Anne Fulda reçoit François Cérésa pour son livre «Dictionnaire égoïste du panache français» dans #HDLivres
Category
🗞
NewsTranscription
00:00 Bonjour François Cereza.
00:01 Bonjour.
00:02 Alors vous êtes un auteur que l'on ne présente pas, un auteur prolifique.
00:06 Vous êtes également le directeur de la revue Service littéraire
00:10 et puis vous venez de publier un très joli livre qui s'appelle
00:12 "Le dictionnaire égoïste du panache français".
00:15 C'est paru au Cherchemidi.
00:16 Alors c'est savoureux, tendre, ironique, malicieux, un peu nostalgique.
00:21 Parce que déjà, avant tout, on a envie de vous demander le panache français, c'est quoi ?
00:26 D'ailleurs, le panache ne peut-il être que français ?
00:29 Ce que vous semblez dire d'ailleurs.
00:30 Il n'y a pas de traduction ni en anglais ni en allemand, ce qui est déjà révélateur.
00:35 Oui.
00:35 Mais le panache, oui, j'allais dire que c'est affreusement français
00:41 dans la mesure où ça remonte non pas à Henri IV avec le célèbre panache,
00:46 mais au Moyen-Âge déjà.
00:47 C'est-à-dire que des chevaliers avaient ce côté, ce brio, ce coup d'éclat
00:52 de vouloir à tout prix briller.
00:53 Et puis on sait comment ils ont brillé.
00:55 À chaque fois, ils se sont fait battre.
00:56 Enfin souvent, ils se sont fait battre.
00:57 Comme vous le savez, que ça soit à Crécy, à Zincour, Poitiers.
01:01 Et puis, il y a quand même eu une bataille qui a terminé la guerre de Cent Ans,
01:06 dont on parle moins, qui est la bataille de Castillon,
01:08 où là, ce sont les Anglais qui ont perdu.
01:12 Et tous les archers anglais qui ont été faits prisonniers,
01:14 on leur a coupé l'index pour plus qu'ils tirent à l'arc.
01:15 Alors, pour mieux cerner ce panache, vous avez fait des portraits,
01:21 une cinquantaine de portraits.
01:22 Il y a 52.
01:23 Il y a 52 portraits.
01:25 Ça va de Bardot à Anctil, à Jeanne d'Arc, à Depardieu, à Dumas.
01:31 À Dumas, oui.
01:32 Voilà, Druot et Coco Chanel.
01:35 Alors, on a envie de vous demander, quel est votre préféré ?
01:38 J'ai une petite idée.
01:40 Dumas.
01:40 Dumas, oui.
01:41 Alexandre Dumas, parce que c'est vraiment l'auteur
01:44 qui m'a fait aimer la lecture, que j'ai commencé à lire très jeune.
01:48 Je ne sais pas si maintenant, les garçons de 12, 13 ans lisent Alexandre Dumas.
01:52 Les trois mousquetaires, 20 ans après, puis toute la série formidable,
01:55 la Reine Margot, la Dame de Montsoro, les 45, etc.
01:58 Qui est un personnage en plus plein de bagout, plein de générosité.
02:03 Parce que j'ai mis, évidemment, Victor Hugo aussi.
02:05 Mais Victor Hugo est moins s'émillant que Dumas.
02:10 Dumas, c'est la démesure.
02:12 Donc, c'est le panache.
02:13 Et pourtant, comme vous le savez, son arrière grand-mère était haïtienne.
02:17 Donc, j'ai réuni finalement dans ce livre
02:22 des gens qui viennent d'horizons très divers.
02:24 Parce que, on pourrait dire Joseph Kessel, c'est un juif russe.
02:28 On pourrait dire Romain Garry, c'est un juif russe aussi.
02:32 Et qui ont adopté la France comme si la France les avait adoptés.
02:35 Et d'ailleurs, Kessel a un mot formidable que moi,
02:42 j'adore et j'admire évidemment Kessel.
02:44 Lorsqu'il dit "le plus beau mot qui existe, c'est le mot France".
02:48 Alors, il y a De Gaulle aussi.
02:50 Mais alors, ce qu'on constate, c'est qu'il n'y a pas beaucoup de contemporains.
02:52 - Ah bon ? Parce que vous trouvez qu'il y a beaucoup de contemporains
02:56 qui viennent du panache ?
02:57 Dans la politique ?
02:58 - C'est un peu les politiques.
03:00 Enfin, dans les politiques, vous mettez Chavènement, donc certes.
03:02 - Vous savez, il y a une phrase de Michel Audiard qui est assez amusante.
03:07 "Les cons, ça ose tous, c'est même comme ça qu'on les reconnaît".
03:10 Pour une fois, moi qui aime beaucoup Audiard et ses dialogues,
03:13 je ne suis pas tout à fait d'accord avec lui.
03:14 Parce que finalement, il faut oser.
03:17 Et il y a une parole de Sénèque.
03:19 Vous voyez, on remonte un petit peu loin.
03:21 "Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles qu'on n'ose pas,
03:25 c'est parce qu'on n'ose pas qu'elles sont difficiles".
03:27 Et ça, je trouve que ça traduit un petit peu une sorte de panache à la française.
03:32 Dieu sait pourtant que Sénèque, comme vous savez,
03:35 c'était le conseiller du gentil empereur romain Néron.
03:38 Et je trouve que beaucoup de Français ont repris cette phrase,
03:43 à l'époque en tout cas, je veux dire pour eux.
03:47 Et maintenant, malheureusement, que ce soit les politiques,
03:51 il y a quelques acteurs, puisque vous citiez tout à l'heure Gérard Depardieu.
03:54 Il y en a quelques disparus qu'on aimait beaucoup,
03:56 comme Jean-Pierre Mariel, Jean Rochefort, Jean-Paul Belmondo.
03:59 Donc c'est Philippe Noiret, évidemment.
04:03 Donc ce sont vraiment des gens qui ont marqué.
04:06 Est-ce qu'il y a encore...
04:07 Je ne veux pas dire que c'était mieux avant, mais bon.
04:09 - Est-ce qu'il n'y a pas quelque chose de désespéré,
04:13 voire de vain dans cette flamboyance ?
04:17 - Oui, il y a des gens qui sont des grands,
04:20 j'allais dire, des grands mélancoliques.
04:25 C'est la phrase de Victor Hugo,
04:26 "la mélancolie, c'est le bonheur d'être triste".
04:28 C'est superbe.
04:29 Il y a un personnage qui est un personnage fictif,
04:32 dans mes 52 portraits, qui est Athos, le comte de l'affaire,
04:35 l'un des trois mousquetaires, l'un des quatre mousquetaires plutôt,
04:38 et qui est exactement ça.
04:39 C'est quelqu'un qui est...
04:40 Maintenant, on dirait qu'il est dépressif.
04:43 Tout à l'heure, je citais Romain Garry,
04:46 mais Romain Garry aussi avait des tendances à être dépressif.
04:49 Il se trouve que je l'ai un petit peu connu, que je l'ai croisé,
04:52 contrairement à un Maurice Druon, qui est une grande gueule,
04:56 qui est un type formidable, avec du bagout et tout ça.
04:59 Donc, ça se traduit de plusieurs façons différentes, le panache.
05:03 - Dernière question, rapidement, vous, vous êtes un panaché,
05:06 d'ailleurs, comment dire ?
05:07 - Ah non, je ne suis pas un panaché, ni un panachard, d'ailleurs.
05:09 - En tout cas, vous parlez très bien de ceux qui représentent
05:14 cette spécificité française qu'est le panache.
05:18 Donc, je vous conseille de lire "Dictionnaire égoïste du panache",
05:21 français, c'est au Cherche-Midi.
05:24 Merci beaucoup, François Serréza.
05:26 - Merci, Anne Vulda.
05:27 [Musique]
05:30 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]