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Thierry Breton commissaire européen chargé du Marché intérieur était l'invité de Questions politiques ce dimanche. Il a notamment été question de la nouvelle législation de l'UE pour éliminer les zones de non-droit sur internet et qui s'appliquera en septembre. Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/questions-politiques/questions-politiques-du-dimanche-23-avril-2023-4560369

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00:00 (Générique)
00:10 Bonjour, bonjour et bienvenue dans "Questions politiques",
00:12 le rendez-vous politique du dimanche midi à la radio sur France Inter,
00:15 à la télévision sur France Info et en partenariat avec le journal Le Monde.
00:19 Notre invité du jour, en direct jusqu'à 13h,
00:21 est commissaire européen en charge du marché intérieur et du numérique
00:24 et à ce titre, en première ligne, pour tenter de défendre l'Europe
00:27 des nombreuses cyberattaques de ses rivaux.
00:30 L'Europe a-t-elle suffisamment d'unités pour y parvenir réellement ?
00:32 On lui posera la question.
00:34 Mais notre invité, ancien ministre de l'économie,
00:36 a également un regard très affûté sur notre pays,
00:38 où le président tente de jouer l'apaisement
00:40 dans un contexte économique et social tendu,
00:42 sur fond d'inflation, de fin du quoi qu'il en coûte et d'endettement record.
00:46 Quels sont, selon lui, les marges de manœuvre
00:48 dont dispose la France pour sortir de cette situation ?
00:50 Et puis personnellement, a-t-il, notre invité, des ambitions hexagonales ?
00:54 Toutes ces questions et bien d'autres,
00:56 nous allons les poser à notre invité, en direct avec nous jusqu'à 13h.
00:59 Thierry Breton est l'invité de "Questions politiques".
01:02 "Questions politiques"
01:03 Thomas Négaroff sur France Inter.
01:07 Thomas Négaroff, mais pas que Thomas Négaroff,
01:11 puisque comme chaque semaine, on commence l'émission
01:13 avec le regard de nos trois éditorialistes préférés,
01:15 évidemment sur les enjeux politiques du moment.
01:18 Mais avant de vous donner la parole,
01:19 un mot pour vous remercier, vous qui nous écoutez toujours si nombreux.
01:22 Plus de 1,7 million de personnes, soit 3,4 millions d'oreilles,
01:26 dont une part non négligeable, pas d'oreilles, mais de personnes,
01:28 qui préparent le repas.
01:29 Vous faites de "Questions politiques" le premier rendez-vous politique du dimanche
01:33 et ça vous en êtes évidemment les responsables, toutes les trois.
01:36 Bonjour à toutes les trois.
01:38 Nathalie Saint-Cricq de France Télévisions.
01:39 Bonjour Nathalie.
01:40 Bonjour Thomas Négaroff.
01:41 Nous, nous ne pouvons pas préparer le déjeuner.
01:42 Nous avons des familles entières, sauf à savoir si les hommes et les enfants font la cuisine.
01:47 Qui a meurt de faim pendant que nous sommes en train de parler politique.
01:50 On dit ce qu'on dit sous la table, c'est génial.
01:52 Françoise Frissos du Monde.
01:53 Bonjour Françoise.
01:53 Bonjour Thomas, bonjour à tous.
01:55 Et Karine Bécard de France Inter.
01:56 Salut Karine.
01:57 Salut tout le monde.
01:58 Allez, on commence avec vous Françoise et le bruit de la semaine.
02:01 Oui, et je vais vous parler casseroles.
02:03 Alors, pas parce qu'on est dimanche, pas parce qu'on est penchés au-dessus du fumet des fourmeaux,
02:09 mais parce que les casseroles, ces derniers temps, émettent un bruit très politique.
02:13 On les entend battre à chaque déplacement du chef de l'État.
02:15 Jean-Luc Mélenchon appelle demain à un concert de casseroles devant les mairies
02:19 à l'occasion du jour anniversaire de la réélection d'Emmanuel Macron.
02:23 Dans sa dernière note de blog, il s'exalte.
02:26 La casserole, d'abord on l'entend, ensuite on y passe, prévient-il.
02:30 Et il promet de poursuivre ce tintamarre au moins jusqu'au 14 juillet,
02:33 date à laquelle le président de la République doit adresser le bilan de ses 100 jours.
02:37 L'idée, c'est vraiment de pourrir l'avis d'Emmanuel Macron et si possible,
02:41 de faire aboutir cette révolution citoyenne que l'insoumis appelle depuis des années de ses vues.
02:46 Alors, jusqu'à présent, c'est plutôt bien trouvé.
02:49 Le mouvement des casseroles ne passe pas inaperçu.
02:51 Il est difficile à réprimer, sans sombrer dans le ridicule.
02:54 Vous imaginez une charge policière contre des casseroles.
02:58 Le mouvement prospère aussi parce qu'il est détourné avec humour.
03:01 En quelques jours, un géant du commerce et un fabricant de casseroles
03:04 s'en sont servis pour tenter de doper leur vente.
03:06 Il n'y a pas de petit profit.
03:08 Alors, il faut reconnaître à Jean-Luc Mélenchon un certain sens de la mise en scène.
03:11 Déjà, après son échec à la présidentielle, il avait su créer le mouvement
03:15 pour essayer de faire miroiter l'idée d'une cohabitation avec Emmanuel Macron.
03:19 Cette fois, il essaye de rétablir son imprimature sur la nupe qui doute de lui,
03:24 sur l'intersyndical qu'il rejette.
03:26 Il essaye de réactiver le mythe de la Révolution française.
03:29 Un peuple qui, de jour en jour, grossit au rythme des casseroles
03:32 et parvient à destituer le monarque.
03:34 Alors, on n'en est pas du tout là.
03:36 Mais le fait est que hier, Marine Le Pen a quand même pointé son nez en Isère
03:40 pour avoir un bain de foule parce qu'il ne manquerait quand même plus que ça,
03:44 que l'Insoumis lui vole la vedette de ce conflit social.
03:47 - Il n'y a pas eu de casserole hier, avec Marine Le Pen ?
03:50 - Absolument. - Pas de casserole.
03:52 Nathalie, avec vous, on va dans la cuisine, dans l'arrière-cuisine même de la politique,
03:56 souvent avec les enquêtes d'opinion qui ne sont pas très bonnes pour le président de la République.
03:59 - Exactement, et on va remonter un petit peu aux déluges avec toujours la même.
04:02 Comme ça, c'est fidèle, c'est-à-dire des enquêtes de l'IFOP depuis le début de la Ve République.
04:05 Alors aujourd'hui, on dira qu'Emmanuel Macron est tombé très, très bas.
04:09 26% de satisfaits, c'est pas terrible.
04:12 Et surtout quand vous regardez les très mécontents, alors là, vous avez une absolue majorité.
04:18 Mais il est déjà tombé plus bas.
04:20 Rappelez-vous, au moment des Gilets jaunes, il a connu pire.
04:22 Il était à 23, donc 26-23, et ça baisse encore au moment des Gilets jaunes.
04:26 Il avait quand même réussi à remonter de 5 points, à remonter à 30, pardon, en 5 mois.
04:32 - Il avait même réussi à être réélu. - Exactement.
04:35 Alors les sondeurs disent pourtant qu'en général, même si la phrase n'est pas très gracieuse,
04:39 que les sondages, on descend en ascenseur et qu'on remonte en escalier,
04:42 c'est-à-dire qu'il faut avoir patience et longueur de temps pour pouvoir remonter.
04:45 Juste trois petits focus sur les autres, parce que ça faut toujours se comparer.
04:49 François Hollande, septembre 2014, 13% de satisfaits.
04:53 On a oublié, mais c'est tombé quand même vraiment très bas.
04:55 François Mitterrand, c'est encore pour les plus anciens, 22% sous Édith Cresson en décembre 91,
05:01 donc là aussi c'était bien bas.
05:02 En revanche, Valéry Giscard d'Estaing, un mois avant d'être battu en 81,
05:07 il était encore à 40%.
05:09 Dernier petit bonus pour vous, le général de Gaulle, au moment de 68.
05:13 Alors je ne vais pas avoir la cruauté de vous demander à combien il était.
05:16 Eh bien écoutez, en mai 68, il passe de 61 à 54% de satisfaits.
05:21 Je pense que l'exécutif aimerait bien avoir de tels scores.
05:23 - 54% après mai 68, c'est quand même encore pas mal.
05:26 Merci à toutes les trois.
05:28 On accueille notre invitée du jour, Thierry Breton, et l'invité de Questions politiques.
05:32 France Inter.
05:34 Questions politiques.
05:39 Thomas Négaroff.
05:42 - Je viens de commettre un impaire impardonnable en oubliant Karine Bécart.
05:46 Mais vous savez Karine, on va le poser sous forme de questions dans un instant,
05:48 parce que c'est un sujet essentiel pour Thierry Breton, la crise des institutions.
05:52 Est-ce que vous me pardonnez ? - Oui, oui, bien sûr, je vous le permets.
05:54 - Merci beaucoup. Thierry Breton, bonjour. - Bonjour.
05:56 - Vous arrivez dans un moment de crise de l'émission.
05:59 On a vu bien besoin d'un commissaire européen pour ça.
06:01 Première question pour vous, Roger Cohen, éditorialiste américain du New York Times,
06:05 évoque un Emmanuel Macron souffrant d'impopularité en France, je le cite,
06:09 et inspirant la défiance à l'étranger.
06:11 Vous qui voyagez sans cesse en Europe et dans le monde,
06:14 est-ce que c'est un constat que vous partagez ?
06:16 - C'est un constat que je partage pour beaucoup de nos démocraties.
06:20 Et Roger Cohen, qui connaît bien notre pays, notre continent, le sait.
06:28 Moi-même qui, je dirais, de par mes fonctions, parcours en permanence l'Union européenne,
06:35 je peux vous dire que c'est partout pareil dans notre démocratie européenne.
06:39 Certains, du reste, n'y survivent pas.
06:42 Je pense à Sana Marine, la première ministre finlandaise.
06:46 Je pense à la première ministre également suédoise.
06:51 Passons beaucoup de temps en Allemagne.
06:53 Je peux vous dire que la presse allemande est peut-être encore moins, plus dure que la presse française.
07:00 C'est donc possible.
07:02 - Ça nous donne quelques marges.
07:05 - On s'interroge beaucoup, je ne dis pas du reste qu'il faut la copier.
07:08 - Non, non, je veux dire, on s'amuse.
07:10 - On s'interroge beaucoup sur ce qui va se passer avec Pedro Sánchez en Espagne.
07:15 Un peu un swing state, comme on dit, pour les prochaines élections européennes.
07:20 Quant à la Grèce, où je me rends dans trois jours,
07:23 il semblerait que le premier ministre Mitsosakis soit dans une situation très difficile.
07:28 - Ça veut dire que quand on se compare, on se console ?
07:30 - Certains réussissent à se faire réélire, comme c'est le cas d'Emmanuel Macron.
07:34 Pas tous, dans notre Europe.
07:36 C'est vrai que lorsqu'ils sont réélus, voilà, ça continue.
07:39 Alors on essaye peut-être d'habiller ça, j'ai entendu ce que vous disiez,
07:42 par des événements un peu festifs.
07:46 Il ne faut pas s'y tromper.
07:47 Derrière, il y a effectivement un certain nombre.
07:49 - Qu'est-ce qui explique cette crise ?
07:51 - C'est la démocratie.
07:53 - Oui, mais on l'a connu moins troublée, quand même.
07:57 - Oui, c'est vrai, mais c'est la démocratie.
07:59 C'est vrai aussi aux États-Unis.
08:00 Enfin, on se souvient quand même du 6 janvier.
08:03 - 2000 ans, le capitol.
08:05 - C'est la démocratie.
08:06 Donc il faut juste savoir que c'est comme ça que nous fonctionnons.
08:09 - Mais vous voulez dire que la démocratie est de plus en plus contestée ?
08:13 Remise en cause, bousculée ?
08:14 - La démocratie, effectivement, avec les réseaux sociaux,
08:16 avec le fait, vous savez, l'une des grandes mutations,
08:20 on en parlera peut-être tout à l'heure sur le numérique,
08:22 des réseaux sociaux, c'est qu'on est désormais le centre
08:26 de son propre univers informationnel.
08:28 En d'autres parts, en d'autres termes, on est l'éditorialiste de soi-même.
08:32 Chacun peut exprimer, effectivement, une opinion
08:35 et avoir ensuite, je dirais, son audience.
08:37 Certains vont dire c'est affidé, c'est like,
08:41 pour reprendre des éléments que nos auditeurs comprennent.
08:44 Et donc, oui, on donne le sentiment qu'il y a effectivement
08:47 des moments institutionnels, des grands rendez-vous,
08:50 et puis que derrière, on a la capacité de s'exprimer et de contester.
08:54 Il faut s'habituer à vivre avec, il faut veiller,
08:56 et c'est très important, à ce que dans cet environnement,
09:00 les fausses informations ne priment pas sur les bonnes.
09:03 Et ça, c'est un sujet extrêmement important,
09:05 parce qu'effectivement, si jamais on s'abrite derrière
09:08 des fausses informations pour créer des coalitions,
09:10 alors on peut amener des catastrophes, y compris des catastrophes démocratiques.
09:13 Donc c'est aussi l'objet, ça, du DMA, que nous avons mis en place,
09:16 que j'ai mis en place, pour précisément lutter contre ça
09:20 qui impacte massivement notre démocratie.
09:22 – Vous ne trouvez pas qu'on est plus violents que les autres ?
09:24 Juste, quand on entend les cris qu'il y a dans les rassemblements
09:27 contre Emmanuel Macron, on entend des termes que personnellement,
09:30 je n'ai pas entendu, même au moment des Gilets jaunes,
09:32 que je ne vais pas répéter ici, mais des choses comme "trop du",
09:34 enfin, vous pouvez imaginer.
09:36 Est-ce qu'il n'y a pas quand même un degré supplémentaire de haine
09:39 et de personnalisation de la fureur qui nous serait propre ?
09:43 – Et de désacralisation de la fonction présidentielle.
09:45 – Oui, alors, on a effectivement des institutions où le président de la République,
09:49 enfin, en tout cas, la façon dont fonctionnent nos institutions,
09:53 c'est une verticalité que vous dénoncez, il en reste beaucoup d'entre vous,
09:57 mais qui fait partie de l'architecture, de l'ossature de notre Ve République.
10:01 – Mais qui n'est pas réelle, la verticalité, vous la…
10:03 – Si, elle est réelle, et c'est peut-être la raison pour laquelle, évidemment,
10:06 tout va converger, évidemment, vers le sommet.
10:09 C'est vrai qu'aux États-Unis, où la violence est extrême,
10:12 enfin, pardon de le dire, je suis souvent aux États-Unis,
10:14 je peux vous dire que la violence est extrême, mais pas que.
10:16 Regardez ce qui se passe au Japon.
10:18 Et puis, vous parliez tout à l'heure de la haine et de la violence,
10:21 et des concerts de casserole.
10:22 J'étais, il y a quelques mois, en Corée,
10:25 c'étaient des concerts de casserole tous les soirs.
10:28 Voilà, je ne dis pas, encore une fois, que c'est la façon dont fonctionne le monde,
10:31 je dis simplement qu'il faut, peut-être, mettre ça dans cette perspective,
10:36 et puis veiller, alors maintenant, à des choses qui sont absolument fondamentales,
10:40 le respect de l'ordre républicain, le respect des individus,
10:43 le respect de la propriété, et là, on voit les incivilités.
10:46 Alors, peut-être, oui, qu'en France, les incivilités vont peut-être plus loin
10:49 que dans d'autres pays, et ça, c'est une missive.
10:51 – Alors, je reviens sur, vous parliez des institutions,
10:53 est-ce que les institutions mériteraient, au vu de tout ce qu'on a vu ces dernières semaines,
10:56 d'être un peu revues, corrigées ?
10:59 Est-ce que, par exemple, le Président a aujourd'hui trop de pouvoir,
11:02 trop de pouvoir aux yeux de cette autre légitimité qu'est la légitimité citoyenne ?
11:06 Est-ce que, par exemple, le 49-3 peut continuer à être appliqué
11:09 comme il est aujourd'hui en France ?
11:10 – Bien sûr, puisque ce sont des institutions, il est hors de question, évidemment,
11:13 d'abord que moi, en tant que Commissaire européen, je porte un jugement
11:16 sur les systèmes démocratiques, qui sont les systèmes démocratiques
11:19 de chacun des 27.
11:20 Je ne vous fais que vous livrer, aujourd'hui, une vision globale de ce qui se passe.
11:25 – Mais une constitution peut être révisée, est-ce que c'est nécessaire ?
11:28 – Mais je ne dis absolument pas cela, et je ne dirai pas cela,
11:32 et je sortirai de mon rôle en vous le disant, donc je ne le dirai pas.
11:35 Je sais que nos institutions, elles ont fonctionné, elles fonctionnent,
11:38 en revanche, et je le redis, il y a des choses qui sont, me semble-t-il,
11:43 inacceptables, tant d'un point de vue, évidemment, des États membres et de la France,
11:48 mais aussi, je suis Commissaire au marché intérieur,
11:50 du fonctionnement du marché intérieur, lorsque un certain nombre de personnes
11:54 vont bloquer, je dirais, un État, un pays, des routes,
12:02 le fonctionnement, donc, du marché intérieur, ça c'est inadmissible,
12:05 et ça doit être répréhendé.
12:06 – Mais Thierry Breton, face à la colère sociale, vous étiez à l'époque
12:09 ministre de l'économie de Jacques Chirac, Jacques Chirac avait promulgué
12:12 et abrogé en même temps la CPE, le contrat de première embauche
12:16 que vous aviez, en tant que ministre de l'économie, largement porté à bout de bras,
12:20 est-ce qu'Emmanuel Macron aurait dû s'en inspirer de cette colère sociale
12:24 et de cette légitimité, peut-être, de la foule dans les rues ?
12:27 – Comparaison n'est absolument pas raison, on ne va pas refaire l'exégèse du CPE,
12:30 je connais ça par cœur, on pourra faire une émission dessus,
12:32 je vous dirai exactement comment c'est venu et comment c'est arrêté,
12:35 c'est absolument pas comparable, je ne vais pas, encore une fois,
12:39 commenter sur ce qui se passe dans tel ou tel pays, il appartient…
12:44 – Là, en l'occurrence, on parle de la France, et vous étiez ministre de l'économie
12:47 à ce moment-là, et on avait beaucoup dit à l'époque que Jacques Chirac
12:50 avait eu la sagesse de répondre à cette colère sociale.
12:53 – C'était Dominique de Villepin qui avait porté, effectivement, cette réforme,
12:58 et la question, c'est une question pour les historiens,
13:01 est-ce qu'au fond, Jacques Chirac était en faveur de lancer cette réforme ?
13:06 Je vous invite à vous poser cette question.
13:08 – Oui, mais on parlait de sagesse, en fait, de Jacques Chirac,
13:10 est-ce que finalement, Emmanuel Macron manque de sagesse, peut-être,
13:13 sur ce défi ? – Non, je ne dis absolument pas ça, mais non.
13:15 Non, et encore une fois, je vous invite vraiment à regarder
13:21 ce qui se passe dans tous les pays.
13:23 Chacun gère, effectivement, sa démocratie comme elle doit la gérer,
13:28 avec ses propres règles.
13:29 C'est vrai que nous, dans notre système démocratique,
13:31 c'est plus compliqué de faire des coalitions,
13:34 mais c'est vrai aussi qu'il va falloir sans doute s'y habituer,
13:36 parce qu'on vit aussi, désormais, au fond, qu'est-ce que je vous dis
13:40 depuis le début de notre entretien ?
13:42 Je vous dis qu'on vit de plus en plus dans une sorte de fragmentation
13:46 de la vie politique, mais la vie politique des vies politiques démocratiques.
13:50 Donc il faut nous habituer à gérer ces fragmentations.
13:52 Certains pays le font mieux que d'autres,
13:55 parce qu'ils ont l'habitude de se consensus,
13:57 de trouver des consensus, de bâtir des coalitions.
14:01 Nous, c'est moins le cas.
14:02 Il va sans doute falloir le faire.
14:03 Il me semble que c'est ce que le président de la République essaye de faire.
14:06 – François de Frissos.
14:07 – Alors, vu de Bruxelles, cette réforme des retraites
14:09 va s'inscriver dans une philosophie du président de la République
14:12 d'augmenter le volume du travail en France pour soutenir la croissance
14:16 et puis réduire aussi les déficits.
14:18 Est-ce que le chemin vu de Bruxelles est suffisant, encourageant,
14:22 ou est-ce que vous dites on est encore loin du compte,
14:25 étant donné l'étendue de notre endettement et de nos déficits ?
14:30 – Alors d'abord, je le dis parce que cette question m'a souvent été posée,
14:35 ce n'est pas Bruxelles qui demande de faire la réforme des retraites.
14:38 – La principale reproche qu'on a fait, c'est dire à Emmanuel Macron
14:41 d'en fait qu'il déguisait des ordres que vous nous donniez.
14:44 – Voilà, alors je le redis, ça permet de le redire pour la énième fois.
14:48 Certains vont me croire, d'autres pas, c'est la réalité.
14:50 Ce n'est pas une fake news ce que je vous dis.
14:52 D'ailleurs, on pourra raconter des fake news, celle-là c'est la réalité.
14:55 Maintenant, de quoi s'agit-il ?
14:57 Vu de Bruxelles, puisque vous parlez de Bruxelles.
15:00 La France est un grand pays,
15:02 la France est un pays qui aujourd'hui est le pays qui est le plus endetté
15:07 en valeur absolue de tous les pays européens.
15:09 C'est-à-dire que nous avons aujourd'hui près de 3 000 milliards de dettes en euros.
15:14 Donc on est le pays qui est le plus endetté en euros,
15:17 en Europe, peut-être même ailleurs.
15:20 Ça veut donc dire, qu'est-ce que ça veut dire pour nos auditeurs et nos téléspectateurs ?
15:24 Ça veut dire que, au fond, l'État, pour fonctionner, évidemment,
15:30 cette dette elle est là, donc il faut la rembourser.
15:33 Et donc il y a une maturité, c'est-à-dire qu'on rembourse,
15:36 on emprunte des morceaux de cette dette à des créanciers.
15:39 Ce ne sont pas les marchés, on emprunte à des personnes,
15:42 on emprunte à des institutions, on emprunte à des fonds de rentrées,
15:45 on emprunte à des entreprises.
15:47 Donc on emprunte à des prêteurs et on leur rembourse.
15:50 La durée moyenne de la dette de remboursement, ce qu'on appelle la maturité,
15:53 c'est 8 ans et demi, donc on rembourse au bout de 8 ans et demi,
15:55 entre-temps on paye des intérêts.
15:57 Et ça, ça veut dire qu'on va précisément devoir rembourser ces montants
16:02 à hauteur de 270 milliards par an.
16:05 Donc il va falloir emprunter, la même chose puisqu'on ne les a pas.
16:08 Donc on rembourse, on emprunte.
16:09 – On emprunte pour rembourser.
16:10 – Et donc, quand on devient, effectivement,
16:13 quand on est le premier émetteur de dette en euro au monde,
16:15 eh bien on est regardé.
16:17 Souvenez-vous ce qui s'est passé en Grande-Bretagne avec l'East Trust,
16:20 qui avait une dette aussi très significative,
16:23 et puis qui a voulu s'exonérer des règles,
16:27 elle a duré qu'un jour.
16:28 Parce qu'évidemment, les prêteurs ont dit "on ne marche pas".
16:31 Je ne dis pas qu'on en est là, mais je dis que c'est un élément
16:33 très important à prendre en considération.
16:35 Deuxième élément, en ce qui concerne, donc,
16:37 effectivement, la réforme des retraites.
16:40 La France est le pays qui dépense le plus de tous les pays du monde
16:46 pour le fonctionnement de la puissance publique, 58%.
16:51 Et la France dépense, c'est des chiffres qui sont importants,
16:55 800 milliards par an, pour notre système de protection sociale
16:59 dont on dit qu'il est le plus généreux, et je pense que ce n'est pas faux.
17:02 Mais comment fonctionne notre système de protection sociale ?
17:04 Il est assis sur quoi ?
17:06 Il est assis sur les employeurs, de ceux qui travaillent.
17:11 Vous savez, quand vous recevez...
17:13 - Il est aussi assis sur ceux qui travaillent.
17:15 - Je veux juste dire, au bout de ma pensée,
17:18 il est assis sur, encore une fois, pour la sécurité sociale,
17:22 il est assis sur, précisément, le niveau, quand vous avez votre fiche de paye,
17:26 vous avez...
17:27 - Les cotisations patronales et les cotisations salariales.
17:29 - Voilà, c'est ce que je dis.
17:30 - Et salariales.
17:31 - D'accord, mais c'est payé, donc, effectivement,
17:33 c'est payé par votre employeur, bien sûr, et vous avez ensuite le brut.
17:36 En gros, il y a un différentiel, une quarantaine, un peu plus, de 2%.
17:41 Donc, au fond, notre système de financement des prestations sociales
17:46 repose sur les actifs et leurs employeurs.
17:51 Ça veut donc dire qu'à partir du moment où, vous diriez,
17:55 je sais que certains ont ce projet politique,
17:58 de dire, finalement, on va passer de 62 ans à 60 ans pour un départ à la retraite,
18:02 bien sûr, quand vous partez en retraite, vous bénéficiez, et c'est normal,
18:05 et j'allais dire, heureusement, de l'ensemble des prestations sociales,
18:09 évidemment, et toute la poursuite de votre vie, évidemment,
18:12 mais vous allez baisser de 5%, en gros, ce qui est la rentabilité.
18:18 - Non, mais justement, François, je me disais, est-ce que c'est suffisant, ce qu'on a fait ?
18:21 - Non, mais attendez, je ne parle pas de la retraite, là.
18:23 Je parle, encore une fois, c'est le nombre d'actifs au travail...
18:26 - Le tout système social, le rapport actif-inactif.
18:27 - À partir du moment où vous baissez, effectivement, le nombre d'actifs au travail,
18:31 vous baissez d'autant le montant qu'on va pouvoir se partager
18:35 pour faire fonctionner notre système social.
18:38 Donc, là, l'indice qui a été fait, c'est que, comme la durée de vie,
18:41 ça allonge dans tous les pays d'Europe,
18:43 que beaucoup des pays d'Europe fonctionnent, comme pour nous,
18:46 pour faire fonctionner leur système de protection sociale,
18:48 eh bien, il fallait rallonger.
18:49 Ce n'est pas uniquement pour financer la retraite.
18:51 C'est pour ça que je pense qu'il y a peut-être un élément à rajouter.
18:54 C'est tout simplement pour pouvoir se payer notre système de protection sociale,
18:58 collectivement, c'est un projet collectif.
19:00 Et donc, c'est la raison pour laquelle, tout simplement,
19:02 tous les pays d'Europe prolongent maintenant la durée de vie...
19:05 - Oui, à condition que le taux d'emploi des seniors augmente.
19:07 Parce que sinon, ça coûte encore plus cher.
19:09 - La durée de vie au travail, et je ne le dis pas encore une fois,
19:12 et je comprends très bien, c'est un sujet extrêmement intime,
19:15 mais il ne peut se comprendre que si on lui donne une dimension collective.
19:20 Collective et d'intérêt général commun.
19:22 C'est ce que font la quasi-totalité, même la totalité des pays européens,
19:25 puisque la moyenne d'âge maintenant est de plus ou moins de 66 ans.
19:28 Et donc, c'est dans ce sens-là qu'effectivement,
19:30 si on dit que c'est uniquement pour boucher un trou de 13 milliards,
19:34 c'est difficilement peut-être compréhensible.
19:36 Mais, vu de Bruxelles, puisque vous m'interrogez,
19:38 je vous réponds, vu de Bruxelles, la question qui se pose,
19:41 c'est effectivement la soutenabilité d'un système qui est très généreux.
19:46 - Est-ce que c'est assez ?
19:47 - Et je vais vous dire une chose, et on va finir par ça.
19:50 Au fond, vous faisiez référence tout à l'heure, Mme Saint-Cricq, à François Mitterrand.
19:55 Alors, on va y revenir.
19:56 François Mitterrand est celui qui a dit,
19:59 "Eh bien, dans mon projet, vous savez, ces fameuses propositions..."
20:03 - "Ce sont 10 propositions."
20:04 - "Il y avait, on va revenir à 60 ans, de 65 à 60 ans."
20:08 Sans se poser d'autres questions, donnant le sentiment à nos compatriotes
20:11 que c'était une avancée sociale équivalente à celle de 36.
20:15 Il l'a fait, mais en même temps, qui invente la dette ?
20:19 François Mitterrand, avec le motif.
20:21 Il invente la dette parce que, comme on ne met pas la productivité,
20:24 la compétitivité en face pour baisser drastiquement de 65 à 60 ans
20:28 le financement de l'ensemble de l'institution, il va commencer...
20:32 Je vais aller au bout, c'est très important, à endetter massivement le pays.
20:35 La dette de la France commence sous François Mitterrand
20:39 pour financer les déficits du fonctionnement de ce qu'on a appelé,
20:42 vous vous souvenez, pendant un certain temps,
20:44 notre 3e voie. Et si la France n'avait pas inventé une 3e voie ?
20:47 Vous savez ce que c'est, la 3e voie ?
20:49 C'est le surendettement de la France.
20:51 Donc pas maintenant, il va falloir le traiter.
20:53 - Alors justement, est-ce que Emmanuel Macron le traite suffisamment ?
20:56 C'était un peu la question de... François, si je traduis bien ces inquiétudes...
20:59 - Toujours, très bien.
21:01 - Est-ce que c'est suffisant pour mettre la France en dessus-dessous,
21:05 mais insuffisant pour sauver les systèmes de protection sociale ?
21:08 - Pour vous aider à répondre, on écoute Bruno Le Maire,
21:11 il était cette semaine sur LCI, voilà qui est parfait.
21:13 - Quel concorde !
21:15 - Le ministre de l'Economie.
21:17 - Il faut sortir de la politique du chéquier,
21:19 il faut sortir de la politique des chèques exceptionnels,
21:21 il faut sortir du quoi qu'il en coûte,
21:23 qui a été, je le dis, exceptionnellement efficace,
21:26 et juste, ça a protégé nos usines, ça a protégé nos entreprises,
21:29 ça a protégé les salariés et les compétences,
21:31 et donc on a relancé très vite.
21:33 Mais maintenant que la croissance revient,
21:35 que nous anticipons une baisse de l'inflation d'ici l'été prochain,
21:39 et en 2024, je pense, une inflation qui devrait vraiment
21:42 se stabiliser à des niveaux beaucoup plus faibles,
21:45 c'est maintenant qu'il faut engager ce rétablissement.
21:47 - Alors, pour prolonger la question,
21:49 est-ce qu'il n'y a pas quelque chose d'un peu risqué ?
21:51 On prévoit une baisse de l'inflation,
21:53 on espère une croissance,
21:55 et on arrête le quoi qu'il en coûte,
21:56 est-ce qu'on n'est pas dans un entre-deux un peu dangereux ?
21:58 - Non mais d'abord, et si on poursuit une seconde,
22:01 puis je vais répondre évidemment, et je suis tout à fait en accord
22:03 avec ce que vient de dire le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire.
22:07 Si on poursuit une seconde,
22:09 l'un des problèmes de communication politique, peut-être,
22:12 mais je le dis ça de vue de Bruxelles, donc je ne porte pas de jugement,
22:15 c'est qu'au moment où, effectivement, il faut expliquer à nos compatriotes,
22:18 comme on l'explique partout dans tous les pays, les autres pays européens,
22:21 qu'il faut avoir ce projet collectif,
22:23 de savoir comment on peut continuer à financer notre protection sociale
22:26 qui est si importante pour nous tous,
22:28 et que celle-ci étant assise sur l'activité,
22:32 pour les raisons que j'ai indiquées,
22:34 il faut poser la question comme ça,
22:35 mais comme au même moment, on a l'impression que l'argent tombe du ciel,
22:38 avec évidemment, d'abord, la réponse extrêmement rapide et généreuse
22:43 et qui était nécessaire de la crise du Covid,
22:45 et puis ensuite, l'échec anti-inflation qui était nécessaire
22:50 par rapport à la crise énergétique,
22:52 donc d'un côté, on donne le sentiment français que l'argent tombe du ciel,
22:55 de l'autre côté, on leur dit qu'il faut faire, évidemment,
22:57 commencer à réfléchir collectivement.
22:58 Et c'est vrai que là, il y a sans doute un arc électrique qui peut se produire,
23:02 mais il n'en demeure pas moins qu'il fallait faire les deux,
23:05 que désormais, Bruno Le Maire a parfaitement raison.
23:08 Il s'agit maintenant de redonner une trajectoire,
23:10 c'est du reste que nous demandons maintenant au pays,
23:12 à chacun des États membres,
23:13 donner une trajectoire pour revenir dans une normalité.
23:16 Je rappelle que la normalité, ce n'est pas 3% de déficit.
23:20 3% de déficit, sur un budget de l'État qui est le nôtre,
23:23 ça veut dire encore une fois de la dette.
23:25 C'est d'être à l'équilibre, parce que dès que vous êtes en déficit…
23:28 – Attendez, à l'équilibre, ça veut dire plus de déficit budgétaire ?
23:31 – Non, non, mais ça, ça a toujours existé.
23:33 – Ah ben, on en est très très loin.
23:35 – Mais pour tous les pays.
23:36 – Ça arrivait quand pour la France la dernière fois ?
23:38 – C'est pour ça, on était en excédent primaire,
23:40 lorsque j'étais à Bercy avec Jean-François Coppé.
23:42 En excédent primaire, ça veut dire avant de s'adapter à la dette.
23:45 – Oui, c'est très bien, avec du déficit quand même.
23:48 – Oui, mais très bien, ça se traduit par de la dette.
23:50 Derrière, encore une fois, on autorise d'aller jusqu'à 3%.
23:53 Il y a ensuite le projet politique, l'acceptabilité politique de dire,
23:56 on peut aller jusqu'à 3%, mais ça veut dire qu'on explique aussi
23:59 à nos compatriotes que c'est les enfants qui vont payer.
24:01 Et que c'est en gros un impôt sur le revenu en plus qu'on fait payer par les enfants.
24:05 Très bien, et ça, on peut en discuter, c'est un sujet politique,
24:08 il ne m'appartient pas de le commenter.
24:10 En revanche, ce qui m'appartient de commenter, c'est de dire qu'aujourd'hui,
24:13 on a demandé à chaque État, effectivement, de se remettre dans une perte de normalité
24:18 pour éviter, effectivement, d'aller vers un sur-endettement
24:21 qui pourrait avoir les conséquences qu'on a évidemment à peine esquissées
24:24 au début de notre entretien, et donc, revenir progressivement sous les 3%.
24:29 Donc, chaque pays maintenant donne sa trajectoire.
24:31 Ce que je peux vous dire, je ne vais pas commenter chacun des pays,
24:33 mais ce que je peux vous dire, c'est que, à l'horizon 2024-2025,
24:36 la quasi-totalité des pays ont une trajectoire en dessous de 3%.
24:39 - Mais est-ce que ça veut dire que... - La quasi-totalité ?
24:41 - Est-ce que ça veut dire... - Non, je ne parle pas de la France,
24:43 je dis qu'aujourd'hui. - Thierry Breton, est-ce que ça veut dire
24:45 que, là, vous parlez en votre nom, dans la commission, ça veut dire que demain,
24:48 le nouveau dogme de la commission, c'est plus 3, c'est 0 ?
24:50 - Mais non, mais attendez, c'est pas ça que c'est la commission, c'est les traités.
24:53 - C'est plus 10. - C'est pas moi, ça.
24:55 - Les traités disent pas 0. - Non, non, les traités disent que c'est 0,
24:57 mais on peut aller jusqu'à 3%. - Ah ben oui, ben...
24:59 - Ah ben non, mais oui, mais oui. Mais on dit, la cible, bien entendu,
25:01 la cible, c'est d'être à l'équilibre. Au fond, un budget, c'est fait pour être équilibré.
25:04 Donc, si on peut, dans des cas particuliers, aller jusqu'à 3%,
25:07 ça n'a pas changé. Je ne donne aucune information nouvelle.
25:10 - Donc, la France n'était pas... - Ça a toujours été comme ça.
25:12 - ... ce que vous dites. - Ce que je dis, c'est qu'aujourd'hui,
25:14 maintenant, les États membres vont nous donner leur projection,
25:17 et que dans ce qui remonte aujourd'hui, dans les discussions qu'on peut avoir,
25:20 c'est qu'effectivement, à l'horizon 2025 à peu près,
25:22 la quasi-totalité des États membres, donc, travaille sur des trajectoires en dessous de 3%,
25:26 et que, et que, il y a aussi du désendettement qui est mis en œuvre
25:30 dans la quasi-totalité, la totalité même maintenant, des pays de l'Union européenne.
25:33 Certains, avec l'ambition de revenir avant le taux d'endettement exceptionnel de la crise de Covid,
25:37 parce qu'on a eu quand même une situation extraordinaire,
25:39 qui a nécessité du reste, en France, de passer de 96% d'endettement à 116.
25:45 Mais, pratiquement, tous les pays l'ont fait, à des proportions un peu diverses.
25:48 Certains, comme ambition de revenir dans les 2-3 ans,
25:51 là où ils étaient avant ce moment exceptionnel de la crise de Covid,
25:55 d'autres un peu moins.
25:56 Tout le monde, je dis bien tout le monde, a cette trajectoire de réduction de l'endettement,
26:00 avec, il faut le dire aussi un petit peu,
26:02 on a aujourd'hui une inflation qui est une inflation encore très forte.
26:06 C'est vrai que ça aide un peu à baisser l'endettement.
26:09 Il faut, encore une fois, tout est à prendre.
26:11 Je l'ai fait, j'ai réduit l'endettement de la France, quand j'étais ministre.
26:15 Il faut avoir un chantier avec de multiples trajectoires,
26:18 avec de multiples cheminements pour pouvoir le faire.
26:22 Et à la fin, oui, il faudra le faire, mais ce n'est pas uniquement la France.
26:25 C'est tous les États membres.
26:27 Il y va, effectivement, je dirais, de la solidité de l'euro.
26:32 Et puis, je voudrais terminer par un point.
26:33 Quand j'entends que certains disent, si nous revenons au pouvoir en 2027,
26:39 ou je ne sais pas, ce que j'ai entendu ici en France,
26:41 nous abrogerons cette réforme et on reviendra immédiatement à 62, voire à 60 ans.
26:46 Marine Le Pen, c'est ça ?
26:48 Eh bien, je vais vous dire une chose. Je prends le pari.
26:50 Personne ne le fera.
26:52 Personne ne le fera, parce que ce sera absolument impossible,
26:55 compte tenu de tout ce dont on vient de parler et des trajectoires.
26:58 Et souvenez-vous, souvenez-vous,
27:00 Elle dira que c'est l'Europe qui l'empêche de le faire.
27:01 Souvenez-vous de ce qui s'est passé en Grande-Bretagne,
27:05 où il n'y a plus d'Europe, madame,
27:07 et où elle a voulu le faire, et elle a duré qu'un jour.
27:10 Donc, je vous l'annonce aujourd'hui,
27:12 personne ne reviendra sur cette retraite,
27:14 et je pense même qu'Emmanuel Macron restera dans l'histoire comme celui qui l'a fait.
27:19 *Musique*
27:25 Thierry Breton est notre invité jusqu'à 13h, très en forme Thierry Breton.
27:28 Ce midi, vous avez rencontré, il y a quelques mois, Elon Musk,
27:31 notamment patron de Twitter aujourd'hui.
27:33 Vous lui aviez demandé à l'époque de respecter les normes européennes.
27:35 On en avait parlé ici d'ailleurs sur les contenus en ligne,
27:37 et depuis, et cette semaine en particulier, je ne sais pas si vous avez vu,
27:40 les comptes certifiés ont disparu de Twitter, autrement dit,
27:42 c'est devenu une sorte de far-west informationnel sur la plateforme.
27:45 Est-ce que ça vous inquiète ? Est-ce que vous allez rappeler Elon Musk ?
27:48 D'abord, je suis comme beaucoup d'utilisateurs de Twitter, je n'ai rien compris.
27:51 Oui, parce qu'on a vu ce matin, vous avez une nouvelle couleur, vous.
27:54 Vous êtes couleur un peu argent.
27:56 Non, je suis gris.
27:57 Oui, gris, voilà.
27:58 Mais je crois que j'étais toujours gris.
27:59 *Rires*
28:00 Voilà, j'étais gris.
28:01 Je suis gris, je ne suis pas bleu, je suis gris.
28:03 Non, non, on sourit, mais c'est quand même assez dangereux.
28:05 Oui, alors je vais vous dire.
28:07 Donc, j'ai proposé à l'ensemble des plateformes,
28:10 comme vous savez, nous avons mis en place maintenant notre nouvelle loi.
28:14 Alors, elle va s'appliquer, donc, je le dis parce que c'est très important,
28:18 c'est vraiment une loi qui va changer fondamentalement
28:21 le respect des individus en ligne, le respect de nos vies privées,
28:25 l'interdiction de tout ce qui est... des fake news, tiens.
28:28 Là, on va enfin commencer à les contrôler,
28:30 donc profitez-en encore pendant quelques temps,
28:32 il y en a beaucoup qui le font parce qu'on va les rattraper.
28:34 Et tout ça va fonctionner, donc, pour les plateformes dites systémiques.
28:38 Donc, je vais annoncer, cette semaine, qui sont ces plateformes systémiques.
28:42 Je ne peux pas encore vous le dire, je suis obligé de tenir un calendrier.
28:44 *Petit peu, hein ?*
28:45 Non, je suis obligé de vous le dire.
28:46 Je peux vous dire qu'il y en a entre 19 et 25, voilà.
28:49 *Ah, quand même !*
28:50 Voilà.
28:51 Donc, on est en train de finaliser tout cela.
28:53 Donc, c'est des plateformes systémiques,
28:55 ce sont celles qui ont plus de 45 millions d'utilisateurs sur le continent européen.
28:59 Pourquoi 45 millions ? Ça représente à peu près 10% des utilisateurs.
29:02 Donc, on estime qu'à partir du moment où vous touchez 10%, vous êtes une plateforme systémique.
29:07 Je vous laisse imaginer qui peut en être ou pas, vous allez avoir sans doute des surprises.
29:10 *Beaucoup d'Américains.*
29:11 Peut-être que celui dont on parle, il sera, en tout état de cause.
29:14 J'ai proposé à ces plateformes de faire, parce qu'elles ont maintenant,
29:18 dès qu'on va leur notifier qu'elles sont des plateformes systémiques,
29:22 elles vont devoir très vite changer radicalement leur fonctionnement
29:26 si elles veulent continuer à opérer en Europe.
29:29 Donc, je rappelle quand même que c'est le premier marché numérique du monde libre.
29:32 On est une fois plus ou une demi plus gros que les Etats-Unis.
29:34 *Alors, très concrètement, ça veut dire que...*
29:36 Très concrètement, ça veut dire qu'on va donc vérifier ce qui se passe dans leurs algorithmes,
29:39 ce qu'ils vont pousser, combien ils ont de modérateurs,
29:42 si les modérateurs se font bien dans chacune des langues de l'Union...
29:44 *On sera protégés de quoi, clairement ?*
29:46 On sera protégés du harcèlement en ligne,
29:51 on sera protégés des fake news,
29:53 on sera protégés de beaucoup de choses aujourd'hui dont on se plaint,
29:55 je ne vais pas revenir, mais tout ce qui fait qu'aujourd'hui,
29:57 dans l'espace informationnel, on a le sentiment qu'on est dans un espace de non-droit,
30:01 alors qu'on est dans un espace de droit,
30:03 peut-être, mis à part les incivilités dont je parlais tout à l'heure,
30:06 je ne sais pas qu'elles sont corrigées,
30:08 dans l'espace physique.
30:09 Ça, ça va être corrigé.
30:10 Mais ce que je voulais dire pour répondre, donc, sur Elon Musk,
30:13 donc j'ai proposé à ces plateformes de procéder avant le mois de septembre,
30:17 où la loi va devenir de droit,
30:20 d'aller faire des audits en blanc,
30:25 parce qu'à partir du mois de septembre,
30:27 pour toutes celles qui oeuvrent,
30:29 je suis en train de créer une équipe,
30:31 qui est une équipe extrêmement performante,
30:32 qui va faire des, pardon cette expression, des descentes,
30:35 quand elle est streamer, elle va le faire,
30:37 parce qu'elle voit qu'il y a des problèmes dans telle ou telle plateforme.
30:39 *Il y a un nouveau shérif dans la ville, c'est vous.*
30:40 Et donc, on va le faire, mais comme mon objectif c'est quoi ?
30:43 C'est au fond que ces plateformes, évidemment,
30:46 respectent désormais notre droit européen,
30:48 donc j'aurais proposé de faire des audits en blanc,
30:51 et figurez-vous que Elon Musk a accepté,
30:53 donc j'irai faire un audit en blanc,
30:56 et donc je serai en capacité de répondre plus précisément à cette question,
31:00 parce que c'est l'un des points que je regarderai.
31:02 Et ça, ce sera fait avant, évidemment, le mois de septembre.
31:04 *Mais c'est pas presque un bras d'honneur, ça, de faire ça cette semaine ?*
31:07 *De faire ça, de désertifier des comptes ?*
31:09 *Ca veut dire que, pour des tas de gens, le New York Times est aussi sérieux
31:13 que n'importe quel véhicule de fausses informations ?*
31:16 Mais encore une fois, il fait ce qu'il veut avant le 1er septembre,
31:21 à partir du 1er septembre, comme je l'ai dit,
31:23 il fera ce que nous lui demanderons de faire,
31:26 s'il veut continuer à opérer.
31:27 *Rendez-vous le 2 septembre, pour vite réfléchir tous !*
31:30 Mais même avant, parce que j'ai l'intention de me rendre en Californie,
31:33 pour participer à cet audit moi-même.
31:35 *Et juste, quand vous dites "je vais avoir une super équipe", c'est combien de personnes ?*
31:38 C'est une centaine de personnes.
31:40 *C'est pas beaucoup ?*
31:41 C'est énorme.
31:42 Parce qu'évidemment, on a 20-25 plateformes,
31:47 et ce ne sont que des spécialistes extrêmement pointus.
31:51 Ce sont des gens qui maîtrisent parfaitement l'algorithmique,
31:55 ce sont des data scientists, ce sont des docteurs en informatique,
31:58 ce sont des gens très pointus.
31:59 Et tu vois, je suis très impressionné par le nombre de CV que nous recevons,
32:03 de jeunes qui sont mobilisés, y compris dans ces domaines,
32:05 par l'intérêt général.
32:06 Moi je trouve ça extraordinairement gratifiant,
32:09 de travailler avec des jeunes comme ça,
32:11 qui pourraient se voir offrir des montants considérables précisément,
32:14 chez ces plateformes,
32:16 et qui vont venir travailler dans mes équipes,
32:18 pour défendre l'intérêt général européen.
32:19 Il y en a beaucoup plus qu'on le croit.
32:21 *Alors il y a la défense des fausses informations, et puis il y a la défense des cyberattaques.*
32:24 *C'est pas du tout de la même nature, mais ça nous met effectivement en danger.*
32:27 *Et là vous avez fait des annonces importantes, notamment ce nouveau plan,*
32:31 *de lutte contre les cyberattaques.*
32:32 *Les cyberattaques, on n'arrive même pas à les quantifier tellement il y en a,*
32:35 *tous les jours sur notre continent européen.*
32:37 *Et la question que je voulais vous poser, c'est, est-ce que les pays européens sont suffisamment unis entre eux,*
32:41 *pour affronter collectivement les cyberattaques, sachant que, eux-mêmes, parfois entre eux,*
32:45 *se mènent des cyberattaques ?*
32:47 C'est tout mon problème.
32:48 Je suis commissaire aussi aux industries de défense numériques.
32:51 On pourra parler aussi de la défense, si vous voulez, tout à l'heure.
32:53 Et donc tout mon problème, c'est de démontrer en permanence.
32:56 Tout mon problème.
32:57 C'est mon travail, j'allais dire.
32:58 *Votre défi, votre défi.*
32:59 C'est mon travail.
33:00 De démontrer en permanence,
33:01 que l'Europe est plus forte si elle est unie et solidaire.
33:04 Et d'avoir du leadership derrière.
33:06 Alors j'essaie d'incarner dans mon domaine le leadership,
33:08 mais il faut aussi de l'unité, et il faut évidemment de la solidarité.
33:11 Et s'il y a un domaine où il faut effectivement de l'unité et de la solidarité,
33:15 c'est bien dans le domaine de la cybersécurité.
33:17 Et donc nous avons proposé, d'abord avec mon collègue Joseph Borrell, qui est le haut représentant,
33:21 on a travaillé à quelque chose qui est tout à fait inédit,
33:24 c'est-à-dire qu'on a un compass, on appelle ça une boussole stratégique,
33:27 c'est-à-dire un livre blanc, donc de la défense,
33:29 qui a été, évidemment, approuvé par l'ensemble des 27 États membres,
33:33 et où on qualifie évidemment nos nouvelles menaces,
33:36 y compris dans des espaces que nous appelons contestés.
33:38 Qu'est-ce que c'est qu'un espace contesté ?
33:39 C'est un espace dans lequel il peut y avoir des interventions qui ne sont pas territoriales,
33:43 il y a l'espace évidemment tout court, il y a l'espace cyber, et puis il y a l'espace maritime.
33:47 Pour l'espace tout court, vous savez que j'ai mis en place,
33:50 avec évidemment maintenant l'ensemble des services de la Commission,
33:53 une constellation qui s'appelle Iris,
33:55 et qui va donc protéger notre espace, je dirais,
33:59 avec des constellations de satellites, notamment en orbite basse.
34:03 L'espace cyber, donc maintenant, on va déployer cette volonté
34:07 qui a été énoncée par l'ensemble des ministres de la Défense européens
34:10 et par l'ensemble des chefs d'État.
34:11 Et donc, on a proposé, et maintenant c'est cet acte,
34:16 donc on appelle ça le Cyber Solidarity Act,
34:19 donc c'est l'acte de cybersécurité solidaire,
34:21 où on va mettre en place un dôme cyber, un véritable dôme cyber,
34:26 donc un espèce de bouclier cyber,
34:28 articulé sur 7, 8, 9, donc on appelle ça des SOCs,
34:32 c'est-à-dire des Centres Opérationnels de Sécurité.
34:36 En gros, c'est quoi ?
34:37 Ce sont des supercalculateurs avec des algorithmes d'intelligence artificielle
34:41 qui vont connecter à l'ensemble des réseaux de plusieurs pays, du reste,
34:44 qui vont détecter de façon préemptive des menaces,
34:47 parce que le problème de la menace cyber,
34:48 c'est qu'évidemment il faut la détecter avant qu'elle ne génère ses impacts.
34:52 Et donc, on sait le faire, et on va le faire maintenant de façon coordonnée.
34:55 On a lancé un pilote pour ça, avec 17 pays et 3 SOCs,
35:02 qui va fonctionner début 2024,
35:04 et derrière, on a donc cet acte cyber,
35:09 où on va avoir pour la première fois un dôme de protection
35:12 de l'ensemble de nos infrastructures cyber en Europe,
35:15 en particulier énergétique, mais pas que,
35:17 les réseaux, les entreprises, les administrations, nos institutions, etc.
35:22 Connecter aussi sur, parce que vous avez raison,
35:25 les compétences cyber de chacun des États membres,
35:27 et puis surtout, on va créer, c'est quelque chose qui était très cher,
35:31 je dirais, pour moi, c'était créer,
35:34 on réfléchissait à faire une armée cyber,
35:36 mais en fait on a fait une réserve, c'est encore mieux, une réserve cyber.
35:39 C'est-à-dire que pour des volontaires qui ont ces compétences
35:42 dont je faisais référence tout à l'heure,
35:45 ils vont être sélectionnés,
35:48 et ils pourront être appelés,
35:49 parce que les compétences sont rares dans ces domaines-là,
35:51 donc s'il y a une attaque, et alors, vous avez raison,
35:54 les attaques ont augmenté de 140% depuis la guerre en Ukraine
35:57 sur l'ensemble des infrastructures européennes en matière de cybersécurité.
36:00 Donc dès qu'une attaque arrive,
36:01 souvent il faut pouvoir dépêcher des experts particuliers
36:04 pour mesurer l'implication, corriger, etc.
36:08 Donc ces réserves cyber vont être mobilisées, c'est plusieurs milliers de personnes.
36:11 - Attaques, réserves, armées, qui sont nos ennemis qui veulent nous faire la guerre ?
36:16 - De toute nature.
36:17 D'abord des individus, des hackers, des groupes de pression,
36:20 des états.
36:21 - Des pays ? - Oui, quels pays ?
36:22 - Des états.
36:23 - C'est des gens qui viennent de Québec ?
36:24 - Je vais vous donner une indication,
36:26 depuis le début de la guerre, voulue par Vladimir Poutine en Ukraine,
36:30 nos attaques cyber ont augmenté de 140%.
36:32 C'est une indication.
36:33 - Et un lien !
36:34 - C'est une indication.
36:35 - Et qui frappe quoi ?
36:36 - Mais pas que.
36:37 - Et à lire le dernier livre de Raphaël Glucksmann,
36:39 qui pointe ces questions-là, ça frappe tout,
36:41 y compris les hôpitaux, c'est pas que les organisations étatiques.
36:44 - Du reste, Raphaël Glucksmann est très intéressé,
36:46 a juste dit, par la Chine aussi.
36:48 - Et la Chine est inquiétante pour vous ?
36:49 - Je ne dis rien d'autre.
36:50 - Et vous diriez que c'est économique ou idéologique, ou un mélange des deux ?
36:53 - Mais vous savez, on est là dans un nouveau terrain de conflictualité.
36:58 Prenons le cas de la Russie.
37:01 Vladimir Poutine n'aime pas le projet européen,
37:06 parce qu'il en a peur.
37:07 Et donc depuis le début, et depuis des années, moi je l'ai vécu,
37:10 il a tout fait pour essayer de diviser l'Europe, l'affaiblir,
37:14 y compris en pénétrant nos démocraties, en les affaiblissant,
37:17 par parenthèse, par rapport à ce que je disais tout à l'heure.
37:21 Les fake news véhiculées sur les réseaux, dont certains extrêmes se servent,
37:26 voire s'abreuvent.
37:28 On a mesuré que lorsque nous avons interdit, à juste titre,
37:31 Russian Today et Sputnik, les fake news ont diminué drastiquement.
37:36 Parce que figurez-vous que Russian Today et Sputnik,
37:40 qui sont des petites entités, heureusement,
37:43 elles n'ont plus le droit d'opérer désormais en Europe.
37:45 Elles utilisaient plus de 30% de la bande passante,
37:49 et de ce qui se passait sur des réseaux comme Facebook.
37:52 Parce que leur contenu était à forte viralité,
37:55 parce qu'évidemment très excessif.
37:57 Donc voilà, tout ça, on est naïf de rien, mais on se protège.
38:02 - Est-ce que vous avez un compte TikTok ?
38:04 - Vous avez un compte TikTok personnellement ?
38:06 - Non. - Et pourquoi ?
38:07 - Vous en aviez un et vous ne l'aviez plus ?
38:08 - Non, je n'en ai jamais eu, et du reste, comme vous savez,
38:10 c'est interdit par tous ceux qui travaillent à la Commission.
38:12 Mais je n'en ai jamais eu.
38:13 - Alors vous n'êtes naïf de rien, on sent que vous avez une grande volonté
38:16 d'essayer de rendre l'Europe un peu plus souveraine,
38:18 mais regardez ce qui se passe dans la défense,
38:20 où on voit que depuis, effectivement, la guerre en Ukraine,
38:23 il y a un problème qui se pose à l'Europe,
38:25 de savoir si elle peut se défendre, si elle peut s'autonomiser.
38:28 Quels sont les progrès qui sont en cours,
38:30 et sur quoi vous butez concrètement ?
38:32 - Il est en train de se passer, Mme Fresseau,
38:36 vraiment un changement de paradigme incroyable.
38:39 - On a du mal à le voir.
38:42 - Eh bien, je vais vous en donner la traduction, si vous le permettez,
38:44 parce que je reviens du terrain, et je suis en permanence sur le terrain,
38:47 parce que c'est sur le terrain que ça se passe.
38:49 À l'occasion, hélas, de cette situation tragique qu'a voulue Vladimir Poutine.
38:55 D'abord, en matière de défense, excusez du peu,
38:58 deux pays qui rejoignent l'OTAN, et dont, en tout cas pour la Finlande,
39:03 je dirais, l'alpha et l'oméga étaient là, entre guillemets, neutralité.
39:08 Ça veut donc dire qu'il se passe des choses.
39:10 Deuxièmement, dès le début, nous avons autorisé,
39:15 et c'est quelque chose de totalement nouveau,
39:17 car je rappelle que, par les traités, la Commission européenne,
39:21 bien sûr, elle a la capacité à intervenir, à travailler sur les industries de défense,
39:27 mais pas à armer telle ou telle partie prenante.
39:32 La Commission européenne et l'ensemble des États membres
39:35 ont décidé de soutenir, d'accompagner la livraison d'armes,
39:38 donc à l'Ukraine, et pas dans des petites proportions, et c'était nécessaire.
39:42 Et puis, maintenant, on est arrivé à un moment de conflit,
39:45 je voudrais qu'on s'arrête une seconde, si vous le permettez,
39:47 parce que c'est un moment qui est très important pour nous, et grave,
39:53 parce qu'il s'agit de la guerre.
39:54 Il s'agit tous les jours de femmes et d'hommes qui sont sur un front.
39:58 Ce front, évidemment, nos auditeurs le connaissent,
40:01 c'est essentiellement la frontière élargie du Donbass,
40:04 et où tous les jours, des centaines de soldats perdent leur vie
40:10 pour défendre l'Ukraine, et derrière l'Ukraine,
40:12 sont de plus, et ça nous concerne.
40:15 Mais pour ce faire, il faut des munitions, parce que là, c'est la guerre.
40:20 Et pour la première fois, l'Union européenne a décidé, d'abord,
40:26 d'inciter très fortement les États membres à fournir ces munitions.
40:29 Pardon de le dire, mais la guerre, c'est ça, et c'est des munitions.
40:33 Et bien sûr, ce sont des équipements, bien sûr, ce sont des chars,
40:36 bien sûr, ce sont des avions.
40:38 Enfin, si vous fournissez ces équipements sans munitions, ça n'ira pas très loin.
40:41 - Et donc, il faut donner plus ?
40:42 - Bien entendu, et il faut surtout donner ce que l'Ukraine demande aujourd'hui.
40:47 Parce que, voyez-vous, c'est pas moi qui vais vous donner les chiffres,
40:49 je suis toujours extrêmement attentif à ces qualités, vous comprendrez aux chiffres,
40:52 mais je lis, effectivement, qu'il y a un rapport, peut-être, de 1 à 4, ou de 1 à 5,
40:56 dans le nombre d'obus tirés du côté ukrainien vers le côté russe,
41:00 et du côté russe vers le côté ukrainien.
41:02 Et donc, il est indispensable de fournir, et c'est la demande qui est faite aujourd'hui,
41:07 je participe évidemment aux réunions des ministres de la Défense,
41:09 le ministre de la Défense ukrainien vient souvent à nos réunions,
41:12 et nous a exprimé très clairement, il nous l'a dit, c'est public, donc je peux le dire,
41:15 je vous dis que des choses qui sont publiques, vous permettrez de ne pas dire autre chose,
41:19 la nécessité d'avoir 1 million d'obus, ce sont des obus, pour les experts, 155 mm,
41:25 152, c'est des obus de l'ancien empire soviétique,
41:28 parce qu'il y a encore beaucoup d'armements qui datent de cette période,
41:31 120, enfin ce sont des obus d'artillerie, pas beaucoup d'entre eux,
41:34 et qui peuvent faire des faux, évidemment, et notamment à l'occasion des campagnes,
41:40 ou de la campagne, puisqu'on parle de cela, qui peut se dérouler,
41:43 qui pourra se dérouler au printemps ou à l'été.
41:45 - Et on ne va pas finir par être considérés comme des co-belligères ?
41:47 - Non, on n'est pas fini, parce qu'on le fait depuis le début,
41:49 et c'est une nécessité, encore une fois, faute de quoi l'Ukraine sera démunie, car désarmée.
41:55 Donc, on a pris l'engagement de fournir un million d'obus,
42:02 donc dans les 12 mois qui viennent à l'Ukraine, c'est la demande ukrainienne,
42:05 pour cela on a bâti trois piliers, d'abord inciter les Etats membres
42:10 à fournir ce qu'ils ont dans leurs stocks, on a encore beaucoup de stocks,
42:13 heureusement, et notamment c'est des contraintes qui nous sont imposées
42:16 par notre appartenance, pour beaucoup d'entre nous, à l'OTAN,
42:18 donc baisser un peu ces stocks et les fournir à l'Ukraine,
42:23 mais en parallèle, il faut évidemment que les ministres de la Défense
42:27 qui vont donner ces autorisations soient convaincus qu'on va pouvoir
42:30 remonter la capacité de production pour refournir très vite.
42:33 - Et là, il y a un doute sur ça ?
42:34 - Il faut le faire, ça ne tombe pas du ciel,
42:36 donc il y a un contrat d'un milliard d'euros, qui fera en fait 2 milliards,
42:39 pour inciter les Etats membres à co-financer, et c'est l'Europe qui le fait,
42:43 à travers une facilité particulière, donc les Etats membres qui vont le faire,
42:46 c'est très important, je vais aller au bout.
42:48 Deuxièmement, donc, c'est lancer un appel d'offres pour très vite
42:51 réaugmenter les capacités de production pour, je dirais,
42:54 remettre nos niveaux là où ils doivent être.
42:57 Et troisièmement, et c'est ce dont je m'occupe,
42:59 c'est faire en sorte que quand on passe un contrat,
43:01 il puisse être délivré dans les 12 mois.
43:03 Et donc, j'ai décidé d'aller voir l'ensemble des pays
43:06 qui ont aujourd'hui la capacité de produire ces armements,
43:09 il y en a 11 aujourd'hui en Union Européenne,
43:11 il y a 15 entreprises, je les vois toutes, un par un,
43:14 avec à chaque fois le ministre de la Défense à mes côtés
43:17 ou le directeur général de l'armement, je vais sur le terrain,
43:20 on discute avec les entreprises, on regarde ce qu'il faut
43:22 pour monter en économie de guerre,
43:24 parce qu'il faut monter en économie de guerre,
43:26 passer de deux équipes à trois équipes,
43:28 voir où il y a les goulets d'étranglement,
43:30 est-ce qu'on a suffisamment de poudre,
43:32 est-ce qu'on a suffisamment de ces composants...
43:34 - Mais quand on passe en économie de guerre,
43:35 on ne devient pas un co-belligérant ?
43:36 Pardonnez-moi, mais il y a quand même une ligne rouge qu'on n'a pas le droit de trancher.
44:01 - On va monter maintenant en puissance,
44:02 beaucoup du reste est hérité des anciens pays du bloc soviétique,
44:05 mais nous avons aussi beaucoup de compétences très technologiques,
44:07 en France, en Italie, en Espagne, en Allemagne, évidemment,
44:10 donc c'est travailler ensemble,
44:11 travailler ensemble, madame Pressoz,
44:13 pour la première fois dans la défense,
44:14 avoir un projet commun,
44:16 échanger l'information,
44:17 échanger nos compétences.
44:19 - Vous écoutez Thierry Breton, à la fois sur les cyberattaques,
44:22 on pourrait aussi évoquer les progrès de l'Union économique et financière
44:26 après la crise de 2008, ou ici,
44:28 est-ce que l'Europe n'avance qu'à réaction ?
44:31 N'est-elle jamais capable d'anticiper ?
44:33 - Mais mon problème, c'est que l'Europe avance, c'est tout.
44:35 Et l'Europe, vous savez, c'est comme tout dans la vie.
44:38 Vous avancez quand vous avez une nécessité.
44:40 - Mais est-ce qu'elle avance suffisamment vite, en fait ?
44:41 - La réponse, c'est oui.
44:42 Quand je vois, honnêtement, ça fait un mois, madame Pressoz,
44:45 ça fait un mois qu'on a pris cette décision,
44:47 un mois après, pour la première fois dans nos histoires institutionnelles,
44:50 depuis la CED de 1954 qui a été ratée,
44:53 depuis la CED ratée de 1954,
44:55 vous avez un commissaire européen en charge de la défense
44:58 avec l'ensemble des ministres de la défense
45:00 qui a une vision globale, unifiée, un projet commun,
45:03 bien sûr qu'on avance.
45:04 - Mais est-ce que vous diriez qu'au-delà de cette...
45:06 - Et bien sûr, et je vais vous dire, demandez également,
45:08 et ce qui est très important, tiens, puisqu'on parle de 1954,
45:10 de la CED,
45:11 ceci est poussé aussi, bien entendu,
45:14 par notre nécessité de soutenir les besoins en Ukraine,
45:17 mais aussi par nos alliés,
45:19 les Américains nous demandent de le faire,
45:20 parce que pour eux aussi, ils n'en ont pas assez,
45:22 poussé par l'OTAN,
45:23 donc oui, nous avons des planètes qui s'alignent...
45:25 - Mais est-ce que vous diriez qu'au-delà de l'aide
45:27 que vous fournissez à l'Ukraine,
45:28 est-ce que vous sentez émerger réellement
45:30 une industrie de la défense européenne
45:32 suffisamment coordonnée pour au fond...
45:34 - Et intégrée.
45:35 - C'est tout mon propos,
45:36 et la réponse, c'est que c'est vrai
45:38 qu'aujourd'hui, elle est essentiellement traitée en silos,
45:40 mais vous savez, j'ai connu ça pour les vaccins.
45:42 Pardon, cette comparaison qui n'est absolument pas raison,
45:45 mais quand on était nulle part dans les vaccins
45:49 et qu'on m'a demandé à la Commission
45:51 d'aller faire un peu la même chose,
45:53 pour monter une base industrielle globale et unie,
45:55 eh bien on l'a fait.
45:57 Est-ce qu'on va réussir à le faire ?
45:59 Je suis dans ce chemin.
46:01 Je vois qu'il est possible.
46:03 Je ne veux pas, évidemment, l'annoncer trop tôt,
46:06 mais je vois le chemin,
46:07 et si l'énergie continue à être là,
46:09 oui, je suis convaincu qu'on va y arriver.
46:11 - Et est-ce que vous voyez aussi le chemin sur les semi-conducteurs ?
46:13 - Le chemin, ça y est, il est écrit.
46:15 On vient de faire voter en 9 mois ou 10 mois,
46:17 c'est exceptionnel, notre cheap act européen,
46:20 avec 43 milliards, excusez-du-peu,
46:22 qui vont être mis maintenant pour inciter les entreprises
46:25 à très haute valeur ajoutée,
46:27 à très haute technologie, pour les experts,
46:29 y compris avec des semi-conducteurs en dessous des 2 milliardièmes de mètres,
46:32 de 2 nanomètres,
46:33 qui vont être construits les plus avancés au monde en Europe
46:36 et qui vont nous permettre...
46:37 - Pourquoi c'est important ?
46:38 - C'est important parce qu'aujourd'hui,
46:40 c'est important pour deux raisons.
46:41 La première, c'est qu'il n'y a pas une entreprise aujourd'hui
46:46 qui ne s'est travaillée pratiquement pas sans semi-conducteurs.
46:49 On en met partout.
46:50 C'est ce qui rend du reste nos produits plus attractifs,
46:53 plus compétitifs.
46:54 Et que, évidemment, on dépend aujourd'hui beaucoup de la fabrication
46:57 qui est essentiellement en Asie, en particulier à Taïwan.
46:59 On connaît tous les risques aujourd'hui
47:01 qui sont autour du détroit de Ex-Formosa de Taïwan
47:05 et, évidemment, de la dépendance, notamment à l'île de Taïwan,
47:09 sur les semi-conducteurs.
47:10 Nous avons donc voulu, pour limiter ces risques,
47:12 passer de 10% de production mondiale,
47:14 qui est encore aujourd'hui ce dont nous héritons, je dirais, en Europe,
47:18 à 20% pour satisfaire nos besoins à l'horizon 2030.
47:21 Pour ça, il fallait mettre de l'argent sur la table,
47:23 il fallait des règles, c'est chose faite.
47:25 Et je peux vous dire qu'on a maintenant, pour plus de 100 milliards,
47:28 je peux vous l'annoncer aujourd'hui,
47:29 de projets qui se sont manifestés à l'issue de ce cheap act.
47:32 Donc oui, on va y arriver.
47:34 Est-ce que c'est la traduction en chiffres
47:36 des propos de Joseph Borrell ce matin dans le JDD,
47:38 qui publie une tribune de notre collègue,
47:40 chef de la diplomatie européenne,
47:41 qui déclare "la mondialisation heureuse est terminée"
47:44 et qui pousse à porter un regard froid sur la Chine ?
47:47 Oui, je suis complètement d'accord avec lui sur les deux termes.
47:50 C'est surprenant de la part de Thierry Breton
47:51 qu'il y a été une forme d'incarnation de la mondialisation heureuse.
47:53 Non, j'étais une forme d'incarnation, j'ai participé comme tout le monde,
47:56 j'ai beaucoup, beaucoup travaillé en Chine, vous avez raison de le rappeler.
47:59 Je connais très, très bien ce pays,
48:00 et c'est parce que je le connais très, très bien
48:01 que je pense que Joseph Borrell a raison.
48:03 Mais puisque vous me parlez de cela,
48:05 je voudrais juste dire que la politique de l'Europe,
48:11 elle est très claire vis-à-vis de la Chine.
48:13 Partenaires commerciaux, mais rivales systémiques.
48:16 Et pour nous, ce qui est important, c'est de dérisquer cette relation,
48:19 pas de nous découpler, parce que nous ne sommes pas naïfs,
48:22 mais de dérisquer.
48:23 Et je vous invite à lire les derniers propos de Madame Yanneth Yellen du 20 avril,
48:31 dans lequel elle dit, dans lequel elle dit,
48:34 alors là c'est surréaliste,
48:36 pratiquement ce qu'a dit le président de la République française,
48:40 notamment sur la Chine,
48:42 il dit "Ouh là là, il faut faire attention, il ne faut pas se découpler,
48:45 de toute façon ce serait beaucoup trop coûteux pour les Etats-Unis d'Amérique,
48:49 on ne pourra pas être prêts nous avant 2027".
48:52 Je vous invite à le lire, parce que ça va vous éclairer peut-être
48:55 sur tout ce qui s'est passé au cours des dernières semaines.
48:58 - François. - Sur tous ces sujets, sur le sujet de l'énergie aussi,
49:01 on voit que la France et l'Allemagne ne sont pas fondamentalement raccords,
49:05 et il y a une grosse interrogation sur la pérennité du coup franco-allemand.
49:09 Quelle est votre opinion là-dessus ?
49:11 Est-ce qu'il faut chercher d'autres alliés ?
49:13 Est-ce qu'on peut recoller les morceaux ?
49:15 Et qu'est-ce qui se passe concrètement ?
49:17 - L'Europe c'est un projet à 27.
49:19 Et voyez-vous, le Conseil européen, je vais faire une analogie,
49:23 c'est un peu comme le Sénat américain,
49:25 ça représente évidemment l'ensemble de nos Etats.
49:28 Dans le Sénat américain, le Delaware, qui est l'un des plus petits Etats américains,
49:32 - Le parlement fiscal. - Il a la même voix,
49:34 il a la même voix que le Texas, de représentants et de voix.
49:39 Mais pour nous c'est pareil, chaque Etat membre a la même voix.
49:42 Et donc je me méfie toujours.
49:44 - Mais pas le même poids.
49:46 - Ça c'est traité au Parlement européen, et c'est traité à la Chambre des représentants.
49:49 Non mais ça s'appelle la co-législation.
49:52 C'est pour ça que nous sommes un co-législateur.
49:54 Comme les Etats-Unis. Je vous invite vraiment à bien nous pencher et vous pencher
49:58 sur la règle de fonctionnement de notre démocratie continentale.
50:00 Elle est très semblable, bien sûr elle n'est pas un Etat fédéral.
50:02 - Non je ne parlais pas du poids en vote, je parlais du poids politique des Etats.
50:06 - Eh bien, eh oui, mais finalement c'est pas ce que les institutions ont voulu.
50:11 Et aux Etats-Unis et en Europe.
50:13 C'est ça une démocratie continentale.
50:15 On peut la critiquer, je vous la livre.
50:17 Maintenant, pour reprendre sur la question de Madame Fresos,
50:20 qui est une question effectivement très légitime,
50:23 c'est vrai qu'il a fallu ce couple franco-allemand,
50:25 parce que, il ne faut pas se raconter d'histoire,
50:27 le projet européen, il est né d'après-guerre,
50:29 et finalement, des deux guerres, des trois guerres,
50:31 tragiques, qui ont ensanglanté notre continent,
50:33 depuis 1870 jusqu'en 1945.
50:37 C'était ça qui a fondé le projet européen.
50:39 Donc évidemment, c'était l'histoire franco-allemande.
50:42 - On peut la déplacer aujourd'hui.
50:44 - Mais maintenant, ce que je dis, c'est qu'entre temps,
50:46 beaucoup de choses se sont passées.
50:48 J'entends les uns et les autres, j'entends M. Monti,
50:50 mais ça c'était au siècle dernier.
50:52 Maintenant, il faut impérativement,
50:55 comprendre que notre projet, c'est un projet à 27.
50:58 Et donc, oui, c'est vrai, que quand, je vous le dis moi-même,
51:01 parce que, quand je vais proposer des lois,
51:04 je fais le tour d'Europe, comme on parle aujourd'hui de la défense,
51:06 je vais proposer un acte, une loi, précisément,
51:09 pour accélérer les industries de défense,
51:11 ce sera sans doute début mai.
51:13 Pour ça, évidemment, je parle à l'ensemble des chefs d'État avant,
51:16 et j'essaie de faire en sorte que la Bulgarie s'y retrouve,
51:18 que la Roumaine s'y retrouve, que la Tchéquie s'y retrouve.
51:20 - Ça n'a pas trop de monde, justement, au bout d'un moment,
51:22 qu'on s'y retrouve, parce que...
51:24 - Eh bien non, on le fait, voilà, c'est ça d'être une démocratie,
51:26 c'est ça d'être un continent.
51:27 Alors ça veut dire, effectivement, beaucoup d'énergie,
51:29 mais c'est ce qu'on nous demande de faire aussi, c'est mon travail.
51:32 - Beaucoup d'énergie et beaucoup de temps, et on a l'impression
51:34 qu'on est dans une temporalité qui s'accélère,
51:36 avec des risques de plus en plus forts.
51:38 - Mais regardez la vitesse à laquelle on a réagi pour les vaccins,
51:40 la vitesse à laquelle on a réagi pour la défense,
51:42 la vitesse à laquelle on a réagi pour la conciliation.
51:44 - Oui, mais toujours en défense, vous êtes d'accord ?
51:46 - Jamais, jamais. - Toujours en réaction.
51:48 - Il y a une action, mais ça nous permet de nous aligner.
51:50 Donc oui, le couple franco-allemand, il est ce qu'il est,
51:52 il est absolument nécessaire, parce qu'il est historique,
51:54 mais maintenant... - Est-ce qu'il y a d'autres partenaires
51:56 à aller chercher ? - Mais bien entendu, regardez-vous,
51:58 on a parlé pendant le nucléaire, aujourd'hui, il y a une douzaine de pays,
52:02 aujourd'hui, qui ont fondé, et je les soutiens,
52:04 et je pense qu'ils ont raison, leur mix énergétique
52:07 et leur autonomie énergétique sur le nucléaire.
52:09 On sait que l'Allemagne n'en fait pas partie,
52:11 mais les autres, ça s'appelle la Pologne, ça s'appelle la Bulgarie,
52:13 ça s'appelle la Roumanie, ça s'appelle la Slovéquie,
52:15 ça s'appelle la Slovénie, ça s'appelle...
52:18 Donc tous ces pays... - Pas tous, là.
52:20 - Regardez le temps, c'est bon. - Mais oui, mais c'est pour vous dire...
52:23 - Bien sûr qu'il faut créer des alliances ensuite,
52:26 et puis derrière, c'est la démocratie. - Nathalie ?
52:28 - Au vu de ce qui se passe en Allemagne,
52:30 est-ce que vous trouvez des accords politiques ou des coalitions,
52:32 est-ce que vous trouvez, un, vous en avez parlé un peu tout à l'heure,
52:34 que ce serait un peu l'idée du siècle concernant la France,
52:37 et puis vous, qu'est-ce que vous pourriez faire là-dedans ?
52:39 - Alors moi, rien, et en ce qui concerne la France,
52:42 je crois qu'on n'est pas encore mûrs à ça. - Ça ne marche pas en Allemagne, hein.
52:45 - Je vais le voir, vous. - Ça ne marche pas, ça a marché quand même,
52:49 mais l'Allemagne a été bâtie, et dans la refonte de l'Allemagne...
52:53 - Moi, je parle en ce moment. - Dans la refonte de l'Allemagne d'après-guerre,
52:56 on a voulu précisément avoir ces coalitions, y compris du reste,
52:59 entre un partage identique entre le patronat et les représentations syndicales,
53:04 je dirais pour, il faut bien dire les choses comme elles sont,
53:07 quand ça a été inventé, juste après la guerre, et notamment par les Américains,
53:10 mais pas que, c'était pour limiter un peu la puissance de l'Allemagne.
53:14 Aujourd'hui, il se trouve que c'est une force.
53:16 Bon, maintenant, dans cette démocratie, tout a été fait aussi,
53:19 pour éviter que les drames que nous avons connus se reproduisent.
53:22 C'est pour ça que le principe de la coalition, du consensus, sont beaucoup plus développés.
53:26 - Mais est-ce qu'on peut gérer, notamment, quand on voit cette coalition,
53:28 est-ce que vous pensez qu'on doit faire pareil chez nous, en clair ?
53:31 Ou est-ce qu'on fait du débauchage ? - On n'a pas du tout les mêmes institutions.
53:35 En Allemagne, le poids des lander est extrêmement fort.
53:37 - Donc Gérard Larcher, Premier ministre, ou tout ce qu'on entend...
53:40 Je suis désolée de vous faire tomber dans la politique de Thierry Breton, dans le Marigo.
53:44 - Vous êtes où dans un an, Thierry Breton ?
53:46 - Je suis encore dans un an, je suis encore à ma tâche à la Commission européenne,
53:51 et je pense que vous avez compris que j'essaie d'y mettre toute mon énergie,
53:54 parce que le projet européen est, pour moi, ce qu'il y a de plus important pour nous.
53:57 - Et vous aurez mis tellement d'énergie que c'est difficile de repartir pour 5 ans, ou pas ?
54:01 - Et donc, parce que c'est le plus important, j'estime que mon devoir,
54:03 c'est d'être à la tâche, avec l'énergie que j'essaie d'y mettre, jusqu'au dernier jour.
54:08 Et puis après, vous savez, moi j'ai pris une chose dans la vie.
54:12 Ça se trouve que la plupart de toutes les fonctions que j'ai occupées,
54:17 j'ai été appelé une demi-heure avant d'en être informé,
54:20 y compris pour celle de commissaire européen.
54:22 Donc vous savez, ça vous donne un peu de hauteur de vue,
54:25 de recul sur la vie et sur les choses.
54:27 - Merci. - Donc, on se focalise sur le projet européen.
54:30 - Et nous, on se focalise sur dimanche prochain,
54:32 déjà encore pardon à Karine pour le début de l'émission.
54:35 On se retrouve dimanche prochain pour un nouveau numéro de Questions politiques.
54:39 !

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