Le secteur doit réduire de plus de moitié ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030.
Les enjeux sont importants et demandent l'intervention des pouvoirs publics : aides, fonds, plus de formations et de formateurs.
Est-ce possible ? Quels leviers pour y parvenir ?
Les enjeux sont importants et demandent l'intervention des pouvoirs publics : aides, fonds, plus de formations et de formateurs.
Est-ce possible ? Quels leviers pour y parvenir ?
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00:05 -Le débat de Smart Impact pour analyser ces enjeux
00:08 de décarbonation du secteur du bâtiment,
00:11 je reçois Jean-Pierre Houette.
00:13 -Bienvenue.
00:14 -Vous êtes président du comité scientifique
00:16 de l'association Equilibre des énergies,
00:19 Sarah Westerfeld.
00:20 Vous êtes directrice générale de Bellastoc.
00:23 C'est quoi, Bellastoc ?
00:24 C'est une coopérative d'architectes, d'urbanistes,
00:28 mais pas que.
00:29 -Oui, et d'ingénieurs également.
00:31 On a une petite dizaine d'années d'existence.
00:34 On réunit 20 personnes autour de projets d'aménagement
00:38 et autour du bâtiment.
00:41 On fait du réemploi de matériaux.
00:43 En promeu, c'est le réemploi de matériaux à l'échelle du bâti.
00:47 -Vos projets sont marqués du saut de l'économie circulaire
00:50 et du réemploi.
00:52 -Exactement.
00:53 On intervient auprès des maîtresses d'ouvrage, en assistance,
00:57 ou auprès des maîtresses d'oeuvre, en conseil.
01:00 Pour généraliser le réemploi,
01:02 on commence par un diagnostic du bâtiment
01:05 qui va être réhabilité ou déconstruit,
01:07 et pour cibler le nombre de matériaux
01:09 qui peuvent être sortis de la benne,
01:12 qui ne rentrent pas dans le cas de figure de déchets.
01:15 Et voilà.
01:16 Après, on accompagne pour toutes les parties faisabilité
01:20 et toutes les logistiques autour du réemploi de matériaux.
01:23 -Jean-Pierre Wett,
01:25 vous présentez des énergies-associations
01:27 présidées par l'ancien ministre de l'Environnement,
01:30 Brice Lalonde.
01:31 Quelles sont vos missions ?
01:33 -C'est un think tank, un cercle de réflexion,
01:36 qui est essentiellement constitué d'entreprises.
01:39 C'est-à-dire qu'on réfléchit aux mesures concrètes
01:42 qui sont de nature à accélérer la décarbonation,
01:45 c'est-à-dire la sortie des énergies fossiles,
01:48 dans les secteurs des transports aériens, routiers, du bâtiment,
01:52 mais sans porter impact à la croissance
01:55 et à l'activité économique.
01:57 -Ce qui n'est pas forcément simple à tenir.
01:59 Il y a la loi de programmation sur l'énergie et le climat
02:03 qui s'annonce.
02:04 Vous venez de faire des propositions
02:06 autour de la décarbonation du bâtiment,
02:09 c'est le thème de notre débat.
02:11 Déjà, le défi en soi, il est immense pour ce secteur.
02:14 -Il est immense.
02:15 Pour les Français, il y a deux grands défis.
02:18 Le problème des transports avec le défi du véhicule électrique,
02:22 un gros problème, mais qui est bien engagé.
02:24 Et à peu près de même ordre de grandeur comme problème,
02:28 il y a le problème de la sortie des énergies fossiles.
02:31 On a vécu pendant des années sur le charbon,
02:33 puis sur le fioul, puis sur le gaz,
02:36 et maintenant, on voit qu'il faut en sortir
02:38 pour des raisons climatiques et de dépendance.
02:41 -Avec un objectif qui s'affiche sur notre écran,
02:44 on passait de 64 millions de tonnes de CO2
02:47 produites par le secteur du bâtiment en 2022
02:49 à 30 millions en 2030.
02:51 -Ce sont les chiffres des officiels du secrétariat général
02:54 à la programmation écologique.
02:56 C'est pour ça que je disais "défi immense".
02:59 -Il faut prendre la mesure de ça.
03:01 Aujourd'hui, il y a des résultats.
03:03 On est dans une bonne trajectoire, mais il faut accélérer.
03:06 Il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt.
03:09 Si on veut sortir des énergies fossiles,
03:12 décarbonées, pour des raisons climatiques,
03:14 il faut prendre des mesures appropriées.
03:17 -Ca vous semble réaliste, Sarah Westerfeld ?
03:20 64 millions de tonnes par an à 30 millions.
03:22 -Il faut se donner les moyens.
03:24 Pour ça, on a besoin des politiques
03:27 pour développer la réduction des marchés, notamment,
03:32 intégrer le réemploi, par exemple.
03:34 Le réemploi, sur l'analyse de cycle de vie du bâtiment,
03:37 on est à zéro en émissions de gaz à effet de serre.
03:42 Ca, c'est la réglementation environnementale 2020
03:45 qui a amené cette analyse.
03:48 Forcément, quand on sait que les matériaux de réemploi
03:53 représentent 3 à 7 fois moins d'impact que les matériaux neufs,
03:56 ça contribue.
03:58 -Sur l'objectif, on est tous d'accord,
04:00 mais sur l'état de préparation du secteur,
04:03 vous qui êtes en relation directe,
04:05 est-ce qu'ils sont acculturés ?
04:07 Ca représente quoi, l'économie circulaire
04:10 ou le réemploi dans le secteur du bâtiment ?
04:13 -1 %. -C'est bien.
04:14 Ca donne une gamme de progression énorme.
04:17 -A l'échelle européenne, c'est 1 %.
04:19 On a beaucoup de travail à faire, de chemin à faire,
04:22 mais on est sur un domaine très innovant.
04:24 On a beaucoup de mal à imaginer
04:27 et à voir ce que va être le futur à moyen terme,
04:31 mais les acteurs sont prégnants là-dedans,
04:33 les assureurs, les maîtrises d'ouvrage, les maîtrises d'oeuvre.
04:37 On a un syndicat du réemploi qui est né,
04:40 qui permet aussi ces échanges-là.
04:42 Et forcément, on est obligés d'y venir.
04:46 Quand on voit qu'on a autant de mal
04:48 à se procurer des matières premières...
04:52 -Et puis on parlait de souveraineté alimentaire
04:55 dans la 1re partie de l'émission.
04:57 C'est aussi un levier de souveraineté.
04:59 Vous prenez une politique plus incitative.
05:02 Est-ce qu'on peut donner des exemples concrets ?
05:05 -Ecoutez, je fais tout à l'heure un parallèle
05:07 avec le secteur de l'automobile.
05:09 Dans le secteur de l'automobile,
05:11 une mesure qui a été comprise par les Français,
05:14 c'est la conversion.
05:16 Vous avez une voiture un peu ancienne
05:18 qui fonctionne au diesel, on vous ouvre sur certaines sobs
05:21 si vous changez de véhicule pour un véhicule électrique,
05:24 un véhicule à basse émission.
05:26 Faisons la même chose dans le domaine des chaudières.
05:29 Il y a des millions de chaudières à fioul ou à gaz chez les Français.
05:33 On ne dit pas qu'il faut le faire en 5 minutes,
05:36 mais envoyons-le un signal clair.
05:38 Pendant 3 ans, vous pourrez bénéficier d'un tel montant
05:41 si vous passez à une solution.
05:43 -C'est une idée de l'Europe qui avait été évoquée.
05:46 Le gouvernement a fait marche arrière.
05:48 -C'est une idée de l'Europe qui a été débattue en Allemagne.
05:52 Peut-être qu'il faudra y venir un jour.
05:54 Mais ce n'est pas ce qu'on dit aujourd'hui.
05:57 Il faut désinciter l'usage du fioul et du gaz.
06:00 Il y a encore des avantages fiscaux qui subsistent.
06:03 Désinciter d'un côté et inciter de l'autre.
06:05 On verra ce que ça donne.
06:07 -Il faut parler un langage commun.
06:09 Pour vous, le critère de référence,
06:12 c'est l'émission des gaz à effet de serre ?
06:14 -L'émission des gaz à effet de serre,
06:17 c'est assez évident.
06:18 C'est directement lié aux énergies fossiles.
06:21 Si vous réduisez les émissions de gaz à effet de serre
06:25 par la réglementation des incitations,
06:27 vous incitez le consommateur à sortir des énergies fossiles.
06:31 Avantage climatique et avantage stratégique.
06:33 Les Français ont des mémoires courtes,
06:36 mais il faut se rappeler de la crise du gaz
06:39 qui a été multipliée par 10.
06:41 Il y a eu le bouclier tarifaire
06:43 et peut-être que les Français n'ont pas réalisé
06:46 l'ampleur du problème qui se posait.
06:48 -On peut se poser la même question
06:51 sur le prix du carburant et les rissonnes.
06:54 On peut se demander si cet argent ne serait pas mieux utilisé
06:58 pour accentuer la transition.
07:00 Je vous pose la même question
07:02 sur l'état de préparation du secteur du bâtiment.
07:05 Pour mettre en oeuvre MaPrimeRénov',
07:08 on peut discuter de la complexité de MaPrimeRénov',
07:11 le fait de la simplifier,
07:13 mais il n'y a pas suffisamment d'artisans labellisés,
07:16 est-ce que le secteur est prêt à accélérer dans sa transformation ?
07:21 -Il est partiellement prêt, mais il faut l'aider.
07:24 Il y a un écosystème d'installateurs, de chaudières,
07:27 mais qui peuvent monter en gamme.
07:30 Tous ces gens-là ont une compétence.
07:32 Pourquoi ne pas passer de la chaudière à la pompe à chaleur ?
07:36 C'est pas insurmontable.
07:38 Il faut les aider, qu'ils reçoivent la formation adaptée.
07:42 C'est le rôle des entreprises et des pouvoirs publics,
07:46 car on a besoin de formation de formateurs
07:49 pour démultiplier ce changement.
07:51 On est bien conscients de la difficulté.
07:54 On ne dit pas que ça se fera en 3 minutes.
07:57 Il faut que le discours soit clair.
07:59 -Qu'on donne un cap.
08:01 -Un peu la même question, Sarah Westerfeld.
08:04 Sur ce que vous attendez de l'action publique,
08:07 pour vous, le levier le plus efficace pour décarboner le bâtiment ?
08:11 Vu votre regard d'intermédiaire avec ce secteur en tant qu'architecte.
08:17 -Je répondais sur les formations.
08:19 Former aussi les personnes sachantes autour du réemploi,
08:23 c'est très important.
08:25 Dynamiser la filière du réemploi.
08:27 On a déjà eu la REP, la responsabilité élargie aux producteurs,
08:31 qui a permis de dynamiser la filière du recyclage.
08:35 Le réemploi était un peu oublié.
08:37 On attend aussi ça.
08:39 C'est de créer des synergies foncières,
08:41 car on a besoin de stocker ces matériaux de réemploi,
08:45 de dynamiser le flux, la rencontre de l'offre et de la demande.
08:49 On a beaucoup d'offres de matériaux de réemploi,
08:53 mais la demande beaucoup moins.
08:56 On sait qu'en plus, le réemploi, au-delà de l'aspect écologique
09:00 et socio-économique, permet de démultiplier les emplois
09:04 sur l'échelle locale.
09:06 -Ca peut représenter quel pourcentage des matériaux
09:10 sur un chantier de rénovation ?
09:12 -C'est difficile à dire.
09:14 -Ca va dépendre des chantiers.
09:16 C'est de l'ordre de 10, 60 %, on est dans quelle fourchette ?
09:21 -Sur un chantier, on est plutôt de 10 %,
09:24 en moyenne, bien sûr.
09:26 Ca va dépendre des matériaux présents sur site.
09:30 On réemploie très bien les charpentes métalliques.
09:33 On a eu plusieurs d'allers et retours
09:36 avec les bureaux de contrôle et les assurances.
09:40 C'est toujours adapté en fonction des chantiers
09:43 et de la réutilisation, du réemploi.
09:46 Il y a beaucoup d'autres matériaux qui sont facilement réemployables.
09:51 On parle des gardes-corps, des radiateurs,
09:54 qui font potentiellement ressabler.
09:57 Il y a plus de 250 acteurs, revendeurs de matériaux,
10:00 qui ont un savoir-faire et qui demandent qu'une chose,
10:04 c'est de le transmettre.
10:06 -Il faut mettre en contact les différents acteurs.
10:10 Jean-Pierre Ouet, un dernier thème,
10:13 qui concerne tous les propriétaires,
10:15 les diagnostics de performance énergétique,
10:19 les DPE qui rentrent en vigueur,
10:21 est-ce le meilleur outil pour inciter les propriétaires
10:26 à faire des recherches sur le développement de l'énergie ?
10:30 -Est-ce un bon outil ?
10:31 Il a été amélioré fortement,
10:34 puisque le nouveau DPE, qui est entré en vigueur en 2021,
10:38 représente un progrès très substantiel.
10:41 Mais il y a des ajustements nécessaires.
10:44 Il y a des anomalies, qui sont liées à des coefficients
10:48 mal calibrés, etc.
10:50 Mais on considère que c'est dans cette direction qu'il faut aller.
10:55 On ne peut pas passer d'un logement G à un logement B.
10:59 Il faut baliser le chemin, le progrès,
11:02 et soutenir en conséquence.
11:04 -Il y a 2 millions de propriétaires "pauvres" en France,
11:08 qui n'ont pas les moyens de faire ces travaux.
11:12 -Il y a beaucoup de gens qui ne se chauffent pas
11:15 comme ils l'aimeraient pouvoir se chauffer.
11:19 On a besoin de les soutenir.
11:21 Cette proportion a augmenté, c'est en dernier.
11:25 On est bien conscients de ça.
11:27 C'est le rôle de la politique publique qui le fait.
11:30 Dans les aides publiques,
11:32 vous avez une forte prééminence des aides
11:36 vers les catégories sociales les moins favorisées.
11:39 Mais il faut être pragmatique.
11:42 Il ne faut pas vouloir passer d'une situation
11:45 qui est souvent fortement dégradée
11:48 à une situation merveilleuse, à l'équivalent de logement neuf.
11:52 C'est un gros map balisé par le DPE.
11:55 -Merci à tous les deux.
11:57 A bientôt sur Bismarck.
11:59 On passe à notre rubrique "Smart ideas",
12:02 une start-up à l'honneur.