La secte islamique des Nizârites ismaéliens, dirigée par un certain Rachid ad-Din Sinan, surnommé le «Vieux de la Montagne», a défrayé la chronique des croisades par les nombreux assassinats politiques dont elle s'est enorgueillie. Retour sur l'histoire de ces combattants dont les méthodes ont frappé leurs contemporains.
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00:00 Ils étaient les soldats les plus redoutés de l'ère médiévale.
00:05 Leur arme, la dague.
00:10 Ils excellaient en infiltration.
00:15 Ils frappaient sans laisser de traces.
00:21 Ils se donnaient l'apparence de fantômes et ils venaient, frappaient et disparaissaient.
00:26 La terreur était leur atout principal.
00:28 C'est de la guerre psychologique et ça a un très grand impact.
00:32 Voici l'histoire d'une petite communauté devenue l'un des plus redoutables bataillons de son époque.
00:40 Il s'agissait d'un petit groupe marginalisé et persécuté.
00:45 Une légende va naître, celle des premiers vrais assassins.
00:51 Leur histoire est une histoire de guerre.
00:53 Leur histoire est une histoire de guerre.
00:55 Leur histoire est une histoire de guerre.
00:57 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:00 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:02 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:04 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:06 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:08 Leur histoire est une histoire de guerre.
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01:12 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:14 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:16 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:18 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:20 Leur histoire est une histoire de guerre.
01:22 Thyr est une ville portuaire située à 160 km au nord de Jérusalem.
01:30 Au XIIe siècle, les croisés en ont fait un bastion.
01:38 Conrad de Montferrat la dirige.
01:46 Il vient d'être fait roi de Jérusalem.
01:48 L'homme le plus puissant de la Terre Sainte.
01:51 Il est le plus puissant de la Terre Sainte.
01:53 Ce soir-là, il rentre chez lui après un dîner.
02:11 Il s'engage dans une ruelle étroite.
02:19 Deux hommes se tiennent de chaque côté.
02:21 Il reconnaît deux moines qui fréquentent régulièrement sa maison.
02:26 Mais il est sur le point de tomber dans un piège tendu par les plus redoutables forces spéciales de l'époque, les assassins.
02:37 [Musique]
02:53 Ce groupe est né bien loin de la Terre Sainte, au XIe siècle, dans un pays que nous connaissons aujourd'hui sous le nom d'Iran, la Perse.
03:01 [Musique]
03:09 A l'époque, la communauté islamique est déchirée par un conflit opposant les sunnites et les chiites.
03:14 Chacun clamment suivre la tradition la plus pure de l'islam.
03:21 Les sunnites pensent être les vrais gardiens de la tradition islamique.
03:27 Ils sont aujourd'hui largement majoritaires.
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03:34 Les sunnites ont désigné Abu Bakr comme successeur de Mahomet.
03:38 Mais les chiites voient les choses autrement.
03:41 Ils désignent le gendre et fils spirituel du prophète Ali et déclarent que tous les imams à venir devront faire partie de ses descendants.
03:58 Aujourd'hui encore, cette rivalité alimente de terribles conflits.
04:01 Au nord de la Perse, dans une région reculée, se trouve la forteresse d'Alamout.
04:23 C'est ici qu'une petite communauté chiite, les ismaéliens, a trouvé refuge.
04:28 Il s'agissait d'un petit groupe marginalisé et persécuté à une époque où pratiquer un islam alternatif était très mal vu.
04:40 Leur repère est surnommé le Nidègle.
04:48 Alamout est une forteresse naturelle.
04:53 Ce n'était pas une place forte comme les croisés en bâtissait, mais un redoute naturel perché à 100 mètres en haut d'une paroi quasi verticale.
05:00 Au pied de la paroi, on trouvait des gorges très difficiles à franchir.
05:14 Le chef de cette communauté est Hassan Issabah, un personnage charismatique exigeant de ses disciples une dévotion totale.
05:22 On raconte qu'il y avait chez cet homme quelque chose de magnétique, voire d'hypnotique, qui lui permettait de s'assurer la loyauté de ses fidèles alors qu'il vivait dans des conditions rudimentaires.
05:39 Les sunnites écrasent littéralement les ismaélites.
05:43 Ces derniers ont face à eux une armée de 300 000 hommes.
05:48 Ils sont face à ce que l'on appelle aujourd'hui la guerre asymétrique.
05:54 Hassan Issabah ne dispose pas d'une assez grande armée pour y poster.
06:05 Il va falloir imaginer des stratégies ne demandant que peu de moyens humains.
06:09 Hassan Issabah a la solution.
06:19 Il va décapiter les armées sunnites en s'en prenant directement à leur chef.
06:29 Puisqu'il ne peut pas affronter directement l'ennemi, il va contourner le problème en s'attaquant à la plus haute pièce de l'échiquier.
06:35 La cible n'est autre que le vizir, un sunnite orthodoxe pur et dur, Nizam al Mulk.
06:54 Il incarne le pouvoir à lui seul et compte bien débarrasser l'état perse de tous les autres mouvements musulmans.
07:01 La communauté des ismaélites est sa cible privilégiée.
07:10 Nizam al Mulk les décrit comme étant le but de la sédition et compte bien tous les exterminer.
07:18 Si Hassan Issabah parvient à retirer Nizam al Mulk de l'équation, il sait qu'il portera un coup terrible au camp des sunnites.
07:25 Une petite équipe de soldats commence à s'entraîner.
07:36 Ils sont choisis parmi les plus fidèles disciples de Hassan Issabah, les fédayins.
07:47 Les fédayins venaient probablement de cette région d'Iran.
07:52 Ce sont donc des montagnards robustes.
07:56 Ils apprennent notamment les techniques de combat rapprochés.
08:01 Leur aptitude en combat rapproché était largement supérieure à celui des soldats modernes.
08:07 Même dans les forces spéciales, on n'atteint pas un tel niveau.
08:11 De nos jours, on se repose beaucoup sur la technologie de combat.
08:16 À l'époque, les fédayins n'avaient rien, juste eux, ils étaient leurs propres armes.
08:21 La question clé était comment frapper et tuer à coup sûr ?
08:29 Ils auraient pu utiliser du poison.
08:32 Mais la cible aurait pu prendre un antidote.
08:36 Ils auraient pu se servir d'un arc et de flèches ou d'une arme de jet.
08:45 Mais il existe un risque de rater les organes vitaux.
08:48 Finalement, ils optent pour la dague.
08:58 Frappant de près, ils pourront s'assurer de la mort de la cible.
09:06 La dague permet d'achever assez facilement votre ennemi.
09:14 Mais c'est une arme très difficile à manier.
09:16 À travers l'histoire, nous avons vu trois types différents de dagues apparaître.
09:23 Celle pour les stocks, celle pour la taille et celle pour les stocks et la taille.
09:29 Le premier type s'apparente à ce qu'on appelle un stylet.
09:34 C'est un poignard à lame très fine, avec un fort pouvoir de pénétration.
09:43 Les stocks au stylet pénètrent immédiatement.
09:45 On frappe et c'est fini.
09:47 On avance en dissimulant l'arme. On la sort, on plante et on s'en va.
09:52 Le type suivant est l'arme de taille.
09:58 On la sort de l'étui et directement, ça se fait d'un seul geste.
10:02 C'est une attaque presque impossible à détecter.
10:12 Le troisième type est l'arme des stocks et de taille.
10:15 Ici, vous en avez une version moderne.
10:17 La lame est incurvée et très affûtée.
10:20 Elle se termine en pointe pour porter les stocks si vous ratez la première attaque.
10:23 Cette dague est équipée d'une garde très solide pour une meilleure prise en main.
10:28 Vous avez donc trois options différentes en fonction des situations.
10:40 Il y a ensuite une phase bien connue des forces spéciales modernes, le renseignement.
10:45 Le succès de l'opération dépend de la connaissance du terrain.
10:54 Un espion ismaélite infiltre le quartier général de Niza Malmouk et observe le moindre de ses mouvements.
11:02 Comment s'organisent ces journées ?
11:10 A quel moment faut-il frapper ?
11:12 Quel est le défaut de l'armure ?
11:16 Les informations sont transmises à Hassan Issaba.
11:36 En disposant maintenant d'éléments détaillés, il va pouvoir déterminer quel est son principal point faible.
11:41 Il s'avère que c'est la religion.
11:46 La seule façon d'approcher Niza Malmouk est de se faire passer pour un soufi,
11:55 c'est-à-dire un religieux très pieux, au-dessus de tout soupçon, et que personne n'imaginerait capable de tuer.
12:03 Les soufis sont des hommes de paix.
12:05 Les ismaélites savaient que Niza Malmouk accueillait à bras ouverts dans son entourage
12:16 tous ceux qui pouvaient dégager un sentiment de piété.
12:20 Ils ne rataient jamais une occasion de se faire bénir par ce genre de personnage.
12:26 Maintenant que les fedayines savent comment approcher, il faut établir comment le tuer.
12:31 Tout repose sur la diversion.
12:36 Il faut attirer l'attention de la cible, ou la distraire en la faisant trébucher, et à ce moment précis vous frapper.
12:43 Le premier coup de feu est le plus simple.
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13:02 L'homme choisi pour réaliser la mission s'entraîne.
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13:12 Après des mois d'efforts, il est prêt.
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13:37 Il va d'abord infiltrer la place forte des sunnites.
13:41 Personne ne suspecte le religieux.
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13:51 Dans ces quartiers, Niza Malmouk ne perçoit aucune menace.
13:56 Rien ne sort de l'ordinaire.
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14:02 À ce moment de la soirée, Niza Malmouk ne se doute de rien.
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14:08 Il vient d'achever sa journée de travail.
14:11 C'est le meilleur moment pour agir.
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14:15 Pendant la journée, il est presque impossible d'approcher de lui sans éveiller les soupçons.
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14:23 Il pensait sans aucun doute au plaisir de rejoindre son harem pour la soirée.
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14:33 Tapis dans l'ombre, le meurtrier guette le moment décisif.
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14:45 Niza Malmouk s'installe sur sa chaise à porteur qui doit le mener à son harem.
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14:58 Il remarque le soufi qui s'approche de lui.
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15:06 C'était quelqu'un qu'il avait déjà rencontré et qu'il était prêt à bénir.
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15:20 Le soufi sort une dague, poignard de Niza Malmouk et s'enfuit.
15:24 [Musique]
15:26 La diversion a fonctionné.
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15:39 La mort du chef des sunnites est une grande victoire pour Hassan Nisaba.
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15:46 C'était une personnalité de premier ordre.
15:49 Le tuer, c'était envoyer un message clair.
15:53 Nous pouvons abattre n'importe qui.
15:56 Si vous vous en prenez aux ismaélites d'Alamut, vous connaîtrez le même sort.
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16:07 Pendant les années qui suivent, Hassan Nisaba se montre fidèle à sa réputation.
16:12 Sous ses ordres, les fedayeen se livrent à de nombreuses attaques.
16:17 Pendant cette courte période, près de 25 assassinats sont perpétrés.
16:23 Il entre dans une sorte d'état de grâce où tout ce qu'il entreprend est couronné de succès.
16:29 [Sirènes]
16:32 Les assassins étaient très bien préparés.
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16:36 Leur technique de combat était sidérante.
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16:42 Ils se donnaient l'apparence de fantômes.
16:44 Ils venaient, frappaient et disparaissaient.
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16:49 Ils changeaient sans cesse de mode opératoire.
16:52 Le seul dénominateur commun était qu'ils utilisaient toujours une dague.
16:56 [Musique]
17:01 La mort de Nisam al Mulk provoque la chute de son empire.
17:04 Les assassins ont prouvé qu'un petit groupe pouvait vaincre une armée supérieure en nombre.
17:09 [Musique]
17:13 C'était la première fois qu'on employait délibérément un petit groupe d'hommes surentraînés dans une guerre asymétrique.
17:22 [Musique]
17:30 Les tueurs de Hassan Issaba sont au centre de toutes les discussions.
17:34 [Musique]
17:36 Ils entrent dans la culture populaire du Moyen-Orient.
17:39 [Musique]
17:43 Un poète parle d'un soldat solitaire à pied qui provoque la terreur chez des centaines de milliers d'ennemis.
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17:56 Les maïliens découvrent très vite que leur stratégie entraîne un effet secondaire.
18:00 [Musique]
18:04 Elle crée une atmosphère de terreur.
18:07 [Musique]
18:14 Il faut garder en tête que le terrorisme est avant tout une tactique de guerre psychologique.
18:19 Peu importe le nombre de morts, ce qui compte c'est l'impact d'une attaque.
18:24 Le fait que ces soldats ne craignaient pas la mort attise ce climat de peur.
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18:34 Les sunnites ont compris qu'ils avaient face à eux des soldats qui étaient prêts à mourir.
18:40 Et c'est ce qui les rendait d'autant plus terrifiants pour leurs ennemis.
18:45 [Explosion]
18:48 [Musique]
18:52 La vie est hélas encore d'actualité.
18:54 Il existe pourtant une différence cruciale.
18:58 Les fedayeen frappaient avec une grande précision.
19:01 Il n'y avait jamais de perte collatérale.
19:05 Ils ne tuaient pas d'innocents, ils frappaient de façon propre, précise et ciblée.
19:10 [Musique]
19:18 Face à un ennemi aussi redoutable, le discrédit est une méthode de défense courante.
19:23 Les sunnites font courir le bruit que les fedayeen sont une secte de montagnards tueurs sanguinaires.
19:30 [Musique]
19:35 On les décrit comme des fous furieux, des drogués aux pratiques déviantes.
19:42 D'ailleurs, aujourd'hui encore, on dépeint des groupes identiques comme étant des fanatiques et des psychopathes.
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19:53 L'imagination de ces détracteurs va parfois assez loin.
19:57 Les musulmans et les chrétiens occidentaux racontent l'histoire de jeunes tueurs manipulés par un chef démoniaque.
20:05 [Musique]
20:12 On parle de potions magiques, de promesses, de vie après la mort.
20:17 On raconte que ce qui rend ces soldats si redoutables et dévoués à leur maître, c'est l'usage de drogue.
20:25 [Musique]
20:28 Les sunnites les surnomment "hachichin", c'est-à-dire consommateurs de hachich.
20:34 [Musique]
20:36 Le nom est resté.
20:38 [Musique]
20:40 L'évolution du langage a transformé ce mot en un autre, "assassin".
20:45 [Musique]
20:51 Une légende est née.
20:53 Ces soldats d'élite de Hassan Issaba sont désormais des assassins.
20:59 [Musique]
21:03 Je ne pense pas qu'ils aient consommé de la drogue.
21:05 Il faut être très concentré pour frapper sa cible.
21:08 Le problème des drogues, c'est qu'elles ont un effet sur la conscience.
21:12 Quelle qu'elle soit, elle nuit forcément à la concentration.
21:17 [Musique]
21:22 Ce premier fait d'armes n'est qu'un début.
21:25 [Musique]
21:28 Les dahyines vont ensuite devoir défendre leur communauté, non seulement contre les sunnites,
21:32 mais avec les premières croisades, contre les catholiques également.
21:36 [Musique]
21:42 50 ans plus tard, dans les montagnes du nord de la Syrie,
21:46 les ismaéliens établissent leur nouvelle base à Masyaf.
21:50 [Musique]
21:52 Ils s'emparent d'un réseau de places fortes pour protéger leur communauté grandissante
21:57 de plus de 60 000 âmes.
21:59 [Musique]
22:04 Mais ici, en Terre Sainte, ils se retrouvent au cœur d'une dangereuse lutte de pouvoir.
22:09 [Musique]
22:13 Une terrible guerre religieuse opposée des musulmans sunnites et les croisés venus d'Occident.
22:18 [Musique]
22:22 L'un des enjeux est le contrôle de la ville de Jérusalem et de ses lieux de culte sacrés.
22:27 [Musique]
22:37 En Terre Sainte, le grand maître des assassins est Rashin al-Din Sinan.
22:43 [Musique]
22:45 C'est un chef charismatique.
22:47 [Musique]
22:50 Il a une personnalité très forte, un peu comme Hassan Issaba, le premier grand maître.
22:55 Il est hypnotisant, il a un contact facile, il est très intelligent et cultivé.
23:02 Mais il rôde autour de lui l'image d'un homme au pouvoir surnaturel, issu d'un autre monde.
23:09 [Musique]
23:11 Les fidèles de Rashin al-Din Sinan lui sont totalement dévoués.
23:16 S'ils devaient un jour donner à l'un d'eux l'ordre de tuer telle ou telle personne, ils l'auraient fait.
23:21 [Musique]
23:27 Pris entre les sunnites et les croisés catholiques, Rashin al-Din Sinan décide de frapper l'homme qui représente selon lui la plus grande menace, le chef des sunnites.
23:39 [Musique]
23:50 Saladin est l'un des plus grands guerriers de son temps.
23:53 [Musique]
23:55 Il a remporté de nombreuses batailles face aux croisés.
23:58 [Musique]
24:01 Il veut étendre son royaume à l'Egypte, à la Syrie et au nord de l'Irak.
24:06 [Musique]
24:08 Il est également l'incarnation de l'orthodoxie sunnite.
24:11 [Musique]
24:13 Il faisait régner la loi religieuse de façon très stricte en crucifiant les hérétiques ou les musulmans non orthodoxes.
24:21 [Musique]
24:24 Pour les assassins, Saladin représente une grande menace.
24:28 [Musique]
24:30 Il est en tête sur leur liste noire.
24:32 [Musique]
24:36 [Bruits de marches]
24:45 Les fedayeen commencent, comme ils l'ont toujours fait, par une phase de renseignement.
24:50 [Musique]
24:54 Les villes syriennes sont autant de sources d'informations idéales.
24:58 [Musique]
25:03 La première chose qu'ils font, c'est envoyer des missionnaires pour recruter parmi les locaux et constituer un réseau faisant remonter l'information.
25:10 Ils établissent leur réseau d'agents secrets.
25:13 [Musique]
25:16 Ils recrutent des agents susceptibles de leur donner des connaissances locales.
25:20 [Musique]
25:23 Dans ces villes, il y a un flux constant de marchands.
25:27 Or, les ismaéliens ont de longues dates infiltré ces confréries.
25:32 Ils peuvent facilement faire remonter les informations à Rashid al-Din Sinan.
25:36 On le décrit comme un fin stratège.
25:39 Il aurait employé des pigeons voyageurs pour transmettre des messages.
25:44 Mais il était par-dessus tout très intelligent.
25:47 Il a réussi à établir quels étaient les points de tension et les enjeux stratégiques à exploiter en Syrie.
25:54 [Musique]
26:04 Pour atteindre un homme de la stature de Saladin, Rashid al-Din Sinan doit trouver comment s'approcher au plus près.
26:11 [Musique]
26:16 Le monde à cette époque était particulièrement hostile.
26:20 Les dirigeants avaient tous leur équipe de gardes du corps.
26:23 Ils recrutaient les meilleurs.
26:25 Leur vie dépendait de l'efficacité de ces unités d'élite.
26:29 [Musique]
26:32 Les espions de Rashid al-Din Sinan ont pour mission d'observer en détail les habitudes des gardes de Saladin.
26:39 [Musique]
26:41 Il fallait absolument des informations détaillées sur la rotation des gardes, leurs habitudes, leur entraînement, leur réactivité.
26:49 Et il fallait surtout identifier à quel moment frapper.
26:52 Il y avait forcément un moment où les membres de la garde rapprochés étaient un peu moins alertes.
26:57 C'est là l'importance du renseignement.
26:59 Plus on a d'informations, mieux c'est.
27:02 [Musique]
27:05 Forts de ces enseignements, les assassins commencent leur entraînement.
27:10 [Musique]
27:12 Ils doivent savoir comment venir à bout des gardes.
27:15 [Musique]
27:17 Ils ont dû apprendre à manier cette épée.
27:21 Pourquoi ?
27:22 Pour une raison toute simple.
27:24 Pour vaincre un opposant, il faut avant tout comprendre comment il se bat.
27:28 S'il doit sortir son épée, comment vais-je pouvoir le contrer à coup sûr ?
27:32 La technique pour neutraliser une sentinelle armée est simple.
27:35 On avance, on bloque, on frappe et c'est fini.
27:38 [Musique]
27:44 Les assassins s'entraînent à neutraliser une sentinelle.
27:49 Première chose, saisir la tête. On tire et on achève la sentinelle avec un second coup.
27:54 [Musique]
28:01 Puis, ils apprennent à neutraliser deux sentinelles.
28:04 La dague est dissimulée. On avance vers la cible en restant tout à fait détendu.
28:09 On frappe l'un et puis l'autre. Et un coup de plus pour les achever.
28:16 [Musique]
28:22 Après des semaines d'entraînement, les assassins doivent maintenant réussir à infiltrer le camp de Saladin.
28:28 [Musique]
28:31 Ils décident probablement de se déguiser en soldats.
28:34 Ils étaient très doués pour l'infiltration.
28:37 Ils étaient capables de placer des hommes à des postes hautement stratégiques
28:41 car ils pouvaient se fondre totalement dans la masse sans que personne ne soupçonne une intrusion.
28:45 [Musique]
28:50 À 320 kilomètres au nord du territoire des assassins, Saladin est en campagne.
28:56 [Musique]
28:59 Il n'a aucune raison de craindre une attaque personnelle.
29:02 [Musique]
29:04 Le jour J, il se prélasse, insouciant, dans sa tente.
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29:11 Les assassins décident de frapper.
29:14 [Musique]
29:24 Mais ils ne parviennent pas à neutraliser les gardes.
29:27 [Musique]
29:39 Pourtant, pour Rashid al-Din Sinan, ce n'est pas un échec.
29:43 Il a démontré à l'ennemi qu'il pouvait frapper.
29:46 [Musique]
29:49 Il prend l'ascendant psychologique face à Saladin.
29:52 [Musique]
29:57 La preuve, le puissant dirigeant sunnite porte désormais une cote de maille en permanence.
30:03 Il sait que les assassins n'abandonneront pas.
30:07 [Musique]
30:11 [Musique]
30:17 Pendant ce temps, dans les montagnes, Rashid al-Din Sinan attend son heure.
30:23 Il décide d'infiltrer un agent dormant.
30:27 Les Ismailites savent être patients.
30:32 Ils n'hésitent pas à employer ce qu'on appelle des agents dormants
30:37 et à attendre le temps qu'il faudra pour frapper la cible au moment opportun.
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30:51 Deux ans plus tard, Saladin est en campagne dans le nord de la Syrie.
30:55 Il ignore que l'un de ses gardes du corps est un assassin infiltré.
31:01 [Musique]
31:20 Sa cote de maille lui sauve la vie.
31:23 [Musique]
31:30 Le seigneur de guerre ne peut plus tolérer cette menace.
31:33 Il choisit d'attaquer le bastion des assassins.
31:37 [Musique]
31:42 Le château de Masyaf est assiégé.
31:46 Saladin est décidé à éradiquer une fois pour toutes ce fléau.
31:51 [Musique]
31:58 Cette fois, Rashid al-Din Sinan est en mauvaise posture.
32:02 Tuer son ennemi ne suffira pas à sauver les Ismailiens.
32:06 Il doit forcer les sunnites à se retirer.
32:10 Il sait que pour cela, il doit changer de stratégie.
32:15 Il a compris quelque chose.
32:18 Étant donné la situation, il serait préférable d'entamer le dialogue avec le sultan.
32:23 Ne serait-ce qu'un peu.
32:27 [Musique]
32:31 L'Ismailite va jouer la carte de la psychologie.
32:35 [Musique]
32:38 On raconte qu'il s'est lui-même introduit furtivement dans le camp de l'ennemi
32:42 et qu'il a laissé une note transpercée d'une dague.
32:46 [Musique]
32:55 Il cherchait à intimider son adversaire.
32:57 Le message était très clair. Il disait "Vous savez qu'on peut vous atteindre n'importe où et n'importe quand."
33:02 [Musique]
33:04 On lisait également "Les fédayids ne craignent pas la mort. La défaite viendra de vos propres rangs."
33:12 [Musique]
33:17 Ce message fait froid dans le dos.
33:21 Rachid al-Din Sinan dit clairement à Saladin qu'il peut toujours les menacer de les exterminer, lui et ses hommes jusqu'au dernier.
33:29 Rien ne peut l'empêcher de le faire.
33:32 Mais il lui rappelle que les fédayids ne craignent aucunement la mort.
33:37 [Musique]
33:43 Cette stratégie fonctionne. Saladin accepte de négocier.
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33:52 D'un point de vue psychologique, c'est un coup de maître de la part de Rachid al-Din Sinan.
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34:04 Un émissaire des fédayids a pour mission de porter un message à Saladin.
34:09 Un message une fois encore très clair.
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34:17 "Ne vous inquiétez pas, nous sommes invincibles, il faudra composer avec nous."
34:20 Il doit être remis à Saladin seul à seul.
34:25 [Musique]
34:28 L'émissaire arrive dans le camp.
34:31 Il insiste sur le fait qu'il doit absolument parler au sultan en privé.
34:36 Il dit à Saladin que ce message ne peut être entendu que par lui.
34:40 Le sultan fait sortir tout le monde, à l'exception de ses deux plus proches gardes du corps.
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34:49 L'émissaire, une fois encore, répète qu'il ne peut lui délivrer ce message qu'en privé.
34:54 Pourquoi permettre à ces deux hommes de rester ?
34:58 Saladin répond "Ces hommes sont comme mes fils, ils peuvent entendre ce que vous avez à me dire, ils restent ici."
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35:08 L'émissaire se tourne alors vers les deux gardes.
35:13 Il les regarde et leur pose une simple question "Si je vous ordonnais de tuer cet homme, le feriez-vous ?"
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35:23 Saladin est sidéré.
35:26 Ces deux plus proches gardes du corps sont en fait des assassins.
35:31 [Musique]
35:34 Ce sont des agents dormants infiltrés dans l'entourage du sultan depuis des années et prêts à agir à tout moment.
35:41 Mais l'émissaire n'était là que pour montrer à Saladin qu'il était vulnérable.
35:45 Il ne peut plus compter sur personne.
35:48 Si ces deux gardes sont des assassins, qui d'autre dans son entourage peut l'être ?
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36:00 Le bras de fer tourne à l'avantage des ismaéliens.
36:04 Saladin lève le siège immédiatement.
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36:11 Mais ce triomphe est de courte durée.
36:14 Les assassins ont toujours un autre ennemi, les croisés.
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36:29 Pendant 15 ans, la terre sainte va être mise à feu et à sang.
36:35 Croisés et musulmans se battent pour le contrôle de la Palestine et de la ville sacrée de Jérusalem.
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36:48 Elle tombe finalement aux mains de Saladin et ses soldats sunnites.
36:53 À 160 kilomètres au nord, les croisés détiennent la ville portuaire de Tyre.
37:01 [Musique]
37:05 C'est ici qu'apparaît une nouvelle menace pour les assassins.
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37:20 Elle se manifeste sous les traits d'un redoutable chef de guerre,
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37:27 Conrad de Montferrat.
37:30 Conrad de Montferrat est membre d'une famille de croisés.
37:32 Il est venu étendre son territoire en colonisant des terres et il représente un vrai problème.
37:38 Il aurait très bien pu devenir pour les chrétiens ce que Saladin incarnait pour les musulmans de l'époque.
37:46 C'est un homme charismatique, dynamique et capable de surprendre ses adversaires.
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37:58 Les assassins sont déjà ses ennemis désignés.
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38:02 On raconte qu'un navire ismaélien serait arrivé au port de Tyre
38:06 et que Conrad aurait confisqué tout ce qu'il transportait et fait prisonnier l'équipage.
38:10 Rachid al-Din Sinan aurait intimé à Conrad l'ordre de lui rendre ses marchandises et ses hommes.
38:17 Il aurait répondu non. Ce refus n'est pas anodin.
38:20 Ça revient à signer son arrêt de mort.
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38:33 Le chef des assassins, conscient de la menace, décide d'infiltrer l'entourage de Conrad de Montferrat.
38:40 Il envoie une nouvelle cellule dormante.
38:46 De nos jours, les services de renseignement utilisent le concept de l'homme gris,
38:53 c'est-à-dire d'agent passant inaperçu dans une foule.
38:57 Si vous recrutez quelqu'un de 2 mètres et de barraqué, il va sortir du lot et attirer l'attention.
39:02 Pour mener leur mission d'infiltration, les ismaéliens choisissaient des individus que l'on oubliait aussitôt après les avoir vus.
39:10 Leurs agents dormants devaient se fondre parfaitement dans la masse.
39:15 Ces agents doivent gagner la confiance de Conrad.
39:19 Ils prennent l'identité de moines récemment convertis au catholicisme.
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39:32 Après des siècles de persécution, les assassins savent comment évoluer en territoire ennemi.
39:38 La Takia les autorise même à dissimuler leur foi chiite pour ne pas éveiller les soupçons.
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39:47 La Takia permet aux fidèles de cacher sa foi aux autres afin d'éviter une réaction hostile ou de tirer profit d'une relation avec un non-chiite.
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40:11 Les assassins doivent endosser leur rôle à la perfection.
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40:20 Ils doivent connaître tous les rituels rythmant la vie de cette communauté.
40:27 Il faut qu'ils s'intègrent parfaitement à la routine quotidienne.
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40:41 Leur mission est très risquée. Au moindre faux pas, c'est la salle de torture qui les attend.
40:48 [Musique]
40:51 Ils réussissent à gagner la confiance de Conrad.
40:55 [Musique]
40:59 Les agents dormants des assassins étaient réputés pour être sociables, serviables et pour attirer la confiance.
41:05 Ils parvenaient à s'approcher au plus près de leur cible sans éveiller les soupçons.
41:09 C'est ce qu'ils ont fait cette fois encore.
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41:18 Pendant six mois, ils surveillent les moindres faits et gestes de Conrad.
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41:26 Leurs ordres sont de l'épier, pas de le tuer.
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41:33 Mais la situation évolue.
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41:39 Conrad de Montferrat doit devenir roi de Jérusalem.
41:43 [Musique]
41:45 Il devient dès lors la figure chrétienne la plus puissante du Proche-Orient.
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41:54 Mais maintenant, c'est une catastrophe.
41:56 Il va falloir agir et vite.
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42:03 Rachid Aldin Sinan envoie un message à tir pour activer les agents dormants.
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42:10 Conrad doit mourir.
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42:23 Deux assassins commencent à préparer leur mission.
42:26 Une fois encore, ils utiliseront leur arme de prédilection, la dague.
42:32 Ils savent qu'ils n'auront pas de seconde chance.
42:36 Quand vous frappez la cible, vous devez être sûr de l'avoir tuée.
42:40 Il faut confirmer la mort.
42:42 De nos jours, cela consiste par exemple à tirer une seconde balle en pleine tête, pour s'assurer que la cible est morte.
42:47 Avec leur dague, les assassins ont employé une tactique très efficace.
42:52 Ils ont frappé dans plusieurs zones vitales.
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42:59 Une fois leur entraînement achevé, les assassins s'apprêtent à passer à l'action.
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43:16 Et justement, une occasion se présente.
43:21 Conrad, le prochain roi de Jérusalem, se prépare à sortir dîner.
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43:29 Certains récits racontent que ce soir-là, l'épouse de Conrad aurait pris un peu trop de temps à se préparer pour ce dîner,
43:36 et que ce dernier serait parti seul.
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43:42 Conrad de Montferrat part dîner seul.
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43:48 Le traquenard se met en place.
43:50 On sait que Rachid Aldin Sinan voulait absolument que Conrad meure.
43:54 La coronation est pour bientôt.
43:56 Les agents dormants décident de profiter de cette sortie en ville pour frapper.
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44:09 Pendant que leur cible prend son repas, les assassins se mettent en place pour agir sur le trajet du retour.
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44:19 Les dernières vérifications sont cruciales.
44:21 Il faut être absolument certain que tout va se dérouler comme prévu.
44:25 Par exemple, les deux Ismaéliens doivent s'assurer qu'ils peuvent facilement dégainer leur DAG.
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44:31 Ils avaient conscience qu'ils étaient sur le point de réaliser la mission qu'ils avaient attendue toute leur vie.
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44:45 Un peu plus tard ce soir-là, Conrad prend le chemin du retour.
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44:52 À ce moment-là, il n'avait aucune raison d'imaginer que quelqu'un puisse s'intenter à sa vie.
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45:01 Il s'engage dans une ruelle étroite.
45:03 Deux hommes se tiennent de chaque côté.
45:06 Quand il aperçoit ces deux individus, assis de part et d'autre de la ruelle, il les reconnaît immédiatement.
45:12 Il les a déjà croisés de nombreuses fois et il n'a aucune raison de s'en méfier.
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45:18 Les assassins frappent.
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45:34 Conrad de Montferrat est mort.
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45:46 L'exécution de Conrad de Montferrat est l'un des plus grands faits d'armes des assassins à l'époque des croisades.
45:52 Son impact a été considérable.
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45:57 La nouvelle s'est propagée à travers toute l'Europe et le Proche-Orient.
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46:07 Très vite, la rumeur circule.
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46:12 On raconte qu'un des meurtriers a été capturé et qu'il aurait avoué avoir agi au nom d'un ennemi de Conrad.
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46:22 Certains désignent Richard Coeur de Lion, qui était opposé à son couronnement.
46:27 D'autres accusent Saladin.
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46:35 Beaucoup de personnes avaient un intérêt à voir Conrad de Montferrat mourir.
46:38 Ce qui a laissé planer le doute sur la véritable identité de l'instigateur de cet assassinat.
46:43 Ce que l'on sait, c'est que les assassins ne l'auraient pas tué si ça n'avait pas directement servi leurs intérêts.
46:50 [Musique]
46:54 Rachid Aldin Sinan n'avouera jamais avoir commandité le meurtre.
46:59 Ce qui ne fait que renforcer la légende.
47:03 La mort de Conrad de Montferrat restera son plus grand fait d'armes.
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47:09 Moins d'un an plus tard, il meurt à son tour.
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47:18 Les exploits des assassins en Perse et en Terre Sainte assurent la survie des Ismaéliens.
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47:30 Cette petite communauté religieuse va continuer à vivre pendant près de 200 ans envers et contre tous.
47:36 [Musique]
47:39 On trouve encore bon nombre de fidèles de cette doctrine à travers le monde.
47:44 [Musique]
47:46 Ils sont les héritiers d'une poignée d'hommes qui ont su résister pendant des siècles à l'oppression.
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