• l’année dernière
Dans notre monde où le capitalisme est (encore) roi, la finance est le nerf de la guerre contre le dérèglement climatique. Qui peut et doit financer la transition écologique des sociétés ? Qui doit payer pour réparer les dégâts causés par le réchauffement climatique ? Pourquoi chacun d’entre nous est responsable et comment pouvons-nous agir à notre échelle ?

Une conférence à destination des dirigeants et responsables d’entreprise, des banquiers, des financiers, des gestionnaires de fonds mais aussi des investisseurs... Bref, de tous ceux qui souhaitent mieux comprendre les enjeux de la finance durable.

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00:00:00 Bonjour à tous, bonjour et bienvenue. Je m'appelle Cécile Desjardins, je suis rédactrice
00:00:09 en chef adjointe du quotidien L'Opinion. Je suis très heureuse d'être avec vous
00:00:13 aujourd'hui pour cette matinée de débat autour de la finance durable, aux côtés
00:00:18 d'Émilie Kovacs, rédactrice en chef du Média The Good.
00:00:22 Bonjour Cécile, bonjour à tous et bienvenue également. Ravi de vous accueillir pour parler
00:00:27 de transition écologique de la finance dans un contexte économique, comme vous le savez,
00:00:31 très tendu. Donc ça va être l'objet justement de nos échanges ce matin. N'oubliez pas
00:00:36 que vous pouvez réagir en direct sur les réseaux sociaux avec le hashtag #TheGoodForum.
00:00:40 Alors nous avons beaucoup de chance, c'était une surprise de la semaine dernière. Je ne
00:00:46 sais pas si vous avez tous noté le petit changement de programme. Nous avons la chance
00:00:51 d'accueillir ce matin Madame Marlène Schiappa, secrétaire d'État auprès de la Première
00:00:56 ministre, chargée de l'économie sociale et solidaire et de la vie associative. Madame
00:01:00 la ministre, le micro est à vous.
00:01:07 Eh bien merci. Bonjour à toutes et à tous d'abord. Mesdames et messieurs les dirigeantes
00:01:13 et dirigeants d'entreprises, mesdames et messieurs les dirigeantes et dirigeants d'institutions
00:01:18 financières, de fonds, d'ONG, Madame la rédactrice en chef de The Good, chère Émilie Kovacs,
00:01:24 Madame la rédactrice en chef adjointe de l'Opinion, chère Cécile Desjardins, chères
00:01:28 toutes et tous et mesdames et messieurs en vos différents grades et qualités. D'abord
00:01:32 je vous félicite pour l'organisation de ce temps de débat, d'échange sur un sujet
00:01:36 qui nous tient au combien à cœur. Je vous remercie aussi chaleureusement pour cette
00:01:39 invitation à ouvrir modestement cette conférence qui pose des questions fondamentales autour
00:01:45 des questions de l'avènement de la finance durable ou de la finance dite verte. Alors
00:01:50 contrairement à ce que disaient certains responsables politiques, moi je ne dis jamais
00:01:54 que la finance est mon ennemi, je ne dis pas que la finance est mon amie non plus, je dis
00:01:57 que la finance est là et qu'il nous faut donc faire avec et travailler avec elle pour
00:02:02 tâcher d'en tirer le meilleur. Je sais que vous êtes nombreux et nombreuses ici à être
00:02:06 engagés de longue date pour faire en sorte que la finance se mette justement vraiment,
00:02:10 concrètement au service de la transformation écologique et sociétale de notre pays et
00:02:15 même du système plus global financier. Et je sais que si vous êtes là, c'est que vous
00:02:19 êtes engagés sur ces questions, que vous savez que nous devons changer de manière
00:02:23 de produire, de consommer, sans quoi la terre deviendrait inhospitalière pour l'humanité
00:02:28 à court ou à moyen terme. C'est aujourd'hui une réalité que nul dans la raison ne conteste.
00:02:33 Vos organisations, dès aujourd'hui, subissent d'ailleurs les coûts lourds du changement
00:02:38 climatique et notamment, je pense à ses impacts humains et sociétaux. Je sais à quel point
00:02:43 les retours des clients sont importants pour vous sur ce qu'ils disent sur le fait de faire
00:02:47 face à des destructions d'actifs lors d'inondations ou de méga-feux. Ce sont les marchés financiers
00:02:52 également transformés par le retour à une certaine inflation, à conséquence de pénuries
00:02:56 de matières premières alimentaires par exemple, qui a un impact là aussi. Je crois que nous
00:03:02 avons tous et toutes en tête désormais les ravages des canicules jamais vues en Espagne,
00:03:07 des inondations en Italie, de la préfiguration d'un monde à +4 degrés. C'était encore
00:03:12 un sujet d'actualité ce matin avec l'apparition d'une nouvelle étude sur ce sujet et de
00:03:17 territoires entiers submergés de canicules qui durent depuis des mois partout en Europe.
00:03:21 Alors face à ça, je pense que nous devons, nous, responsables politiques et responsables
00:03:26 publics au sens large, trouver une réponse autre que l'éco-anxiété une fois qu'on
00:03:31 a posé ce constat. La question c'est comment on peut agir ensemble pour améliorer la situation.
00:03:37 Donc le président de la République, Emmanuel Macron, et les gouvernements tâchent d'agir
00:03:42 face à cela depuis maintenant deux quinquennats. Je voudrais citer ici notamment la question
00:03:46 de la loi AGEC, qui est une première mondiale dans de nombreuses dispositions qui a été
00:03:50 prise lors du précédent quinquennat sur la question du plastique, notamment, et beaucoup
00:03:54 d'entre vous y avez participé, mais sur la question également de l'interdiction de
00:04:00 la destruction des invendus non alimentaires. Nous sommes le premier pays au monde, grâce
00:04:04 à la loi AGEC et grâce à l'impulsion du président de la République, à interdire
00:04:09 dans la loi la destruction des invendus non alimentaires. C'est fondamental à la fois
00:04:13 pour la réduction des déchets, mais aussi, au-delà des enjeux économiques, pour des
00:04:17 questions d'irrège social et d'équité, puisque ce sont des objets qui ne sont pas
00:04:22 détruits et donc qui peuvent ensuite avoir une seconde vie. Et je veux saluer à cet
00:04:26 égard le grand nombre de start-up, d'innovation sociale, d'entreprises, d'associations
00:04:32 qui se montent dans le champ de l'économie sociale et solidaire pour y apporter des réponses,
00:04:37 justement, et qui créent des business models qui fonctionnent autour de cette loi pour
00:04:41 justement réfléchir à ce que faisons-nous de ces invendus, puisque la destruction n'est
00:04:45 plus possible. On voit à quel point c'est un changement de paradigme, mais à quel point
00:04:49 ce changement de paradigme peut créer des opportunités, y compris économiques, pour
00:04:53 des entrepreneurs. Alors 2023, c'est une accélération pour nous avec la loi sur l'industrie
00:04:58 verte, présentée il y a à peine 15 jours par mon collègue Roland Lescure, le ministre
00:05:01 de l'Industrie, avec une quinzaine de mesures qui ont pour but de faire de la France le
00:05:06 leader de l'industrie verte en Europe. Alors c'est une volonté politique, elle est louable,
00:05:12 elle ne suffit pas en elle-même, puisque finalement ce sont justement les industriels
00:05:16 eux-mêmes dans leur capacité à se saisir de ces grandes transformations qui vont permettre
00:05:20 à la France de réaliser cette grande ambition. Je crois que la mobilisation, elle doit être
00:05:25 collective et totale, main dans la main des collectivités et des entreprises, de l'État
00:05:29 et des citoyens, pour mener justement cette transformation en profondeur. Dans le champ
00:05:34 de l'économie sociale et solidaire, c'est une économie, comme vous le savez, qui est
00:05:37 durable par nature, une économie qui vise à privilégier la coopération davantage que
00:05:43 la compétition et qui tâche en tout cas d'apporter des solutions à ces enjeux. Et nous avons
00:05:48 chaque jour des porteurs de projets sur la question de la finance plus durable, qui sont
00:05:54 extrêmement importants, extrêmement engagés. Et je partage avec vous un sentiment, mais
00:05:59 vous en débattrez dans la suite des tables rondes et des échanges, mais j'ai le sentiment
00:06:03 qu'aujourd'hui c'est une volonté de la totalité des entreprises, quelle que soit
00:06:06 leur taille. Je n'ai pas une entreprise qui vienne me voir et qui ne me parle pas des
00:06:10 enjeux de RSE, des enjeux d'impact, des enjeux de sustainability, des enjeux environnementaux,
00:06:16 voire de la résolution des ODD à cet égard, y compris dans le rôle que le secteur privé
00:06:21 peut jouer et qui est tellement fondamental. Donc je pense que ce constat et cet objectif,
00:06:25 il est partagé et qu'ensuite il y a des débats et parfois des désaccords sur la
00:06:28 manière de réaliser cet objectif pour y répondre. Mais je pense que c'est important
00:06:34 de se dire que dans le champ de l'économie sociale et solidaire que je représente aujourd'hui
00:06:38 et de la vie associative, il y a également une réflexion qui se met en place pour lutter
00:06:43 contre une forme de greenwashing et pour s'interroger sur ce qu'est véritablement cette finance
00:06:47 durable ou cette finance verte. Je pense par exemple à la start-up Lita créée par Eva
00:06:52 Sadoun qui se présente comme étant le Yuka de la finance et qui vise à scanner notamment
00:06:56 notre épargne pour voir si notre épargne durable finance vraiment la repousse d'arbres
00:07:01 dans les forêts amazoniennes ou si en fait on est sur 14% de financement green ou vert
00:07:07 et que le reste en fait reste de l'épargne classique. Je pense que c'est extrêmement
00:07:11 important de travailler aussi sur cette transparence et qu'il y a là aussi des idées d'entreprises
00:07:17 et des business models créés autour des questions de la finance durable et de la finance
00:07:21 verte et qui allient à la fois une quête de sens et une volonté de transformation
00:07:24 extrêmement concrète vers des modèles plus écologiques et plus soutenables et de véritables
00:07:30 esprits d'entreprises qui sont soutenus, financés et qui à terme fonctionnent et
00:07:35 trouvent véritablement un marché et des consommateurs et je trouve ça extrêmement
00:07:39 important. Alors il y a quelques mois, je vais organiser un colloque sur la finance
00:07:43 durable. En novembre dernier, dans le champ de l'économie sociale et solidaire, j'avais
00:07:48 promis à ce moment-là d'aller chercher des financements partout où je pouvais en
00:07:51 trouver pour soutenir ces projets notamment liés aux questions de finances durables.
00:07:55 C'est ce que nous faisons avec Bruno Bonnel que vous connaissez, secrétaire général
00:07:59 au plan d'investissement France 2030. Nous avons agi pour inclure le champ de l'économie
00:08:03 sociale et solidaire mais aussi de l'innovation sociale puisque nous sommes dedans pour qu'il
00:08:07 puisse bénéficier des fonds destinés à financer la transformation de l'économie.
00:08:11 Nous avons aussi accéléré, nous en parlions à l'instant, la signature des contrats
00:08:15 impact, ce dispositif de financement par l'État et par des organismes financiers
00:08:19 de projets innovants sur le plan écologique ou sociétal. Je veux citer également, parce
00:08:25 que je donne des exemples de l'économie sociale et solidaire, Envie d'autonomie
00:08:29 où Toupie, ce sont plus de 15 millions d'euros qui sont engagés à cet égard. Je pense
00:08:34 aussi au PTCE que vous connaissez peut-être, les pôles territoriaux de coopération économique
00:08:38 sur lesquels nous engageons 1,5 million d'euros pour faire en sorte de les relancer et de
00:08:42 démontrer l'efficacité de ce que Timothée Duverger appelle une responsabilité territoriale
00:08:47 d'une entreprise, car cette forme d'économie non délocalisable, je crois qu'elle est
00:08:52 extrêmement fondamentale, y compris pour des questions de souveraineté économique
00:08:55 de notre pays. Très prochainement, et je m'en réjouis, je signerai une convention
00:08:59 à hauteur de 100 millions d'euros avec la Banque des Territoires pour le financement
00:09:03 de tels projets et de projets de l'économie sociale et solidaire. Je remercie bien sûr
00:09:07 la Banque des Territoires pour son engagement et pour ses projets novateurs que nous dirigeons
00:09:13 et que nous finançons ensemble. Alors, vous toutes et tous ici, dirigeants de fonds Impact,
00:09:18 vous êtes les partenaires au quotidien de ces entrepreneurs, vous êtes partie prenante
00:09:22 bien sûr de cette économie qui vise l'intérêt général également et qui n'oppose plus
00:09:26 la recherche du bénéfice ou de l'équilibre budgétaire avec la recherche de l'amélioration
00:09:32 de la société dans son ensemble. Je pense que vos activités, dont j'ai eu une présentation
00:09:37 extrêmement intéressante, et vos avoir-faire en matière de financement de l'Impact, ils
00:09:40 sont désormais aussi des modèles pour tous les établissements financiers qui veulent
00:09:44 assurer leur pérennité face aux défis du monde. Je suis convaincue que sur ces grands
00:09:47 enjeux sociétaux, l'État ne peut pas tout seul et forcée d'avouer que très souvent
00:09:52 la société civile et la société économique notamment est en avance par rapport aux actions
00:09:57 de l'État qui ensuite modélisent ses politiques publiques en fonction de cela. Et je crois
00:10:01 que c'est en nous mobilisant toutes et tous, institutions financières, entreprises, secteurs
00:10:06 de l'ESS que nous réussirons à vraiment faire bouger les lignes de la finance. Je
00:10:10 veux conclure avec un petit message peut-être un peu plus personnel. Peut-être certains
00:10:14 d'entre vous me connaissent et savent à quel point je suis attachée aux enjeux de
00:10:18 communication parce que je suis intimement persuadée que communiquer, ce n'est pas seulement
00:10:23 vendre un produit ou promouvoir sa marque, mais c'est aussi créer un imaginaire dans
00:10:28 la société et parfois faire bouger les lignes. Et donc je souhaite humblement de la place
00:10:32 qui est la mienne au gouvernement vous inciter à communiquer sur vos engagements. Je le
00:10:36 dis parce que j'ai très souvent reçu des entrepreneurs, des investisseurs qui hésitaient
00:10:41 à communiquer sur le caractère durable ou vert ou écologique ou environnemental de
00:10:46 leurs actions en me disant qu'ils avaient peur d'être taxés de faire du greenwashing
00:10:49 ou qu'ils avaient peur ensuite qu'on examine très exactement quels sont leurs engagements
00:10:53 et qu'on les mette à défaut entre la communication et la réalité de ce qui est fait. Mais moi
00:10:58 je suis convaincue que communiquer c'est aussi engager sa filière, engager son secteur,
00:11:03 dynamiser aussi parfois la concurrence quand elle existe, mais également communiquer sur
00:11:08 ses nouveaux objectifs et créer justement ce nouveau consensus commun et ce nouvel imaginaire
00:11:14 en nous donnant des objectifs communs. Je pense que nous sommes dans une période où
00:11:17 nous vivons hélas tellement de division, tellement de violence dans le débat public,
00:11:22 qu'elle soit symbolique, verbale ou même encore récemment physique, à l'endroit
00:11:25 de personnes qui s'engagent pour le bien commun. Et je dis ça en pensant bien sûr
00:11:30 aux trois policiers et à l'infirmière qui en l'espace de 24 heures ont été hélas
00:11:35 tuées de manière extrêmement violente. Et je fais le lien avec nos sujets parce que
00:11:39 je pense que notre société a terriblement besoin de commun, d'espoir, de positivité.
00:11:44 J'en terminerai avec un autre sujet d'actualité, la question de la relance de la natalité
00:11:48 qui peut sembler n'avoir aucun rapport avec la finance durable, mais je suis personnellement
00:11:52 convaincue qu'il y a un lien très fort parce que quand on écoute les jeunes générations,
00:11:56 les 15-25 ans, qui nous parlent d'éco-anxiété et qui nous disent à quel point ils peuvent
00:12:00 avoir peur de l'avenir et être démunis face au manque de solutions vis-à-vis de
00:12:05 la transition écologique, je suis absolument persuadée que démontrer que l'économie
00:12:09 peut s'adapter, peut changer, peut être moteur et force de progrès et d'engagement
00:12:14 vis-à-vis de l'écologie est aussi de nature à donner confiance à ces jeunes générations
00:12:19 dans l'avenir et à redonner un peu d'espoir, puisque je pense que c'est ce dont nous avons
00:12:23 besoin par les temps qui courent. Je vous remercie très sincèrement pour votre engagement.
00:12:27 Je vous souhaite de très bons débats et une excellente journée. Merci à vous.
00:12:30 Merci beaucoup, Madame la ministre. Merci pour toutes ces pistes. En effet, on va en
00:12:42 débattre toute la matinée. Je pense qu'il y a aussi de quoi travailler plusieurs années
00:12:46 sur toutes ces pistes. Place tout de suite à un débat sur la définition même de la
00:12:51 finance durable. Emilie, à toi.
00:12:53 Oui, absolument. Nous allons commencer par un débat qui est un petit peu le début de
00:12:59 nos échanges. L'idée, ça va être de savoir si la finance verte est un fantasme ou est-ce
00:13:05 qu'elle fait l'objet de réels engagements. J'appelle sur scène Lucie Pinson, qui est
00:13:10 fondatrice et directrice exécutive de Reclaim Finance et Noam Leandri, qui est secrétaire
00:13:15 général de l'ADEME et co-auteur du livre La finance verte paru en 2021 aux éditions
00:13:22 La Découverte. Installez-vous.
00:13:24 Alors, pour commencer, déjà, faudrait-il définir ce qu'est la finance verte, Lucie?
00:13:37 Long exercice. Après, je pense que c'est assez instinctif, mais c'est vrai. Depuis
00:13:41 le terme a fait son apparition, notamment et répété à de multiples reprises par
00:13:46 le ministre de l'économie et des finances, qui affirme que la finance sera verte ou ne
00:13:50 sera pas, que ça a le mérite au moins de rappeler le fait que la finance aujourd'hui
00:13:55 qui domine contribue au dérèglement climatique et à l'aggravation de la crise écologique.
00:14:02 Peut-être pour donner quelques chiffres qui permettent aussi de planter le décor. En
00:14:08 2021, les financements pour se concentrer sur le secteur énergétique que je connais
00:14:13 mieux, financement aux énergies dites bas carbone, représentait 81% des financements
00:14:20 qui allaient aux énergies fossiles. Alors que, on le sait, la transition implique d'augmenter
00:14:25 massivement les financements au secteur de la production d'électricité, notamment,
00:14:29 et au secteur de la transition, mais avec une augmentation, bien entendu, des financements
00:14:36 aux solutions et une diminution des financements aux énergies fossiles. Il nous faut viser
00:14:42 un ratio de 1 à 9. 1 euro dans les énergies fossiles doivent donner lieu à 9 euros dans
00:14:50 la transition et 5 dans les secteurs de la production et de la distribution d'électricité
00:14:55 soutenables. Or, aujourd'hui, on en est donc très très loin encore avec les 81%. Et puis,
00:15:05 quand on se penche sur les engagements, on voit que c'est assez hétéroclique encore
00:15:09 du côté et dur à vraiment percevoir l'impact qu'ils peuvent avoir. Le deuxième enjeu,
00:15:14 bien entendu, est dans les financements aux énergies fossiles. À quoi servent-ils ? Et
00:15:20 malheureusement, on sait aujourd'hui que ces financements ne vont pas uniquement à
00:15:24 la maintenance des infrastructures en opération, mais bien aussi au développement de nouvelles
00:15:29 infrastructures d'énergie fossile qui sont strictement incompatibles avec l'objectif
00:15:36 de limiter le réchauffement à 1,5 degré. Et on comprend les impacts que ça peut avoir
00:15:41 puisque le développement de nouvelles infrastructures, elles ne sont pas pensées pour durer un an,
00:15:47 deux ans. Elles sont pensées pour rester et pour être maintenues en opération et
00:15:51 donc leur développement verrouille des émissions de gaz à effet de serre que l'on ne peut
00:15:56 pas se permettre vu notre budget carbone. Citer un chiffre, les banques juste européennes
00:16:01 ont alloué 30 milliards de financements aux 100 entreprises, pas à toutes les entreprises,
00:16:08 mais juste 100 entreprises qui sont à l'avant-garde de l'expansion des énergies fossiles en
00:16:13 2022. 15 milliards, donc la moitié de ces financements proviennent juste de BNP Paribas.
00:16:20 Noam, vous abandez j'imagine dans ce qui vient d'être dit. Pour vous, la finance durable,
00:16:25 qu'est-ce que c'est ? Je vais être un peu scolaire, ça va vous permettre de rentrer
00:16:31 comme vous êtes tous sages et attentifs, sans que ce soit un cours magistral où vous
00:16:37 vous redonnez une définition. Je vais citer la banque de France, je crois qu'il y a Jean
00:16:39 Boissineau qui était dans le coin, je l'ai entreperçu. La finance durable, ça repart
00:16:47 un peu de ce qui s'est passé il y a une centaine d'années, il y a un siècle, c'est la finance
00:16:50 éthique qui s'était lancée aux Etats-Unis en disant on va interdire un certain nombre
00:16:54 d'investissements, que ce soit dans les armes, dans la pornographie, dans les cigarettes,
00:17:01 il y a un certain nombre d'exclusions qui ont été créées il y a une centaine d'années,
00:17:03 c'était la finance éthique. Et maintenant il y a une nouvelle finance qui désigne aujourd'hui
00:17:07 plutôt des outils de financement, des outils financiers qui soutiennent un développement
00:17:10 durable. Alors ça peut être à la fois des initiatives des pouvoirs publics, des régulateurs
00:17:15 qui vont interdire, imposer, orienter les financements, ou aussi des initiatives du
00:17:20 secteur privé lui-même, par exemple les green bonds, les obligations vertes, c'est
00:17:24 une initiative du secteur privé, enfin des institutions financières qui ont voulu un
00:17:28 peu réglementer, pouvoir dire voilà quand je dis que cette obligation elle est verte,
00:17:32 qu'est-ce que ça signifie et donc ils se sont dotés de leurs propres règles qui aujourd'hui
00:17:37 sont reprises au niveau européen avec par exemple ce qu'on appelle aujourd'hui la taxonomie.
00:17:40 Alors il y a deux approches aujourd'hui de cette finance durable, c'est soit centré
00:17:44 sur l'impact, sur la finalité de l'investissement, est-ce que ça contribue positivement à l'environnement
00:17:50 ou est-ce que ça réduit éventuellement des impacts d'environnement négatifs qui
00:17:52 existeraient sinon. L'autre manière aussi, l'autre façon de voir la finance verte, c'est
00:17:58 celle qui réduit des risques, notamment le risque climatique, qu'on a tous bien en tête
00:18:02 ou d'extinction des espèces avec la biodiversité, et donc réduit aussi le risque que les actifs
00:18:08 financiers se déprécient. Donc en fait c'est de la stabilité financière concrètement,
00:18:12 c'est-à-dire aujourd'hui la finance si elle n'intègre pas le risque climatique,
00:18:17 le risque de durabilité, pour faire large, et bien elle va s'autodétruire. Donc on a
00:18:22 intérêt à ce que l'économie soit soutenable et continue à fonctionner. Donc voilà, pour
00:18:26 avoir une définition un peu large, mais voilà, je vous laisse vous référer à l'ouvrage
00:18:30 que j'ai publié il y a quelques années, vous aurez tout ça de toute façon écrite,
00:18:33 ça sera encore plus simple.
00:18:34 Lucie, quels sont les freins de cette finance durable actuellement ? On en a parlé un petit
00:18:39 peu là à l'instant, est-ce que vous pouvez nous dire ce qui empêche cette finance d'être
00:18:43 plus durable aujourd'hui ?
00:18:44 Les profits, tout simplement. C'est aujourd'hui très intéressant de continuer de financer
00:18:51 les secteurs extrêmement polluants comme les énergies fossiles. Noam le rappelait à
00:18:55 juste titre, la transition présente des risques pour le secteur financier, mais ces risques-là
00:19:01 ne se matérialisent pas aujourd'hui concrètement sur les portefeuilles d'investissement ou
00:19:05 financement. On voit leur impact aujourd'hui arriver pour les assureurs. On a l'Assemblée
00:19:13 Générale de Scores dans deux jours. Scores aujourd'hui ne fait plus de profit, notamment
00:19:20 dû à son portefeuille d'assurance aux catastrophes climatiques, qui est largement déficitaire.
00:19:26 Mais pour les banques, pour les investisseurs, ça ne nous aura pas échappé que les entreprises
00:19:34 des énergies fossiles font des profits faramineux, que nos banques aussi ont annoncé des profits
00:19:39 extrêmement importants encore récemment, malgré des portefeuilles fortement émetteurs.
00:19:47 Donc tout simplement, ça c'est la première mesure et ça montre bien qu'il va falloir
00:19:53 engager un rapport de force avec ces institutions pour les pousser à se transformer. Et puis
00:19:58 il va falloir aussi forcer le régulateur, surtout à entrer plus fortement en jeu, puisque
00:20:05 malheureusement aujourd'hui on a encore des réglementations qui misent sur la bonne volonté
00:20:11 des acteurs financiers ou sur leur soi-disant rationalité à agir. Donnons de la transparence,
00:20:17 donnons de l'information et les acteurs financiers vont comprendre qu'à long terme ils ont un
00:20:22 intérêt à agir et donc ils vont se mettre au travail. Ça ne suffit pas, il va falloir
00:20:27 tordre le bras des acteurs financiers un peu plus fort. Les banques centrales peuvent notamment
00:20:33 agir en changeant leur politique monétaire au prudentiel, en dissuadant les investissements
00:20:38 dans les secteurs polluants, en encourageant au contraire les investissements dans les
00:20:42 secteurs de la solution, donc en jouant sur les coûts. Et puis le politique, elle règne
00:20:48 du possible, donc pourquoi ne pas tout simplement aussi interdire certains types de financements
00:20:53 à des projets reconnus par l'Agence internationale de l'énergie, le GIEC, comme étant strictement
00:21:00 incompatible avec les engagements politiques que nous avons pris.
00:21:03 La régulation, comment le gouvernement réagit face à ces freins noix à main ?
00:21:09 Je ne voudrais pas me substituer au gouvernement puisque madame la ministre est parmi nous,
00:21:14 donc je vais peut-être déjà rebondir sur ce que vous avez dit aussi, c'est-à-dire
00:21:18 qu'effectivement un des principaux freins c'est aujourd'hui le manque de rentabilité
00:21:21 ou la recherche du profit qui dans le secteur vert, pour faire court, la durabilité est
00:21:27 moins importante que dans des secteurs classiques, traditionnels, comme dans tout ce qui est
00:21:31 fossile. Et pour reprendre les exemples que c'était madame la ministre des contrats
00:21:35 impact qu'on a pu lancer, avec la toupie, en vie en autonomie, on voit que financer
00:21:40 ces projets qui ont de l'impact positif pour l'environnement, pour le social, c'est
00:21:44 compliqué parce que les investisseurs recherchent un taux de rentabilité qui n'est pas de
00:21:47 3, 4, 5%, mais plutôt 15, 20%, ce qui est difficile à obtenir sur ce type de projet
00:21:54 qui ont de l'impact mais qui sont faits dans le secteur de l'ESS, de l'économie
00:21:57 sociale et solidaire, par des associations ou des PME et qui ne peuvent pas rendre un
00:22:03 taux de rentabilité aussi élevé que celui qui est traditionnellement obtenu dans le
00:22:06 secteur financier. Donc ça c'est un frein. Alors comment est-ce qu'on peut agir en
00:22:10 tant que régulateur ? Premièrement par des obligations à investir, à aller dans un
00:22:16 secteur d'activité, donc ça se passe tant à l'échelle européenne avec la taxonomie
00:22:20 dans le cadre du Green Deal qui a été adopté, maintenant qu'il y a la taxonomie, il va
00:22:25 y avoir aussi l'obligation d'interroger depuis cette année les épargnants sur leurs
00:22:29 préférences en matière de durabilité, c'est-à-dire qu'un épargnant lorsqu'il
00:22:32 va voir son banquier, et je vous invite à faire le test parce que quand on a fait des
00:22:37 enquêtes client mystère, on s'est rendu compte que c'était très rarement proposé,
00:22:41 est-ce que votre banquier vous propose spontanément un investissement vert et quand vous lui posez
00:22:46 la question, vous dites "mais je veux absolument investir dans le vert", est-ce qu'il est
00:22:49 capable de vous proposer un produit ? Ça, malheureusement, ce n'est pas toujours le
00:22:52 cas, c'est obligatoire dans la loi Pacte, la loi sur les entreprises qui avait été
00:22:57 adoptée sous le précédent quinquennat, qui avait été portée par Bruno Le Maire
00:23:00 et qui normalement oblige depuis légalement cette année, lorsque vous souscrivez à
00:23:05 une assurance vie en unité de compte, alors ce n'est pas forcément la plus répandue,
00:23:08 mais en tout cas il y a obligation de vous proposer au moins un fonds vert ou un fonds
00:23:12 OSG si vous voulez, ou ISR, ou investissement socialement responsable, je ne sais pas si
00:23:18 tout le monde, et aujourd'hui si vous allez voir votre banquier au coin de la rue, est-ce
00:23:22 que l'agence est capable de vous proposer ce fonds ? Moi j'ai fait le test quand j'ai
00:23:25 ouvert une assurance vie pour mon petit garçon, et bien écoutez, j'étais extrêmement déçu,
00:23:30 mais j'espère que ça s'est amélioré depuis, il faudrait que je refasse le test, mais en
00:23:33 tout cas ce n'est pas toujours le cas. Donc voilà, il y a ce type d'engagement, d'encouragement
00:23:38 qui peut être fait, ça passe également par le reporting, c'est-à-dire qu'aujourd'hui
00:23:41 les entreprises, les investisseurs ont l'obligation de rendre des comptes sur l'impact de leur
00:23:46 activité sur le climat, sur la biodiversité, donc ça c'était des obligations qui datent
00:23:50 de 2015 dans la loi transition énergétique, qui a été renforcée dans la loi énergie
00:23:55 climat en 2018, ce qu'on appelle le 29 FLEC, l'article 29 FLEC c'est assez moche, et au
00:24:01 niveau européen CSRD, voilà je finis avec toutes ces abréviations, mais tout ça va
00:24:06 obliger finalement à faire de la transparence, et quand il y a de la transparence, il peut
00:24:11 y avoir une action, et on le voit aujourd'hui dans le cadre des assemblées générales
00:24:15 de certaines entreprises, je pense à Total, mais il n'y a pas que Total dans lesquelles
00:24:19 il y a des Sayon Climate, des rendus comptes de la part des entreprises sur leur plan de
00:24:25 décarbonation, leur plan de transition, et ça, ça permet par cette transparence de
00:24:29 pouvoir évaluer et pouvoir agir, les pousser à aller encore plus loin.
00:24:33 Comment encourager cette finance propre, Lucie, justement ?
00:24:38 Pour rebondir sur ce que disait Noah, mais il y a plusieurs opportunités en ce moment
00:24:45 que le gouvernement envisage, il y a la loi sur le partage de la valeur, où il serait
00:24:50 intéressant de clarifier les règles et de donner du pouvoir aux salariés, pour leur
00:24:57 permettre d'utiliser l'épargne salariale au profit de la transition, donc dès lors
00:25:03 que vous êtes salarié, vous pouvez faire l'exercice et aller chercher l'information
00:25:08 dans quoi votre épargne investit, ça va être extrêmement difficile d'avoir cette
00:25:14 information, donc il faut absolument assurer la transparence à ce niveau-là, il faut
00:25:19 également assurer qu'il y ait des propositions de fonds d'épargne salariale sans entreprise
00:25:26 qui aggravent la situation au niveau climatique, et donc notamment les entreprises qui développent
00:25:31 de nouveaux projets d'énergie fossile, ça c'est une demande qui a été faite par
00:25:38 un collectif parmi lesquels on trouve Reclaim Finance, mais aussi le mouvement importe,
00:25:44 les collectifs pour un réveil écologique, tout un panel d'acteurs qui entend se mobiliser
00:25:50 pour mettre l'épargne salariale au service du climat. Vous avez donc ce premier axe d'action,
00:25:58 vous avez un autre axe d'action où on attend une décision du ministre à la rentrée prochaine
00:26:06 sur le label ISR, qui est un peu quand même la star des labels en France et qui malheureusement
00:26:13 aujourd'hui contribue aussi à la confusion et à l'aggravation du dérèglement climatique,
00:26:20 et donc il est temps de passer d'une approche best-in-class à une approche intégrant des
00:26:26 exclusions et une approche plus dynamique. Le comité du label a rendu sa copie récemment,
00:26:33 des consultations sont ouvertes et certaines vont vraiment dans le bon sens et donc on
00:26:39 espère maintenant que le gouvernement acte notamment donc l'exclusion des entreprises
00:26:45 qui développent des nouveaux projets d'énergie fossile. A l'heure actuelle, les énergies
00:26:50 fossiles exclus sont les non conventionnelles, il faudrait étendre ça à toutes les énergies
00:26:56 fossiles, en tout cas à tous les développeurs d'énergie fossile puisque de nouveau, nos
00:27:03 benchmarks doivent être la science et la science est très claire, les énergies fossiles
00:27:07 non conventionnelles sont un problème parce qu'ils génèrent des impacts sur le climat
00:27:11 mais aussi sur l'environnement et les populations plus importants que les énergies fossiles
00:27:15 conventionnelles et donc il faut organiser leur sortie plus rapidement. Par contre dès
00:27:19 lors qu'on parle de l'arrêt de l'expansion, c'est toutes les énergies fossiles qui sont
00:27:24 concernées. Ça c'est pour le gouvernement et puis au niveau du contrôle peut-être
00:27:32 des pratiques notamment en termes de communication ou d'allégations environnementales, et bien
00:27:36 là il faut que les régulateurs jouent leur rôle de contrôler et sanctionner les acteurs
00:27:43 qui auraient des pratiques abusives en termes de communication. Malheureusement la commission
00:27:51 européenne a rendu un avis qu'on déplore sur CSRD puisqu'elle n'entend pas préciser
00:27:57 plus avant ce qu'elle entend par les fonds durables classés article 9. En revanche rien
00:28:05 n'empêche l'AMF qui a pris une position très claire disant que les énergies fossiles
00:28:09 ne devaient pas être dans les fonds article 9 peut prendre son bâton et sanctionner les
00:28:17 acteurs financiers qui commercialiseraient en France des produits qui contiennent de
00:28:21 telles entreprises et donc tromperait les investisseurs finaux.
00:28:27 Le temps nous est compté. Merci à tous les deux pour votre intervention. On peut les
00:28:34 applaudir. Merci.
00:28:36 Merci, merci beaucoup à tous les trois. Nous allons parler des grands groupes. Venez, venez,
00:28:49 ne soyez pas timides. On va se demander comment est-ce que les financements à impact se sont
00:28:55 imposés dans les grands groupes. Qu'est-ce que ça change concrètement dans les entreprises.
00:29:05 Quelle pression cela représente pour les dirigeants de grands groupes et est-ce que
00:29:10 ceux qui ne jouent pas le jeu pourraient se voir bientôt sanctionner. Voici toutes les
00:29:14 questions que j'ai posées à mes intervenants. Alors à mes côtés Muriel Namias. Bonjour
00:29:20 Muriel. Bonjour Cécile. Managing Director, conseiller en dette chez Redbridge. Alors
00:29:25 Redbridge montre des financements pour pas mal d'entreprises de La Place et donc elle
00:29:30 peut nous raconter un peu les coulisses de ce qui se passe. A tes côtés Stéphanie
00:29:35 Rousseau. Bonjour Stéphanie. Bonjour. Vous êtes directrice financement et trésorerie
00:29:40 du groupe SOR mais vous intervenez aujourd'hui au nom de La Place j'ai envie de dire puisque
00:29:45 vous êtes présidente de la commission financement de l'AFTE, l'association française des trésoriers
00:29:51 d'entreprises. A vos côtés Benoît Rousseau. Alors je tiens à le dire il n'y a aucun lien,
00:29:56 ça arrive. Bonjour à tous. Benoît Rousseau, vous êtes trésorier et responsable des assurances
00:30:03 du groupe BEL, le groupe la vache qui rit, tout ces choses là pour un géant de l'agroalimentaire.
00:30:11 Alors justement Benoît j'ai envie de commencer avec vous. Vous n'êtes pas là par hasard,
00:30:18 vous êtes très connu pour vos financements et votre position d'innovation, d'innovateur
00:30:28 dans le domaine de la finance durable. Alors j'ai envie de vous raconter un peu l'histoire
00:30:31 rapidement mais comment c'est arrivé chez BEL tous ces financements durables, quand
00:30:36 est-ce que vous y êtes mis et comment est-ce que vous avez à la fois tracé la route et
00:30:41 tracé votre route dans ces différents financements ? Alors je rappelle donc BEL est un groupe
00:30:49 familial et qui est très engagé dans le durable depuis des années. Notre stratégie
00:30:55 en fait a commencé il y a un peu plus de 20 ans avec notre engagement avec la signature
00:31:01 du pacte des Nations Unies en 2003. Et donc notre président a toujours été très impliqué
00:31:07 sur être une entreprise responsable et aujourd'hui le durable et le rentable sont les deux piliers
00:31:16 en fait de notre stratégie et c'est vraiment deux piliers qui ont la même taille. Donc
00:31:23 pendant très longtemps on a eu un département RSE très actif et qui travaillait un petit
00:31:28 peu en silo et puis en 2017 en fait au moment où notre président remettait, réinsistait
00:31:34 pour mettre l'RSE au cœur de notre stratégie et a demandé à tous nos départements, tous
00:31:39 les entreprises, que ce soit l'ARH, le marketing, la production, la communication et aussi la
00:31:46 finance, de travailler sur des sujets et de mettre les critères et l'RSE au sein de
00:31:53 son activité propre. Et en 2017 donc au moment où on refinançait une ligne de crédit,
00:31:59 on a commencé à associer dans notre ligne de crédit des critères extra financiers.
00:32:05 Donc à cette époque on était une des premières entreprises et la première entreprise du
00:32:10 secteur agroalimentaire donc à associer critères financiers et critères non financiers dans
00:32:18 notre stratégie financière. Donc ça a permis un énorme rapprochement entre le département
00:32:24 RSE et la finance pour définir ces critères extra financiers. Donc on était assez fier
00:32:30 de cette opération et en 2022 quand on a commencé à refinancer nos premières lignes
00:32:36 de crédit, on a décidé d'aller encore plus loin puisque ces critères financiers
00:32:40 en 2017 n'étaient certifiés par nos auditeurs et uniquement par nos éditeurs et il n'y
00:32:46 avait pas de tiers-partie qui exprimait si ces critères étaient ambitieux ou pas. Et
00:32:51 donc au moment où on a refinancé nos lignes de crédit et au moment où on réfléchissait
00:32:56 à d'autres financements, on a décidé en fait en 2022 de mettre en place un framework
00:33:04 SIP, un cadre de travail absolument, un cadre à ces opérations là et de le faire noter
00:33:11 par une agence extra financière. Le rôle de l'agence extra financière justement, elle
00:33:16 est là pour mesurer que vos critères sont ambitieux, mesurables. Donc cette tiers-partie
00:33:24 est extrêmement importante aujourd'hui pour les investisseurs. Donc ça s'est fait en
00:33:29 plusieurs étapes. Une première étape on a aussi un peu appris et puis au fur et à
00:33:33 mesure on se professionnalise sur ces sujets là et on est de plus en plus ambitieux.
00:33:37 Stéphanie, c'est représentatif de ce qui se passe dans les grands groupes aujourd'hui.
00:33:41 Vous voyez dans les membres de l'association, c'est la tendance, tout le monde le fait.
00:33:47 Les entreprises travaillent à la définition, à la mise en œuvre de leur stratégie RSE,
00:33:55 en partie en lien avec l'évolution de la réglementation. Et cette mise en œuvre et
00:34:02 l'établissement de plans d'action durable se traduit dans leur financement et effectivement
00:34:09 les financements durables prennent de plus en plus d'ampleur. On a eu en 2022 37% d'émissions
00:34:17 durables et il y en avait 10% en 2020. Il y a deux grandes catégories de financement
00:34:25 durable de type ESG. La première catégorie c'est les financements qu'on appelle non
00:34:34 fléchés qui sont des financements dédiés à des projets identifiés comme étant des
00:34:39 projets verts durables.
00:34:41 Ou fléchés ?
00:34:42 Fléchés, tout à fait. Pardon, excusez-moi, fléchés. Donc ça c'est ce qu'on appelle
00:34:48 les green bonds. Et il y a une deuxième catégorie de financement qui sont les financements
00:34:53 non fléchés, des financements sustainability linked, dont le coût en fait est lié à
00:34:58 l'atteinte de critères de performance ESG qui ont été fixés dans le cadre notamment
00:35:05 de l'établissement d'une politique et d'une stratégie RSE.
00:35:08 Muriel, les deux se développent beaucoup aujourd'hui ?
00:35:11 C'est surtout les sustainable linked qui se développent.
00:35:14 Donc ceux qui sont non fléchés c'est plus facile à mettre en place ?
00:35:18 Ceux qui sont non fléchés, donc c'est des financements en général, ce qu'on appelle
00:35:20 général corporate purpose, objectifs de financement généraux des besoins d'une
00:35:26 entreprise à travers des lignes de crédit type RCF, lignes de crédit renouvelables
00:35:32 et de liquidités, ou des lignes des CapEx lines, ou évidemment pour les grands groupes
00:35:38 ou les plus grosses ETI, le marché obligataire, qu'il soit public ou privé, en gros pour
00:35:43 résumer.
00:35:44 Tous les financements d'une entreprise aujourd'hui peuvent être, ce financement bancaire obligataire,
00:35:48 tout peut être maintenant avec une...
00:35:50 On le voit même aujourd'hui dans des programmes d'affecturage, ça commence à venir, on peut
00:35:55 l'imaginer se propager à tous les compartiments de marché, y compris sur le court terme.
00:36:02 C'est un avantage, c'est un inconvénient, Benoît ?
00:36:08 Moi je pense que c'est un énorme avantage, je voudrais rebondir en fait sur ce que disait
00:36:14 Madame la Ministre tout à l'heure sur les sujets de communication.
00:36:18 Mettre en place ces critères extra-financiers, c'est effectivement souvent à destination
00:36:23 de nos prêteurs, de nos investisseurs aussi, mais il ne faut pas sous-estimer l'impact
00:36:29 extrêmement positif que ça a en termes de communication interne.
00:36:34 C'est un énorme vecteur pour diffuser ce qu'est l'ARSE, ce qu'est le Science Based
00:36:43 Target, le Scope 1, le Scope 2, le Scope 3, toutes ces définitions qui peuvent paraître
00:36:49 parfois un peu compliquées et qui, au travers de ces engagements qu'une entreprise va prendre,
00:36:57 vont vous permettre de communiquer en air terne.
00:37:00 Vous faites par exemple la fraise du crime Lima, il y a beaucoup d'entreprises qui ont
00:37:03 développé la fraise du crime Lima aujourd'hui à l'intérieur de leur entreprise, mais
00:37:08 ces KPIs c'est vraiment quelque chose de concret sur lequel on peut vraiment avoir
00:37:14 une communication active et opérationnelle vis-à-vis de ses salariés et donc diffuser
00:37:19 auprès de ses salariés, qu'il va le diffuser auprès de sa famille, etc.
00:37:22 C'est une assurance anti-greenwashing en fait ?
00:37:24 Absolument.
00:37:25 Est-ce qu'il y a aussi des inconvénients Stéphanie ? C'est difficile à mettre en
00:37:31 place ?
00:37:32 Oui, je vais dans le sens de Benoît, c'est un cercle vertueux, un pré-requis à la mise
00:37:37 en place d'un financement, c'est effectivement la politique et l'établissement du plan d'action.
00:37:43 Effectivement dans la mise en œuvre, ça nécessite de la mobilisation de toute l'organisation,
00:37:49 des opérations, de la finance, des RH et donc un changement d'état d'esprit, un changement
00:37:54 de paradigme et donc qui peuvent prendre parfois du temps à des horizons lointains puisqu'en
00:38:02 fait un financement a une maturité longue et donc…
00:38:06 On est sûr qu'à l'ordre de maturité ?
00:38:08 Ça peut aller 7 ans, 5 ans, 7 ans, voilà.
00:38:13 En termes de coût, tout à l'heure on a entendu que les investisseurs attendaient
00:38:18 du 15% et que quand on était sur du green il fallait plutôt être à 5, en réalité
00:38:22 c'est quoi l'ordre de grandeur ou de différence entre un financement classique et un financement
00:38:29 muriel ?
00:38:30 En fait dans les financements sustainability linked, les financeurs, les prêteurs, soit
00:38:36 les banques ou les fonds obligataires, les investisseurs obligataires en placement privé
00:38:41 vous vendent en fait une indexation à l'atteinte des objectifs qui sont définis dans le financement,
00:38:51 donc des indicateurs environnementaux, sociaux, de gouvernance, entre 3 et 5 indicateurs généralement
00:38:59 et donc le coupon de l'obligation ou la grille de marge de la ligne bancaire va varier
00:39:05 en fonction de l'atteinte de ces objectifs, donc le coût du financement de l'année
00:39:09 d'après va varier en fonction des performances de l'année à ne moins un.
00:39:14 Bon, ceci dit…
00:39:15 On peut espérer faire une économie de quel ordre ?
00:39:18 Ces bonus/malus, voilà, ces bonus/malus comme on appelle, sont extrêmement faibles, ils
00:39:23 sont de l'ordre de, je dirais entre 5 et 10 BP, c'est ce qu'on vend en moyenne
00:39:28 sur nos opérations, donc entre 0,05% et 0,10% sur le bancaire, sur l'obligataire ça peut
00:39:37 aller un peu plus, mais je voudrais quand même déjà dire que souvent on nous pose
00:39:42 la question nous, sur des clients qui viennent nous voir, c'est pas fait pour baisser le
00:39:48 coût de ces financements, enfin ça c'est mon avis personnel.
00:39:51 Alors ça sert à quoi ?
00:39:52 Mettre en place des financements durables…
00:39:53 Je maintiens, en fait je maintiens en tant qu'entreprise, on fait pas ça pour baisser
00:39:57 son coût de financement.
00:39:58 Ça ne sert pas à baisser les coûts de financement.
00:40:00 Par contre, indirectement, par l'appétit que ça va générer de proposer un financement
00:40:06 durable avec des indicateurs ambitieux, pertinents, des trajectoires ambitieuses, on a de l'appétit,
00:40:14 on a des opérations qui sont sursouscrites et donc par la taille, par le volume, on peut
00:40:19 effectivement avoir un pouvoir de négociation.
00:40:21 Mais le bonus/malus, moi-même à titre personnel, je crois même que le bonus va un jour disparaître,
00:40:26 enfin ça sera plutôt un malus qu'un bonus.
00:40:29 Je confirme, chez Bell on n'a pas de bonus sur nos financements, en cas d'atteinte
00:40:35 on n'a que du malus si on l'atteint pas.
00:40:38 Donc par contre je pense que c'est un facteur d'accès à la liquidité, ça va faciliter
00:40:43 l'accès à votre liquidité, mais en aucun cas, l'enjeu en termes de taux d'intérêt
00:40:50 reste extrêmement faible, par contre l'enjeu en termes de liquidité est beaucoup plus
00:40:54 important.
00:40:55 Stéphanie, on parle de faciliter l'accès à la liquidité, j'ai envie de renverser
00:41:01 la question en disant, si on ne fait pas ça, est-ce qu'on commence à avoir des difficultés
00:41:05 ou est-ce qu'on va avoir des difficultés si on n'a aucune indexation sur sa durabilité,
00:41:11 est-ce qu'on va avoir des difficultés à se financer ?
00:41:13 L'accès en fait, le recours à des financements durables permet d'élargir effectivement
00:41:25 le nombre d'investisseurs auxquels une société a accès.
00:41:30 Il y a effectivement de plus en plus de financements durables, je donnais les chiffres tout à
00:41:37 l'heure auxquels les entreprises ont recours, demain effectivement c'est compliqué de
00:41:45 dire que ça deviendra la norme, puisque je n'ai pas la boule de cristal, néanmoins
00:41:53 c'est sûr qu'aujourd'hui c'est quelque chose qui devient de plus en plus présent,
00:41:58 et les investisseurs en fait sont vraiment en demande d'avoir accès à ces informations,
00:42:06 à de la donnée notamment disclosée par les entreprises.
00:42:10 Muriel, on a vu qu'aujourd'hui c'était déjà de plus en plus important, les tendances
00:42:14 à moyen terme, toi tu les analyses comment ?
00:42:16 Alors déjà au niveau de la relation bancaire, sur les marchés français, européens en
00:42:21 général, le financement bancaire reste quand même prégnant pour l'ensemble des entreprises,
00:42:27 pas seulement le CAC 40, mais pour l'ensemble des entreprises.
00:42:31 On voit en fait dans les banques se développer, à défaut aujourd'hui d'avoir des systèmes
00:42:39 mais qui vont venir un jour, on ne sait pas quand, mais des systèmes coercitifs de bonification
00:42:44 de fonds propres prudentiels dans les banques, à mettre en phase des actifs, c'est la réforme
00:42:49 peut-être, les BAL 5, BAL 6, après BAL 3 et BAL 4 qui vont entrer en…
00:42:56 La banque de France sera sur la salette tout à l'heure.
00:42:59 Donc en tout cas ce qu'on voit aujourd'hui en termes pratiques c'est que les banques,
00:43:03 la plupart des grandes banques ont instauré des labels internes dans lesquels elles flaguent
00:43:07 leurs actifs, elles vont les colorier, enfin ça c'est une image que je donne, mais marron
00:43:17 foncé jusqu'au vert, le vert étant évidemment un abus de langage, ça englobe également
00:43:22 des indicateurs sociaux, c'est la performance durable en général, ES et G, et donc elles
00:43:28 vont colorier leurs actifs du marron foncé au vert foncé, et aujourd'hui certaines
00:43:33 banques même allouent du capital économique, donc le capital réglementaire reste le même
00:43:38 puisque les normes de BAL n'ont pas encore changé aujourd'hui, et elles allouent leur
00:43:43 capital économique, beaucoup plus de capital économique, ce qu'on appelle les RWA, aux
00:43:47 opérations, plus elles sont vertes plus elles…
00:43:49 Elles sont déjà en train de prendre de l'avance sur une réglementation attendue.
00:43:53 Voilà, c'est déjà le cas, donc c'est un peu aussi ce qu'on disait dans l'élargissement
00:43:57 à la liquidité, donc une opération qui ne présente pas d'objectif ou un programme
00:44:04 ESG ambitieux, pertinent, etc., aura moins d'appétit, encore une fois, aura moins de
00:44:11 liquidité, sera même probablement presque plus cher à la limite, à terme, qu'un
00:44:17 financement dit durable, et donc en fait ce qu'on s'aperçoit aujourd'hui c'est
00:44:21 que la relation bancaire, qui jusqu'à aujourd'hui, jusqu'à récemment, se bâtissait autour
00:44:28 des deux comités, ce qu'on appelle le comité business, qui analyse la rentabilité du P&L,
00:44:35 d'une relation bancaire entre une entreprise et sa banque…
00:44:38 C'est parce que la banque gagne, hein ?
00:44:39 Et le comité de crédit, qui lui se focalise sur le risque de crédit, l'analyse crédit,
00:44:45 la notation interne de la banque, on a maintenant quasiment toutes les banques qui ont des comités
00:44:49 ESG, et donc quand un deal passe dans les fourches, enfin dans les analyses, comité
00:44:56 business, comité ESG qui est parfois intégré un petit peu au comité de crédit, ça dépend
00:45:01 des banques, mais comité ESG vraiment formalisé, et comité de crédit, qui vont analyser.
00:45:06 Donc elle va passer, elle a maintenant une transaction bancaire, elle passe sous trois
00:45:11 fourches.
00:45:12 En guise de conclusion, j'avais envie de vous demander, est-ce qu'il y a un point
00:45:19 d'attention, un point de vigilance que vous souhaitez, sur lequel vous souhaitez mettre
00:45:27 l'accent et interpeller peut-être notre public ? Stéphanie ?
00:45:31 Ce qu'on disait tout à l'heure, c'est que l'atteinte des objectifs dans le cadre
00:45:35 de financement lié à des indicateurs de performance ESG, elle est suivie par les
00:45:41 investisseurs, et donc je parle au nom de l'AFTE, qui souligne en fait l'importance
00:45:48 d'avoir une définition normalisée et standardisée au maximum de ces indicateurs, qui rentrent
00:45:55 dans le cadre aussi d'un reporting, ultimement, ESG, qui doit être mis en œuvre par ces
00:46:02 entreprises, dont certaines sont petites et n'ont pas des ressources très étendues,
00:46:09 et donc d'aller vers des choses simples et pragmatiques.
00:46:12 Patrick de Cambour en premier rang vous écoute avec attention, nous allons bientôt avoir
00:46:17 la réponse.
00:46:18 Ce que je voudrais dire aussi, c'est qu'il faut faire attention à ne pas mettre la
00:46:22 charrue avant les bœufs, c'est-à-dire qu'il ne faut pas se lancer dans des financements
00:46:26 durables et définir sa stratégie en même temps. Je pense qu'il faut commencer par
00:46:34 définir sa stratégie RSE, commencer à collecter de la data, être sûr que cette data est
00:46:40 fiable, et c'est une fois qu'on aura mis en place tous ces prérequis qu'on pourra
00:46:47 se lancer sur des KPIs qui seront inclus dans ces financements. Je pense que c'est
00:46:54 quand même un travail qui réclame beaucoup de préparation, beaucoup de données chiffrées,
00:47:04 c'est pour ça que chez Bell, la RSE est aujourd'hui rattachée à la finance, parce
00:47:10 qu'on voit en fait que dans tous ces sujets là, il y a beaucoup de traitement de données,
00:47:16 il faut que cette donnée soit extrêmement fiable, et c'est naturellement à la finance
00:47:23 qui est en charge de la fiabilisation de ces données. Et donc ça montre bien que
00:47:30 finance et durable sont aujourd'hui extrêmement proches.
00:47:35 Muriel, un point d'attention ou un souhait pour cette progression ?
00:47:42 Il y en a beaucoup, mais nous par rapport à ce qu'on voit effectivement dans la lignée
00:47:47 de ce que vient de dire Benoît, notamment l'enjeu maintenant aujourd'hui, il est quand
00:47:52 même surtout sur les ETI, enfin ce que j'appelle les ETI au sens assez large du terme, mais
00:47:59 qui sont les trois quarts de l'économie, et effectivement qui sont beaucoup moins
00:48:05 staffées que dans des groupes comme Bell ou les groupes du CAC 40. Effectivement il
00:48:11 y a d'abord s'y prendre très en amont avec la RSE et la finance, et c'est un travail
00:48:17 de plusieurs mois, de trois, quatre mois, avant de pouvoir approcher son poule bancaire.
00:48:23 Donc ça c'est un premier, je dirais, prérequis ou point d'attention important. Mais nous
00:48:30 on les pousse énormément parce que avant que ça devienne obligatoire, entre guillemets,
00:48:36 puisqu'à un moment donné, comme disait une intervenante précédente, il faudra bien
00:48:41 à un moment donné que ça devienne obligatoire, donc on sent que ça devient mainstream. Pour
00:48:45 l'instant aujourd'hui ça se fait en bonne entente avec ses financeurs, c'est des discussions
00:48:49 qui sont parfois d'ailleurs assez ardues, puisque les banques ont édicté des principes
00:48:55 pour les sustainable link loans, ces principes ont l'avantage d'être assez flexibles, mais
00:48:59 ils ont été édictés uniquement par les banques, sans prendre en compte l'avis des
00:49:03 emprunteurs et des entreprises. Donc là aussi, peut-être, ce serait de rebâtir un cadre,
00:49:09 peut-être, enfin en tout cas de l'amender pour avoir quelque chose de plus... qui reste
00:49:15 flexible malgré tout, mais de plus cadré, plus standardisé. Quand on parle à un pool
00:49:21 bancaire, on est sur des discussions qui sont agréables, sur des sujets qui nous changent
00:49:26 un peu du financier pur, mais on a une hétérogénéité entre banques sur la perception d'une politique
00:49:33 RSE vis-à-vis de son client emprunteur, sur ses indicateurs, etc., qui peut être assez
00:49:40 hétérogène, même très hétérogène d'une banque à l'autre.
00:49:43 Merci beaucoup à tous les trois. On peut vous applaudir.
00:49:50 Merci Cécile.
00:49:53 Beaucoup de travail en effet, et beaucoup de travail sur les normes. Je cède la parole
00:49:57 à Émilie pour parler des normes.
00:50:00 Oui, on continue. Avec vous, Patrick Decombourg, président du Sustainability Reporting Board
00:50:09 de l'EFRAG, installez-vous l'European Financial Reporting Advertisery Group.
00:50:16 On a oublié les acronymes, ça s'appelle EFRAG aujourd'hui.
00:50:23 C'est ça. Alors, quelles normes pour l'information extra-financière pour aujourd'hui comme pour
00:50:29 demain ? Patrick Decombourg, le reporting financier qui sera vraisemblablement au goût
00:50:37 du jour à partir de 2024 pour certaines entreprises et 2025 pour d'autres. Qu'est-ce que ça va
00:50:43 changer concrètement pour elles, pour les entreprises ? Ce fameux CSRD.
00:50:48 Bonjour à tous. Si vous me permettez, le terme "vraisemblable" ne me paraît pas adapté.
00:50:55 Parce qu'en fait, aujourd'hui, les textes européens ont été adoptés au niveau législatif,
00:51:04 les transpositions à venir dans les différents états membres, s'agissant déjà d'un texte
00:51:11 assez ambitieux, ne devraient pas rajouter. Elles traiteront de certains sujets spécifiques
00:51:16 aux différents états membres mais ne toucheront pas le cœur du reporting, je pense. Et par
00:51:23 ailleurs, les standards, c'est-à-dire les normes applicables, le niveau réglementaire,
00:51:30 va, sa première tranche, le premier jeu du standard, qui est relativement conséquent,
00:51:37 je vais en dire un mot, va être adopté en juillet. Donc en fait, on n'est pas dans
00:51:44 le vraisemblable, on est dans le "combien de temps, qui et à quel rythme". Alors, ce
00:51:51 que je voulais vous dire et qui me paraît essentiel, je représente quelque chose qui
00:51:57 roule et qui est une affaire de longue haleine, c'est-à-dire que le fondement de ce que
00:52:04 fait l'EFRAG, de ce qu'a fait la Corporate Sustainability Reporting Directive, CSRD,
00:52:09 ou de ce que font les standards européens, les ESRS, c'est quelque chose qui paraît
00:52:17 basique mais qui est un travail de longue haleine, c'est-à-dire qu'il faut fiabiliser
00:52:22 l'information sur la durabilité. Densifier, fiabiliser, rendre comparable.
00:52:28 Oui, c'est tout l'enjeu.
00:52:30 C'est tout l'enjeu. Parce que j'entendais les intervenants précédents et ils ont tous
00:52:36 des remarques extrêmement pertinentes, mais je dis souvent qu'il n'y a pas de stratégie
00:52:42 privée ou de politique publique sans une information fiable à la base. Sinon, on tombe
00:52:48 dans les risques de greenwashing, d'ESG washing, on tombe dans la situation qu'on connaît
00:52:53 aujourd'hui, c'est-à-dire qu'il est très difficile de déterminer de façon relativement
00:52:58 objective, quelle est la nature du produit que l'on va acheter, de l'investissement
00:53:03 qu'on va faire. C'est à la fois important pour l'entreprise elle-même dans sa prise
00:53:08 de décision, mais aussi pour la prise de décision de tous les tiers, de toutes les
00:53:12 parties et des parties prenantes. Donc l'information financière a fait une longue évolution.
00:53:17 Après des étapes successives, en 2002, je ne sais pas si vous avez cela en tête, un
00:53:27 langage commun a été adopté, celui du langage des IFRS qui a été mis en place à partir
00:53:32 de 2005. Il fallait unifier quelque chose qui était relativement commun, mais on parlait
00:53:38 des langues, des dialectes, il fallait une langue commune en Europe, donc on a fait ce
00:53:43 choix. L'Europe a fait un choix un peu différent pour la durabilité, elle a décidé que compte
00:53:48 tenu de ses politiques, de l'importance du développement durable et de la finance durable
00:53:52 pour le développement européen, c'était l'Europe qui allait se doter de ses propres
00:53:56 normes, certes en dialogue avec les normes internationales qui sont émergentes, mais
00:54:02 dans une position plutôt pionnière. Donc on est en train d'assister aujourd'hui à
00:54:08 une mutation, une mue, qui est comparable à ce que l'on a fait en matière financière
00:54:14 entre 1990 et 2005, mais simplement le fait plus rapidement.
00:54:21 Mais quel chamboulement cela va apporter côté entreprise, parce que ce n'était pas rien
00:54:25 à l'époque ?
00:54:26 Alors voilà, je profite de ce moment pour dire qu'effectivement, cela n'est pas spectaculaire,
00:54:33 mais c'est un travail qui requiert toute l'attention des entreprises. Le système européen
00:54:39 demande à toutes les entreprises de plus de 250 salariés, on les appelle grandes entreprises,
00:54:46 mais elles ne sont pas si grandes que ça, ça représente plus de 50 000 entreprises
00:54:52 en Europe, qui représentent plus de la moitié de la création de richesses, de se situer
00:54:58 dans cette perspective de reporting, de durabilité. Je reviens sur le concept, pour moi l'information
00:55:11 normée d'une entreprise, l'information standardisée d'une entreprise, doit marcher
00:55:16 sur deux jambes. Il y a la jambe financière qui est bien connue, qui est relativement
00:55:21 structurée, musclée, mais la jambe de durabilité aujourd'hui est un peu le parent pauvre.
00:55:26 D'ailleurs, ça fait, pardonnez-moi cette expression un peu populaire, ça fait les
00:55:32 choux gras des gens qui font de la collection, de la recherche de data, de la vente de data,
00:55:40 mais dans un univers qui n'est pas fiabilisé, harmonisé et comparable. Donc on est en train
00:55:46 de franchir cette étape-là, c'est la deuxième jambe. Et en fait, à l'avenir, pour combiner
00:55:52 à la fois le financier, dont on dit souvent qu'il est à relativement court terme, et
00:55:57 la durabilité qui regarde l'avenir, il faudra marcher sur deux jambes, sous la coordination,
00:56:04 deux jambes ça ne marche que si on a un cerveau qui permet de coordonner les deux jambes,
00:56:09 de la gouvernance de l'entreprise sous le regard du marché et des observateurs de toutes
00:56:15 les parties prenantes. Donc, pour traduire la CSRD, ce qu'il faut avoir en tête, c'est
00:56:21 que les normes européennes font l'objet des derniers arbitrages en ce moment au niveau
00:56:26 de la commission européenne qui fera une ultime consultation au mois de juin avant
00:56:30 de publier son acte délégué qui est applicable dans l'union, sans transposition, ce qui
00:56:38 permet donc un marché unifié. L'avis technique que l'EFRAG a rendu en novembre, qui est l'objet
00:56:46 de quelques arbitrages, mais je ne pense pas qu'on changera le fonds, on parle quand même,
00:56:50 pour couvrir E, S et G, de 84 Disclosure Requirements, donc d'objectifs d'information,
00:56:59 qui couvrent un peu plus de 1100 indicateurs.
00:57:04 Contre combien aujourd'hui, pour qu'on puisse se rendre compte ?
00:57:08 Vous pouvez calculer comme vous voulez, ça dépend des pays, l'ADPEF...
00:57:12 Mais bien moins quoi en tout cas, c'est pas comparé.
00:57:15 Il ne faut pas se faire peur non plus, c'est à dire que ces 1100 indicateurs, qui seront
00:57:21 peut-être transformés un peu par l'arbitrage de la commission, mais ces 1100 indicateurs
00:57:26 sont soumis à la matérialité, c'est à dire que toute entreprise ne devra pas donner
00:57:32 les 1100 informations, elle donnera des informations pour ce qui est significatif, important, matériel
00:57:37 pour elle, ce qui veut dire peut-être 500, 600, 400, etc.
00:57:42 Mais on change de braquet, c'est bientôt le Tour de France, donc je prends une image
00:57:48 cycliste, on change de braquet en termes de qualité d'information.
00:57:53 Par ailleurs, cette information est normée, donc elle permet la comparabilité et la qualité
00:57:58 et deuxièmement, elle sera auditée.
00:58:01 Donc en dehors des mécanismes classiques de qualité interne à l'entreprise, il y a
00:58:06 l'intervention du normalisateur en amont et puis l'intervention des auditeurs en aval
00:58:14 puis des régulateurs de marché pour les sociétés cotées.
00:58:18 Donc on change vraiment d'univers, nous travaillons également à faire en sorte que ceci soit
00:58:26 digitalisé, numérisé, c'est à dire que cette information sera disponible non seulement
00:58:31 en ce qu'on appelle "human readable" mais aussi en "machine readable" et selon un cadre
00:58:40 que l'on bataille pour imposer, parce qu'il y a beaucoup de narratifs dans l'information
00:58:46 de durabilité et le narratif c'est par définition difficile à normer et à comparer.
00:58:50 Parce que je fais une phrase, est-ce que ma phrase est comparable à celle de mon voisin ?
00:58:54 Justement, ce n'est pas ce qui est compliqué dans ces histoires de normes, c'est qu'on
00:58:58 est vachement sur de la qualité et c'est difficile de comparer. Vous l'avez très
00:59:03 justement dit, entre deux entreprises qui ont des activités différentes, qui vont
00:59:07 donner des informations différentes, c'est précisément le point un peu compliqué,
00:59:12 j'allais dire.
00:59:13 Oui, alors là on rentre peut-être un peu dans la technique mais pour la partie narrative,
00:59:17 le quantitatif entre guillemets c'est plus facile puisqu'on a des méthodologies pour
00:59:22 par exemple les émissions de gaz à effet de serre, etc. Il y a des choses, on a normé,
00:59:27 on a élevé les options qui créent de l'incomparabilité. Pour le narratif, on a structuré le narratif
00:59:34 en fixant d'abord un principe et ensuite des points de passage obligés. A, B, C, D,
00:59:39 E, F. Donc vous aborderez A, B, C, D, E, F. Et puis parfois dans A, il y a petit 1 romain,
00:59:45 petit 2 romain, petit 3 romain. Pour justement faire en sorte que l'on trouve l'information
00:59:50 avec le niveau de granularité qui permet son utilisation pour la décision et sa pertinence.
00:59:57 Alors, j'ai oublié de mentionner un point parce que ça a été évoqué tout à l'heure
01:00:01 par les intervenants précédents. Je parle des entreprises de plus de 250 salariés.
01:00:06 Les PME, elles, ne sont pas abandonnées du tout. D'abord, les PME cotées vont avoir
01:00:12 un standard propre. Bon, alors ce n'est pas une population énorme en Europe mais
01:00:16 le législateur y a pensé. Et par ailleurs, la commission nous a demandé d'élaborer
01:00:22 un standard d'application volontaire pour les autres PME simplifiés. Parce qu'il y
01:00:29 a une pleine conscience du fait que les PME qui ne prendraient pas le virage du reporting
01:00:36 de durabilité risqueraient d'être marginalisés. Que ce soit dans la chaîne de valeur à
01:00:43 laquelle ils contribuent. Les grands donneurs d'ordre vont leur demander des informations
01:00:48 ou alors vont dire "on ne traite pas avec vous". Et deuxièmement, les institutions
01:00:53 financières, les transitions requièrent des financements très importants qui requièrent
01:01:00 souvent l'appel de la banque quand on est une PME ou alors d'un private equity mais
01:01:05 qui lui-même... Donc c'est le cercle vertueux qui commence. Et donc, je suis un peu un
01:01:11 optimiste, je pense que le dispositif est un dispositif qui assurera une base solide
01:01:21 de données pertinentes et comparables et que les PME, si elles ne veulent pas se dévaloriser
01:01:28 et se marginaliser, auront tout intérêt pour leur propre décision et pour leur relation
01:01:33 avec les tiers à s'inscrire dans ce cercle vertueux. Et pour leur partie prenante. Et
01:01:39 pour les relations qu'elles entretiennent. Merci beaucoup Patrick de Cambour pour ses
01:01:44 éclorages. Merci Emily. J'appelle maintenant Carole Sirou. Carole, où êtes-vous cachée
01:01:57 tout au fond ? C'est dirigeante d'Etifinance, une agence de notation ESG. On va voir comment
01:02:04 très concrètement, ce que nous a expliqué Patrick va se décliner dans les entreprises.
01:02:11 Pour commencer, j'ai un petit côté toujours un peu professoral, enfin, je ne sais pas
01:02:21 comment on appelle ça... Pédagogique, voilà, c'est mieux. Concrètement, c'est quoi une
01:02:27 notation ESG ? Vous qui les donnez, c'est quoi la différence entre une notation ESG
01:02:32 et une notation de crédit ? Alors une notation ESG, c'est un scoring en fait. C'est-à-dire
01:02:39 que comme ça a été évoqué par les panels précédents, pour faire de l'analyse, il
01:02:47 faut de la donnée. La donnée ESG est une donnée plus récente, pas complètement normée
01:02:53 ni comparable, on y reviendra. Et qui, par essence aujourd'hui, est essentiellement un
01:03:00 score. C'est-à-dire qu'on regarde un certain nombre de paramètres, on les pondère avec
01:03:05 des méthodologies qui peuvent varier d'ailleurs d'une agence de notation à l'autre, on y
01:03:09 reviendra certainement. Et qui donne finalement une analyse sur 100 de la maturité d'une
01:03:19 entreprise en matière ESG. L'analyse crédit, qui a plus de 150 ans d'existence, c'est un
01:03:27 produit beaucoup plus "avancé" dans l'analyse et ne mesure qu'une seule chose, c'est la
01:03:34 capacité d'un emprunteur à rembourser sa dette. Donc il y a déjà cette "définition
01:03:39 simple" par rapport aux notations ESG qui peuvent mesurer des situations un peu différentes.
01:03:45 Et puis surtout, l'analyse crédit se fonde sur de l'information qui est normée et qui
01:03:52 est auditée. Or, tous les autres panels l'ont évoqué. Aujourd'hui, ce qu'il manque le
01:03:57 plus sur la data ESG, c'est justement cette capacité à démontrer qu'elle mesure bien
01:04:04 ce qu'elle mesure, pour éviter soit le greenwashing, mais surtout pour permettre que ce soit un
01:04:10 outil de prise de décision de la part des investisseurs.
01:04:13 Alors, on va venir sur ces défauts aussi, je peux dire. Aujourd'hui vous dites une note
01:04:17 sur 100. Concrètement, si je vais vous voir en tant qu'entreprise, c'est quoi une bonne
01:04:24 moyenne et comment je peux améliorer ma moyenne ?
01:04:28 Alors aujourd'hui, la plupart des notations attribuées par ETI Finance, et je vais faire
01:04:34 un petit point, donc nous, nous notons essentiellement des mid-cap, donc des sociétés qui sont
01:04:40 cotées et qui ont un niveau de capitalisation entre grosso modo 500 millions d'euros et
01:04:47 10 milliards. C'est à peu près 2400 entreprises en Europe, 400 en France. Et sur cet échantillon,
01:04:55 la moyenne des notes est de l'ordre de 53. Donc comme vous pouvez le voir, il y a de
01:05:01 la marge de progression avant d'arriver vers les notes les plus élevées. Pourquoi ? Parce
01:05:08 que justement, sur tous les éléments que nous mesurons, que ce soit l'environnement,
01:05:13 le social, le sociétal ou l'engagement avec les parties prenantes, et bien il y a de la
01:05:19 marge de progression. Et donc, ce que nous voyons, et en fait, un élément que je n'ai
01:05:25 pas mentionné mais qui est important, toute notation est intéressante, bien sûr en
01:05:30 comparaison d'autres, et notamment des paires, mais surtout ce qui est intéressant, c'est
01:05:35 la progression dans le temps. Et donc il ne s'agit pas de prendre ça pour une notation,
01:05:41 qu'elle soit d'ailleurs financière ou extra-financière, comme un élément absolu, mais plutôt comme
01:05:47 un point de départ qui permet ensuite, d'année en année, de progresser et de pouvoir démontrer
01:05:55 aux investisseurs et aux différentes parties prenantes que, effectivement, l'entreprise
01:06:02 est en phase de construction sur un certain nombre de points et qu'elle met en place,
01:06:09 bien entendu, la stratégie et ensuite toutes les déclinaisons opérationnelles lui permettant
01:06:14 de travailler sur ces différentes thématiques. La moyenne de la classe est à 53. Les meilleurs,
01:06:20 ils arrivent à avoir quel type de note aujourd'hui ? Alors les meilleurs sont généralement aux
01:06:25 alentours de 70 à 80. En toute logique, j'aurais l'impression que cette grille, elle pourrait
01:06:31 évoluer dans le temps, c'est-à-dire que quand tout le monde aura 90, on va changer
01:06:35 la grille ou pas du tout ? C'est une grille absolue ? J'espère que tout le monde sera
01:06:40 à 90 un jour, ça voudrait dire qu'on aura fait d'énormes progrès sur beaucoup de sujets
01:06:46 qui sont d'une rare complexité. C'est un métier qui est en construction et en devenir
01:06:53 lui aussi, qui évolue en fonction des aspects réglementaires, du niveau d'exigence qui
01:07:00 augmente. Chez Eti Finance, nous sommes convaincus que ce métier qui a à peine 20 ans d'existence
01:07:12 va évoluer fortement et à mesure que l'information sera disponible, sera normée et auditée,
01:07:20 en fait va évoluer du scoring vers une vraie notation. Aujourd'hui, le principal handicap
01:07:28 de la notation ESG, c'est que finalement, le carburant dont elle a besoin, à savoir
01:07:35 la data, est très difficilement interprétable. C'était mentionné par Patrick de Cambour
01:07:43 juste précédemment, il y a aussi beaucoup d'éléments qualitatifs et en fait, il y
01:07:49 a un vrai besoin, et plus on aura d'informations qualitatives, de passer du scoring vers l'analyse.
01:07:57 Et l'analyse, ce sera quoi ? Ce sera ce que tout le monde aspire à avoir, de pouvoir
01:08:03 analyser justement les trajectoires, par exemple, de transition d'une entreprise. Pas uniquement
01:08:08 de regarder des points d'information à un moment T, mais bien de se dire, est-ce que
01:08:13 l'entreprise lambda, qui s'engage sur telle ou telle trajectoire, est bien à même d'exécuter
01:08:21 cette trajectoire, par exemple, de décarbonation ? Et donc, de vraiment passer d'une analyse
01:08:27 un peu statique, vers une analyse dynamique, qui permettra d'être finalement un outil
01:08:33 de prise de décision, de la part des investisseurs, beaucoup plus précis et fin.
01:08:38 Parce que vous parlez de photos, aujourd'hui on a ces scorings à un moment T dans l'année,
01:08:44 ou même une fois par an, je crois, alors que côté crédit, je suis désolée de refaire
01:08:48 la comparaison, mais côté crédit, à tout moment, on est susceptible de se voir abaisser
01:08:53 plus que remonter l'air.
01:08:55 Ça marche dans les deux sens, mais effectivement, souvent, en période difficile, ça marche
01:08:59 plutôt à la baisse. Oui, justement, vous l'évoquiez, aujourd'hui, la principale
01:09:04 source d'information, c'est en France en tout cas, la DPEF, qui apparaît une fois
01:09:09 par an, et ensuite, je dirais, l'avis de l'entreprise de manière générale, mais
01:09:14 on n'a pas, comme dans le domaine financier, finalement, des publications de comptes annuels,
01:09:19 comptes trimestriels, etc. Donc c'est plus difficile, finalement, d'apprécier ces
01:09:26 éléments de manière dynamique. C'est également un des biais, aujourd'hui, c'est
01:09:35 que beaucoup d'informations manquent, et sont des informations calculées, ou des
01:09:41 informations qui sont données par les entreprises, sans qu'on comprenne très très bien comment
01:09:45 elles ont été déterminées. Et donc, les notateurs, comme nous, ou les tiers, les
01:09:53 investisseurs, regardent également des informations qui tournent autour, puisqu'au cours d'une
01:09:59 année, il peut se passer beaucoup de choses dans une entreprise. Et donc, comment apprécier,
01:10:04 finalement, en dynamique, ces notations ? En regardant les controverses.
01:10:09 Si je lis vraiment derrière ce que vous dites, entre les lignes, on n'est pas très
01:10:14 content des notations, aujourd'hui. Vous employez le mot "insatisfaisant", mais
01:10:18 globalement, elles sont fausses ? Elles sont insatisfaisantes à quel point ?
01:10:21 Elles sont le reflet du monde dans lequel on est, où l'information sous-jacente a
01:10:28 encore des marges d'amélioration. Et c'est un outil qui va évoluer, il apporte de la
01:10:35 transparence, il apporte, finalement, de la continuité, dans cette comparabilité d'une
01:10:44 entreprise dans le temps et entre les différentes entreprises. Mais c'est effectivement un
01:10:49 outil qui va continuer à s'améliorer à mesure que les réglementations, les standards,
01:10:57 notamment extra-financiers, vont être mis en place, pour être, finalement, un outil
01:11:03 plus fin. Il apporte une information qui est importante, notamment, je crois que ça avait
01:11:08 été évoqué dans une autre des tables rondes, dans un domaine, que ce soit les ETI ou les
01:11:13 small and mid-cap, où il n'y a pas beaucoup d'informations. Il faut regarder aussi, on
01:11:18 n'est pas uniquement, le monde n'est pas uniquement régi par les très très grandes
01:11:23 sociétés. En fait, l'économie, c'est essentiellement des ETI, voire des PME. Donc
01:11:28 il ne faut pas oublier ce pan-là du segment du marché. Et donc, je dirais que la notation
01:11:36 ESG, elle va évoluer et se professionnaliser, s'améliorer, à mesure que l'information
01:11:43 elle-même sera de meilleure qualité.
01:11:46 Carole, si tel le génie de la lampe, je vous donnais trois voeux pour améliorer sérieusement
01:11:52 les choses, il faudrait quoi ?
01:11:54 Alors il faudrait que les normes sortent.
01:11:57 Enfin, Patrick !
01:11:59 Qu'on sache, les normes sectorielles.
01:12:02 Les normes générales et sectorielles, qu'elles ne soient pas trop complexes, parce qu'à
01:12:09 force de vouloir atteindre la perfection, on perd du temps. Et donc, peut-être que,
01:12:17 faire preuve d'un peu de proportionnalité, on l'a bien entendu dans...
01:12:21 J'ai peur que Patrick de Cambourg n'ai fuit, mais on va lui envoyer pas les tweets.
01:12:25 Je pense que c'est ce qu'il disait, en parlant des PME notamment. Et puis, un autre point
01:12:34 je crois qui est très très important, c'est avoir conscience que c'est peut-être pas
01:12:37 parfait, mais c'est mieux que rien. Et que donc, et là je vais rebondir sur un point
01:12:42 de Patrick de Cambourg, c'est commencer à se préparer, parce que c'est un cheminement
01:12:52 sur lequel on apprend, collectivement, quelles que soient d'ailleurs les parties prenantes,
01:12:57 et sur lequel je pense qu'il faut faire preuve d'une forme d'humilité aussi, et de se dire
01:13:04 bon voilà, on construit brique par brique, et il y a moyen de faire progresser les choses,
01:13:11 parce que, et peut-être pour boucler sur les points de la première table ronde, on
01:13:17 a besoin de la finance, aussi imparfaite soit-elle, on a besoin de la finance pour financer ces
01:13:22 transitions, et donc il faut que tout ça aille, je dirais, dans la même direction.
01:13:26 Et puis pour reboucler sur la note de crédit, il faut se dire qu'aujourd'hui on considère
01:13:31 que tout ça, voilà, c'est acquis, mais ça a pris plus d'une centaine d'années avant
01:13:36 d'être vraiment bien établi. Alors avec ChatGBT et autres technologies, je pense qu'on
01:13:42 ira plus vite, mais voilà, je pense qu'il faut avoir aussi conscience du fait qu'il
01:13:48 faut accepter que ce ne soit pas parfait.
01:13:51 Alors on a évoqué plusieurs fois la généralisation, je voulais vous poser la question en guise
01:13:56 de conclusion, mais la généralisation de cette notation, est-ce qu'elle est possible,
01:14:01 à quelle échéance, et ça impliquerait aussi qu'on aille, aujourd'hui vous l'avez
01:14:06 bien dit, les entreprises vous sollicitent, elles viennent, elles sont volontaires, est-ce
01:14:11 que vous pourriez, demain, noter tout un chacun, alors quand je dis vous, c'est toute l'industrie,
01:14:17 on est bien d'accord.
01:14:19 À partir du moment où on aura de la donnée, normée, auditée, j'ai l'impression d'un
01:14:25 mot répété, mais voilà, ce sera beaucoup plus facile, effectivement, de pouvoir noter
01:14:32 des univers plus larges. Aujourd'hui, en fait, ce sont les investisseurs qui nous sollicitent,
01:14:39 donc nous, nous sommes vraiment des notations et de la donnée sous-jacente demandées par
01:14:45 les investisseurs, mais effectivement, à la différence de certains de nos concurrents,
01:14:50 nous considérons que l'interaction avec l'entreprise est un point important, pour justement pouvoir
01:14:57 comprendre les données sous-jacentes, qui parfois, d'une année sur l'autre, peuvent
01:15:01 être relativement incohérentes, donc comprendre quels sont les changements méthodologiques,
01:15:06 éventuellement avoir la possibilité de challenger certaines données, et donc, c'est en ce
01:15:12 sens, et c'est d'autant plus important, je dirais, avec les entreprises auxquelles nous
01:15:18 discutons, puisque, là aussi, les small and mid-cap ont besoin d'être accompagnés dans
01:15:25 cette réflexion, et donc, notre rôle, il est certes de donner de la donnée qui a été
01:15:31 probablement plus travaillée, entre guillemets, plus testée, que celle qui est dans le domaine
01:15:36 public, et aussi de contribuer à faire évoluer les mentalités, et à faire comprendre aux
01:15:43 entreprises que ce sont des sujets importants sur lesquels elles doivent se préparer.
01:15:48 Alors, vraiment le mot de la fin, ce serait possible, d'après vous, je suis consciente
01:15:52 qu'on n'a pas de boule de cristal, mais à quelle échéance ? On peut espérer, là,
01:15:56 en 2030, ce sera ?
01:15:58 En 2027, on sera déjà dans un monde complètement différent, les normes seront ce qu'elles
01:16:06 seront, la plupart des entreprises en Europe, puisqu'on parle quand même sur CSRD d'à
01:16:13 peu près 50 000 entreprises qui seraient couvertes par ces réglementations, soit quasiment
01:16:20 un quadruplement de ce qui existe aujourd'hui, et puis, donc, l'horizon 2030, pourquoi pas ?
01:16:27 Pourquoi pas ? C'est certainement un objectif qu'il faut avoir en tête, puisque de toute
01:16:33 façon, c'est indispensable et c'est impréalable pour les banques, je crois que c'était évoqué
01:16:40 également le rôle de la banque centrale, voilà, tout le monde a besoin d'informations
01:16:46 et de données pour pouvoir prendre ses décisions. Donc, espérons, nous nous reverrons dans
01:16:52 quelques années, alors, on se donne rendez-vous dans sept ans.
01:16:55 Les banques, justement, on va en parler tout de suite avec Emilie, merci beaucoup, Carole
01:16:58 Thiroux.
01:16:59 Merci.
01:17:00 Effectivement, merci Cécile. Les banques sont-elles réellement engagées au service
01:17:11 de la transition écologique, du développement durable ? Réponse tout de suite avec Olivia
01:17:16 Blanchard, présidente et cofondatrice des acteurs de la finance responsable, Cédric
01:17:20 Malengrot, qui est directeur du secrétariat général et de la communication institutionnelle
01:17:26 du groupe Arkea et Jean Boissineau, qui est adjoint au directeur de la stabilité financière
01:17:32 et secrétaire général du network for greening the financial system à la Banque de France.
01:17:38 Bonjour à tous les trois, installez-vous, je vous en prie, on peut les applaudir. Et
01:17:47 Jean Boissineau, qui est également l'auteur du très bon livre « La finance verte »
01:17:52 paru il n'y a pas si longtemps, en novembre dernier, aux éditions Duneau, je crois,
01:17:58 c'est ça. Jean Boissineau, justement, dans votre ouvrage, vous expliquez que la finance
01:18:05 en fait évolue bien plus rapidement que ce que l'on dit, c'est plutôt une surprise,
01:18:12 c'est vrai quand on a préparé cette table ronde, on nous disait « bah quand même,
01:18:15 c'est un petit peu lent tout ça », vous vous dites « mais attendez, remettez les
01:18:18 choses en perspective, la finance a fait un pas de géant quand même, si on prend un
01:18:23 peu de hauteur, expliquez-nous ». Oui, tout à fait. Alors, en fait, d'abord,
01:18:28 cette histoire, elle commence fondamentalement en 2014-2015, c'est il y a longtemps, mais
01:18:33 pas si longtemps que ça, et pour parler de quelque chose qui n'est pas dans le livre,
01:18:37 mais pour faire un pas de deux ans en deux ans. Novembre 2021, la BCE demande à toutes
01:18:42 les banques européennes qu'elle supervise d'avoir des bonnes pratiques en matière
01:18:48 d'évaluation des risques environnementaux et notamment des risques climatiques. À
01:18:51 ce moment-là, elle fait une photo, et la photo révèle qu'il y a moins de 25% des
01:18:56 banques qui ont des pratiques au mieux basiques en matière d'identification des risques.
01:19:00 On part d'assez loin, même si, comme je le disais, ça fait déjà à ce moment-là
01:19:04 cinq ans qu'on commence à travailler. Novembre 2022, elle publie la deuxième photo,
01:19:10 pour faire le point sur là où on en est, et là, qu'est-ce que la deuxième photo révèle,
01:19:15 et puis quand on met deux photos à côté, ça commence à faire un film, 85% des banques,
01:19:19 donc le 25 est devenu 85% des banques, ont des pratiques au moins basiques. Donc c'est
01:19:24 un mouvement assez important. Maintenant, ce qu'elle nous dit aussi, fondamentalement,
01:19:30 c'est qu'on a moins de 10% des banques, par exemple, qui ont une approche suffisamment
01:19:33 prospective des enjeux, qui arrivent à se projeter dans l'avenir et à comprendre ce
01:19:37 que ça implique vraiment. Elle nous dit aussi que les banques disent qu'elles vont faire
01:19:43 des choses, puis la mise en œuvre est parfois un peu plus difficile, donc elle dit qu'on
01:19:47 n'y est pas encore, mais il y a du mouvement. Et surtout, pour finir sur une note positive,
01:19:52 elle nous dit aussi que sur 25 des 30 domaines sur lesquels elle a des attentes, elle est
01:19:57 capable d'identifier des banques qui sont à l'objectif. Et en gros, un quart des banques
01:20:01 sont déjà à l'objectif sur au moins un domaine. Donc en fait, en l'espace de deux
01:20:05 ans, on a déjà couvert un chemin important, ce qui permet à la BCE à ce moment-là de
01:20:10 dire "vous savez quoi, encore deux ans et tout le monde est à l'objectif, et si vous
01:20:14 n'y êtes pas, on viendra pousser un peu plus fort".
01:20:19 Justement, côté des banques, au groupe Arkea, Cédric Malengro, est-ce que vous pouvez nous
01:20:23 expliquer comment vous, vous essayez de lutter justement contre ce fameux greenwashing ?
01:20:28 En fait, on ne prend pas le sujet tout à fait comme ça. On ne se lève pas tous les
01:20:31 matins pour éviter le greenwashing, on se lève tous les matins pour maximiser notre
01:20:35 engagement en faveur du climat. Et ça prend la forme d'une intégration, et intégration
01:20:42 qui prend elle-même plusieurs formes. La première intégration, et là on est servi
01:20:46 par notre modèle, en étant une banque coopérative et mutualiste, c'est que de manière native,
01:20:52 on est plutôt engagé de manière naturelle pour le bien commun, et notamment sa traduction
01:20:58 en matière de lutte contre le climat. Ça prend d'autres formes d'intégration, et
01:21:03 puisqu'on a fait le choix, c'est le choix du Crédit Mutuel Arkea, c'est aussi le choix
01:21:07 d'autres composantes au sein du Crédit Mutuel, et notamment l'autre composante qui est
01:21:11 le Crédit Mutuel Allianz Fédéral, de devenir entreprise à mission, et de placer au cœur
01:21:16 de nos statuts, au travers de nos engagements, qui sont décrits dans nos statuts, on en a
01:21:20 cinq, il y a un engagement qui est spécifique à l'engagement climatique. Ensuite, ça
01:21:26 s'est venu intégrer ou irriguer notre plan stratégique, celui qu'on a élaboré en
01:21:31 2020, qui s'appelle Transition 2024, donc qui trouve son terme dans deux ans, et dont
01:21:37 l'un des drivers, si ce n'est le driver principal, est justement cet engagement dans
01:21:43 la lutte pour la préservation du climat. Et enfin, c'est une intégration, je dirais,
01:21:49 de tous les instants dans l'ensemble de nos politiques, de nos réflexions, et d'accompagnement
01:21:56 de nos clients, puisque je rejoins l'intervention précédente, on a aujourd'hui un besoin de
01:22:02 données importantes, et ces données, il y a les données de la banque, évidemment,
01:22:06 et celles-là on en dispose, mais il y a surtout les données de nos clients, et on a un formidable
01:22:11 pouvoir, nous les banques, de pouvoir infléchir finalement un certain nombre de choses, un
01:22:16 certain nombre d'actions en matière d'environnement, par nos choix, par les inflexions qu'on donne
01:22:22 à nos financements.
01:22:24 Olivia Blanchard, est-ce que vous pouvez rentrer dans le vif du sujet des freins qui empêcheraient
01:22:30 justement ces banques de s'engager réellement vers plus de durabilité ?
01:22:35 En effet, je pense que déjà dans cette question, il y a deux mots qui sont importants, c'est
01:22:39 le mot engagement et le mot durabilité. Le mot engagement, aujourd'hui, ça signifie
01:22:43 quoi ? Je pense qu'on en a déjà parlé pas mal ce matin, ça se situe à plusieurs niveaux,
01:22:48 c'est l'engagement sur des politiques d'exclusion, sur des objectifs de financement bien précis,
01:22:54 et ensuite il y a cette notion de durabilité. Durabilité, ça veut dire quoi en fait aujourd'hui ?
01:22:59 Et je pense que depuis 2018, où il y a des travaux pharaoniques au niveau européen,
01:23:03 justement pour harmoniser et définir ce que veut dire durabilité, en fait on ne sait
01:23:08 encore pas vraiment ce que ça veut dire. Donc déjà ça c'est un premier frein. Durabilité,
01:23:13 ça veut dire quoi ? Ensuite, il y a le deuxième frein qu'on pourrait juger, c'est, on en
01:23:19 a parlé aussi ce matin, c'est la notion de rentabilité. Quelle valeur aujourd'hui on
01:23:23 donne à une entreprise, à une activité ? Quels sont les indicateurs qu'on va toujours
01:23:28 utiliser pour justement valoriser un investissement, un retour sur investissement ? Ça c'est
01:23:33 le deuxième frein. Et enfin le troisième frein qui peut être quand même aujourd'hui
01:23:38 rappelé, c'est que dans ces institutions, banques, sociétés de gestion, c'est qui ?
01:23:43 C'est des hommes, c'est des femmes, c'est nous tous. Et ce dont on a encore cruellement
01:23:47 besoin, c'est de la sensibilisation, de la pédagogie et de la formation sur toutes ces
01:23:51 notions qui sont un peu un monde dans un monde. Parce qu'il faut le dire, la finance durable,
01:23:56 dans la finance de marché classique, c'est un peu un univers à part. Donc il faut arriver
01:24:01 à réconcilier justement ces deux mondes et ça va passer par la formation.
01:24:06 Jean Boissineau, Olivia vient de le dire, la durabilité, qu'est-ce que ça veut dire ? Est-ce
01:24:10 que pour vous ça veut dire avoir une vision long-termiste dans un univers, on le sait,
01:24:15 très court-termiste ?
01:24:16 Alors je pense que pour rebondir sur ce que vient de dire Olivia, il y a effectivement
01:24:21 cette question de formation, d'engagement. Je pense qu'il y a aussi pour une banque le
01:24:27 fait que par nature l'activité bancaire est long-termiste. Enfin quand une banque n'est
01:24:31 pas long-termiste, je pose la question comme superviseur de sa stratégie. Et donc dans
01:24:41 ce contexte-là, c'est plutôt dans ce que manque dans cette vision de long terme pour
01:24:46 vraiment attraper les enjeux. Pour revenir aussi sur ce que disait Olivia, la question
01:24:51 de la rentabilité, il y a une loi des reins qui est qu'une banque finance quand c'est
01:24:56 rentable et ne finance pas quand ce n'est pas rentable. Et ça pour le coup c'est quelque
01:24:59 chose qui se passe à l'extérieur du secteur financier, ce que fait le secteur financier
01:25:04 est très complémentaire des politiques environnementales, climatiques, etc. Les deux doivent marcher
01:25:08 ensemble mais le secteur financier ne peut pas se substituer à ça. Ça c'est quelque
01:25:13 chose pour lequel on travaille avec ce qu'on a dans l'univers dans lequel on a. Mais sur
01:25:18 cette base-là, c'est une question d'intégrer ces enjeux de long terme dans les processus,
01:25:25 dans l'ensemble des pratiques de la banque et puis c'est une capacité, comme je le
01:25:30 disais tout à l'heure, à se dire que le long terme ce n'est pas la répétition des 15
01:25:34 dernières années, c'est quelque chose qui change, c'est une transition. Et donc prendre
01:25:37 en compte cette transition dans la vision du long terme, en ce moment c'est en train
01:25:41 de se traduire par quelque chose qui à mon avis va prendre beaucoup d'importance dans
01:25:45 les années qui viennent, qui est la question d'un plan de transition, c'est-à-dire demander
01:25:48 aux institutions financières, demander aussi d'ailleurs aux firmes non financières de
01:25:52 formaliser leur stratégie de transition, de nous expliquer à nous comme clients, à
01:25:58 moi comme superviseur etc. quelle est la stratégie, où sont les produits, comment on forme les
01:26:02 gens, comment on engage avec les clients etc. pour que ça ne soit pas juste, on va y arriver
01:26:07 mais voilà quels sont les moyens qu'on met pour y arriver.
01:26:10 On le voit que c'est compliqué d'être dans cet état d'esprit-là, dans le contexte
01:26:15 économique, on le verra avec la table blonde sur les PME qui cherchent des financements
01:26:21 pour leur transition alors qu'elles sont dans une situation financière compliquée,
01:26:26 voire un peu endettée suite au Covid pour certaines, donc c'est vrai que d'aller, vous
01:26:31 parliez de rentabilité pour les entreprises, mais certaines sont dans des difficultés
01:26:35 et pourtant elles veulent aller vers la transition, donc on voit qu'on peut être quand même
01:26:39 dans des difficultés à ce niveau-là.
01:26:41 Qu'est-ce que vous pouvez apporter comme réponse ?
01:26:44 Je reviens sur ce que je disais tout à l'heure, c'est le rôle vraiment très important des
01:26:48 politiques par ailleurs, c'est-à-dire que si on veut que certaines entreprises s'engagent
01:26:53 dans la transition, on ne pourra pas le faire sans garantir que les activités dans lesquelles
01:26:57 elles s'engagent sont rentables.
01:26:58 Ça veut dire des normes, ça veut dire des subventions parfois, ça veut dire un prix
01:27:02 du carbone, ça veut dire etc.
01:27:03 Et ça quelque part, effectivement si on n'a pas ça, et en plus qu'on part d'une situation
01:27:08 où les entreprises sont très endettées, ça va être très compliqué.
01:27:11 Mais je pense que si on a les politiques, je suis certain que les banquiers trouveront
01:27:16 une manière de financer les investissements nécessaires.
01:27:20 Cédric Malengreau, expliquez-nous comment vous avez repensé vos offres pour vous adapter
01:27:27 au réchauffement climatique, je pense notamment à vos offres à destination des agriculteurs
01:27:31 mais pas que pour les entreprises.
01:27:34 Déjà nos offres sont pour beaucoup encadrées par des politiques sectorielles, qui peuvent
01:27:40 être dans certains cas des politiques d'exclusion et dans d'autres cas des politiques d'accompagnement
01:27:44 et d'engagement.
01:27:45 Et notamment si on cite l'agriculture, l'agriculteur type aujourd'hui qui a besoin d'un financement,
01:27:49 c'est un jeune qui a entre 25 et 30 ans, qui va s'endetter à hauteur de plusieurs millions
01:27:54 d'euros pour acheter une installation, la rénover, la mettre aux normes parfois, et
01:28:02 à l'échelle d'une génération.
01:28:04 Donc un jeune qui s'endette fortement et à l'échelle d'une génération, c'est un vrai
01:28:09 défi en soi, et ce jeune il faut l'accompagner.
01:28:12 J'ai donné un exemple d'offre qui a été imaginé pour accompagner ça, qui s'appelle
01:28:17 le PASS Bacarbon, qui est d'ailleurs une initiative qu'on mène avec la région Bretagne,
01:28:22 qui permet justement le financement d'audits énergétiques ou de bilans énergétiques,
01:28:28 parce qu'on pense que la prise de conscience du besoin, qui va nourrir finalement ce besoin
01:28:35 de financement et puis la nature de l'investissement qui va être demandé et mis en place par
01:28:41 l'agriculteur, ça passe par une meilleure connaissance également de ce besoin.
01:28:45 Donc c'est un exemple d'offre assez symbolique je trouve, de ce qu'on apporte aux agriculteurs.
01:28:51 Merci.
01:28:52 Olivia Blanchard, est-ce que vous pouvez nous expliquer comment être plus transparent
01:29:00 et comment mieux communiquer notamment auprès des épargnants ? Il y a un vrai sujet là-dessus.
01:29:04 Effectivement, je pense qu'un des engagements principaux aussi qu'a une banque aujourd'hui,
01:29:09 c'est la manière dont il va communiquer avec ses épargnants, comment il va le sensibiliser
01:29:13 sur ses problématiques. Je vais vous donner un petit chiffre qui est de 4549 milliards
01:29:19 d'euros, c'est ce que représente l'encours aujourd'hui de l'épargne salariale. Donc
01:29:24 on parle quand même de montants qui sont significatifs et aujourd'hui, quand on voit
01:29:29 qu'il y a eu un sondage qui est sorti en septembre dernier, qui fait état que seulement
01:29:34 un épargnant sur dix s'est vu proposer un produit ISR par son conseiller, on voit que
01:29:39 la marge de progression est énorme et que le rôle justement des acteurs financiers
01:29:44 et des banques et des conseillers plus précisément, est fondamental pour instaurer cette culture
01:29:50 justement de comment je flèche mon argent, à quoi est-ce qu'il sert. Et aujourd'hui
01:29:57 vraiment les banques sont les meilleurs acteurs pour ce sujet. Donc c'est faire preuve encore
01:30:03 une fois de pédagogie, d'expliquer. Après, il y a des freins, il faut le dire, expliquer
01:30:08 à un épargnant ce que ça veut dire la taxonomie, les PAI, article 8, article 9, c'est un gros
01:30:13 challenge pour les banquiers mais il faut le relever parce que l'objectif est important.
01:30:20 Jean Boissineau, comment encourager le développement de produits bancaires plus verts ?
01:30:27 Alors, ce dont vient de parler Olivier, ce n'est pas des produits bancaires en fait.
01:30:32 Vous rentrez dans une banque mais vous avez en face de vous un conseiller qui va vous
01:30:36 conseiller pour accéder à des produits d'épargne qui sont en fait investis sur les marchés.
01:30:40 Et là c'est un monde différent et c'est une problématique différente. Dans le cas
01:30:44 des produits bancaires, on a un produit et en face il y a le bilan de la banque. Et ça
01:30:49 je pense qu'il faut être au clair, le bilan d'une banque c'est fangible. Je m'exprime
01:30:54 à titre personnel mais le fléchage au travers d'un bilan d'une banque, c'est discutable.
01:30:59 Ce qui veut dire que le produit bancaire, alors je ne reviens pas sur tout ce qui est
01:31:03 fait au niveau européen sur la partie épargne vraiment, enfin sur la partie épargne investie
01:31:07 sur les marchés, mais pour les intermédiaires financiers du coup le véritable enjeu c'est
01:31:13 probablement moins de développer des produits verts que d'être une banque intégralement
01:31:18 verte et de manière robuste. Et ça je reviens sur ce que je disais tout à l'heure, c'est
01:31:22 une question de pratique, c'est une question de process, c'est une question de cohérence
01:31:25 et c'est une question de voilà quelle est la... Quand vous venez me voir, moi comme
01:31:29 banque, enfin pas moi mais vous par exemple, quand vous venez voir le crédit mutuel Arkea,
01:31:35 c'est quoi le plan de transition du crédit mutuel Arkea ? Est-ce que la banque a démontré
01:31:40 sa capacité à exécuter cette transition ? Est-ce que ça produit des effets ? Je pense
01:31:45 que c'est probablement plus important que de se dire on a un surlivré 3A vert qui finance
01:31:55 ceci et cela, puisqu'à la fin des temps on sait tous que le bilan d'une banque c'est
01:32:00 frangible. Donc plutôt que de transformer l'épargne bancaire, transformons les banques.
01:32:05 Olivier, le disait Cédric, effectivement quand on rentre dans une banque encore faut-il
01:32:11 avoir la bonne information, est-ce que tout ça passera la transition des banques par
01:32:16 la formation justement des agents notamment ? Alors par de la formation et un peu plus
01:32:21 que ça, aussi de l'acculturation. Je pense qu'il y a deux leviers sur lesquels il faut
01:32:25 vraiment appuyer, l'acculturation et la formation. L'acculturation c'est la prise de connaissance
01:32:30 ou la prise de conscience finalement des enjeux. Alors nous, la démarche qu'on a mise en
01:32:35 oeuvre à ce niveau là, ça passe par la fresque du climat, qui a été évoquée précédemment.
01:32:41 Et on a fonctionné par, je dirais, cercles successifs. On a formé nos administrateurs,
01:32:46 on a formé le COMEX déjà, c'est un peu ébouriffé au départ de former le COMEX à
01:32:51 la fresque du climat. Et puis on a réuni les 500 premiers managers du groupe et on leur
01:32:56 a fait suivre la fresque du climat. Et je pense que ça a été un vrai révélateur.
01:33:01 Il y a beaucoup de directeurs qui se sont dit "je vais proposer ça à l'ensemble de
01:33:06 mes collaborateurs". Et de fil en aiguille, on arrive aujourd'hui à peu près à 60%
01:33:11 de nos collaborateurs. Il y a 11 000 collaborateurs dans le groupe Crédit Mutuel Arca. Sur 11
01:33:16 000 collaborateurs, on est à 60% aujourd'hui de collaborateurs qui ont suivi la fresque
01:33:20 du climat et qui ont vraiment changé leur perspective, pour beaucoup d'entre eux en
01:33:27 tout cas, par une meilleure compréhension des enjeux et des enjeux environnementaux.
01:33:32 Ça c'est le premier élément. Puis il y a un deuxième élément qui est un élément
01:33:35 de formation. Et là on a effectivement densifié de manière importante notre catalogue de
01:33:41 formation avec des formations techniques. Expliquer ce que c'est que l'article 9,
01:33:46 expliquer ce que c'est que CFRD, expliquer ce qu'est la Convention de l'Équateur,
01:33:52 essayer de vulgariser pour éviter qu'il y ait un intervenant précédent, qu'en poussant
01:33:58 la porte d'une agence ou d'une caisse de crédit mutuel, on ait un interlocuteur qui
01:34:08 soit, pas forcément un hyper expert, mais au moins qui ait le vernis culturel qui lui
01:34:14 permettent d'assurer son devoir de conseil vis-à-vis de sa clientèle. Et donc ça, ça
01:34:20 passe par un renforcement assez important de tout notre dispositif de formation sur la
01:34:27 biodiversité, sur l'univers normatif autour, particulièrement dense, technique, parfois
01:34:35 ardue, qui fait place à beaucoup d'acronymes, pour justement expliciter tous ces concepts.
01:34:41 Puisque ce sont eux les premiers ambassadeurs des banques. Merci beaucoup à tous les trois,
01:34:46 on peut les applaudir. Merci beaucoup, nous avons maintenant la chance d'accueillir Clara
01:34:58 Guémard, Clara co-fondatrice de RAISE, une société d'investissement qui a été fondée
01:35:03 en 2013, avec justement un souci et une ambition sur l'impact des financements. Alors Clara,
01:35:11 vous avez pu observer la finance changer assez considérablement depuis dix ans, j'ai envie
01:35:18 de vous demander de vous projeter dans l'avenir, à quoi ressemblera la finance de demain,
01:35:24 selon vous. Merci beaucoup, merci beaucoup, bonjour à toutes et à tous, je suis très
01:35:29 heureuse d'être là parmi vous sur un sujet qui est absolument majeur. Moi je suis, comme
01:35:36 l'a dit Patrick de Cambour et tous les autres intervenants, une optimiste de nature, mais
01:35:41 je voudrais quand même juste rappeler certains chiffres, on vient de parler de l'activité
01:35:46 des banques, mais il faut savoir qu'une grande partie du financement des entreprises est fait
01:35:52 par ce qu'on appelle le private equity, c'est à dire des fonds, des fonds d'investissement
01:35:57 qui viennent investir au capital des entreprises ou dans les infrastructures des entreprises
01:36:03 pour les aider dans leur croissance. Et pour vous donner juste quelques chiffres, c'est
01:36:11 un métier qui a accru d'une façon exponentielle depuis trente ans, c'est un outil formidable
01:36:18 pour la croissance, mais également pour le bien commun, le montant des actifs sous gestion,
01:36:24 c'est le jargon pour dire les actifs des entreprises qui sont sous gestion de fonds d'investissement
01:36:30 et de cent milliards de dollars, donc c'est juste totalement massif, et moins de 1% des
01:36:40 investissements réalisés respectent les accords de Paris. Et sur 158 fonds d'investissement
01:36:46 dans le monde, et seuls 158 fonds d'investissement dans le monde sur les 16 500 analysés, soit
01:36:54 à peine 0,5% des actifs placés, sont en ligne avec les objectifs pour limiter la hausse
01:37:00 des températures au-dessous de 2%. Tout ça pour vous dire que la révolution, elle est
01:37:05 majeure et on parle de transition énergétique, en fait il s'agit d'une transformation radicale
01:37:13 de la finance. La bonne nouvelle, c'est ce qu'a dit Patrick de Cambour, c'est que la
01:37:18 CSRD s'implique bien sûr aux entreprises, mais tout d'abord à la finance, et que si
01:37:24 vous voyez aujourd'hui beaucoup de fonds d'investissement parler du fait qu'ils vont vers l'impact
01:37:30 et vers la décarbonation, c'est bien sûr parce qu'il y a heureusement un intérêt
01:37:38 économique, mais c'est aussi parce que la réglementation les y force. Et c'est une
01:37:43 très bonne chose parce que sans la finance, on n'y arrivera pas. Ça a été évoqué
01:37:49 tout à l'heure, les PME françaises, elles veulent faire, enfin françaises ou européennes
01:37:53 ou mondiales, elles veulent faire leur transformation, leur transition énergétique, mais c'est
01:37:58 assez simple, quand vous utilisez du pétrole et du gaz, c'est de l'opex, c'est de la
01:38:02 dépense de fonctionnement, quand vous voulez transformer votre toit en toit solaire, mettre
01:38:08 toutes vos voitures électriques, changer votre système de chauffage, c'est de l'investissement,
01:38:13 c'est du capex. C'est d'ailleurs pour ça que nous, nous sommes en train de créer un
01:38:18 fonds d'infrastructure dédié spécifiquement à la décarbonation et au maintien de la
01:38:24 biodiversité des entreprises, un fonds européen de 750 millions d'euros qu'on est en train
01:38:29 de lever, parce que si on veut atteindre le 1,5%, ça passera par les infrastructures.
01:38:35 La clé, ce sont les infrastructures générales bien sûr, les trains, les routes, mais surtout
01:38:42 les infrastructures des entreprises. Alors nous avec Gonzague, on a eu une intuition
01:38:46 il y a 10 ans, en se disant que la finance était la clé de l'économie, mais que la
01:38:52 finance elle ne s'était pas transformée depuis toujours et que finalement elle n'évaluait
01:38:57 son succès que à ce qu'elle gagnait. On peut trouver ça logique puisque sa mode de
01:39:03 référence c'est l'argent, mais pas du tout par son action sur le bien commun. Et donc
01:39:09 en créant RAISE, on a voulu vraiment faire la finance autrement et il y a 10 ans, je
01:39:14 peux vous assurer que tout le monde nous prenait pour des bisounours, puisque nous sommes une
01:39:19 entreprise à mission, nous avons Jean-Dominique Sénard comme président de notre comité
01:39:24 de mission, on a aussi Delphine Ernotte qui nous accompagne et puis des entrepreneurs
01:39:30 et des experts, mais nous avons axé notre stratégie sur 4 piliers. Le premier pilier,
01:39:42 dont on n'a pas du tout parlé ce matin, mais qui nous semble absolument clé, c'est
01:39:46 la générosité. Nous sommes convaincus que la générosité est un moteur économique
01:39:52 et qu'il faut arrêter le côté où on va d'un côté, on travaille beaucoup la semaine
01:39:57 et puis on donne le dimanche ou d'autres jours à des causes. Et donc nous, nous avons
01:40:02 mis en place un système où 50% du carré d'intérêts qui est l'intéressement des
01:40:08 équipes est donné à une fondation pour l'entrepreneuriat. Nous avons ainsi depuis
01:40:14 10 ans collecté 60 millions et ces 60 millions, cette fondation accompagne à peu près toutes
01:40:21 les belles start-up françaises, soit en leur procurant du financement, des prêts
01:40:29 d'honneur à 100 000 euros, des prêts à 500 000 euros grâce au partenariat avec
01:40:33 le Crédit Agricole et surtout beaucoup, beaucoup d'accompagnement. On accepte avec grand plaisir
01:40:40 et on travaille beaucoup avec Arkea aussi, des cadres de grands groupes qui veulent accompagner
01:40:45 des start-up, des experts. On a aujourd'hui 1000 experts jour qui accompagnent ces start-up
01:40:52 pour les aider dans leur croissance. Donc ce pilier de la générosité, il nous semble
01:40:57 essentiel. Le deuxième pilier c'est le fait que nous sommes à parité totale. Donc Gonzague
01:41:04 et moi on a créé Raise, mais dans la finance c'est assez rare d'avoir la parité. Je pense
01:41:09 qu'on est à peu près la seule société d'investissement qui a la parité totale.
01:41:14 Ça ne nous a pas empêché de démarrer à deux et d'être une centaine aujourd'hui,
01:41:18 d'avoir deux milliards sous gestion. On espère bientôt trois d'ici 2024, même si notre
01:41:24 objectif ce n'est pas la course à la croissance. Et ça nous a amené à une gouvernance en
01:41:29 binôme. Donc Gonzague et moi nous sommes tellement heureux de travailler ensemble que
01:41:34 toutes nos équipes d'investissement sont en binôme. Et ça apporte une chose essentielle,
01:41:39 c'est que le dialogue est indispensable. Personne ne peut dire "je", tout le monde
01:41:44 dit "nous". Et qu'avant toute décision, le dialogue est total. Et donc ça empêche
01:41:50 les incompréhensions, les retours en arrière, puisque il faut être deux pour décider,
01:41:56 finalement comme dans la vie, comme dans un couple, comme avec des amis. On met l'entreprise
01:42:02 au diapason de la vraie vie, si je puis dire. Et ça donne une performance beaucoup plus
01:42:08 efficace, puisque les non-dits sont interdits. Et on est obligés de se confronter.
01:42:15 Le troisième pilier, et c'est celui que vous avez beaucoup évoqué ce matin, c'est que
01:42:19 depuis le début nous mesurons tout ce que nous faisons, pas simplement chez Reiz, mais
01:42:24 dans toutes nos participations. Et sur les 75 participations que nous avons eues, aujourd'hui
01:42:30 on en a 50, puisque certaines on les a cédées pour le grand bonheur de nos actionnaires,
01:42:36 puisqu'on apporte une rentabilité entre 10 à 15% à nos actionnaires. Donc on a une
01:42:41 performance qui est au moins équivalente à celle des autres fonds. Dès le départ,
01:42:45 nous avons mis en place des mesures d'impact. Et la mesure d'impact, elle est assez simple,
01:42:51 elle s'appuie sur les ODD de l'ONU. Et pour chacune des entreprises dans lesquelles
01:42:56 on investit, on va regarder quel est le KPI, ce qui est le meilleur dans les ODD de l'ONU.
01:43:02 Et on va pouvoir mesurer en valeur et en volume la croissance, la montée en puissance de
01:43:10 cette ODD, et aussi l'impact de notre investissement dans l'entreprise pour la croissance de cette
01:43:16 ODD. Je vous donne un exemple pour être un peu plus parlant. On a investi dans une entreprise
01:43:22 qui s'appelle M2i, qui fait des phéromones, et les phéromones, c'est la confusion sexuelle
01:43:29 des insectes. Alors c'est génial, parce que ça permet, quand vous voulez éviter la
01:43:33 pyrale du buis sur vos buis, vous projetez ça, les mâles vont se reproduire ailleurs,
01:43:38 ils vont arrêter d'embêter les buis, ils vont arrêter d'être en surpopulation, mais
01:43:42 vous ne touchez pas les abeilles, vous ne touchez pas tous les autres insectes qui sont
01:43:46 indispensables à la nourriture des abeilles que vous pouvez avoir à côté. Et bien depuis
01:43:53 que nous avons investi dans cette entreprise, cette entreprise a enlevé, si je puis dire,
01:44:00 les pesticides de l'Espagne et de la Pologne réunies, si on mesure en quantité de pesticides
01:44:06 évités. Donc c'est une manière de pouvoir mesurer l'impact que l'entreprise a sur l'environnement,
01:44:15 mais aussi l'impact que votre propre contribution, votre investissement a sur l'environnement.
01:44:22 Et nous y ajoutons des critères sociaux, parce que nous avons la conviction qu'on
01:44:27 arrivera à atteindre peut-être le 1,5%, mais en tout cas l'enjeu climatique, que si on
01:44:37 prend en compte le critère social. Et le troisième pilier, c'est l'innovation. Et
01:44:42 l'innovation, elle prend plusieurs formes. On a créé un lieu qui s'appelle RazeLab,
01:44:47 qui est un lieu d'innovation partagée entre les grands groupes et les start-up, qui permet
01:44:52 de regarder tous les pain points que peuvent avoir les grands groupes. Et je veux juste
01:44:57 donner un exemple avant de conclure. Le rouge à lèvres, qui est quelque chose de très
01:45:04 commun, en fait c'est très très difficile à retraiter. Aujourd'hui vous savez qu'on
01:45:08 ne peut plus jeter les invendus. On a découvert une start-up en Pologne qui utilise le rouge
01:45:16 à lèvres pour faire de la peinture et donc ça rend rentable le recyclage du rouge à
01:45:24 lèvres. Et par ailleurs, on a fédéré un certain nombre d'investisseurs et de sociétés
01:45:32 de gestion, les investisseurs acceptant de donner 50% de leur revenu pour deux fondations
01:45:41 qui sont Imagine et la Fondation d'emprunte. Donc on essaye de faire fructifier cette idée
01:45:48 que la générosité est un moteur économique. Et le but pour moi c'est pas de vous rendre
01:45:55 raises, mais simplement vous dire que chacun d'entre nous on peut être un acteur radical
01:46:02 de la transformation écologique. Il faut juste se dire que c'est pas une transformation
01:46:07 qu'on doit faire, c'est ce que je vous disais au début, c'est pas une évolution qu'on
01:46:11 doit faire. Au fond ceux qui vont gagner, c'est pas ceux qui s'adaptent, c'est ceux
01:46:15 qui changent radicalement. Et c'est évidemment plus facile si on fait comme nous et qu'on
01:46:20 démarre de zéro. Mais si il y a un message que je veux faire passer, c'est vraiment
01:46:25 celui-là, c'est que la finance qui est le moteur de la croissance économique doit être
01:46:31 aujourd'hui au stade où elle doit radicalement se transformer en ayant deux piliers, ce
01:46:38 qu'explique très bien Patrick Ducambourg, le pilier financier mais le pilier extra-financier
01:46:43 qui est à la fois environnemental et social. Je vous remercie.
01:46:47 Merci beaucoup Clara Guaymar. On a évoqué beaucoup les PME, on va justement aller voir
01:46:55 de leur côté. Émilie c'est à toi.
01:46:57 Merci Cécile. Quel rôle jouent les financements dans la transition des PME et des ETI ? Réponse
01:47:06 tout de suite avec Marie Bozzoni, directrice générale de Vedette de Paris, Jérémy Lepetit
01:47:11 fondateur et CEO de Retrib et Emmanuel Millard, président national du réseau national des
01:47:17 dirigeants financiers, des FCG. On peut les accueillir et les applaudir. Installez-vous.
01:47:28 Bonjour à tous les trois. Merci d'être avec nous ce matin. Marie Bozzoni, on va commencer
01:47:36 avec vous. Est-ce que vous pouvez nous raconter les difficultés de financement, pour mettre
01:47:42 les pieds dans le plat tout de suite, de votre projet de transition qui consiste à rendre
01:47:48 une partie, quasiment la totalité de votre flotte, je vais vous raconter ça, la rendre
01:47:54 électrique. Et vous avez rencontré un certain nombre de difficultés. Racontez-nous.
01:48:00 Oui alors merci, bonjour. Vedette de Paris c'est une compagnie de croisières touristiques
01:48:04 sur la Seine, donc on a cinq bateaux, on est une PME, on a une centaine d'employés, 12
01:48:10 millions de chiffres d'affaires. Et donc on a eu cette volonté liée à une prise de
01:48:16 conscience environnementale de transformer, rétrofiter la quasi-totalité de notre flotte,
01:48:23 c'est-à-dire quatre bateaux sur cinq. C'est une initiative qu'on a lancée en novembre
01:48:28 2021 ou octobre 2021, donc il y a un petit moment maintenant, et le premier bateau devrait
01:48:32 sortir d'ici juillet, donc vous voyez déjà ça prend du temps d'un point de vue technique
01:48:36 et technologique. Et novembre 2021, si on s'y remet, le tourisme à Paris venait de
01:48:42 subir deux années de crise Covid, donc on n'était quand même pas merveilleux, merveilleux,
01:48:47 avec un chiffre d'affaires qui avait été divisé par six, enfin bref, voilà. Et donc
01:48:51 effectivement quand je suis allée voir mes partenaires bancaires, grands partenaires,
01:48:56 j'aurais dit voilà le projet, voilà combien ça va nous coûter, et la première réaction
01:49:01 c'était "ouh, ma bonne dame, vous voulez pas vous désendetter un peu avant de lancer
01:49:05 tout ça ?" Bon, donc ça c'était en novembre 2021. Voilà, parce que effectivement, Covid
01:49:09 était passé par là et en tant qu'entreprise touristique, vous n'avez pas pu logiquement
01:49:15 exercer votre métier en plein Covid, en plein confinement. Donc on avait suspendu nos dettes,
01:49:19 on avait pris les PGE, les PGE saison, et effectivement on avait un niveau d'endettement
01:49:23 assez élevé, je le reconnais, mais ça ne m'a pas arrêtée, donc on a poursuivi,
01:49:29 il y a un peu moins d'un an je repars à la charge, donc là avec un petit peu une meilleure
01:49:34 oreille, puisque le tourisme reprenait en France et à Paris, donc oui oui oui, on va
01:49:40 regarder ça, on commence à me proposer une solution qui est le PPR, qui était parfaite
01:49:45 puisque donc je pouvais rembourser mes PGE et après rembourser la dette liée à cet
01:49:50 investissement. Au final, donc très bien, ils m'avaient assuré que j'aurais cette
01:49:56 dette là, en novembre par le premier bateau au chantier, je commence à le désausser,
01:50:03 on enlève le moteur thermique, donc il était à sec sans moteur, et là mi-décembre on
01:50:08 m'appelle, on m'a dit finalement on ne va pas pouvoir te faire un PPR. Je dis pas, pas
01:50:13 de problème, vous allez me trouver une solution, et là ils ont dit bah en fait non. Donc globalement
01:50:20 là je dois reconnaître que la BPI a été vraiment très très moteur, sans mauvais
01:50:26 jeu de mots, pour trouver des solutions, mais pour tout vous dire, aujourd'hui, donc je
01:50:31 ne sais même plus quelle date on est, mais je n'ai toujours pas signé mes contrats
01:50:34 de financement avec mes partenaires bancaires, ils sont en cours depuis deux mois, ils sont
01:50:39 en cours de rédaction, voilà. Donc fort heureusement nous avions de la trésorerie
01:50:44 pour assurer ce premier bateau, mais je suis censée en envoyer deux autres au chantier
01:50:49 à l'automne, donc je ne sais pas si je vais pouvoir le faire.
01:50:53 Emmanuel Millard, le cadre de Vedette de Paris n'est pas isolé malheureusement.
01:50:58 Alors non, aujourd'hui je pense qu'on est sur une tendance quand même, je dirais, assez
01:51:05 compliquée pour les entreprises pour trouver des financements, plus qu'il y a quelques
01:51:10 semaines, même quelques mois naturellement. On a plusieurs effets qui se conjuguent, on
01:51:15 a déjà une augmentation des taux, et ça c'est effectivement un facteur important.
01:51:19 On a aussi, je dirais, pour les entreprises, vous l'avez dit, des PGE qui avaient été
01:51:26 assez largement versés aux entreprises et qui n'ont pas été utilisées pendant un
01:51:31 certain temps, et aujourd'hui les entreprises, TPE, PME, même les grandes entreprises,
01:51:35 tirent sur ces PGE. Donc on est sur une situation en matière de trésorerie qui est assez tendue
01:51:39 aujourd'hui, il faut quand même le préciser. Et puis on a quand même des banques, ça
01:51:44 a été dit tout à l'heure, des banques qui malheureusement ne jouent pas le jeu. Je
01:51:47 suis désolé de le dire, les banques ne jouent pas le jeu. C'est-à-dire qu'aujourd'hui
01:51:50 il faut qu'elles prennent des risques. Quand on voit, je vais pas faire mon, je dirais,
01:51:56 en tout cas, il faut qu'elles puissent, je dirais, revoir ou alléger un petit peu leurs
01:52:03 critères d'appréciation du risque et qu'elles puissent aussi soutenir l'économie. Les
01:52:07 banques sont là pour ça, je rappelle juste qu'elles sont là pour ça, qu'elles sont
01:52:11 aujourd'hui soutenues par les états, par notre état, par l'Union européenne. Et qu'il
01:52:16 y a effectivement aujourd'hui une crise de liquidité qui me semble-t-il n'est pas complètement
01:52:20 fondée. Il faut être clair aussi là-dessus. Donc oui c'est compliqué pour les entreprises,
01:52:24 oui ça le sera de plus en plus dans une période relativement courte parce qu'on va nous demander
01:52:28 de mettre en place plein de choses. On a parlé de CSRD tout à l'heure, mais tout ça c'est
01:52:32 un coup. Ça se fait pas, ça tombe pas du ciel, c'est un coup. Il va falloir mettre
01:52:36 en place, mettre en oeuvre, former des équipes, adapter, ajuster les logiciels de suivi, mettre
01:52:43 en place des bases de données, etc. Et former des équipes naturellement. Et tout ça naturellement
01:52:48 en un coup. Je rappelle quand même que la CSRD c'est quelque chose qui est important,
01:52:52 qu'il faut mettre en place. Ça va concerner 50 000 entreprises. 50 000 entreprises à
01:52:56 partir de 2025. Et même les petites, tout à l'heure j'entendais dire que les petites
01:53:00 étaient pas concernées, c'est pas vrai. Il y a une incitation pour les petites entreprises
01:53:04 à mettre en oeuvre la CSRD. Donc tout ça fait qu'aujourd'hui les entreprises ont besoin
01:53:08 de trésorerie, elles ont besoin de liquidité. Et effectivement, moi je vous conseille peut-être
01:53:12 aussi de continuer de mettre la pression sur votre banquier. Je pense qu'il n'y a pas d'autre
01:53:16 solution en réalité. À un moment donné, il faudra aussi que, peut-être avec un taux
01:53:20 plus important, avec des garanties différentes, avec une progressivité dans le financement,
01:53:24 j'en sais rien. Mais je pense que ce qui est important vraiment, c'est aussi que les banques
01:53:28 qui sont des partenaires indispensables de l'économie prennent vraiment conscience
01:53:31 qu'elles ont un rôle important. Ou la solution peut aussi se trouver hors des circuits traditionnels
01:53:37 de financement. C'est votre cas, Jérémy Le Petit. Vous pour Retrib, vous n'êtes pas
01:53:42 allé chercher l'argent dans les circuits traditionnels entre guillemets. Racontez-nous.
01:53:48 Oui, c'est le moins qu'on puisse dire. Donc déjà Retrib c'est le maillon paiement d'une
01:53:53 chaîne de consommation qui elle-même se veut de plus en plus responsable. Et comme le paiement
01:53:57 est à la racine de notre relation individuelle à la finance, c'est peut-être le meilleur
01:54:01 moyen de remonter la chaîne de valeur de main. Donc on partait avec un avantage certain,
01:54:05 puisque Retrib se trouve être au sommet de l'innovation technologique et au sommet de
01:54:09 l'innovation sociétale, ce qui normalement aurait dû faciliter finalement nos financements.
01:54:14 Et l'histoire commençait bien, puisque si je reviens à la Genèse, en 2019, on l'a
01:54:19 100 000 euros en précide, ce qui nous permet de poser l'infrastructure, rejoindre des
01:54:25 récubateurs comme Station F et finalement commencer le développement et la recherche
01:54:30 sur notre premier proto. Et en fait, alors qu'on commence un tour d'Equity pour aller
01:54:34 lever 600K sur des marchés de manière très conventionnelle, c'est le début du Covid.
01:54:39 Et donc, comme beaucoup d'entreprises, on va rentrer dans une sorte de phase d'hibernation
01:54:42 qui va durer un an. Et comme je ne suis pas un romantique de l'entrepreneuriat, il faut
01:54:46 bien que les choses aboutissent. On a bien failli arrêter le projet fin 2019. Et en
01:54:53 fait, ce qui va se passer, c'est que, au tout début du janvier 2021, le Covid a aussi
01:55:04 été le moteur pour générer une masse monétaire absolument considérable. On parle de 8000
01:55:08 milliards d'euros, le pass sur la quantité faramineuse de dollars qui a été créée
01:55:12 pendant cette période. Et en fait, cet argent va se déverser sur les stakes exchange, sur
01:55:16 les indices boursiers, va se déverser dans les marchés immobiliers, va finir par se
01:55:19 déverser dans les marchés cryptos. Et en fait, j'observais tout début 2021 des projets
01:55:25 qui n'avaient ni fondamentaux, le début d'un powerpoint, levé quelques centaines
01:55:28 de milliers d'euros en quelques jours, voire en quelques heures dans certains cas. Et donc,
01:55:32 je vais saisir la balle au bond et je vais, à mon projet qui avait déjà une dimension
01:55:36 Web3Forth, je vais créer et émettre un token utilitaire qui va avoir une quantité limitée,
01:55:43 mais une valeur variable. Un token utilitaire ? Parce que peut-être que tout le monde n'est
01:55:47 pas familiarisé avec le token utilitaire, on est dans la crypto monnaie. Donc vous créez
01:55:52 votre propre monnaie ? On crée notre propre monnaie, un peu à la manière d'une banque
01:55:55 centrale. On va être en capacité de l'émettre et de le vendre. Et on va lever 1,8 million
01:55:59 de dollars en 10 jours sur les marchés cryptos, qu'on va venir compléter d'un financement
01:56:05 puisque notre token va être valorisé au top du marché, ce qui est complètement virtuel,
01:56:09 mais 296 millions de dollars pendant à peu près 3 mois. Et donc, on va compléter ce
01:56:13 financement d'à peu près 600K sur la période, puisqu'on a managé notre token. Et donc,
01:56:19 on va financer le projet, on va remonter des équipes, prendre les bureaux, lancer la R&D,
01:56:24 développer les protos. Et c'est comme ça qu'on va réussir à se financer. Mais peut-être
01:56:30 avec une conscience un peu différente de la plupart de mes petits camarades dans cette
01:56:33 industrie, c'est que cet argent, on a parfaitement conscience que c'est de l'argent magique
01:56:38 qui a été créé avec Snilo et qu'aujourd'hui ce sont les peuples qui les remboursent,
01:56:42 soit sous forme d'inflation, soit sous forme de perte de services publics, soit sous forme
01:56:46 de nouvelles taxes qui pourraient émerger. Et donc, on considère chez Retrib que la
01:56:51 moindre des choses, c'est que ces projets, en tout cas, sont une utilité au service
01:56:55 de la société et de l'économie. Et donc, c'est ce qu'on fait, c'est ce qu'on porte
01:56:59 avec Retrib.
01:57:00 Marie Bozzoni, ça vous donne envie de créer, vous aussi, votre token pour peut-être sortir
01:57:07 de vos problématiques actuelles ?
01:57:09 Moi, je trouve ça génial, mais je pense que tout comme il faut former nos interlocuteurs
01:57:14 bancaires au dérèglement climatique, il faut également former les DG et les directeurs
01:57:18 financiers à la crypto-monnaie parce que on ne va rien comprendre.
01:57:22 Vous disiez, Marie, en préparant cette table ronde, que la difficulté n'était pas tant
01:57:27 de connaître les financements pour vos projets de transition, et encore, c'est un sujet
01:57:33 en soi parce qu'il y en a beaucoup et que j'imagine que vous ne les connaissez pas
01:57:38 toutes, tous. Mais que le problème résidait plutôt dans le fait d'avoir de la trésorerie
01:57:44 justement pour pouvoir, derrière, anticiper ces dépenses puisque vous allez toucher les
01:57:51 aides qu'après avoir réalisé vos travaux, donc après avoir engagé de l'argent.
01:57:56 Oui, tout à fait, effectivement. Ce programme de rétrofit de bateaux pour passer en 100%
01:58:04 électrique, il fait l'objet de nombreuses subventions, qu'elles soient publiques ou
01:58:08 privées, que ce soit par l'ADEME ou par la vente de certificats d'économie d'énergie.
01:58:12 Ça représente grosso modo 35% de l'investissement, donc c'est quand même pas neutre. La difficulté,
01:58:18 c'est que les aides publiques, on les touche peut-être un petit peu pendant les travaux,
01:58:24 mais surtout 6 mois après la fin des travaux, et les certificats d'économie d'énergie
01:58:28 tels qu'ils sont faits pour le transport fluvial de passagers, on les touchera au mieux 18
01:58:34 mois après la fin des travaux. Donc il y a une vraie question de financement de ces
01:58:38 subventions, et là mes partenaires bancaires m'ont dit "on finance pas ça, il y a trop
01:58:44 de risques". Donc moi j'ai dit "il y a trop de risques sur l'Etat", on m'a dit "oui,
01:58:48 il y a trop de risques sur l'Etat". Donc effectivement, le nerf de la guerre, on revient à la trésorerie,
01:58:53 et fortheureusement on avait une trésorerie sympathique, mais au bout d'un moment, c'est compliqué.
01:58:58 C'est compliqué, Emmanuel Millard, c'est compliqué, vous l'avez dit, surtout en ce
01:59:03 moment, et c'est pas amené à être moins pire, j'allais dire, c'est amené à s'aggraver,
01:59:11 au contraire, justement dans ce contexte-là, comment les PME peuvent-elles continuer à
01:59:16 investir dans la transition écologique quand elles ont en face d'elles des murs en fait ?
01:59:22 Alors, je voudrais faire quand même une précision, il y a aussi, vous avez tous vu que la note
01:59:27 de la France a été dégradée, on est pour, on est contre, bref, peu importe, en tout
01:59:31 cas, on attend aussi avec impatience les notes de Moody's et de S&P, on verra. Moi je pense,
01:59:37 je fais partie de ceux qui pensent que ça peut avoir un impact sur le moral des entreprises,
01:59:41 sur le financement des entreprises, parce que naturellement c'est un signal important
01:59:46 qui va être donné aux banques sur la relative fragilité, je dis relative fragilité finalement,
01:59:51 de nos entreprises, donc là aussi c'est un facteur potentiel d'augmentation du coût
01:59:57 du crédit et d'augmentation également de la difficulté à pouvoir avoir accès au crédit.
02:00:01 Il existe plein d'autres solutions aujourd'hui sur le marché auprès de la BPI qui fait
02:00:06 plein de choses, qui veut mettre vraiment beaucoup d'argent sur le marché, c'est ce
02:00:10 qu'a annoncé Nicolas Dufour en début de semaine, donc je pense que la BPI aussi,
02:00:15 il faut quand même saluer cet effort qui a été fait depuis pas mal d'années maintenant
02:00:19 pour les entreprises, pour toutes les entreprises, et en réalité je voulais aussi insister
02:00:27 sur le plan Industrie verte 2030 qui a été annoncé la semaine dernière par Emmanuel
02:00:33 Macron, alors il y a beaucoup de choses positives, la DFCG on a analysé au crible finalement
02:00:39 ses propositions, sur le papier on n'a pas grand chose à redire, simplement ce qui
02:00:44 est important c'est de s'assurer, parce que là ils vont mettre plein de pognon,
02:00:47 excusez moi, sur la table, c'est vraiment de s'assurer que cet argent infuse et diffuse
02:00:52 auprès des entreprises, on parle de garantie, on parle de subvention, c'est très bien,
02:00:57 je pense qu'il faut continuer d'aider les entreprises pendant cette période, mais notre
02:01:02 rôle nous à la DFCG va être naturellement de faire attention à ce que ces subventions,
02:01:06 ces garanties, garanties pour des financements, pour des subventions, etc. puissent être
02:01:11 effectivement réellement effectives, donc il va y avoir de l'argent, il ne faut pas
02:01:15 que ça tarde, il faut que ça arrive maintenant, il va y avoir de l'argent pendant cette période
02:01:18 qui est un petit peu compliquée, je comprends complètement les entreprises, je disais aussi
02:01:22 dans un papier récent qu'aujourd'hui on a quand même retrouvé, recouvré le niveau
02:01:27 des faillites d'avant Covid, qui n'était pas un niveau très bon, très positif, donc
02:01:32 je ne suis pas là pour casser l'ambiance, je dis simplement qu'il y a quand même des
02:01:35 signaux qui sont structurels et qui ne sont pas forcément très positifs, qu'il y a
02:01:41 beaucoup de choses qui sont mises en place, notamment par le gouvernement, sur des aides,
02:01:46 etc. Donc il faut que tout ça puisse se desserrer rapidement, parce qu'on a une économie
02:01:52 qui est solide mais qui reste quand même fragile, il suffit de quelques signaux qui
02:01:59 puissent encore fragiliser l'ensemble de cet écosystème. Il va y avoir des financements,
02:02:04 il en existe déjà, il ne va y en avoir, et je pense qu'effectivement c'est de la responsabilité
02:02:10 à la fois des banques, c'est de la responsabilité des pouvoirs publics, c'est de la responsabilité
02:02:14 aussi des organisations professionnelles de faire en sorte que les entreprises puissent
02:02:18 avoir accès à ces crédits. Pour moi c'est vraiment essentiel. Mais attention effectivement
02:02:22 à une recrudescence possible quand même de ce fameux taux de faillite qui n'est pas
02:02:28 très bon, c'est un signal qui n'est pas très positif.
02:02:31 Jérémy, pour vous l'avenir des PME passera aussi par cette alternative des crypto-monnaies,
02:02:38 ce système décentralisé de la blockchain et de tout ce jargon à condition qu'on le
02:02:43 comprenne, c'est un peu ça aussi l'enjeu. On en est qu'aux prémices mais c'est aussi
02:02:47 une solution très crédible, vous en êtes la preuve vivante.
02:02:50 Oui exactement. Je pense que la blockchain et le web3 a démontré sa capacité à flécher
02:02:55 les financements. Maintenant il ne faut pas confondre blockchain et crypto, la blockchain
02:03:00 est une technologie sous-jacente qui va être la technologie d'infrastructure de très
02:03:03 nombreuses industries et a fortiori de l'industrie financière dans les prochaines années.
02:03:07 La crypto-monnaie c'est un levier d'échange à l'intérieur de cette infrastructure et
02:03:12 toutes les entreprises n'ont pas vocation à créer une crypto-monnaie, quand bien même
02:03:15 elles auraient potentiellement demain toute vocation à utiliser la blockchain.
02:03:19 Donc vraiment il faut comprendre que c'est un levier qui nécessite quand même un très
02:03:23 haut niveau de technicité et de compréhension à la fois du marché de manière macro-économique
02:03:29 parce que c'est une industrie et un secteur d'activité, un marché qui est très dépendant
02:03:33 de la macro-économie et de son influence et également de la compréhension de ce qu'est
02:03:38 le marché crypto. Donc il ne faut pas donner de faux espoirs par rapport à ça.
02:03:43 Et je conclurai là-dessus pour rejoindre ce qui vient d'être dit, c'est que du cash
02:03:47 il y en a énormément, quand on crée 8000 milliards d'euros il n'a pas été intégralement
02:03:51 injecté dans l'économie cet argent là, il est gelé d'une certaine manière dans
02:03:54 le permafrost financier et j'assiste moi depuis 3-4 ans, qui connaît très bien, ça
02:03:58 fait 15 ans que j'entreprends, je connais très bien l'écosystème start-up français,
02:04:03 j'assiste quasiment depuis 3-4 ans à presque plus de création de fonds d'investissement
02:04:08 que de start-up et donc ça c'est un signal qui est quand même intéressant je trouve.
02:04:13 Merci beaucoup à tous les trois pour vos témoignages, justement on va parler des fonds d'investissement
02:04:19 maintenant, mieux que ceci. Merci.
02:04:21 Merci.
02:04:27 Merci beaucoup, en effet table ronde sur les fonds d'investissement, je vais demander
02:04:31 à mes intervenants de bien vouloir me rejoindre, se lever. C'est là qu'on se rend compte
02:04:38 qu'il en manque un sauf s'il sort du dernier rang, oui c'est ça, discrètement. Allez
02:04:43 Hervé, asseyez-vous. Clara Kemmer a rappelé tout à l'heure qu'il n'y a pas que les
02:04:50 banques qui financent les entreprises, donc c'est très important de se pencher sur les
02:04:55 fonds d'investissement. Alors il y a le capital investissement, les grands fonds, un peu pour
02:05:01 la blague, on a évoqué les INZIN, les investisseurs institutionnels, et là sur cette table ronde
02:05:09 on va prendre le temps de parler des investisseurs en général, on verra il y en a de très
02:05:13 différents. Alors à mes côtés, on va commencer par les filles. Fanny Vicar, bonjour Fanny,
02:05:19 vous êtes fondatrice d'Alter Equity, en effet un fonds un peu différent, comme dit Alter
02:05:25 vous nous expliquerez tout à l'heure. A vos côtés Guillaume-Olivier Doré, vous êtes
02:05:29 président, tu es président et cofondateur d'Impact Source, tu nous expliqueras aussi
02:05:34 ce que vous faites. Et Hervé Guèze, bonjour, directeur des gestions action, taux et solidaires
02:05:41 chez Mirova. Alors merci à tous les trois, et pour commencer, toujours c'est mon côté
02:05:47 pédagogique, j'avais envie de vous demander, et c'est une question beaucoup plus de fond
02:05:53 que ça n'en a l'air, ce qu'est un investisseur responsable, et de me répondre avec vos tripes
02:05:59 parce qu'on verra que la réponse n'est pas forcément la même. Alors on va commencer
02:06:03 à un bout peut-être, Fanny, pour vous, c'est quoi un investisseur responsable ?
02:06:09 Bonjour Cécile Desjardins, merci de votre investition. Pour moi un investisseur responsable
02:06:14 c'est un investisseur qui dans toutes ses décisions d'investissement, de gestion, intègre
02:06:20 les enjeux sociaux et environnementaux contemporains. Concrètement, chez Alter Equity, nous avons
02:06:26 parlé d'investissement à impact positif, qu'est-ce que ça voulait dire ? Nous avons
02:06:30 été les premiers à parler, en France et en Europe, de finance à impact, ça va un
02:06:35 petit peu plus loin que la responsabilité, qu'est-ce que ça voulait dire ? Ça voulait
02:06:39 dire que les effets d'une entreprise, d'un point de vue social, vis-à-vis de ses salariés,
02:06:44 ou vis-à-vis de ses consommateurs, vis-à-vis de ses fournisseurs, ou environnementaux,
02:06:48 évidemment de la nature, mais aussi ses effets sociaux et environnementaux sur ses territoires
02:06:53 d'implantation, sur l'Etat, vis-à-vis de ses souscripteurs, voire de l'entreprise
02:06:59 elle-même, eh bien cette entreprise, l'idée d'un impact positif c'est qu'elle produit
02:07:04 plus d'effets positifs que d'effets négatifs, d'externalités négatives. Quand on parle
02:07:09 d'un médicament, on parle d'effets secondaires du médicament, je n'ai pas besoin de vous
02:07:12 expliquer, vous comprenez immédiatement. Donc concrètement, nous investissons au capital
02:07:16 d'entreprises qui, par leur activité, sont utiles aux personnes ou à la nature, dont
02:07:21 les externalités négatives sont le plus limitées possible, et nous leur demandons
02:07:25 en outre de progresser dans leur pratique de gestion vers plus de responsabilité sociale
02:07:30 et environnementale, donc on s'intéresse au double niveau de responsabilité de l'activité
02:07:35 ou de l'impact et des pratiques de gestion, et nous leur demandons aussi de nous permettre
02:07:40 de générer un rendement financier qui va nous permettre à notre tour de rémunérer
02:07:46 le risque pris par nos souscripteurs, d'une part, et de contribuer à notre mesure de
02:07:51 démontrer qu'il est parfaitement possible d'être à la fois rentable et responsable,
02:07:56 ce qui, à l'époque où nous avons créé Alter Equity, nous avons commencé de travailler
02:08:01 en 2007, n'était pas du tout considéré comme conciliable, et qui aujourd'hui encore,
02:08:06 et on va y revenir, l'est parfois peut-être dans des discours et puis un petit peu moins
02:08:13 dans un certain nombre de réalités.
02:08:16 Hervé, est-ce qu'il y a des investisseurs responsables et des investisseurs qui ne sont
02:08:21 pas responsables, voire irresponsables ?
02:08:24 Oui, je ne vais pas redire ce que vient de dire Fanny et qui pourrait exactement s'appliquer
02:08:29 à ce que fait Mirova, mais ce qui me semble important quand on se pose la question de
02:08:34 qu'est-ce que c'est un investisseur responsable, c'est d'éviter deux pièges, le piège de
02:08:38 la binarité, c'est-à-dire on est responsable ou on ne l'est pas, on est responsable ou
02:08:41 on est irresponsable, et le piège de l'uniformité, tous les investisseurs ne se ressemblent pas,
02:08:46 on peut parler de ce que fait Mirova, on peut parler de ce que fait un fonds de pension,
02:08:50 on peut parler de ce que fait une compagnie d'assurance, on peut parler de ce que fait
02:08:54 une grande banque, c'est évidemment des situations de départ, des histoires très différentes,
02:08:57 et donc définir ce qu'est un investisseur responsable, si on ne prend pas en compte
02:09:01 cette hérogénéité de l'histoire et des pratiques et des tailles, on passe à côté
02:09:06 me semble-t-il de l'essentiel. Et donc pour moi un investisseur responsable, ça doit
02:09:11 être deux choses, il y a deux éléments clés que tous les acteurs, quelle que soit
02:09:15 leur taille, quelle que soit leur histoire, doivent être en mesure de communiquer auprès
02:09:20 de leur parti prenant pour utiliser un peu de neuve langue. Les deux éléments clés,
02:09:26 c'est un peu ce que font toutes les entreprises dans l'industrie, c'est un élément de
02:09:31 politique de responsabilité adapté à l'entreprise, à son secteur. Donc un investisseur doit
02:09:35 vous dire, voilà, moi, ça a été dit, par exemple, Jean Boissineau sur les banques,
02:09:40 compte tenu de mon histoire, de là où je pars, voilà ma trajectoire, voilà mon ambition
02:09:44 globale en tant qu'investisseur. Et me semble-t-il, et là où peut-être j'avais un point de
02:09:49 désaccord avec Jean Boissineau qui parlait de l'EHPAD tout à l'heure, c'est que la
02:09:53 trajectoire globale, c'est un gros rapport, c'est évalué par des agences de notation,
02:09:57 ce n'est pas suffisant. Quand une entreprise automobile, elle vous parle de sa politique
02:10:01 RSE, vous en tant que particulier qui vous intéressez à acheter une voiture, vous avez
02:10:07 besoin d'une évaluation de la voiture, A, B, C, D, E. Et donc, pour un investisseur,
02:10:14 ça, ça doit se traduire par aussi une réflexion sur ses labels produits et la variété des
02:10:19 produits qu'elle peut proposer avec une graduation des niveaux d'impact de ces différents
02:10:24 produits. Donc une politique globale et une approche produit intégrée dans une évaluation
02:10:30 à niveau, on est responsable ou on ne l'est pas, on peut faire des produits à impact,
02:10:35 il faut savoir le dire et les mettre en A, et il faut savoir dire aussi qu'on a des
02:10:42 produits, compte tenu de l'histoire, qui ne sont pas du tout à impact positif aujourd'hui
02:10:46 et ça, ça se raccroche avec la trajectoire qu'on peut dire, voilà, je sais qu'aujourd'hui
02:10:49 j'ai des produits, des investissements qui ne sont pas durables, qui sont bruns, etc.
02:10:55 Mais j'ai une politique pour les transformer. Ça ne gêne pas un constructeur automobile,
02:10:59 encore une fois je reprends l'analogie comme Mercedes ou Renault, d'écrire une politique
02:11:03 de transformation en ayant des produits A, B, C, D, des produits avec des bonus écologiques,
02:11:09 des produits avec des malus écologiques. Voilà, donc cet effort de transparence sur
02:11:12 la politique globale et sur l'évaluation de produits sont à mon avis les deux éléments
02:11:16 de ce qui va pouvoir permettre de qualifier le niveau de responsabilité d'un acteur financier.
02:11:21 Guillaume, toi aussi tu regardes les produits, tu leur mets des notes ?
02:11:25 Non, pardon c'est un peu brutal, non non pas du tout, Impact Source est un fonds de fonds
02:11:31 et un fonds d'investissement direct, donc on accompagne des équipes de gestion qui
02:11:35 veulent effectivement se transformer et la vision que nous portons et que je défend
02:11:39 depuis quelque temps c'est ce que j'appelle l'impact transformatif. C'est-à-dire d'aller
02:11:43 d'un point A à un point B. Ce qui nous intéresse nous lorsqu'on appelle ça un investisseur
02:11:48 responsable, je suis assez d'accord avec la définition de la non-binarité de ce qui
02:11:52 est la responsabilité, c'est en fait d'être capable de mesurer l'intentionnalité des
02:11:56 équipes de gestion, ce qu'ils veulent vraiment faire. Je le résume souvent en une phrase
02:12:00 en disant que mon objectif c'est pas de donner des cours de maths au premier de la classe,
02:12:03 ça sert pas à grand chose. Par contre, aller sélectionner des équipes de gestion ou des
02:12:07 projets qui ont une intentionnalité forte, qui veulent accélérer un mouvement qui est
02:12:12 de toute façon inéluctable. On est parti pour 15 ans de transformation forte de notre
02:12:16 économie, on ne pourra pas passer à côté. Par contre, l'idée en tout cas c'est ce
02:12:21 qu'on prône chez Impact Source, c'est d'être capable d'aller plus vite, d'accompagner
02:12:24 plus vite ces volontés-là. Et donc on a très fortement accès à notre analyse sur
02:12:29 cette partie intentionnelle pour faire en sorte d'être un des moteurs qui va permettre
02:12:34 de la transformation très rapide des équipes de gestion pour aller chercher un impact plus
02:12:38 important, avec aussi une notion qui est qu'on ne pourra pas toujours tout faire dans cet
02:12:43 univers-là. L'impact malheureusement négatif est présent dans toute notre économie, il
02:12:49 faudra probablement des générations d'entrepreneurs, on va continuer à prendre l'avion, on va
02:12:53 continuer à produire des arbres, malheureusement il y a une gare pas très loin donc il ne
02:12:56 peut pas rêver. Et donc je suis assez non-binaire sur ce sujet en disant qu'il faut vraiment
02:13:02 qu'on soit réaliste par rapport à ce qu'on fait. Et donc voilà un peu la définition
02:13:07 d'un investisseur responsable, quelqu'un qui est réaliste et à la fois conscient
02:13:09 des enjeux auxquels il fait face.
02:13:11 Je fais juste un point de côté peut-être en miroir de ce que nous disait Carole Simonot
02:13:15 tout à l'heure, comment est-ce que quand tu regardes une trajectoire, tu dis quand
02:13:19 tu regardes s'il y a une volonté de progression et s'il y a une trajectoire, est-ce que tu
02:13:23 es serein dans ta capacité à analyser la réalité de la trajectoire ?
02:13:28 On l'est jamais complètement et si on fait un choix de conviction, du capital d'investissement,
02:13:32 investir dans des entreprises ou investir dans des fonds sur des équipes qui elles-mêmes
02:13:35 investissent dans les entreprises, dans les territoires, parce que je vise plutôt les
02:13:37 entreprises des territoires parce que je pense qu'il y a un vrai besoin, on est jamais
02:13:41 complètement serein donc la confiance n'exclut pas le contrôle, donc on est présent auprès
02:13:44 des équipes pour les accompagner et pour s'assurer que l'argent est investi là où
02:13:47 il doit être investi. Mais en l'occurrence on fait en sorte de cadrer le risque, c'est
02:13:52 ça notre métier, c'est finalement mettre un cadre autour de ça, mettre une feuille
02:13:56 de route assez précise, ce que disait Fanny tout à l'heure sur les entreprises, on part
02:14:00 d'un point A vers un point B et puis une fois qu'on a cadré, qu'on a mis cette feuille
02:14:04 de route, faire preuve de pragmatisme parce qu'on sait tous que d'aller d'un point
02:14:08 A à un point B ça ne sera jamais linéaire, ce sera même plutôt très compliqué, comme
02:14:12 tout projet entrepreneurial et de facto on s'adapte, donc il faut faire de l'adaptation
02:14:17 et de compréhension mais aussi de réalisme et donc être extrêmement je pense par contre
02:14:21 rigoureux sur ce nombre de normes, c'est ce qu'on essaie de faire.
02:14:24 On regarde les trajectoires, on regarde vers l'avenir, j'ai envie de vous demander, est-ce
02:14:28 que vous êtes optimiste sur ces trajectoires, est-ce qu'on peut y croire aujourd'hui, Hervé ?
02:14:35 Il y a deux questions dans la question, c'est quelles sont les trajectoires des investisseurs
02:14:40 institutionnels et est-ce qu'on peut être optimiste, quelles sont les trajectoires des
02:14:45 investisseurs institutionnels, bon on peut toujours regarder vers la moitié vide, la
02:14:48 moitié plein, il est évident que quand on regarde la transformation qui s'opérait
02:14:52 en 10 ans, ça a été dit même plus récemment sur les banques, les niveaux d'ambition,
02:14:58 de politique, d'acculturation à ces sujets a évidemment extrêmement progressé, donc
02:15:04 si l'optimisme c'est de se dire est-ce que ça progresse et est-ce que ça va continuer
02:15:09 à progresser, oui on peut être optimiste.
02:15:12 Après si on veut dire bon mais est-ce que ça progresse suffisamment vite ou pour résoudre
02:15:19 les enjeux, j'ai envie de dire attention, est-ce que ça progresse assez vite, à la
02:15:26 limite peu importe, ça ne progresse jamais assez vite vu la complexité des enjeux, il
02:15:30 y a évidemment beaucoup à faire, beaucoup de champs de travaux entre la recherche, les
02:15:37 politiques produits etc, le travail est immense et donc à la limite ça a chacun de mettre
02:15:43 énormément de moyens pour progresser le plus vite possible, je n'ai pas de jugement clé
02:15:47 sur si ça va assez vite.
02:15:48 Par contre il y a la question, est-ce que ça va assez vite pour résoudre les enjeux
02:15:53 climatiques, là je dis attention, c'est Miróa quelque part qui vous le dit, la finance
02:15:59 jouera un rôle dans la transformation de l'économie, la finance au global, dans sa
02:16:05 globalité ne sera pas l'élément de transformation seule et unique qui permettra d'atteindre
02:16:13 avoir une planète à 1,5° plutôt qu'à 4°. Est-ce que Miróa deviendra BlackRock,
02:16:19 ce serait très heureux pour nous, ce serait probablement très utile pour la transformation
02:16:24 de l'économie en juin, demain quelle sera la politique de la Chine sur sa politique
02:16:29 charbon, ce n'est pas Miróa même en devenant BlackRock qui fera la politique chinoise des
02:16:34 investissements des centrales. Donc attention dans ces traits qu'on tire, il faut quand
02:16:39 même avoir l'humilité, à la fois l'ambition de se dire oui on peut faire beaucoup plus,
02:16:44 on peut faire beaucoup mieux, on peut aller plus vite et il faut avoir aussi l'humilité
02:16:48 de les résultats qu'on peut atteindre sont toujours une brique, une part d'un ensemble
02:16:53 plus large et donc ne pas céder un peu à la facilité de se dire on n'a qu'à faire
02:17:00 des investissements positifs et demain on vivra sur une planète à 1,5° avec les droits
02:17:05 de l'homme respectés partout etc. La responsabilité du monde financier, encore une fois pas d'incompréhension
02:17:12 dans ce que je dis, est importante, elle est un aiguillon clé, il ne faut pas non plus
02:17:17 attendre tout deux et donc l'optimisme de ce point de vue là, ne nous trompons pas,
02:17:22 ce n'est pas parce que tous les investisseurs institutionnels auront une politique climatique
02:17:25 parfaite que le problème du climat sera résolu demain.
02:17:30 Fanny vous êtes plutôt de l'équipe du verre à moitié vide, non ? Moins optimiste ?
02:17:37 Moi je suis par nature optimiste, c'est pour ça que je suis entrepreneur, que j'ai créé
02:17:42 ce fond Alter Equity depuis 2007 sur un trajet qui était non emprunté à l'époque, mais
02:17:49 ce n'est pas une question d'optimisme ou de pessimisme, c'est que je suis lucide.
02:17:53 En 2022, les émissions de gaz à effet de serre en France ont baissé de 2,5%, on sait
02:18:01 qu'il faut qu'ils baissent de 5% par an jusqu'en 2030 pour atteindre l'objectif d'une baisse
02:18:06 de 55% des émissions à horizon 2030 par comparaison avec 1990, qui est notre engagement
02:18:16 européen, et ce dans un contexte dans lequel l'hiver a été assez peu froid et où donc
02:18:25 l'essentiel de la baisse d'émissions est dû à une moindre consommation d'énergie
02:18:32 pour le chauffage. Donc on est en fort décalage au regard de la trajectoire nécessaire pour
02:18:40 rester dans une épure de conditions de vie sur Terre vivables. A l'échelle de la France,
02:18:46 vous avez probablement vu deux chiffres. Le premier, c'est qu'aujourd'hui on est déjà
02:18:50 à 1,7 degré de réchauffement par rapport à l'ère pré-industrielle. 1,7, c'est au-dessus
02:18:57 des 1,5 de l'objectif des accords de Paris. Par ailleurs, une étude récente d'octobre
02:19:03 dernier du CNRS et de Météo France évalue dans un scénario médian, si les situations
02:19:12 en termes d'émissions ne changent pas radicalement, la température en France à horizon 2100
02:19:17 à 3,8 degrés au-dessus de la température pré-industrielle. Je rappelle qu'Henri de
02:19:22 Castres, lorsqu'il dirigeait AXA, avait dit qu'un monde à +4 degrés n'était pas assurable.
02:19:27 Donc nous sommes en France dans une trajectoire dont un grand dirigeant considérait qu'il
02:19:33 n'était pas assurable. C'est juste pour dire qu'il y a d'autres éléments, des limites
02:19:37 planétaires qui ont été franchies en 2022, etc. De toute façon, vous le voyez bien avec
02:19:40 les incendies, les sécheresses, les dérèglements de température, les inondations. On est dans
02:19:47 une configuration qui est extrêmement préoccupante. Et Hervé le rappelait, les grandes institutions
02:19:55 sont en train de changer. Mais sont-elles en train de changer à la mesure des risques ?
02:20:00 La réponse est non, puisque l'objectif c'était -5% et on est à la moitié. Et qu'elles ont
02:20:07 quand même une influence considérable dans le financement de l'économie, qui est lui-même,
02:20:16 selon le plan du gouvernement qui a été dévoilé hier et qui était dans vos journaux du soir
02:20:23 hier ou du matin ce matin, qui devrait permettre à peu près la moitié des réductions en
02:20:31 termes d'émissions de gaz à effet de serre. Donc, voilà, ce n'est pas une question de
02:20:34 pessimisme optimiste, on est factuellement dans une situation qui est extrêmement préoccupante.
02:20:39 Et face à ça, nous sommes tous appelés dans notre responsabilité à agir pour essayer
02:20:48 de faire en sorte que ce dérèglement soit le moins grave possible, le moins important
02:20:54 possible. Et en tout cas, nous c'est ce que nous faisons avec beaucoup d'optimisme. Et
02:20:59 on est sûr que si vous êtes là, c'est que vous le faites aussi. Et puis les déclarations
02:21:03 du gouvernement sont extrêmement encourageantes. Et puis le rapport de Jean-Pierre Déniféry
02:21:08 d'hier est extrêmement clair aussi. Donc voilà, il y a un certain nombre de raisons
02:21:13 de se réjouir, mais il va falloir, et comme le dit d'ailleurs Jean-Pierre Déniféry,
02:21:18 il va falloir lever les manches et accepter des changements considérables si, encore
02:21:26 une fois, on veut maintenir des conditions de vie convenables sur Terre.
02:21:31 On a entendu tout à l'heure des grands groupes, on a entendu des PME. Guillaume Olivier,
02:21:37 toi tu es pas mal dans les territoires. Alors concrètement, comment c'est appréhendé
02:21:43 sur le terrain ? Tu ne veux pas avoir l'air trop parisienne dans cette dichotomie, mais
02:21:48 est-ce qu'il y a une différence ?
02:21:50 Oui, il y a une notion universaliste autour de la prise en compte des critères d'impact.
02:21:56 De toute façon, que ce soit à Paris, que ce soit dans les régions, dans les territoires,
02:21:59 dans les PME d'entreprise, de toute façon c'est devenu incontournable. Et pour une raison
02:22:03 extrêmement simple, c'est que lorsqu'on discute avec des patrons de PME, encore une fois,
02:22:07 dans les territoires, ils vous disent que la matière première dont ils ont besoin,
02:22:11 eux, c'est les gens. Nous, c'est les humains pour travailler. Donc ça veut dire qu'il
02:22:14 faut que le quotidien de ces gens-là s'améliore, parce que sinon ils ne pourront pas continuer
02:22:17 à les faire venir travailler, ils ne pourront pas payer leur essence pour aller travailler.
02:22:20 Donc on a un vrai sujet de fidélisation, de structuration des territoires autour de
02:22:24 ces PME et de l'autonomisation. Donc moi je suis assez optimiste sur ce sujet-là,
02:22:29 parce que la prise en compte, elle est assez universelle aujourd'hui. Alors ce n'était
02:22:33 pas le cas pré-Covid, mais en tout cas ce qui restera, en tout cas ce que je retiens
02:22:36 de cette phase-là un peu compliquée de la Covid il y a un an et demi, c'est ça,
02:22:39 ce qui restera de cette phase-là, c'est probablement cette prise de conscience assez
02:22:42 violente, que les choses vont changer pour les gens au quotidien. Les collaborateurs
02:22:46 ont une autre chose, on le voit, ils travaillent différemment, ils fonctionnent différemment.
02:22:50 Et j'allais dire, ça imprime un peu en remontée du terrain l'intégralité de l'économie
02:22:57 et dans le monde du capital investissement auquel j'appartiens depuis assez longtemps
02:23:01 maintenant, il y a un vrai changement de paradigme autour de ça. Alors tu as été pionnière
02:23:05 depuis très longtemps sur le sujet, il y en a eu d'autres qui ont effectivement lancé
02:23:08 ce mouvement-là et aujourd'hui il n'y a pas un fonds d'investissement qui ne marque
02:23:12 pas impact sur sa plaquette commerciale, qui ne le fait pas. Et c'est plutôt une
02:23:16 bonne nouvelle. Alors ils le font plus ou moins bien, ils sont plus ou moins bien notés,
02:23:20 on peut parfois les accuser.
02:23:21 Le bilan que faisait Clara, ce n'était pas tout à fait...
02:23:23 Voilà, c'est plus ou moins bien fait. Mais pour 5% de gens qui jouent un peu avec la
02:23:29 ligne blanche, il y en a 95% qui essaient de faire le travail correctement. Donc je
02:23:33 suis plutôt de cet avis-là, qui est de dire, on est dans une phase où on est en train
02:23:37 de vivre un changement systémique autour de ça. On est là pour en parler, il y a des
02:23:41 conférences tout le temps sur le sujet, il faudra du temps pour que ça se mette en place,
02:23:45 il faut aller le plus vite possible. Et effectivement l'industrie financière, Bernard le disait
02:23:50 très justement, ne sera qu'une brique d'accompagnement. Mais moi je vois dans les territoires, pour
02:23:56 répondre précisément à ta question, beaucoup de gens qui sont comme M. Jourdain, ils font
02:23:59 de l'impact sans en avoir conscience réellement. Il y a des patrons de PME qui finalisent,
02:24:04 organisent des choses pour leurs salariés, qui sont impactantes au sens large, mais qui
02:24:08 du coup sont dans cette notion de "j'en fais déjà sans même m'en rendre compte".
02:24:13 Très concrètement, qu'est-ce qu'on peut proposer, qu'est-ce que vous proposez pour
02:24:17 accélérer ? Quels sont les conseils que vous donnez pour que la finance progresse d'un
02:24:22 cran ?
02:24:23 Il y a deux thématiques que j'ai revenues, c'est-à-dire se fixer des objectifs. Qu'est-ce
02:24:32 que ça veut dire qu'une politique de transformation pour aligner ses investissements, ses financements
02:24:36 à l'accord de Paris ? Est-ce que c'est réalisable ? Quelle est la trajectoire ? Quelles sont
02:24:40 les étapes intermédiaires que l'on peut se fixer ? Après ça peut être décliné
02:24:45 sur d'autres sujets que le climat, mais quelle est la stratégie politique ? Et ensuite,
02:24:49 quelle est la location de capital ? Le danger c'est de croire que parce qu'on va afficher
02:24:56 sur la plaquette RSE, on a investi X millions voire milliards dans tel ou tel type d'activité,
02:25:05 ça montre qu'on est très vertueux. Et donc ça on le montre pour faire joli dans le rapport
02:25:10 qui en occulte la stratégie globale. Et inversement, l'autre piège c'est d'écrire des grands
02:25:15 rapports sur les objectifs de transformation, de transition, etc. en se disant "bon de
02:25:20 toute façon la finance finance l'économie, donc l'économie se transformant, on a une
02:25:24 bonne chance que de toute façon si l'économie atteint ses objectifs, la finance les atteindra
02:25:28 aussi, donc attendons patiemment que la transformation du monde économique se fasse pour que la finance
02:25:33 fasse des choses". Il faut bien sûr combiner les deux et c'est ça qui fait encore une
02:25:37 fois la crédibilité d'une politique responsable, c'est une trajectoire globale avec des points
02:25:42 clés et des exemples clés d'allocations, de transformations qui sont à la mesure de
02:25:48 ce qui peut être fait. Encore une fois on ne peut pas tout transformer, mais il y a
02:25:52 des choses qui peuvent être faites et clairement je suis d'accord avec Fanny, il y en a qui
02:25:55 pourraient être faites davantage dans beaucoup d'institutions en termes de financement, ça
02:26:00 peut être le cas bien sûr sur les nouvelles technologies, ça peut être le cas sur les
02:26:05 pays émergents, donc il y a beaucoup d'endroits qui sont les frontières qui ne cochent pas
02:26:09 les cases des allocataires, c'est-à-dire quand vous allez voir un grand investisseur
02:26:14 institutionnel, il a ses politiques d'allocation et donc il fait de l'obligataire de l'action,
02:26:20 de l'obligataire Investment Grade, d'Aïd, donc quand c'est dans ces cases et que c'est
02:26:27 ces zones de confort, il fait. Quand vous proposez quelque chose, c'est un peu de blended
02:26:32 finance, avec un peu de partenariat public-privé sur une zone émergente.
02:26:36 On ne sait plus juger.
02:26:37 Oh là là, mais mon Dieu, je ne sais pas dans quelle case ça va. Et c'est ça où il y a
02:26:41 vraiment beaucoup à faire, c'est-à-dire les sujets sont nouveaux, l'innovation est
02:26:45 importante et donc il faut que les stratégies des investisseurs intègrent cette capacité
02:26:50 à sortir des cases, à inventer de nouvelles cases pour rentrer de l'innovation et de
02:26:55 l'allocation de capital qui est différenciante et qui n'est pas le business as usual qu'elle
02:27:00 faisait et qui va se transformer petit à petit.
02:27:03 Fanny, une piste de progrès ?
02:27:05 Merci beaucoup. La première c'est que je pense qu'il faut aller vite, alors évidemment
02:27:16 ça dépend des types d'institutions, les assurances, j'entendais le patron de Covea
02:27:23 qui indiquait que l'environnement, le climat, les dérèglements avaient causé aux assureurs
02:27:30 français l'année dernière, en 2022, 10 milliards de dommages. Lui il a 15-16% de
02:27:34 part de marché, paf, ça lui avait coûté 1,6 milliards l'année dernière. Donc un
02:27:39 intérêt immédiat qui est de contribuer à éviter ces dommages, à sa mesure bien sûr.
02:27:45 Et puis pour les autres financiers, je pense qu'il y a un intérêt qui est peut-être
02:27:49 un tout petit peu plus indirect quoi que, qui est une question de license to operate
02:27:54 dans un contexte dans lequel, et franchement je le déplore mais je suis obligée de le
02:27:58 constater, il y a une critique de l'univers financier par l'opinion publique qui est de
02:28:03 plus en plus pressante. Et donc avoir quelque chose à dire sur la contribution à l'intérêt
02:28:08 général, ça me semble aujourd'hui absolument nécessaire pour toutes les institutions
02:28:12 financières. Donc je pense qu'il y a un vrai enjeu de rapidité, qui en plus fait
02:28:16 référence à ce que j'évoquais tout à l'heure, c'est-à-dire la gravité de la
02:28:20 situation. Et je crois aussi, et en parallèle, qu'il faut être cohérent, qu'il faut
02:28:24 faire extrêmement attention à ne pas raconter tout et n'importe quoi, et faire quelque
02:28:28 chose de complètement différent. Enfin pardon pour mes propos un petit peu radicaux,
02:28:32 mais je crois qu'aujourd'hui le greenwashing est très dangereux avec des effets boomerang
02:28:36 qui sont catastrophiques. Donc je pense que la question de la communication doit être
02:28:40 maniée avec beaucoup de subtilité pour ne pas prendre des risques trop importants.
02:28:45 Mais enfin voilà, dans la continuité de mon propre engagement, j'espère et je conseille
02:28:50 à tous d'aller vite dans ces directions.
02:28:53 On fout droit du regard, donc en mots de conclusion, une piste ?
02:28:59 Repasser à repartir du terrain. Je sais que j'ai un angle très territoire et très
02:29:04 PME, et c'est ce que visent in fine les investissements directs et indirects d'impact
02:29:08 source. Aujourd'hui il y a beaucoup de demandes d'accompagnement. Lorsqu'on est une grosse
02:29:12 entreprise, une ETI, on a des ressources pour se transformer. Lorsqu'on a un patron de
02:29:16 PME, qu'on a la conscience de ça, forcément on ne mesure pas forcément ce que ça veut
02:29:21 dire de changer ses modèles économiques, etc. Et donc les patrons de PME ont besoin
02:29:25 de beaucoup d'accompagnement pour le faire, beaucoup de guides. Ils savent aller d'un
02:29:28 point à un point B, mais ils sont quand même un peu comme une poule avec une fourchette.
02:29:31 Ils ne savent pas comment exactement gérer cette transition. Ils vont devoir y aller.
02:29:35 Leurs propres enfants vont leur mettre la pression de manière un peu structurelle.
02:29:38 Les enfants aujourd'hui sont très cash sur le sujet. Ils n'iront pas dans une entreprise
02:29:42 si elle apparaît avec un certain nombre de critères travaillés. Donc on est vraiment
02:29:44 de côté binaire là. Donc oui, je pense qu'il y a un vrai travail à mener sur le terrain
02:29:50 et dans les territoires pour accompagner les patrons de PME qui reste un peu le parent
02:29:53 pauvre de l'impact en réalité aujourd'hui. Ce sera probablement la dernière tranche
02:29:56 qui viendra alors qu'il y a vraiment de la volonté.
02:29:59 Merci beaucoup à tous les trois.
02:30:02 Merci beaucoup.
02:30:03 Je pense qu'on va parler d'une piste pour les patrons de PME. La compta, ils savent
02:30:13 ce que c'est. Et ça va changer aussi.
02:30:15 Oui, exactement. On va parler de comptabilité écologique. Vous avez peut-être entendu
02:30:21 parler de ce terme. Est-ce que cette comptabilité a un impact, comptabilité verte ou extra-financière,
02:30:28 et a un réel avenir ? On va en parler tout de suite avec Delphine Gibassier, fondatrice
02:30:34 et présidente de Vert de Gris, et Hervé Guébeau qui est associé chez Hendrix et président
02:30:39 du cercle des comptables environnementaux et sociaux. On peut les accueillir. Merci.
02:30:45 Installez-vous.
02:30:47 Bonjour à tous les deux. Delphine Gibassier, la comptabilité écologique n'est pas du
02:30:55 tout un fantasme pour vous. Expliquez-nous.
02:30:59 Bonjour à tous. Merci d'être là. Non, ce n'est pas du tout un fantasme. C'est une
02:31:05 réalité. Je travaille depuis une quinzaine d'années sur le sujet. Je pense qu'on pouvait
02:31:11 dire que le sujet intéressait de loin. Je disais souvent que j'étais invitée parce
02:31:15 que ça faisait joli de parler de vert. Il y a quatre ou cinq ans, ça a complètement
02:31:20 changé. Ce sujet est devenu central et je pense qu'un certain nombre d'entre vous l'ont
02:31:25 déjà vu dans vos organisations. Pour moi, ce n'est pas une utopie pour plein de raisons.
02:31:29 Quand on attaque le cœur des piliers du système, que ce soit la profession de commissaire au
02:31:37 compte ou d'auditeur, que ce soit des directeurs financiers qui s'en emparent en entreprise,
02:31:42 que ce soit les formations qui changent, on est sur des changements qui sont fondamentaux,
02:31:47 qui sont structurels, qui ne sont donc pas du tout un fantasme et qui sont en fait une
02:31:52 vraie réalité pour vous et surtout des réalités qui sont durables. Pas de jeu de mots, mais
02:32:00 qui sont sur le long terme puisque quand on va changer la formation des personnes qui
02:32:05 aujourd'hui vont intégrer vos entreprises, quand on change les lois puisque la directive
02:32:09 comptable a été changée par la CSRD pour changer la profession d'auditeur en Europe,
02:32:16 on est sur des changements qui sont vraiment fondamentaux.
02:32:19 Hervé, la France en plus est en avance sur les questions de comptabilité écologique.
02:32:24 Oui, si on précise un peu de quoi on parle. Parce qu'effectivement, quand on parle de
02:32:29 comptabilité écologique, il faut rappeler qu'on a un univers autour de l'extra financier.
02:32:34 Donc toutes les comptabilités extra financières, je peux inclure le bilan carbone, les ACV,
02:32:39 un tas d'outils qu'on a déjà à disposition depuis très longtemps qui mesurent les données
02:32:44 RSE. Il y a la structuration autour de la CSRD. Mais effectivement, la France depuis
02:32:51 2001 avait déjà lancé un mouvement avec ce qu'on a appelé la loi NRE, ensuite Grenelle
02:32:58 2 et on a atterri en 2017 avec l'Union Européenne qui a pris le relais et qui nous a proposé
02:33:06 la DPEF et demain, dans quelques semaines maintenant, la CSRD. Donc là, on est effectivement
02:33:12 dans l'univers de la comptabilité extra financière et ce dont on parle, sur lequel
02:33:17 on travaille depuis une quinzaine d'années également pour ma part, c'est cette jonction
02:33:22 avec l'information financière classique. Parce que le défi aujourd'hui, c'est comment
02:33:26 faire la connexion entre les données extra financières qui sont mesurées par ces comptabilités
02:33:32 extra financières avec la donnée financière classique. Donc c'est le défi qu'on a
02:33:37 et la France là aussi est en avance parce que depuis une dizaine d'années, il y a
02:33:42 des méthodes d'eau qui travaillent et qui sont expérimentées aujourd'hui sur le terrain.
02:33:46 Delphine, concrètement, qu'est-ce que ça change d'une comptabilité écologique pour
02:33:50 l'entreprise ? Je vais juste compléter parce que je pense que c'est important de dire
02:33:56 qu'au niveau recherche et pratique, on a eu deux points importants au niveau français,
02:34:03 c'est qu'on a un groupe de recherche extrêmement vivant sur le thème de la comptabilité environnementale
02:34:10 et sociale en France. On a quand même au moins deux chaires, mais il y en a même plus
02:34:14 qui travaillent quatre ou cinq pôles en France et c'est le seul pays à avoir autant de ferveur
02:34:20 sur le sujet. Et on a quand même aussi été très présents au niveau de l'Europe. Patrick
02:34:26 je crois est intervenu tout à l'heure et je pense que c'est important de le rappeler
02:34:30 parce que c'est assez chouette de voir la dynamique qu'il y a et pour vous de pouvoir
02:34:34 travailler avec toute cette dynamique là. En entreprise, qu'est-ce que ça change ? Je
02:34:38 pense qu'aujourd'hui, il y a énormément de professions qui ont vu leur rôle évoluer.
02:34:42 Moi, je le vois au quotidien, je suis assez sidérée de la vitesse à laquelle ça va.
02:34:47 Je pense que les professions financières sont les premières touchées. Ça va du rôle
02:34:51 du directeur financier au rôle du directeur d'audit interne, au rôle du directeur des
02:34:56 normes IFRS qui maintenant intègrent les normes ESRS et ESRD. On le voit aussi dans
02:35:02 les grands cabinets d'ailleurs d'audit qui font pareil. Donc ces professions là sont
02:35:07 en train d'intégrer des sujets qu'ils ne connaissaient pas il y a quelques années,
02:35:12 de créer des postes, de créer des équipes, de créer des jonctions, des postes d'ailleurs
02:35:16 on me dit souvent on crée des postes de pont entre la RSE et la finance. Donc ça je le
02:35:23 vois constamment dans les directions avec lesquelles on travaille et qu'on interroge.
02:35:28 Ce changement là est vraiment important. Derrière ça, il y a un changement de qualification
02:35:33 de la donnée, de l'importance de la donnée extra financière. Du coup, ça implique des
02:35:38 changements de système d'information. Ça c'est peut-être le sujet qui est le plus
02:35:41 en retard parce que malheureusement, on n'a pas eu une prise de conscience au niveau
02:35:46 des grands groupes ERP et autres sur le sujet. Je trouve qu'on a eu, moi j'ai eu des discussions
02:35:52 lunaires il y a ne serait-ce que deux ans avec des personnes de grands groupes de systèmes
02:35:58 d'information qui n'ont pas du tout capté à quel point ce sujet là était crucial
02:36:03 pour le développement de la comptabilité environnementale et sociale en entreprise.
02:36:06 On parle de CSRD mais on peut parler de la jonction aussi. Et puis, on voit aussi comment
02:36:13 vous intégrer de plus en plus, je pense à la biodiversité et au climat, des personnes
02:36:18 venant des sciences dures. On l'a vu aussi dans des grands groupes Microsoft qui a été
02:36:24 chercher ce qu'ils appellent des sustainability leaders venant de la recherche là-dessus.
02:36:29 Donc, il y a des changements importants au niveau structurel dans les organisations.
02:36:34 Et puis, il y a un changement aussi de mindset puisque aujourd'hui, la CSRD, ce n'est pas
02:36:38 que de la compliance, c'est avant tout une direction stratégique. Derrière, il y a
02:36:43 beaucoup de gens qui voient CSRD plus comptabilité multicapitaux dans la ligne de mire et dans
02:36:49 la façon de travailler ce sujet là. Donc, pour moi, c'est vraiment une révolution
02:36:55 qui a été peut-être un petit peu lente et puis de nouveau avec un pas très très
02:37:01 rapide. Donc, ça change absolument tout et ça change aussi la façon dont vous considérez
02:37:05 la création de valeur et vos business model derrière. Normalement, vous devez vous interroger
02:37:10 sur ce qui est possible aujourd'hui et demain et ce qui n'est plus possible puisque votre
02:37:16 système dépend de la société, dépend de l'environnement. On appelle ça de la valeur
02:37:20 systémique et ça, c'est vraiment aussi absolument crucial à comprendre. C'est que compter,
02:37:25 c'est bien, mais compter pour un objectif de transformation et un objectif qui est
02:37:31 de devenir une entreprise avec un business model résilient aux changements qui vont
02:37:36 venir. On parle beaucoup là de ce que le gouvernement est en train de faire sur les
02:37:40 4 degrés. Mes enfants, moi j'habite en Bretagne, mes enfants me disaient "mais maman, il va
02:37:45 refaire 39". 39 l'année dernière là où j'habite, ça n'était jamais arrivé,
02:37:50 jamais jamais, jamais du tout. Donc, voilà, on est sur ces changements là, donc compter,
02:37:55 c'est bien, compter pour le futur, c'est mieux et compter pour la résilience, c'est
02:37:59 vraiment très très important. Donc ça, je pense que les changements sont en cours,
02:38:03 vous y vivez tous et c'est plutôt sympathique à voir et on est là aussi pour vous accompagner
02:38:08 là-dessus.
02:38:09 Hervé, j'entends bien ce que dit Delphine. Effectivement, la valeur change et ça doit
02:38:14 se retranscrire dans les écritures comptables. Est-ce que vous pouvez nous donner peut-être
02:38:18 un exemple d'entreprise qui a adopté cette comptabilité écologique et puis voir un
02:38:22 petit peu ce que ça change concrètement ?
02:38:24 Peut-être rapidement quand même pour rebondir sur l'aspect système d'information, parce
02:38:30 que ce qu'on voit sur le terrain, ce qu'on observe effectivement, c'est qu'on demande
02:38:35 des reportings alors même que les comptas nécessaires pour nourrir ces reportings ne
02:38:41 sont pas bien structurés. Comment collecter, comment consolider, comment analyser, comment
02:38:48 rendre fiables l'ensemble de ces données ? Les systèmes d'information ne suivent pas.
02:38:53 Heureusement, avec la CSRD, on a un cadre dans lequel on pourra travailler pour mieux
02:38:58 structurer et ensuite pouvoir faire la connexion avec la comptabilité. Après la question
02:39:05 de comment on valorise les éléments, il y a des financiers dans la salle mais grosso
02:39:12 modo, il va falloir suivre l'une ou l'autre des normes comptables qui sont à l'œuvre
02:39:20 au niveau mondial, soit la norme proche de ce qu'on appelle les coûts historiques,
02:39:24 je ne vais pas détailler, ou la norme proche des IFRS. Mais une fois que j'ai dit ça,
02:39:29 les entreprises par rapport à l'adoption, moi je travaille, ce qui n'est pas tout à
02:39:34 fait la même chose que Delphine, mais je travaille avec un écosystème de chercheurs
02:39:39 qui porte un modèle qui s'appelle CARE, c'est plus d'une dizaine d'années que
02:39:43 je les suis, beaucoup plus de 15 ans où c'est né à Delphine, et on en est à près
02:39:48 d'une trentaine d'expérimentations menées dans des grands groupes, dans des sociétés
02:39:54 plus moyennes. Ils m'ont autorisé à le faire, on vient de terminer une première
02:40:00 expérimentation avec le groupe Bouygues sur Bouygues Habitat Social, qui a été menée
02:40:10 et j'espère qu'ils vont poursuivre. On a mené aussi une expérimentation en région
02:40:14 PACA il y a déjà 2-3 ans avec le soutien de l'ADEME, où on a eu une dizaine d'entreprises
02:40:20 dans lesquelles vous aviez Auchan, Carrefour, Veolia ou des sociétés comme ça qui ont
02:40:25 expérimenté sur l'une de leurs filiales cette comptabilité. La difficulté, je peux
02:40:31 vous parler du modèle CARE que je connais mieux, la difficulté c'est qu'on touche
02:40:36 souvent des sujets stratégiques. Il y a un aspect secret des affaires qui joue, c'est
02:40:44 bien pour ça que vous ne verrez pas sur internet des tas de comptes intégrés, parce qu'il
02:40:52 y a quand même le secret des affaires à un moment donné qui joue. On a un peu plus
02:40:58 de transparence qu'on nous a demandé au niveau européen, c'est un peu mieux structuré
02:41:03 avec la CSRD, mais on espère que demain ces comptabilités seront visibles, mais malheureusement
02:41:11 ce n'est pas un outil de com, c'est un outil pour structurer votre stratégie, structurer
02:41:17 la trajectoire dans laquelle vous êtes, mesurer, valoriser et ensuite suivre dans le temps
02:41:23 comment évolue votre modèle économique. Donc ce n'est pas des choses simples à mettre
02:41:27 devant le grand public.
02:41:30 Delphine, qu'est-ce qu'on observe des entreprises qui ont testé très concrètement cette comptabilité
02:41:35 écologique ?
02:41:36 Oui, alors je pense qu'il y a beaucoup d'exemples internationaux et français, mais
02:41:42 ils sont publics ou pas, pas pour les mêmes raisons, je pense qu'il faut justement se
02:41:48 méfier de ce qui est rendu potentiellement public avec des grands chiffres sociaux extrêmement
02:41:55 positifs, les impacts positifs montrés. Souvent, quand elle est bien faite, la comptabilité
02:42:01 sociale et écologique vous montre sur un jour qui n'est pas forcément celui que vous
02:42:05 avez envie de communiquer, parce que malheureusement, par rapport aux limites planétaires et aux
02:42:09 fondations sociales, les entreprises, comme toutes les personnes physiques aujourd'hui
02:42:13 et tous les gouvernements et tous les pays, moi je me mets dedans, aujourd'hui quand
02:42:18 j'enseigne, si on fait ces tonnes CO2, on n'est pas dans les tonnes CO2 qu'il faut
02:42:25 pour chaque individu, donc il faut juste se regarder aussi un petit peu. Donc aucune entreprise
02:42:30 ne l'est non plus, donc quand on fait et qu'on se regarde par rapport aux limites planétaires
02:42:33 et aux fondations sociales, on est un peu dans le rouge, un peu dans l'orange, parfois
02:42:37 un peu dans le vert, et du coup ce n'est pas forcément chouette à présenter à l'extérieur,
02:42:41 mais c'est ça qui permet aussi de faire les efforts nécessaires pour la suite. Donc
02:42:45 c'est vrai que la comptabilité écologique et sociale multi capitaux, peu importe le
02:42:50 nom qu'on lui donne, c'est un outil interne qui est là pour faire bouger les choses,
02:42:56 nous on associe par exemple des budgets, à côté du budget financier, un budget carbone,
02:43:02 ça permet souvent de se rendre compte des choix qu'on a à faire, et par exemple si
02:43:06 on a 2 tonnes, on n'a que 2 tonnes, on n'a pas 3 tonnes, donc il faut faire des choix
02:43:10 d'investissement, des choix dans les nouveaux produits qu'on fait, des choix d'achat,
02:43:15 d'entreprise ou de revente, et c'est un petit peu dans ce sens là qu'il faut utiliser.
02:43:20 On est sollicité par exemple, on nous demande parfois aujourd'hui, si je dois racheter
02:43:25 telle entreprise, quel choix je vais faire en fait, est-ce que si je fais une comptabilité
02:43:31 écologique et sociale, je ne vais pas me rendre compte qu'elle est complètement endettée
02:43:35 à la vie de la planète et de la société ? Sans doute, mais du coup, quel risque vous
02:43:40 êtes prêts à prendre ? Est-ce que c'est beaucoup, beaucoup ? Est-ce que c'est 60 fois
02:43:44 la limite planétaire ou est-ce que c'est juste 2 fois ou 1,5 ? Donc c'est toutes ces
02:43:48 choses là qu'il faut prendre en compte, et oui il y a énormément d'exemples, il y a
02:43:52 les entreprises qui ont fait caire, mais vous avez aussi beaucoup de projets, je renvoie
02:43:56 aussi vers le travail de l'ORS, de C3D, de l'association RECORDS, qui ont mis en avant
02:44:03 les expérimentations et les différents modèles, les différentes chairs de recherche,
02:44:08 les deux nôtres, mais il y en a d'autres, qui vous permettent de voir toutes les expérimentations
02:44:13 qui ont été faites, nous on a fait avec des PME, on est en train de terminer une expérimentation
02:44:17 avec Danone, on travaille aussi avec d'autres groupes, et de chercher à regarder le dessous
02:44:24 des cartes plutôt que de voir le shiny de potentiellement les impacts, notamment positifs.
02:44:31 Moi je m'inquiète quand une entreprise me dit qu'elle crée beaucoup beaucoup de valeurs
02:44:36 aujourd'hui quand on sait que les limites planétaires sont ultra dépassées et les
02:44:40 fondations sociales complètement enfoncées, donc il faut sans doute pouvoir se regarder
02:44:45 dans le miroir, le beau miroir, et se dire qu'il y a beaucoup encore d'efforts à faire.
02:44:50 C'est ça la difficulté, le fait qu'on ne communique pas forcément ce qu'on a comme
02:44:55 résultat, mais si ça vous sert d'aiguillon pour transformer votre business model, alors
02:44:58 on a gagné. Merci beaucoup à tous les deux pour votre intervention. Merci.
02:45:04 En clôture de cette matinée je suis très heureuse d'accueillir Bertrand Badré. Bertrand
02:45:14 venez me rejoindre. Alors Bertrand vous avez été un représentant pur jus de la finance
02:45:20 d'avant, notamment chez Lazare, au Crédit Récolle, Société Générale, et puis vous
02:45:26 avez changé de monde en passant en 2013 peut-être première étape à la Banque Mondiale, et
02:45:32 en 2016 vous avez lancé Blue Like an Orange, un fonds d'investissement justement spécialisé
02:45:37 dans les projets à impact positif dans les pays émergents. Alors ma question est très
02:45:42 simple Bertrand, est-ce qu'on peut vraiment conjuguer rentabilité et responsabilité ?
02:45:48 Non seulement on peut mais on doit. Fin de l'intervention.
02:45:54 Non allez, vous avez un quart d'heure, je pense que c'est même court pour nous expliquer
02:46:00 les ressorts.
02:46:01 Non non mais je vais essayer d'être clair et ça fait écho à la table ronde précédente,
02:46:07 on est face à un défi dont on mesure en particulier dans cette salle combien il est considérable.
02:46:13 Alors c'est intéressant d'avoir ce débat aujourd'hui, ce n'est pas un moment anodin
02:46:18 et les débatteurs et les orateurs que vous avez rassemblés sont aussi des gens qui sont
02:46:25 plutôt en première ligne sur ces sujets. Donc c'est à la fois très stimulant et pas
02:46:30 très simple d'être à la fois conclusif et informé. Je pense qu'il faut rester modeste.
02:46:36 Alors le moment n'est pas anodin parce qu'il suffit d'écouter tout ce qui se passe, on
02:46:41 est potentiellement à la veille d'une récession, on se pose la question tous les matins de
02:46:45 savoir si elle va venir ou pas, en tout cas l'économie n'est pas très flamboyante. On
02:46:50 voit bien qu'il y a une crise sociale, chez nous mais pas seulement chez nous. On voit
02:46:55 bien qu'il y a des tensions dans les modèles démocratiques, on voit bien la question de
02:46:59 la crise géopolitique qui a été particulièrement visible ce week-end avec la Chine rassemblant
02:47:04 un sommet Asie centrale d'un côté pendant que le G7 essaie de mobiliser sur l'Ukraine
02:47:08 de l'autre. On voit bien que la crise énergétique n'est pas résolue. On voit bien aussi que
02:47:15 la crise alimentaire, tous les 6 mois, il faut en passer par une discussion avec la Russie
02:47:19 et l'Ukraine pour savoir si les barges chargées de blé peuvent quitter la mer Noire. Et tout
02:47:23 ça sur fond de paradigmes financiers qui est là aussi quelque chose d'un peu déstabilisant
02:47:29 parce que ce paradigme financier, comme on était habitué depuis pas mal d'années,
02:47:33 taux bas, inflation qui était plus un souvenir, banque centrale qui intervenait comme le 20ème
02:47:39 de cavalerie chaque fois qu'il y avait un problème, tout ça finalement c'est une équation
02:47:42 qui était assez plaisante sur le plan financier. Aujourd'hui l'inflation est de retour et
02:47:47 les débats sont ouverts pour savoir jusqu'à où, pendant combien de temps et dans quelles
02:47:51 proportions. Les taux sont redevenus élevés, on peut regretter de ne pas avoir utilisé
02:47:55 suffisamment la période de taux faible pour faire un certain nombre d'investissements
02:47:57 qui auraient été moins coûteux il y a 4 ou 5 ans qu'ils le sont aujourd'hui. On
02:48:01 voit bien que l'inversion de la position des banques centrales après ce qu'on a appelé
02:48:06 le quantitative easing, la facilitation quantitative, l'achat par les banques centrales d'obligation
02:48:12 pour faire baisser les taux, maintenant on inverse le processus et fermer le robinet
02:48:16 c'est beaucoup plus douloureux et désagréable que d'ouvrir le robinet. Et puis on voit
02:48:20 bien que tout ça se passe dans un contexte de décoordination internationale au lieu
02:48:24 de coordination internationale. Et donc tout ça fait un moment un peu particulier pour
02:48:29 s'interroger sur est-ce qu'on est capable de changer de modèle, à un moment où je
02:48:34 ne résiste pas à citer Warren Buffett qui il y a une trentaine d'années expliquait
02:48:39 que c'est quand la marée baisse qu'on voit qu'il se baigne sans maillot. Et c'est
02:48:43 précisément ce qui se passe, le changement de paradigme financier c'est la marée qui
02:48:46 baisse et donc on voit brusquement qu'il faut de nouveau sauver des banques en un
02:48:50 week-end, on avait perdu cette idée, on en a fait 4 ou 5 le mois dernier, on voit ce
02:48:55 qui s'est passé sur les cryptos, on voit ce qui s'est passé sur les fonds de pension
02:48:59 britanniques. Donc tout ça crée un climat un peu anxiogène par rapport à nos préoccupations
02:49:03 qui a tendance à nous ramener dans le court terme et dans une souci d'aversion au risque,
02:49:08 de liquidité etc. et nous empêche encore plus de projeter dans le moyen à long terme
02:49:12 la transformation de nos modèles. Dans un contexte qui plus est aussi délicat, si je
02:49:19 me permets de faire un détour par Voltaire, ou ce serait peut-être dans vos années lycées
02:49:22 à la fin de Candide, tout le monde a cité deux grandes citations de Candide, la première
02:49:26 c'est "le travail est loin de nous", trois grands mots, l'ennui, le vice et le besoin
02:49:30 et la deuxième c'est "il faut cultiver notre jardin". Alors aujourd'hui je vais me
02:49:34 focaler sur "il faut cultiver notre jardin", aujourd'hui on a une lecture assez littérale
02:49:38 de "il faut cultiver notre jardin". Au fond, et posez vous la question vous-même, on se
02:49:43 moque un peu du reste du monde, en gros on se dit "écoutez, tout ça c'est compliqué,
02:49:47 le climat, la biodiversité, les réfugiés, le cyber, le nucléaire, les guerres, tout
02:49:52 ça, oulala, moi j'y peux rien, donc chacun s'occupe de son jardin et les vaux seront
02:49:57 bien gardés". En fait, la question c'est de savoir si on ne se trompe pas de jardin,
02:50:01 c'est-à-dire qu'il y a effectivement notre jardin au sens de notre village, notre entreprise,
02:50:05 notre famille, mais il y a aussi notre jardin planétaire. De même qu'on a beaucoup ironisé
02:50:09 sur les tensions entre la fin du mois et la fin du monde, je pense qu'il y a une tension
02:50:12 entre ces deux jardins et cette tension est au cœur de la discussion qu'on doit avoir
02:50:16 avec les gens. Alors, où est-ce qu'on en est ? Le modèle dans lequel on opère aujourd'hui,
02:50:20 malgré ce qui a été dit précédemment, il reste le modèle posé il y a 50 ans, je
02:50:24 ne vais pas élaborer trop longuement, mais c'est au fond ce qui s'est passé entre
02:50:28 1970 et 1980, la fameuse position de Milton Friedman en 70, l'objet social de l'entreprise
02:50:35 est de maximiser le profit, donc le profit est la fin en soi de l'activité économique.
02:50:39 La décision de Richard Nixon en 1971 de suspendre la convertibilité en or du dollar, qui nous
02:50:44 fait basculer dans un monde où tout était organisé autour de l'or, dans un monde où
02:50:48 on bascule dans la fiat monnaie, où on est dans un monde de confiance, dans un monde
02:50:51 où on peut s'endetter. Donc on a une financiarisation de l'économie qui vient et un primat donné
02:50:55 au marché pour attribuer la valeur. Si je vous demande combien vaut un dollar aujourd'hui,
02:50:59 il ne faut plus 35 dollars pour avoir une once d'or, aujourd'hui un dollar vaut autant
02:51:03 d'euros, alors je dis un euro ça vaut combien ? Ça vaut autant de dollars et ça change
02:51:06 tous les jours et on a complètement intégré ça dans nos raisonnements. Donc tout ça
02:51:09 structure notre pensée, primauté du marché, valeur déterminée par le marché et primauté
02:51:15 du profit tel que défini à cette époque. C'est ce qu'on a appelé le consensus de
02:51:18 Washington, le modèle néolibéral, etc. La crise financière de 2008 a un peu brouillé
02:51:23 les messages, a montré les limites de ce modèle, on n'a pas fait grand chose après,
02:51:27 si on a durci les ratios des banques, etc. mais on n'a pas repensé le modèle. On a
02:51:32 eu un espèce de sursaut qui nous amène au sujet d'aujourd'hui en 2015, où en 2015
02:51:37 on s'est mis d'accord, toute la planète, on a tous signé des accords de Paris, évidemment
02:51:42 en décembre, ce qu'on connaît le mieux en France, mais les objectifs de développement
02:51:45 durable à New York en septembre, et un peu moins connu en juillet de la même année,
02:51:49 de partenariat pour le développement à la 10. Donc on s'est mis d'accord sur une feuille
02:51:53 de route, mais avec quelques faiblesses. La première c'est qu'on n'a pas beaucoup réfléchi
02:51:56 à combien ça va nous coûter. On est tous d'accord, en gros pour éviter que les températures
02:52:02 augmentent, on est tous d'accord pour que tout le monde ait accès à la santé, à
02:52:05 l'eau, etc. Il faut vraiment être un salopard pour dire "je suis contre ça". Simplement
02:52:09 quand on vous dit "ça coûte tant", alors là c'est plus compliqué. Et on ne s'est
02:52:12 pas posé la question de savoir si notre système allait naturellement dans cette direction.
02:52:16 On a fait le pari que la main invisible allait fonctionner, et que finalement, c'était
02:52:20 le principe des accords de Paris, c'est qu'il y aurait une course vers le haut. C'est que
02:52:23 tous les 5 ans on allait vouloir faire mieux que le voisin. On n'a pas pensé qu'il
02:52:26 pouvait y avoir un autre scénario qui est celui qu'on voit aujourd'hui. Et donc on
02:52:29 s'est mis d'accord sur une magnifique feuille de route, mais on ne s'est pas vraiment donné
02:52:32 les moyens. Et peut-être qu'on ne pouvait pas se donner les moyens à l'époque. Donc
02:52:35 résultat, où est-ce qu'on en est en 2023 aujourd'hui ? On en est à avoir une discussion
02:52:39 comme celle qu'on a ce matin, et comme il y a souvent un peu partout sur la planète,
02:52:42 on réalise bien que cette feuille de route, on n'y est pas. On nous a vendu un système
02:52:47 qui se passerait tranquillement en 30 ans, et on voit bien que sur les 8 premières années
02:52:51 on a pris du retard par rapport à ces 30 ans. Et on se rend compte que le système dans
02:52:55 lequel on évolue, ce qu'on appelle le système c'est encore une fois les normes comptables,
02:52:59 les modes de rémunération, la gouvernance des entreprises, etc. Ce système est finalement
02:53:03 assez neutre par rapport à nos questions. Il ne nous empêche pas de faire des bonnes
02:53:06 choses, mais il ne récompense pas les bonnes choses. Il ne nous empêche pas de faire des
02:53:09 mauvaises choses, mais il ne punit pas les mauvaises choses. Ce n'est pas une excuse
02:53:13 pour ne rien faire, mais il n'y a pas d'encouragement. Et donc aujourd'hui, le système n'amène
02:53:19 pas dans la bonne direction, donc on espère soit un grand accord multilatéral, peu probable,
02:53:23 soit une espèce de solution technologique qui va tomber du ciel, peut-être mais pas
02:53:27 tout de suite, soit une hypothétique rupture avec le capitalisme. Donc on est dans une
02:53:31 espèce de pensée magique en disant qu'il va se passer quelque chose et en même temps,
02:53:35 comme ça a été rappelé précédemment, on se prépare à une France à +4°C parce
02:53:38 qu'on ne sait jamais si ces trucs-là n'arrivent pas, peut-être qu'il faut s'y préparer.
02:53:42 Et on voit bien que tout ça est d'autant plus compliqué, que ce n'est plus un problème
02:53:45 de mondialisation, c'est un problème de planétarisation. Le problème c'est la planète et que c'est
02:53:50 précisément un moment où la planète elle-même se fissure. Là aussi j'ai été, comme
02:53:55 beaucoup d'entre vous, vous en souvenez peut-être, en 2015, il y a eu une photo qui a fait le
02:53:59 tour du monde qui était une poignée de mains entre Barack Obama et Xi Jinping, juste avant
02:54:02 les accords de Paris, sur le thème "on s'engage". On a tous cru, moi le premier, que c'était
02:54:06 le début d'une nouvelle ère, que finalement si les Américains et les Chinois sur ces
02:54:09 sujets-là étaient capables de se mettre d'accord, la planète allait repartir. Et
02:54:13 en fait c'est une erreur de perspective, ce n'était pas le début d'une nouvelle
02:54:16 ère, c'était la fin de l'ère précédente, c'était la fin de la fin de l'histoire,
02:54:20 c'était la fin de la chute du mur de Berlin, 6 mois plus tard Brexit, un an plus tard
02:54:24 Trump, et puis la suite, vous la connaissez, et jusqu'à Hiroshima cette semaine, où
02:54:29 on explique à la Chine "on vous aime bien, on ne veut pas vous contrecarrer, mais quand
02:54:33 même, attention etc." C'est ça qui s'est passé en 10 ans. On a complètement décalé
02:54:37 et finalement la transformation de nos modèles devient un peu otage de cette situation géopolitique.
02:54:42 Les tensions ne sont pas traitées, on est dans un monde qui est plus égoïste qu'il
02:54:46 était il y a 10 ans, alors que précisément on a besoin d'être moins égoïste, on est
02:54:50 dans un monde où il y a plus de colère qu'il y a 10 ans, notamment, j'y reviendrai, de
02:54:54 la part des pays du sud qui ont le sentiment qu'on leur fait beaucoup la morale, qu'on
02:54:58 a quand même plutôt bien profité du système et que maintenant on leur dit "écoutez les
02:55:01 gars, la fête est terminée, débrouillez-vous" et qu'on ne les aide pas. Et donc on se retrouve
02:55:06 dans un monde où il est difficile de faire sens, j'en rajoute évidemment, on peut se
02:55:11 faire peur, l'intelligence artificielle, la hausse des inégalités etc. Et d'une certaine
02:55:16 manière, on peut revenir à ce que disait Michel Houellebecq, vous vous en souvenez
02:55:20 peut-être au début du Covid, quand tout le monde réfléchissait au monde d'après,
02:55:24 il disait "vous ne précipitez pas, le monde d'après c'est le monde d'avant en pire".
02:55:27 J'espère qu'on va faire démentir ça aujourd'hui, mais on voit bien que si vous voulez, un arrêt
02:55:31 sur image, ce n'est pas gagné. Il se passe quand même un certain nombre de choses. Le
02:55:37 point important, c'est que finalement, on prend conscience 7 ou 8 ans après 2015, que
02:55:42 ce qu'on nous a vendu en 2015, qui était une transition, il suffit de baisser vos émissions
02:55:49 de CO2 de 2% par an, il suffit de réallouer l'épargne mondiale à hauteur de 2% par
02:55:55 an, et tout ça c'était incrémental. Et ça ne fait pas peur si on vous dit demain
02:55:59 "réallouer 2%", très bien, 2% tous les jours pendant 30 ans, c'est plus compliqué.
02:56:04 Mais on nous a vendu une transition, et on prend conscience aujourd'hui qu'au fond,
02:56:08 si on parle, si on est sérieux, ce n'est pas une transition. On voit bien qu'on ne
02:56:12 va pas réussir à marginalement modifier la manière dont on fonctionne, que c'est bien
02:56:15 une transformation. Et cette transformation, forcément, est plus coûteuse, est plus compliquée,
02:56:21 est douloureuse. Il y a des gagnants, il y a des perdants. Et c'est ça qui fait mal
02:56:24 aujourd'hui. Et on voit bien que ça se crispe. D'un côté, les esprits les plus généreux
02:56:29 ou les plus éclairés disent "si c'est vraiment une urgence, il faut faire tout tout de suite".
02:56:33 Et vous voyez la pression que certaines associations mettent sur certaines entreprises qui n'en
02:56:37 ont jamais assez. Et à l'inverse, des gens qui disent "on s'en fout, de toute façon
02:56:41 c'est fini, on va se mettre dans la France à 4 degrés, les Etats-Unis à 5 degrés,
02:56:45 nous on pourra payer l'air conditionné etc." et donc on arrête ces imbécilités de ESG
02:56:49 qui sont du woke capitalism. Et donc on voit bien une crispation autour du fait qu'on
02:56:53 rentre dans le dur. Donc moi c'est plutôt une bonne nouvelle qu'on rentre dans le dur,
02:56:56 mais en même temps, ça laisse la majorité des gens un peu troublés. Ils disent "mais
02:57:00 au fond, on a le sentiment qu'on a déjà fait des efforts, mais en fait ce n'est pas
02:57:03 le cas, quel est l'objectif finalement?" Et on voit bien, confusément, qu'il faut
02:57:09 qu'on parle de notre operating system. C'est-à-dire qu'on rentre vraiment dans le dur de ce qui
02:57:13 fait fonctionner nos économies et la mondialisation, le operating system de notre planète, de
02:57:18 la gouvernance mondiale et le operating system de nos entreprises. Et passer, comme je l'ai
02:57:22 dit souvent, et pardon si certains de vous m'ont déjà entendu, passer de Milton Friedman
02:57:27 "l'objet social de l'entreprise est de maximiser le profit" pour prendre une belle
02:57:31 formule de Colin Meyer, l'ancien doyen de la Business School d'Oxford. L'objet social
02:57:35 n'est pas de maximiser le profit, l'objet social est de trouver des solutions profitables
02:57:39 aux problèmes de la planète et de ses habitants. Ce n'est évidemment pas de dire qu'il faut
02:57:42 arrêter le capitalisme, le profit, etc. Ça c'est une illusion que je laisse à ceux
02:57:46 qui aiment les illusions. Mais c'est de dire que le profit n'est pas une fin en soi.
02:57:50 Le profit est un moyen en vue d'une fin. Le profit est légitime parce qu'il nous
02:57:54 permet de trouver des solutions aux problèmes de la planète, pour l'instant il n'y en
02:57:57 a pas d'autres, et de ses habitants, c'est-à-dire de nous. Ce n'est pas un problème de tableur
02:58:00 Excel, c'est un problème de vraie personne sur une vraie planète.
02:58:03 C'est cette bascule qu'il faut faire. J'avais expliqué sur une formule un peu rhétorique
02:58:09 que j'aime bien. Il faut passer du système "Mark to Market", qui est le système dans
02:58:14 lequel on est aujourd'hui, la comptabilité s'appelle bien "Mark to Market". Quand vous
02:58:18 arrêtez votre bilan à la fin d'un exercice, vous l'évaluez à valeur de marché, c'est
02:58:22 la loi. Un système "Mark to Planet" où finalement, au lieu de se concentrer sur le
02:58:27 facteur rare qui était à 50 ans, l'argent, aujourd'hui on s'aperçoit que le capital
02:58:31 financier n'est plus le facteur rare. La preuve c'est que chaque fois qu'on en a besoin,
02:58:34 on trouve des milliers de milliards. Le vrai sujet c'est le capital environnemental, le
02:58:38 capital humain, le capital social, qui pour l'instant n'ont pas de prix. Il y a quelques
02:58:41 systèmes alternatifs, on en a parlé ce matin, mais pour l'instant, comme me dit un de mes
02:58:45 investisseurs, quand j'investis dans Blue, White and Orange, ça revient à la question
02:58:48 que vous posiez, je prends la performance financière très bien, et l'impact c'est
02:58:53 gratuit, c'est cadeau, c'est en plus, ça n'a pas de valeur, ça me permet de cocher
02:58:57 une case. C'est déjà bien, mais pour l'instant ça n'a pas de valeur, ça ne rentre pas dans
02:59:01 les cases. C'est pour ça que ce débat est un peu biaisé, c'est pour ça que je fais
02:59:04 très attention à dire est-ce que c'est compatible. C'est aussi, ça dépend de la
02:59:07 manière dont on mesure. Alors évidemment, on va dire, il se passe des choses, et heureusement
02:59:11 il se passe des choses. Regardez l'ESG, il y a 50 000 milliards d'actifs qui sont gérés
02:59:14 en ESG, ou 60 000, ça change tous les jours. C'est à la fois très bien, parce qu'on
02:59:18 en parle, on parle de l'environnement, du social et de la gouvernance, ça permet de
02:59:22 socialiser l'idée, mais il ne faut pas se raconter d'histoire, on connait toutes les
02:59:25 ambiguïtés, il y a 200 schémas qui permettent d'évaluer l'ESG, chacun prend celui qui
02:59:29 lui plaît, donc c'est une bonne première étape, mais ça n'est qu'une première étape.
02:59:33 La question c'est comment est-ce qu'on poursuit, comment est-ce qu'on va au-delà de la simple
02:59:39 aspiration, à ce qu'on appelle notamment l'impact, mais il y a d'autres modes de
02:59:44 qualification, quelque chose qui soit vraiment, voilà ce que je veux faire, je me mets en
02:59:48 risque, je me mesure, je suis audité, je rends compte, qu'on rentre dans un système qui
02:59:52 n'est plus de la bonne intention. Et c'est là que ça devient compliqué, parce qu'on
02:59:57 est dans une économie qui reste mondiale, et aujourd'hui il n'y a pas de maître du
03:00:01 monde. En 1970, Friedman expliquait dans le New York Times, c'est comme ça, Reagan se
03:00:05 faisait élire, Thatcher se faisait élire, et on avait le consensus de Washington, il
03:00:09 n'y avait pas de marche arrière, même Mitterrand en 1980 disait, on va vivre autrement, et
03:00:13 en 1983 disait, finalement on va faire comme tout le monde. Donc aujourd'hui, il n'y a
03:00:17 pas de maître du monde, vous avez des modèles différents qui sont en concurrence, et qui
03:00:24 montrent bien la complexité des choses. On aimerait bien finalement que ce sujet, on
03:00:28 le traite en disant, chacun a une voiture électrique, fin de l'histoire. Ça répond
03:00:31 qu'à une partie de l'équation, c'est beaucoup plus compliqué que ça. Et donc on voit bien
03:00:34 l'Europe avancer à l'européenne, c'est-à-dire, comme avait dit à l'époque la jugeante Christine
03:00:39 Lagarde, quand j'étais à Washington, l'Europe, il vous reste deux choses à faire, taxer
03:00:43 ce que vous pouvez, réglementer ce que vous pouvez, pour le reste on s'en charge. Je
03:00:46 vais dire merci à mes amis, mais ce n'est pas complètement faux, j'espère qu'on va
03:00:49 démontrer que c'est un peu faux quand même, mais nous on fait des règles, on en a parlé,
03:00:53 c'est SDR, SFDR, etc. On fait des règles, des normes, des taxes, etc. Les américains
03:00:59 eux font de l'Amérique, donc ils mettent de l'argent sur la table, les chinois font
03:01:03 de la Chine, ils font du capitalisme dirigé, tout ça ne converge pas naturellement. Avec
03:01:07 un certain nombre de risques, le premier c'est évidemment le brouillard bureaucratique,
03:01:11 à la fin on remplit des papiers, on ne sait plus pourquoi on les remplit, on est excédé
03:01:14 par les papiers qu'on vous demande et on perd le sens de ce qu'il faut faire. Donc ça,
03:01:17 il ne faut jamais perdre de vue pourquoi on fait tout ça. Le deuxième risque c'est
03:01:21 la fragmentation, vous avez des pôles différents, avec des priorités différentes, des sens
03:01:26 différents. Le troisième risque c'est le repli, je reviens dans mon jardin, ça m'agace,
03:01:33 j'arrête, etc. Et puis un autre risque est l'approche salamie, on va traiter les
03:01:39 problèmes les uns derrière les autres, alors qu'au fond on fait face à une dimension
03:01:42 systémique de réforme de notre modèle. Donc tous ces sujets là, on les voit, ils
03:01:45 sont difficiles à traiter, d'autant plus que les grands absences, je faisais allusion
03:01:49 en introduction, il y a 80% de la planète qui ne fait pas partie de cette conversation.
03:01:54 Je dis souvent la bataille du climat, la bataille de la biodiversité, la bataille de l'égalité
03:01:58 homme-femme, elles ne se gagneront pas uniquement à Bruxelles, à Paris ou à Washington, elles
03:02:03 se gagneront à Bogota, à Lagos et à Delhi. C'est précisément là qu'on ne fait rien
03:02:07 et c'est précisément là qu'on n'intègre personne dans les conversations. D'où les
03:02:11 tensions qu'il y a aujourd'hui entre ce qu'on appelle le sud global et l'ouest, je ne dis
03:02:16 plus le nord parce que la Russie s'est un peu éloignée. Et donc on voit bien le côté
03:02:20 vous nous imposez un cadre nouveau, regardez les tensions par exemple avec un pays comme
03:02:25 le Sénégal, le Sénégal a trouvé du gaz naturel et on dit que le gaz naturel ce n'est
03:02:30 pas possible parce que c'est fossile. Le Sénégal nous dit "mais vous en Europe avec la Russie
03:02:34 regardez ce que vous faites sur le gaz, on a une position qui est intenable". C'est ça
03:02:38 la perception que ces pays ont de notre morale, de notre belle vision du capitalisme. Donc
03:02:46 on voit bien qu'on a un sujet majeur qui est d'inclusion sur ces modèles. Je pense que
03:02:51 je pousse l'Europe à tendre la main à ces pays et à trouver des solutions. On a besoin
03:02:56 d'alliés, on ne va pas être tout seul contre les Etats-Unis et la Chine. Encore une fois
03:03:00 c'est une première étape, on a un peu abordé ça dans la table ronde précédente. L'étape
03:03:04 suivante sur laquelle il y a en plus un peu de concurrence c'est l'EFRAC d'un côté
03:03:08 et l'ISSB de l'autre, ça va être de se mettre d'accord sur les normes extra financières.
03:03:13 Première étape, de quoi parle-t-on ? C'est déjà pas mal si on se met d'accord là-dessus.
03:03:16 On n'y est pas encore complètement, on y travaille, j'espère qu'on aura des bonnes
03:03:19 nouvelles dans les semaines qui viennent sur l'interopérabilité pour parler de nouveaux
03:03:23 jargons. Derrière cette étape, il y a une autre étape qui va être la monétisation.
03:03:28 C'est un sujet dont on parle encore assez peu en France. Ce n'est pas seulement de se
03:03:32 mettre d'accord sur les tonnes de CO2, la mesure de la biodiversité, les indices de
03:03:35 disparité salariale, etc. C'est de se demander si ça a ou non un prix. Ça revient à mon
03:03:40 point, est-ce qu'on est capable de valoriser cette absence de capital ou cette destruction
03:03:44 de capital ? Là aussi il y a des choses qui se passent. Je prendrais un exemple, Harvard,
03:03:48 un projet qui s'appelle Impact Weighted Accounts. Peut-être que certains d'entre
03:03:53 vous le connaissent. Je pense qu'il faut toujours faire attention à ce genre de choses.
03:03:56 Rappelez-vous le classement de Shanghai quand les Chinois ont commencé à classer les
03:04:00 universités et les écoles. 20 ans plus tard, on fusionne toutes les écoles du plateau
03:04:04 de Saclay pour entrer dans les classements. Quand Harvard commence à dire qu'on va regarder
03:04:09 combien ça coûte sur le plan environnemental et social, ce que font telle ou telle entreprise,
03:04:13 ça va vous dire que Exxon vaut tant, 500 milliards, mais nous avec notre calcul, on
03:04:18 estime que Exxon détruit 40 milliards de valeur environnementale par an et on va forcer
03:04:22 Exxon à mettre ça dans son rapport annuel. Mais en revanche, Exxon, parce qu'ils sont
03:04:26 super bons sur la politique salariale, crée 10 milliards de valeur sociale, on va les
03:04:29 forcer à mettre ça. Ils font déjà ça pour plusieurs milliers d'entreprises.
03:04:32 Là c'est la prochaine étape. Ça pose plusieurs questions. Pourquoi est-ce que c'est
03:04:35 Harvard qui fait ça ? Quelle est leur boîte noire ? Comment fonctionne leur algorithme
03:04:38 ? Est-ce que c'est eux qui décident pour la planète ? Il vaut mieux réagir trop
03:04:42 tôt que trop tard. Après on va se prendre ça en disant que c'est les Américains
03:04:45 qui nous disent que c'est eux qui ont pensé plus tôt que nous à ce genre de choses.
03:04:49 Deuxième sujet, et il y en a beaucoup d'autres, est-ce qu'on peut compenser l'environnemental
03:04:52 et le social ? La finance va vouloir faire ça. Elle préfère avoir un chiffre que deux.
03:04:56 Le gars va dire que je suis très mauvais sur le plan environnemental, mais je suis
03:04:59 excellent sur le plan social, donc au total je suis en net zéro, ne m'embêtez pas.
03:05:02 Vous avez adoré l'offset sur le carbone, vous allez adorer l'offset sur tout.
03:05:06 On voit bien que c'est l'étape suivante. Et puis la dernière étape, à laquelle
03:05:09 je ne vous parlais pas, mais qui est probablement ce qu'il faut avoir en ligne de mire,
03:05:12 c'est non pas seulement la valorisation, mais la comptabilisation. C'est-à-dire qu'on
03:05:15 n'a pas deux rapports, un rapport financier et un rapport extra-financier, mais qu'on
03:05:18 n'a qu'un seul rapport avec des conséquences fiscales, des conséquences sur votre capacité
03:05:22 d'emprunt. Votre bilan n'a plus la même allure si on vous met ces coûts ou se badouille
03:05:26 dans votre bilan que vous avez dans votre banquier. Donc on voit bien que c'est un
03:05:30 chemin, on est au tout début. C'est un moment qui est très frustrant parce qu'on
03:05:33 a le sentiment que ça fait des années qu'on en parle et qu'il ne se passe pas encore
03:05:36 de choses. En même temps, il y a quand même pas mal de graines qui ont été plantées.
03:05:39 Ne nous le ronds pas, on n'y est pas. Mais en même temps, on a quand même un certain
03:05:44 nombre d'outils sur la table, on a quand même un certain nombre de choses qui se passent.
03:05:48 La vraie difficulté, c'est qu'on n'est pas encore dos au mur. Ce qui m'a donné
03:05:53 finalement de l'espoir par rapport à nos conversations, c'est le vaccin et c'est
03:05:58 ce qui s'est passé sur le Covid. J'habitais aux Etats-Unis à l'époque. Rappelez-vous,
03:06:02 il y a 6 ans, on était quand même au fond du trou. Printemps 2020 et le seul, il faut
03:06:07 le faire crédit, je n'ai pas particulièrement de sympathie pour Donald Trump, le seul qui
03:06:11 dit qu'il n'y a pas de problème, on va trouver un vaccin avant la fin de l'année,
03:06:14 c'est Donald Trump. Et effectivement, l'humanité dos au mur en 2020, elle a trouvé les milliards
03:06:18 qu'il fallait, elle a trouvé un vaccin en 9 mois et on est sorti d'affaire. J'espère
03:06:22 qu'on va être capable, quand on va vraiment sentir le mur environnemental et le mur social,
03:06:28 on est capable d'autant d'imagination. Voilà un peu ce que je voulais partager avec vous.
03:06:32 Pour répondre à votre question, comme je l'avais dit de manière un peu laconique
03:06:36 et lapidaire au début, il n'y a pas de sujet entre rentabilité et impact. Ça va évidemment
03:06:45 de pair. Aujourd'hui, on est encore une fois dans le brouillard, dans le brouillard
03:06:50 vous avez trois attitudes. La première attitude c'est de dire je suis dans le brouillard,
03:06:54 je peux continuer à crapuler, personne ne me voit. Greenwashing délibéré. Ça, ça
03:06:58 existe, de moins en moins j'espère. A l'autre extrémité du spec, il y a des gens qui disent
03:07:02 moi dans le brouillard, brouillard ou pas brouillard ça m'est égal, j'ai ma boussole.
03:07:06 Pour moi c'est stratégique, je veux avancer, ce sont à la fois mes convictions, mon intérêt
03:07:12 et puis je pense que si je ne vais pas dans cette direction, je vais perdre petit à petit
03:07:16 mes clients, j'attirerai plus de talent et j'aurai plus d'investisseurs. Peut-être
03:07:19 pas aujourd'hui mais dans deux ans, dans cinq ans, etc. Donc j'avance. Et puis entre
03:07:23 les deux, vous avez un certain nombre de gens qui sont un peu hésitants et qui finalement
03:07:27 se disent, moi je fais ce qu'on me demande, pas plus pas moins, avec la frousse d'être
03:07:31 pris dans les phares, ah t'as fait un truc horrible et qui se disent, si je me mets trop
03:07:37 en avant je vais me faire flinguer par les ONG qui disent que je n'en fais pas assez,
03:07:40 si je n'en fais pas assez, je vais avoir un problème avec mon board. Et donc une majorité
03:07:44 qui essaie d'évoluer, plutôt de bonne foi, mais qui a besoin qu'on les rassure. Et donc
03:07:48 je conclue là-dessus, la question de la rentabilité et de l'impact, elle est secondaire, la question
03:07:53 qui est centrale, c'est qu'on transforme nos modèles financiers. C'est-à-dire qu'on
03:07:58 sort de cette idée qu'il y a une finance durable, ce qui veut dire qu'il y a une finance
03:08:03 non durable, qu'il y a une finance verte, c'est-à-dire qu'il y a une finance non verte,
03:08:06 qu'il y a une finance à impact, qu'il y a une finance à vache, il faut que toute la
03:08:08 finance devienne durable, à impact, etc. Et donc de même qu'on a passé des années
03:08:13 à sophistiquer le modèle de l'industrie financière née à Chicago dans les années
03:08:18 50, modèle risque-rendement, on peut le compléter ce modèle. C'est une discussion que j'avais
03:08:22 avec René Cohen que certains connaissent sur l'impact, il faut compléter risque-rendement
03:08:26 impact, risque-rendement durabilité, c'est pas quelque chose d'impossible, on sait faire
03:08:29 tout ça, et c'est bien dans cette direction qu'il faut aller. Si on se satisfait d'avoir
03:08:34 une petite poche à côté où on se sent bien, on n'ira pas très loin. Merci beaucoup.
03:08:40 Merci beaucoup Bertrand Badré, merci à tous. Les séquences sont toutes très bientôt
03:08:52 disponibles en replay sur nos sites et donc je vous invite à y retourner très vite.
03:08:58 Emilie pour conclure.
03:09:00 Oui, pour conclure, merci à tous nos partenaires, je suis obligée de les citer pour les remercier,
03:09:04 évidemment, Crédit Mutuel, Mirovas, Solocal, ISG, avec le soutien également du C3D, L'ORÉ,
03:09:11 L'ORS, le Sommet Virtuel du Climat, le CJD et Phi Plus. Pour ceux qui ne connaissent
03:09:16 pas bien The Good, je rappelle que nous existons depuis 3 ans cette année, que nous suivons
03:09:22 de près les entreprises qui s'engagent, qui font des choses, qui font effectivement
03:09:27 des choses, on les met en avant toutes les semaines dans notre newsletter qui paraît
03:09:32 tous les mardis et que nous avons ce trimestriel également, la revue The Good qui paraîtra
03:09:39 la prochaine en juin avec des sujets notamment sur la finance et nous organisons du coup
03:09:44 des Good Forum, c'est le deuxième de l'année celui-là, n'hésitez pas à nous suivre
03:09:47 et à vous abonner. Merci encore Bertrand, merci à tous les intervenants, merci à
03:09:53 vous d'être venus.
03:09:54 Merci.
03:10:03 Merci.
03:10:05 Merci.
03:10:06 [SILENCE]

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