Anne Fulda reçoit Daniel Rondeau pour son livre «Ma Champagne, mon pays» dans #HDLivres
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00:00 Bienvenue à l'heure des livres, Daniel Rondeau.
00:02 Alors, on vous connaît, vous êtes académicien, vous êtes romancier,
00:05 vous avez écrit de nombreux romans.
00:07 Vous êtes intéressé autant par l'Orient, le bassin méditerranéen,
00:10 Alexandrie, Tanger, Beyrouth, Malte.
00:12 Vous avez été ambassadeur que par la France, autant par Johnny que par Paul Morand.
00:16 Et là, vous venez d'écrire "Ma Champagne, mon pays".
00:19 C'est paru aux éditions des Équateurs.
00:22 Vous écrivez par la terre et par le sang.
00:25 "Je suis champenois de nations", comme disait Dom Mébillon.
00:28 "Par le vin aussi, qui ne ressemble à aucun autre.
00:30 Ce vin qui parle au monde entier et coule dans mes veines
00:33 depuis que j'ai reçu ma première transfusion baptismale
00:36 dans l'église du Ménil-sur-Ogé."
00:38 Alors, c'est donc la première phrase de votre livre.
00:40 Et en fait, c'est une déclaration d'amour à cette région.
00:44 Oui, d'une certaine façon, déclaration d'amour à ma région.
00:49 Je me suis dit, enfin, je pense qu'après,
00:51 nous sommes en pleine mondialisation.
00:55 La mondialisation a des avantages, a sans doute des charmes.
00:58 Mais en même temps, elle uniformise, elle aplatie,
01:01 elle légalise toutes les régions du monde entier.
01:04 Et on retrouve les mêmes produits un peu partout,
01:07 les mêmes hôtels, les mêmes maisons.
01:08 Et bon, moi, je me suis dit, j'ai eu la chance d'être né
01:11 dans une région qui résiste.
01:13 Et au contraire, ce sont 20 résistes tellement que c'est lui
01:15 qui est mondialisé.
01:18 Bon, ça, c'était une première chose.
01:19 Et la deuxième chose, je me suis dit, après,
01:22 on a vécu un épisode au début de l'été.
01:25 On a eu toutes ces émeutes.
01:28 On a vu que la France était fracturée, divisée,
01:31 qu'il y avait quand même aussi des poussées de haine
01:34 assez inquiétantes.
01:36 Et pour moi, écrire "Ma Champagne, mon pays",
01:38 c'est une façon de dire "J'aime ma France, j'aime mon pays".
01:43 Et je pense que toutes les régions ont participé,
01:48 d'une certaine façon, à la création de ce qu'on peut appeler
01:51 l'âme française.
01:52 Bon, et ma Champagne, en tout cas, avec ses caveaux,
01:57 ses coteaux, ses églises,
01:59 notre âme de race, vous voulez.
02:01 Bon, tout ça a participé à la production
02:05 de cette âme française, si je voulais le dire simplement.
02:07 - Alors, c'est une manière aussi de rendre hommage
02:08 à votre arrière-grand-père, Tonelier,
02:10 à votre grand-père, David Vigneron,
02:12 aussi à vos parents, instituteurs, l'un et l'autre.
02:14 Et aussi de rendre hommage à des figures
02:17 qu'on ne connaît pas toutes.
02:18 Notamment, vous parlez de Don Mabillon,
02:21 auquel vous vous référez, qui est une personnalité
02:24 assez étonnante, parce qu'aujourd'hui,
02:25 Mabillon, on ne connaît que la station de métro.
02:27 - La station de métro, et maintenant, il y a un map café.
02:29 Non, bien sûr, c'était une figure centrale,
02:33 de XVIIe, une figure, c'était une sorte...
02:37 Autour de lui, s'est formée une petite République des Lettres.
02:41 C'était un énorme savant.
02:42 C'était une forme, une sorte d'historien voyageur
02:45 qui allait partout et qui a joué un rôle énorme
02:49 pour le rayonnement intellectuel de la France et de Paris.
02:52 C'est-à-dire, on connaît Saint-Germain-des-Prés
02:54 à cause de Jean-Paul Sartre, Camus, Leflore,
02:56 La Rose Rouge, Juliette Gréco.
02:58 Mais il y a eu, avant tout ce genre,
03:01 il y a eu ce moine extraordinaire de modestie
03:05 et d'intelligence et d'érudition qui s'appelait Don Mabillon.
03:10 - Alors, vous qui avez commencé,
03:13 qui avez été révolutionnaire dans votre jeunesse,
03:15 qui avez travaillé pendant quatre ans dans une usine,
03:19 vous auriez pu ensuite, comme intellectuel,
03:22 être happé par Paris.
03:23 Mais pourquoi vous restez fidèle quand même à ces terres ?
03:26 - Je pense que...
03:28 Je suis né dans une famille très modeste, un petit vinon.
03:34 Je passais mes vacances chez mon grand-père à Congé.
03:37 Et quand je sortais de chez lui,
03:40 je voyais ses vergers, son clos, sa vigne,
03:42 toutes les collines complantées de vignes
03:46 et de petits vergers tout autour.
03:48 Et je crois qu'il m'a donné...
03:51 Enfin, cet endroit m'a donné la chance
03:54 de m'accorder à la beauté du monde.
03:55 Ça, c'est une première chose.
03:56 Dans la modestie la plus totale, mais je me sentais pas modeste.
04:00 Je me sentais privilégié.
04:02 D'autre part, mes parents, l'école de mes parents,
04:05 je pense que j'ai appris...
04:08 C'était l'école de la liberté.
04:10 J'ai appris à la fois à n'être prisonnier d'aucun milieu,
04:14 d'aucune situation, d'aucune fatalité.
04:16 Liberté aussi de partir pour d'autres cieux,
04:19 mais liberté aussi de rester fidèle au sien.
04:23 Et je crois que ces deux, en me coagulant,
04:26 m'ont donné la fierté d'être français, tout simplement.
04:30 Dernière question, rapidement.
04:32 Quel est le lien entre le jeune homme au point levé,
04:34 qu'on voit sur la couverture du livre,
04:35 et le soldat de la Grande Guerre qui est derrière ?
04:38 C'est une manière de tirer un oeil ?
04:40 Non, mais bon, la champagne était le bouclier de la France
04:43 sur le front Est, les cimetières sont innombrables.
04:47 Et nous avons vécu avec le poids de l'histoire.
04:50 Le poids de l'histoire, il est énorme.
04:52 Il est énorme dans ma formation.
04:54 Je n'ai jamais oublié ça.
04:55 Moi, comme tout le monde,
04:56 enfin mes grands-parents ont fait la guerre 14.
05:00 Et donc, c'est un salut au poilu d'autrefois.
05:04 Et avec une référence à l'histoire, mais toujours à la géographie,
05:09 parce que chez vous, il y a toujours histoire, géographie,
05:11 littérature qui sont mêlées.
05:13 En tout cas, je vous conseille vraiment ce livre,
05:15 "Ma Champagne, mon Pays".
05:16 C'est publié aux éditions des Équateur.
05:18 Merci beaucoup, Daniel Foucault.
05:19 Merci Anne Foulda.
05:20 Merci infiniment.
05:21 [Musique]
05:25 [SILENCE]