, la police peut intervenir et arrêter.
01:16:32 On est bien dans du droit préventif.
01:16:33 – L'attention vaut crime.
01:16:35 – Pardon ?
01:16:35 – L'attention vaut crime, préparez un attentat.
01:16:37 – Bien sûr, bien sûr, donc on est bien dans du droit préventif,
01:16:40 ne faites pas comme si on était des défenseurs de Mussolini et d'Hitler.
01:16:43 C'est la pensée en fait, c'est la pensée que…
01:16:45 – Non, il ne faut pas immédiatement soupçonner
01:16:50 qu'on veut transformer la démocratie en quelque chose de répressif.
01:16:56 Quand même, il y a un moyen de se défendre contre une menace qui est nette.
01:17:02 Lorsqu'elle a été plusieurs fois en action,
01:17:06 lorsque il y a des gens qui travaillent dans ce sens-là,
01:17:09 lorsque l'on prépare le "eux et nous" etc.
01:17:12 – Bon, il faut faire quelque chose.
01:17:14 – Mais on peut se défendre, mais sans abandonner la démocratie.
01:17:16 Il faut effectivement se défendre contre ça.
01:17:18 Mais en restant ce que nous sommes en fait,
01:17:20 et non pas devenir des dictateurs.
01:17:22 – Mais madame, on vous donne des exemples de droits préventifs
01:17:24 en matière criminelle, pourquoi les négligez-vous ?
01:17:27 Quand vous savez qu'un attentat terroriste se prépare…
01:17:29 – La préparation d'un attentat, ce n'est pas du tout préventif.
01:17:33 Vous préparez un attentat, vous êtes en train de faire quelque chose.
01:17:35 – On attend qu'il se passe pour pouvoir réprimer, mais arrêtez enfin.
01:17:38 – Non, Pierre Connaissas, vous le savez bien,
01:17:39 si vous arrêtez des gangsters qui préparent un hold-up…
01:17:42 – C'est du droit préventif.
01:17:44 – Oui, oui, ils sont déjà en train de…
01:17:46 – C'est l'association des malfaiteurs déjà, c'est déjà un fait déjà.
01:17:49 – Mais c'est ce qu'on a pour les arrestations sur des préparations d'attentats.
01:17:52 Il y en a 59 qui ont été empêchées.
01:17:54 – Mais oui, mais c'est pas préventif ça.
01:17:56 – C'est le fait de…
01:17:57 C'est les fichiers S qui n'ont vraiment rien fait.
01:17:59 – Des fois, sur un simple appel,
01:18:01 il y a quelqu'un qui appelle et dit "ce type me semble suspect",
01:18:04 on les met en fichier S.
01:18:05 – Madame, s'il vous plaît, c'est pas la vie de sapeau, arrêtez, c'est injurieux.
01:18:08 – Mais c'est Sarmanin qui dit…
01:18:09 – Pierre Connaissas, vous savez bien que c'est un vrai problème aujourd'hui,
01:18:11 c'est-à-dire que constamment, ça revient,
01:18:13 c'est-à-dire qu'on se demande si on doit franchir cette ligne rouge ou pas.
01:18:17 Il y a des gens qui ne veulent pas la franchir,
01:18:18 il y en a d'autres qui y sont prêts.
01:18:20 – Je suis d'accord, mais enfin, encore une fois, on est dans un état de droit,
01:18:23 il y a des juges, il y a des règles,
01:18:25 il y a une police qui doit obligatoirement faire du renseignement,
01:18:28 le renseignement c'est philosophiquement contraire à la démocratie,
01:18:31 vous êtes d'accord ?
01:18:32 Il a déjà assis et c'est son boulot, vous voyez ce que je veux dire ?
01:18:35 Donc arrêtons de faire semblant comme si on était dans un monde abstract,
01:18:38 de bisounours.
01:18:40 – C'est que des fois, les gens qui ont des pensées qui nous conviennent pas,
01:18:43 qui peuvent être injurieux.
01:18:44 – Non, arrêtez, madame, s'il vous plaît, c'est pas ça.
01:18:46 – Non, mais attendez.
01:18:46 – Vous connaissez pas le cas des dossiers de fichiers,
01:18:49 vous faites de la théorie, là.
01:18:50 – Bon, mais écoutez, c'est facile.
01:18:51 – C'est une juriste.
01:18:52 – Oui, bah, justement.
01:18:54 J'ai passé ma vie à travailler sur ces questions.
01:18:57 – Smaïne Lachère.
01:18:59 – Sur.
01:18:59 – Sur ça.
01:19:03 – Je sais pas, j'avoue que j'ai légèrement décroché.
01:19:09 – La question, là, on était plus particulièrement sur les fichiers S qui nous hantent,
01:19:15 le fichier S nous hante depuis un certain nombre d'années.
01:19:18 – Oui, alors, bon, moi je sais pas exactement,
01:19:21 peut-être qu'il y en a qui savent ici ce qu'il y a exactement dans ce fichier S,
01:19:27 qui sont les gens, dans quelles conditions ils ont été fichés S.
01:19:32 Bon, c'est un instrument que l'on peut trouver légitime,
01:19:37 d'autres peuvent le trouver illégitime.
01:19:40 Moi, je pense que il doit y avoir, je suis pas juriste,
01:19:45 il doit y avoir probablement un arsenal juridique
01:19:47 relativement suffisant pour, précisément,
01:19:52 pour reprendre une terminologie qui a été citée, pour se défendre.
01:19:56 – Très bien, c'est clair.
01:19:57 – Oui, je crois que le droit en la matière s'est considérablement épaissi,
01:20:06 s'est considérablement fortifié, et on a aujourd'hui les moyens,
01:20:10 en tout cas les moyens juridiques de pouvoir lutter contre,
01:20:19 par exemple, la préparation des attentats.
01:20:22 Mais, en fait, c'est pas sûr du tout que le projet de loi
01:20:28 soit centré sur la question du terrorisme.
01:20:30 Le projet de loi, c'est fondamentalement deux choses.
01:20:34 – Oui, enfin, moi, à titre personnel, je vis dans un monde concret.
01:20:39 C'est-à-dire que, bon, je suis pour l'État de droit,
01:20:42 je suis un démocrate, je l'ai prouvé 250 fois,
01:20:44 j'ai risqué ma vie pour, mais je veux pas non plus me faire blouser
01:20:48 par des sales cons qui cherchent à changer le monde dans lequel je vis,
01:20:53 et sous prétexte qu'ils veulent profiter de la faille de ceci ou de cela.
01:20:58 C'est-à-dire que tout ça, c'est du concret.
01:21:01 Je veux dire qu'on n'est pas dans un monde strictement,
01:21:04 comment dirais-je, c'est pas dans la loi, c'est pas ceci.
01:21:07 Non, c'est concret, c'est concret, ça c'est des actes,
01:21:11 c'est des gens qu'on connaît, on sait comment ils pensent,
01:21:14 comment ils agissent, etc.
01:21:16 Voilà, je veux dire, nous ne sommes pas, si vous voulez,
01:21:19 dans un univers abstrait où on a des idées, non, ça c'est des actes.
01:21:25 – Non, mais c'est pas du tout incompatible,
01:21:26 on peut parfaitement avoir des actes qui soient fondés sur des idées
01:21:30 ou sur une philosophie générale, c'est pas du tout incompatible.
01:21:33 – Oui, mais quand même.
01:21:35 Et puis la France n'est pas le seul pays quand même au monde
01:21:38 où on est confronté à ce genre de problème.
01:21:40 Est-ce que vous connaissez un pays
01:21:42 où on n'est pas confronté à ce genre de problème ?
01:21:43 – Je n'ai jamais prétendu ça.
01:21:45 – Non, mais ce sera le mot de la fin sur ce débat notamment.
01:21:50 C'est le rappel des titres, Mathieu Deveze,
01:21:53 et ensuite on change totalement de sujet avec Rachel Khan.
01:21:57 – C'est un saut dans le vide là.
01:21:59 [Musique]
01:22:02 Emmanuel Macron se rendra mardi à Tel Aviv.
01:22:04 Le chef de l'État y rencontrera notamment
01:22:06 le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.
01:22:09 Ce déplacement intervient plus de deux semaines
01:22:11 après les attaques meurtrières du Hamas.
01:22:13 30 ressortissants français ont été tués
01:22:15 et 7 sont toujours portés disparus.
01:22:17 Un nouveau convoi humanitaire de 17 camions
01:22:20 est entré dans la bande de Gaza.
01:22:21 Il s'agit du deuxième convoi destiné au territoire palestinien.
01:22:24 Le premier est arrivé hier par le terminal de Rafah,
01:22:27 le seul point de passage du territoire
01:22:29 qui ne soit pas contrôlé par Israël.
01:22:31 Enfin, 29 employés de l'agence de l'ONU pour les réfugiés
01:22:35 ont été tués depuis le début de la guerre.
01:22:37 Sous le choc et en deuil, l'agence précise
01:22:39 que la moitié des victimes étaient des professeurs.
01:22:42 [Musique]
01:22:56 – Rachel Khan, vous êtes productrice de télévision,
01:22:59 de documentaires, d'émissions,
01:23:01 vous avez même été ma productrice du temps de
01:23:03 "Ce soir ou jamais" sur France Télévisions,
01:23:05 je suis donc ravie de vous recevoir ce soir.
01:23:08 Vous racontez en effet dans un livre illustré,
01:23:11 co-écrit avec Christophe Faure,
01:23:13 "La folle histoire du rouge à lèvres",
01:23:14 une véritable saga qui commence 3000 ans avant Jésus-Christ
01:23:18 et qui continue de nos jours puisque le rouge à lèvres
01:23:21 est toujours le produit cosmétique le plus vendu,
01:23:23 c'est à peu près 20% du marché.
01:23:25 Vous l'avez fait débuter cette saga dans l'Égypte ancienne,
01:23:28 puis dans la civilisation minoenne où les femmes des classes supérieures
01:23:33 ne se privaient pas de se colorer les lèvres
01:23:35 comme en atteste cette peinture murale qu'on vient de voir,
01:23:38 du palais de Minos, Aknosos, Aknosos c'est en crête,
01:23:44 elle est évidemment tirée de votre livre
01:23:45 comme toutes les images qu'on va voir,
01:23:47 mais pourquoi le rouge à lèvres est-il rouge dès cette époque ?
01:23:50 Pourquoi il a toujours été rouge ?
01:23:51 Pourquoi il n'est pas jaune ou vert ?
01:23:53 – Parce que dans l'Antiquité, puisqu'il vient de la nuit des temps,
01:23:58 il n'y avait que trois couleurs, le rouge, le blanc et le noir.
01:24:02 Et le rouge, on le trouvait, il était à portée de main de tout le monde
01:24:05 puisqu'on utilisait la terre ocre pour fabriquer la couleur rouge
01:24:09 et c'est la première couleur que l'homme a utilisée pour peindre,
01:24:12 pour teindre, d'ailleurs dans les grottes néolithiques,
01:24:16 les peintures ont trois couleurs, rouge, noir et blanc.
01:24:21 – Alors Cléopâtre avait une véritable obsession,
01:24:24 dites-vous pour le rouge à lèvres, carmin celui-là.
01:24:26 – Carmin, oui.
01:24:28 – A l'époque, c'est réservé aux femmes riches,
01:24:31 pendant toute l'Antiquité quasiment c'est réservé aux femmes riches.
01:24:33 – Oui, aux classes supérieures, à l'aristocratie
01:24:36 et bien sûr à la reine en premier lieu, oui.
01:24:38 Cléopâtre était addict, elle n'était pas la seule reine,
01:24:42 puisque Élisabeth, 600 ans plus tard,
01:24:45 la reine Élisabeth Ière d'Angleterre aussi,
01:24:48 elle en est morte presque, je crois.
01:24:51 Et Cléopâtre, alors dans l'Égypte ancienne,
01:24:55 ce n'était pas uniquement pour l'esthétique,
01:24:56 c'était aussi beaucoup probablement,
01:24:59 mais c'était aussi quasiment un talisman le rouge à lèvres.
01:25:02 Ça empêchait les maladies de rentrer par la bouche,
01:25:05 ça signifiait aussi le rang qu'on occupait dans la société
01:25:10 et c'est pour ça que c'était réservé uniquement à l'aristocratie.
01:25:13 Donc ça avait plusieurs fonctions, sociales, sociétales et voilà.
01:25:19 – Alors vous l'avez intitulé "la folle histoire du rouge à lèvres",
01:25:22 c'est pas juste parce que ça sonne bien,
01:25:24 c'est parce qu'effectivement c'est une histoire assez folle,
01:25:26 on ne va plus cesser à partir de l'Antiquité
01:25:29 d'interdire ou d'encourager le rouge à lèvres sans arrêt,
01:25:33 ça change tout le temps et parfois,
01:25:36 enfin si, il y a quand même une petite cohérence,
01:25:38 on va s'en apercevoir, par exemple c'est interdit chez les anciens grecs,
01:25:42 les anciens grecs considèrent que de ce…
01:25:45 – Oui, de la vérité, de la pureté.
01:25:47 – Voilà, c'est ça, c'est une tricherie, c'est pas bien, etc.
01:25:51 Mais ils vont le rendre obligatoire pour les prostituées.
01:25:53 – Oui, parce que ça les différencie des femmes respectables.
01:25:56 – Voilà.
01:25:56 – Justement on les emprisonne si elles n'ont pas de rouge à lèvres
01:26:00 parce qu'elles chercheraient à se faire passer pour des femmes respectables.
01:26:03 – Et ça permet de savoir si le mari est allé voir les prostituées aussi.
01:26:06 – Oui, c'est pas bête, je n'avais pas pensé que ça pouvait être ça.
01:26:09 Alors, chez les romains c'est toléré,
01:26:12 mais alors évidemment ça va être combattu
01:26:14 quand l'Empire romain va se convertir en Christianie.
01:26:16 – Exactement, quand Constantin se convertit,
01:26:19 immédiatement on interdit le rouge à lèvres, voilà.
01:26:22 C'est une fixation sur ce petit objet inoffensif.
01:26:26 – Et chez les hommes ?
01:26:29 – Alors les hommes, dans l'Egypte ancienne,
01:26:32 les hommes et les femmes se maquillaient indifféremment,
01:26:34 c'était pas, il n'y avait aucun problème.
01:26:38 Ensuite, chez les romains aussi, les grecs,
01:26:40 bon, ni les femmes ni les hommes puisqu'ils l'interdisaient.
01:26:43 – Ils rigolaient pas les grecs.
01:26:44 – Ils rigolaient pas.
01:26:44 Au 17e, au 18e siècle, dans les cours royales,
01:26:48 les hommes pouvaient se maquiller, il n'y avait aucune interdiction,
01:26:51 certains le faisaient, d'autres le faisaient pas.
01:26:53 C'est vraiment la révolution française, alors là, qui a fini directement…
01:26:56 – Alors on va y arriver, mais d'abord, alors,
01:26:58 qu'intéressant, vous dites qu'au Moyen-Âge,
01:27:02 le rouge c'est la couleur du diable,
01:27:05 mais bon, on s'aperçoit que les couleurs sont très ambivalentes,
01:27:07 ça peut dire, rouge peut dire une chose, et l'inverse aussi.
01:27:12 Mais c'est vrai que le rouge à lèvres,
01:27:13 c'est vraiment pas tolérable à ce moment-là,
01:27:16 mais vous dites qu'en Asie et en Afrique du Nord,
01:27:18 le rouge à lèvres n'a jamais été la cible d'aucun interdit.
01:27:21 – Non mais en Asie, le maquillage était un art,
01:27:24 au contraire, on l'encouragait, on l'enseignait même.
01:27:29 En Afrique du Nord aussi, bizarrement,
01:27:31 enfin ensuite, par la suite, quand l'islam est devenu plus radical,
01:27:35 il a été interdit, mais oui, et dans l'Europe.
01:27:39 – Et le premier tube de rouge à lèvres,
01:27:40 c'est d'ailleurs un chirurgien musulman qui l'invente
01:27:43 aux alentours de l'an 1000, à la grande époque de Cordoue.
01:27:47 – Oui, absolument.
01:27:48 – Et des Landalousses en Espagne musulmane.
01:27:50 – Oui, il s'appelait Abu el-Kassim, c'était un génie,
01:27:53 dont on a découvert d'ailleurs le génie et les différentes inventions
01:27:58 quand il a été traduit, et il a inspiré beaucoup de médecins
01:28:02 du Moyen-Âge et plus tard.
01:28:04 – Et à l'époque, ça ressemble à quoi ? C'est un bâtonnet ?
01:28:08 – Eh bien lui, il a inventé le premier bâtonnet de rouge à lèvres,
01:28:11 c'est lui qui l'a inventé.
01:28:12 Avant, c'était dans des petites fioles,
01:28:14 on le prenait avec le doigt et on le passait,
01:28:17 on a connu ça dans nos pays,
01:28:19 mais c'est lui qui a inventé le premier bâtonnet.
01:28:22 Mais on ne s'en est rendu compte que quand on l'a traduit,
01:28:26 qu'on a pu le lire dans nos langues.
01:28:29 – Et alors on l'a vu, c'est plutôt les femmes des classes privilégiées
01:28:32 qui jusqu'à présent se mettaient du rouge à lèvres.
01:28:35 À partir du XIIIe siècle en Italie, donc au Moyen-Âge,
01:28:40 toutes les femmes se mettent à porter du rouge à lèvres.
01:28:42 – Oui, dans l'Europe du Sud, pas dans l'Europe du Nord chez nous, non.
01:28:45 Ça, c'était proscrit.
01:28:47 Mais dans l'Europe du Sud, alors, selon leurs moyens et leurs classes,
01:28:51 elles ne portaient pas le même rouge à lèvres,
01:28:53 d'ailleurs elles se mettaient en danger puisqu'elles utilisaient des composants
01:29:01 qui pouvaient être dangereux pour elles.
01:29:03 Mais l'Église n'intervenait pas dans l'Europe du Sud, bizarrement,
01:29:08 alors qu'en France, par exemple, elle était drastique.
01:29:12 – Et c'est au XVIIe siècle que le rouge à lèvres se répand en Europe,
01:29:15 dans toutes les couches de la société,
01:29:17 mais au XVIIIe, il y a le mouvement inverse.
01:29:19 Donc il y a les Lumières qui s'en mêlent
01:29:22 et qui commencent à dire que c'est mauvais pour la santé.
01:29:24 – Et puis surtout, ils s'inscrivent aussi dans la continuité des philosophes grecs,
01:29:28 ils disent que c'est une tricherie, que c'est un mensonge,
01:29:31 que la femme, le soir, elle pose son visage sur sa table de nuit,
01:29:35 je ne sais pas s'il y avait des tables de nuit à l'époque,
01:29:37 mais donc oui, c'est au nom aussi de la vérité et de l'authenticité qu'ils le proscrivent.
01:29:44 – Et c'est combattu par Révolution parce que c'est un signe pour eux de l'ancien régime ?
01:29:48 – Alors là, bien sûr, c'est l'aristocratie qui se maquillait,
01:29:52 donc ils l'interdisent aussi.
01:29:54 – Et l'expression rouge à lèvres, c'est à ce moment-là, je crois, c'est au XVIIIe ?
01:29:58 – Alors c'est une chercheuse qui a découvert ça, oui, effectivement,
01:30:02 ça vient du XVIIIe, elle a trouvé ça dans une boutique d'un parfumeur,
01:30:06 elle a vu rouge à lèvres sur des petits cartons
01:30:09 où il y avait des petites fioles avec cet ongant-là.
01:30:14 – En Angleterre, c'est carrément interdit par la loi à partir de 1770.
01:30:18 – Absolument.
01:30:19 – Et alors pendant tout le XIXe, et notamment pendant le règne de la Reine Victoria,
01:30:24 alors là, il n'y a pas question…
01:30:26 – Elle était folle.
01:30:28 – Puritanisme ?
01:30:29 – Puritanisme, plus d'hibouderie,
01:30:31 elle était de toute façon habillée en noir toute sa vie et puis…
01:30:35 – Elle était en deuil, c'est pour ça qu'elle était habillée en noir.
01:30:37 – Oui, mais même…
01:30:38 – Elle était très amoureuse de son mari, elle-même.
01:30:40 – Oui, mais aussi à St-Gervais.
01:30:43 – Est-ce que des femmes ont contesté cette interdiction ?
01:30:45 – Ah, les femmes se sont toujours, toujours, toujours battues
01:30:49 pour conserver leur rouge à lèvres.
01:30:52 C'est fou à quel point elles étaient obsédées par le fait d'être libres,
01:30:56 de se maquiller, de se rougir les lèvres.
01:30:59 – Ce qui est drôle, c'est qu'on s'aperçoit dans votre livre
01:31:01 qu'au même moment où c'est rigoureusement interdit en Angleterre,
01:31:04 même si évidemment il doit y avoir…
01:31:06 – Oui, elles venaient en France, celles qui pouvaient.
01:31:09 – Voilà, et au même moment au Japon,
01:31:10 au moment où le Japon avec l'air mégi s'ouvre à l'Occident,
01:31:13 les femmes se maquillaient ?
01:31:15 – Elles se sont toujours maquillées, les geishas ont donné le temps, non.
01:31:19 Elles donnaient le là et puis alors le maquillage au Japon, c'est un art,
01:31:24 parce qu'elles ne se maquillaient pas forcément les deux lèvres,
01:31:27 elles dessinaient des paysages, des fruits,
01:31:32 même des personnages sur leurs lèvres.
01:31:35 Il y a je crois 90 dessins répertoriés dans un très beau livre
01:31:40 qui est à la Bibliothèque Nationale,
01:31:41 où on voit tous les dessins que les geishas faisaient sur leurs lèvres supérieures,
01:31:48 qu'elles maquillaient, c'était un art, voilà.
01:31:51 – Alors là où ça devient non plus un art, mais une industrie,
01:31:54 c'est au XXe siècle, et là il y a un truc que j'ai trouvé extraordinaire
01:31:58 dans votre livre, c'est qu'on est en 1912,
01:32:01 et il y a 20 000 subfragettes qui s'apprêtent à défiler
01:32:06 pour réclamer le droit de vote,
01:32:07 et Élisabeth Ardenne a l'idée de leur donner à chacune
01:32:11 un tube de rouge à lèvres.
01:32:12 – Aussitôt, elle se maquille.
01:32:14 – Et ça devient le signe du féminisme, alors ce sera l'inverse.
01:32:17 – Oui.
01:32:17 – 60 ans plus tard, c'est l'inverse, mais là c'est le signe du féminisme.
01:32:21 – Oui absolument, tout de suite elles se maquillent les lèvres
01:32:23 et elles brandissent leurs petites étendards, leur rouge à lèvres.
01:32:27 Et d'ailleurs pendant la Deuxième Guerre mondiale aussi,
01:32:30 ça a été un enjeu entre les deux camps.
01:32:32 – Exactement, et il y a des images, les femmes qui sont dans l'armée…
01:32:35 – Elles se maquillaient, alors c'était contre l'Allemagne,
01:32:38 parce qu'Hitler détestait le rouge à lèvres,
01:32:40 Eva Braun n'en portait pas,
01:32:41 les Allemandes hitlériennes avaient jeté leur rouge à lèvres.
01:32:45 Et de notre côté, enfin si j'ose dire, en Angleterre Churchill lui avait dit,
01:32:50 dans toutes les restrictions qui avaient lieu et qui avaient cours,
01:32:55 il a dit "on restreint tout sauf la fabrication du rouge à lèvres
01:32:58 parce que c'est bon pour le moral des femmes".
01:33:00 Il avait tout, je suis amoureuse de Churchill,
01:33:03 mais il y a beaucoup de raisons pour lesquelles on peut être amoureuse
01:33:07 de cet homme-là, dont celle-là.
01:33:09 – Le rouge à lèvres, donc les féministes des années 60 sont contre ?
01:33:16 – Ils sont contre, et les hippies aussi, eux c'est au nom du naturel,
01:33:21 les féministes c'est parce que c'est une alienation.
01:33:24 – Et juste après ça revient avec la disco.
01:33:27 – Exactement, ce sont les reines, les divas du disco.
01:33:30 – Oui, on voit Madonna Summer là, des lèvres éclatantes, le gloss.
01:33:35 Et puis les années 80, Madonna, c'est la sophistication des années 80.
01:33:39 – Pour Hollywood, toutes les stars de Hollywood,
01:33:42 Maryline disait "il vaut mieux qu'un homme vous détruise votre rouge à lèvres
01:33:46 que votre eyeliner".
01:33:48 Toutes les stars de Hollywood ne sortaient jamais sans leur rouge à lèvres.
01:33:52 Enfin, une des grandes aussi, comment dire, influenceuses, c'est Sarah Bernard.
01:33:57 Sarah Bernard, elle l'appelait "mon stylo d'amour"
01:34:00 et c'est la première à s'être maquillée, à avoir mis du rouge à lèvres,
01:34:05 c'était considéré comme un geste obscène de se mettre du rouge à lèvres publiquement.
01:34:09 Et c'est la première qui sortait ostensiblement son tube de rouge à lèvres
01:34:14 et qui se maquillait.
01:34:15 – Il faut savoir que Sarah Bernard c'est quand même la première grande star internationale
01:34:19 et donc elle a de l'influence sur tout le monde.
01:34:20 C'est-à-dire qu'elle se produit aussi bien à Moscou qu'à Washington.
01:34:24 – Exactement.
01:34:24 – Et c'est la première, il n'y en a pas eu d'autres avant.
01:34:27 Et effectivement ça a donc eu une importance.
01:34:30 – Ça a eu une influence sur les femmes.
01:34:32 – Et alors dernier épisode dans la grande saga du rouge à lèvres,
01:34:36 c'est le confinement, le Covid.
01:34:39 – Ah oui, les masques, les ventes s'écroulent.
01:34:41 – 70% de ventes en baisse du rouge à lèvres.
01:34:44 Donc en fait on met du rouge à lèvres mais pour sortir.
01:34:47 – Pour séduire.
01:34:49 – Oui mais on pourrait vouloir séduire à la maison.
01:34:51 – Ah oui mais sauf…
01:34:52 – Ou plaire.
01:34:53 – Pour séduire, oui.
01:34:55 – Donc ça veut dire, non mais donc ils n'avaient pas tort les grecs
01:34:58 quand ils disaient non non non pas de rouge à lèvres parce que c'est pour séduire,
01:35:01 parce que c'est la tentation d'être infidèles, ils n'avaient pas tort.
01:35:04 – Évidemment, il y a un texte magnifique de Philippe Grimberg sur justement
01:35:12 toutes les connotations sexuelles autour du rouge à lèvres.
01:35:15 On le sature de connotations sexuelles, évidemment que c'est pour séduire.
01:35:18 – Voilà mais ce n'est pas pour séduire son mari quoi.
01:35:22 – On peut en déduire effectivement ça.
01:35:26 – Marcelle Jacob, un mois d'hier sur rouge à lèvres,
01:35:29 vous n'en avez pas mais je vous en ai vu souvent en portée.
01:35:32 – Non mais c'est vrai que je ne connaissais pas les détails de cette histoire
01:35:42 mais je pense qu'il y a quelque chose,
01:35:44 enfin c'est l'impression que quand vous avez raconté
01:35:46 que peut-être c'est plus que le truc de séduire,
01:35:49 il y a le fait de mettre en public cette connotation sexuelle directement,
01:35:54 aux actes sexuels, aux actes sexuels boucogénitales en fait.
01:36:00 – Oui parce qu'en plus le tube de rouge à lèvres, il a une forme phallique
01:36:05 et on a toujours lié le rouge à lèvres.
01:36:07 – C'est pas seulement la séduction, c'est directement…
01:36:09 – Oui c'est vrai qu'il y a cette connotation-là, c'est certain.
01:36:14 – Mais de même on ne se remettait pas forcément de la poudre devant tout le monde.
01:36:18 – Non mais le rouge à lèvres oui.
01:36:19 – Oui, effectivement.
01:36:23 Jean Chalian un mot sur…
01:36:26 – Je trouve que séduire c'est merveilleux
01:36:29 et qu'au cours de l'histoire ça a été très fréquemment utilisé,
01:36:34 entre parenthèses Louis XIV par exemple,
01:36:37 c'est un monsieur qui se mettait de la poudre sur les joues
01:36:40 et qui prenait beaucoup de temps pour s'arranger.
01:36:43 – Vous savez pourquoi il avait une longue perruque ?
01:36:46 Parce qu'il était comme vous ?
01:36:47 – Parce qu'il était chaud.
01:36:48 – Voilà.
01:36:49 – Oui c'est bien connu que les cheveux c'est non seulement quelque chose qui tient chaud
01:36:54 mais que c'est joli.
01:36:56 Quoi qu'il en soit, plaire est la chose la plus naturelle du monde
01:37:01 et effectivement dans ce cadre-là, si vous voulez,
01:37:03 le rouge à lèvres entre autres a joué un rôle très important.
01:37:08 Par hasard d'ailleurs que ce soit les lèvres qui soient conservées.
01:37:13 – Évidemment, c'est ce que je disais.
01:37:17 – Pierre Connaissain.
01:37:19 – Est-ce que les femmes de salafistes mettent du rouge à lèvres sous le hijab ?
01:37:23 – Il y a des images dans votre livre, Rachel Khan ?
01:37:26 – Vous pourrez voir pour les salafistes les plus modernes.
01:37:30 Parce qu'ils mettent bien des jeans en dessous.
01:37:33 – Non mais certaines sont maquillées comme des camions volés.
01:37:36 – Il y a même dans votre livre des photos des talibans de Kaboul
01:37:40 qui sont maquillés avec du rouge à lèvres.
01:37:43 – C'est touchant d'ailleurs.
01:37:44 – On se demande c'est quoi ces photos ?
01:37:46 Est-ce que c'est une provocation ?
01:37:48 – Non, c'est quelqu'un qui a trouvé ça.
01:37:50 C'est des photos matants, c'est une photo matant.
01:37:53 Et deux talibans qui ont trouvé du rouge à lèvres
01:37:56 dans une boutique après l'avoir dévastée.
01:37:58 – Vous croyez que c'est ça ?
01:37:59 – C'est ce qui a été raconté et qui ont maquillé.
01:38:01 – Moi j'ai vu ça à Kaboul, sous la burqa.
01:38:05 Les femmes avaient du… c'est vraiment,
01:38:08 je l'ai vu, j'ai proposé puisque j'étais à Kaboul,
01:38:11 elles avaient le rouge à lèvres,
01:38:13 mais le rouge à lèvres avait été donné par les expatriés.
01:38:17 C'est les expatriés qui donnaient les tubes de rouge à lèvres.
01:38:20 Mais je pensais aussi aux transsexuels, aux minorités
01:38:25 qui usent et abusent du maquillage, du rouge à lèvres, etc.
01:38:29 – D'ailleurs c'est le prochain marché
01:38:30 que va chercher à conquérir l'industrie, c'est les hommes.
01:38:34 D'abord les transsexuels,
01:38:36 à un moment, une période favorable où le genre n'est plus affirmé massivement.
01:38:41 – De toute façon, avant que les hommes commencent à mettre de l'eau de toilette,
01:38:44 il a fallu quelques années, maintenant c'est totalement…
01:38:46 – Maintenant il y a une grève.
01:38:47 – On peut imaginer qu'un jour on se mettra du noir…
01:38:49 – Il y a une offensive, il y a une offensive des fabricants
01:38:53 en direction des hommes en général.
01:38:55 D'ailleurs ça a commencé en Asie.
01:38:57 – Non mais ça marche avec la jeune génération,
01:38:59 il y en a une partie qui a déjà…
01:39:00 – C'est pas à vous Frédéric qu'on s'adresse pour l'instant.
01:39:03 – Vous êtes gentil de me rappeler mon âge, évidemment.
01:39:07 Vous faisiez allusion à Elisabeth Ier tout à l'heure,
01:39:11 grande reine, la fille d'Henri VIII,
01:39:14 grande reine et qui elle, effectivement, est complètement addicte aux rouges,
01:39:19 mais elle est addicte aussi à la…
01:39:21 – A la poudre blanche.
01:39:22 – A la poudre blanche, et c'est peut-être ça qui l'a rendue…
01:39:25 – Les deux.
01:39:26 – Elle a vécu vieille quand même.
01:39:27 – Oui, oui, elle a vécu vieille,
01:39:28 mais enfin bon, ça l'a empoisonnée lentement mais sûrement.
01:39:31 – Mais ça, ça l'a duré jusqu'au 18ème,
01:39:33 une des raisons pour laquelle les philosophes des Lumières
01:39:37 sont contre le maquillage et le rouge à lèvres,
01:39:39 c'est parce qu'à l'époque, il y a du plomb, il y a du mercure,
01:39:41 et ça rend terrible.
01:39:43 – On sait qu'il y a des ingrédients dangereux,
01:39:45 mais on ne sait pas trop comment les éviter,
01:39:46 et puis de toute façon, les femmes n'en tentent pas raison.
01:39:50 – Oui, c'est toujours comme ça, si on aime quelque chose,
01:39:54 on s'en fiche que ce soit pas bon pour la santé, c'est le problème.
01:39:58 Qu'est-ce que vous avez découvert de plus surprenant
01:40:00 en racontant cette trégage ?
01:40:02 – À quel point c'était important pour les femmes ?
01:40:03 Moi, je suis sidérée, c'est presque un terdissement.
01:40:06 Non, je ne savais pas qu'elles y étaient attachées à ce point-là.
01:40:10 Par exemple, pendant la guerre de 14-18,
01:40:11 c'est encore une période, au début du 19ème,
01:40:15 où il n'y avait que les prostituées ou les comédiennes
01:40:17 qui pouvaient se farder les lèvres.
01:40:20 Dès que les hommes sont partis au front,
01:40:22 les femmes qui les ont remplacées dans tous les postes de production,
01:40:26 elles se sont précipitées sur les rouges à lèvres.
01:40:29 Alors qu'en leur interdisant, on ne sait pas pourquoi, de le porter.
01:40:32 C'est systématique.
01:40:34 Dès qu'on veut leur interdire ce petit truc,
01:40:36 elles se battent pour le récupérer.
01:40:39 – Et vous pensez qu'il n'y a pas d'autre équivalent ?
01:40:41 Ce serait juste le rouge à lèvres ?
01:40:43 – En tout cas, oui.
01:40:46 Dans le maquillage et les cosmétiques, oui.
01:40:49 Parce que la liner et tout ça…
01:40:51 – Après ça, c'est certainement le col et mettre en valeur les yeux.
01:40:56 – Oui, mais c'est beaucoup moins répandu aujourd'hui.
01:40:59 – Non mais chez les Allemands, c'est pas répandu.
01:41:01 – Dans les années 60, par exemple, les femmes à Paris
01:41:04 se mettaient beaucoup de noir sur les yeux.
01:41:06 C'est fini aujourd'hui, elles ne s'en passent pas bien.
01:41:08 Elles n'ont pas l'impression d'être brimées.
01:41:11 C'est une question de mode.
01:41:12 – Là, du coup, les islamistes ont un goût prononcé pour le col sur les yeux.
01:41:17 – Pour les hommes ?
01:41:18 – Pour les hommes, absolument.
01:41:19 C'est une marque de distinction et d'allégeance, absolument.
01:41:25 – Un dernier mot, Marcel et Yacoub,
01:41:26 sur l'importance du rouge à lèvres pour les femmes.
01:41:29 Vous n'avez pas votre petite idée ?
01:41:30 – Non, elle n'importe pas.
01:41:31 – Pas voir des vergnements.
01:41:32 – Elle n'importe rien.
01:41:33 – Non, mais…
01:41:34 [Rires]
01:41:35 – Peut-être.
01:41:36 – Vous n'avez rien à dire ?
01:41:37 – Non.
01:41:38 – Très bien.
01:41:39 – Je vais offrir ce livre à ma femme.
01:41:40 – Monsieur, je vous l'offre.
01:41:41 – Ecoutez, vous êtes très gentille.
01:41:42 – Donc, toute dernière question, c'était parce que vous vouliez en faire un documentaire
01:41:45 que finalement vous en avez fait un livre.
01:41:46 – Oui, je devais en faire un documentaire.
01:41:47 – On sent que ça va être un documentaire dans pas longtemps.
01:41:49 – Ça sera un documentaire aussi.
01:41:51 – Une folle histoire du rouge à lèvres.
01:41:53 Merci Rachel Khan, merci tous les quatre d'avoir participé à cette émission.
01:41:57 – Merci.
01:41:58 – Merci de nous avoir suivis et je vous donne rendez-vous la semaine prochaine, dimanche
01:42:03 à 22h pour un autre numéro des visiteurs du soir.
01:42:06 Je vous souhaite une très bonne nuit.
01:42:08 Conflit bon.