Mazarine Mitterrand Pingeot, « Les grands entretiens » sur LCP : » C’est difficile de déployer une pensée à la télévision »

  • l’année dernière
L’écrivaine et philosophe est l’un des nouveaux visages de La Chaîne Parlementaire – Assemblée Nationale



C’est devenu une marque forte de la chaîne LCP : « Les Grands entretiens » est une collection d’interviews menées depuis plusieurs années par Daphné Roulier, Yves Thréard ou Maïtena Biraben le dimanche à 23h. Depuis début février, Mazarine Mitterrand Pingeot est venue s’ajouter à la liste des présentateurs, avec une thématique spécifique : la philosophie du vivant. Elle interroge des penseurs, comme Olivier Rey et Sophie Nordman ce 19 février. Cela faisait longtemps que l’écrivaine souhaitait populariser la philosophie à la télévision. Elle est l’invitée médias de Célyne Baÿt-Darcourt

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Transcript
00:00 Bonjour Mazarine Mitterrand-Pinjot, merci d'être avec nous.
00:03 Ces grands entretiens que vous menez sur LCP le dimanche soir, ce sont des penseurs que
00:08 vous interrogez sur la philosophie du vivant.
00:10 Avant d'expliquer de quoi il s'agit, dites-nous comment s'est faite la rencontre entre vous
00:14 et la chaîne parlementaire ?
00:15 Ah, alors elle s'est faite parce que j'étais moi-même invitée à ces grands entretiens
00:20 d'Yves Tréard.
00:21 Vous êtes passée d'invitée à présentatrice.
00:23 Exactement, et là-dessus Bertrand Delay, qui dirige la chaîne, avait très envie d'ouvrir
00:31 ces grands entretiens au champ de la pensée et de l'écriture et donc il m'a proposé.
00:37 D'autant que ça fait un moment que vous aviez cette envie aussi.
00:40 Alors moi j'ai toujours envie de diffuser la pensée, la philosophie et de la populariser.
00:46 Ça fait partie de mes missions dans ma vie et à cet étre là je fais pas mal de choses.
00:52 On a notamment un festival de philosophie qui se tient à Saint-Emilion tous les derniers
00:56 week-ends de mai qui regroupe un grand nombre de personnes qui sont pas du tout philosophes.
01:01 Les intervenants le sont, mais en revanche le public ne l'est pas et c'est très populaire.
01:05 Donc oui, j'essaye d'oeuvrer pour ça.
01:08 Et donc typiquement cette émission le permet.
01:11 Parce que vous êtes philosophe de formation, vous trouvez que cette matière manquait à
01:15 la télé ?
01:16 Alors, elle manque à la télé, oui.
01:18 Quand on regarde les images d'archives qu'on retrouve, ou on entend Michel Foucault répondre
01:23 en prime time, je pense notamment à une émission qui s'est déroulée au musée du Louvre
01:30 à Bernard Pivot et qui parle de la fin de l'humanité.
01:33 C'est incroyable.
01:34 Ça n'existe plus ?
01:35 Non, clairement ça n'existe plus.
01:38 Après c'est normal, la philosophie ou la pensée en général, elle a besoin d'un
01:42 tout petit peu de temps pour se déployer.
01:43 Donc il faut quand même avoir ce temps-là.
01:46 C'est vrai que c'est difficile de trouver un temps pour la pensée à la télévision.
01:50 Mais alors qu'est-ce que la philosophie du vivant ?
01:52 Alors du vivant, en tout cas le vivant c'est l'angle à travers lequel j'essaye d'interroger
01:58 ces philosophes.
01:59 D'abord parce que c'est un peu la grande question qui nous occupe tous à travers notamment
02:04 la crise climatique, qui est aussi une crise du vivant, de la biodiversité.
02:08 Et donc c'était un peu la question qui permettait d'éditorialiser tous les grands
02:14 entretiens et qui permettait d'entrer dans la réflexion des uns et des autres.
02:18 Et donc la question du vivant, c'est un peu la nouvelle grande question philosophique
02:24 qui occupe un certain nombre de penseurs, alors que ça les occupait beaucoup moins
02:28 il y a un siècle par exemple.
02:29 C'est la grande question philosophique qui est venue aussi avec la biologie, avec les
02:36 interrogations sur le climat, avec tout ce qui nous occupe chacun d'entre nous, mais
02:40 dont la philosophie s'est emparée.
02:42 Mais la politique aussi, par exemple la réforme des retraites, ça peut être un sujet ?
02:45 Alors moi j'aimerais beaucoup continuer ces grands entretiens avec un prisme politique.
02:50 Pour l'instant ce n'est pas le cas, même si la question du vivant, elle peut complètement
02:53 amener sur le terrain politique.
02:55 Après tout, il peut y avoir une politique du vivant.
02:57 Mais c'est vrai que j'aimerais aussi mener des entretiens peut-être plus politiques,
03:02 de philosophie politique, toujours quand même avec cette espèce de pas de côté par rapport
03:07 à l'actualité brûlante de la politique.
03:10 C'est quelque chose qui m'intéresserait beaucoup.
03:12 Comment choisissez-vous vos invités ? C'est l'actualité qui vous guide, la sortie d'un
03:16 de leurs livres ?
03:17 Ça peut être ça, mais ça peut être autre chose.
03:21 C'est en général des philosophes que j'ai lus, que j'apprécie, que je trouve intéressants.
03:26 Donc je sais qu'ils auront, même si je ne suis pas d'accord avec eux, pas avec tous,
03:30 mais qu'ils auront quelque chose…
03:31 Et vous le dites ça dans l'émission ?
03:32 Non, je ne le dis pas.
03:33 Vraiment, moi je questionne.
03:34 Mais je trouve qu'ils ont une pensée intelligente, intéressante, élaborée et stimulante.
03:40 Avez-vous bien conscience, Mazarine Mitterrand-Pinjaud, que c'est une émission très exigeante,
03:45 qui ne peut peut-être pas être regardée par tout le monde ?
03:48 C'est possible.
03:49 En même temps, l'idée c'est justement d'essayer d'accueillir le plus grand nombre
03:56 pour écouter, pour regarder.
03:57 Je pense qu'en tout cas, dans le discours, il est relativement accessible.
04:03 Il me semble en tout cas, même si ça peut faire peur comme ça de loin, parce que c'est
04:06 de la philosophie, mais ce n'est pas de la philosophie au sens académique du terme.
04:09 Ce n'est pas de la philosophie en tant que discipline, où on lirait des textes hyper
04:12 compliqués.
04:13 Non, ça reste très accessible, il me semble en tout cas.
04:17 Et encore une fois, c'est un petit pas de côté par rapport à la manière dont on
04:20 a l'habitude de se questionner.
04:22 Et quel est le rôle de la philosophie, plus particulièrement à la télé ? Que voulez-vous
04:26 apporter avec cette émission ?
04:28 Alors déjà qu'elle existe, quelque part.
04:31 Ensuite, je pense que ce sont des voix qu'il faut pouvoir entendre.
04:35 Il y a un grand nombre de chercheurs aujourd'hui en France qui ont plein de choses très intéressantes
04:39 à dire et c'est vraiment dommage que leurs propos restent enfermés dans l'enceinte
04:45 de l'université, si vous voulez.
04:46 Et je pense que ça serait vraiment profitable à tout le monde d'ouvrir un petit peu les
04:50 portes de l'université pour que cette parole devienne justement politique, au sens peut-être
04:54 beaucoup plus large du terme, c'est-à-dire qu'elle devienne publique, que tout le monde
04:57 puisse s'en emparer.
04:58 Je pense qu'il faut démocratiser la philosophie.
05:00 Je pense qu'elle ne doit pas rester enfermée dans l'université, même si c'est là son
05:03 lieu d'élaboration.
05:04 Et donc voilà, pour moi, c'est très important que la télévision puisse accueillir ça.
05:09 Et en plus, cette émission, ces grands entretiens sont déjà un format qui existe.
05:15 Ce n'est pas moi qui l'ai inventé.
05:16 Et je trouve que c'est un très joli format qui permet une vraie conversation, une discussion,
05:22 puisqu'il s'agit vraiment d'une discussion et qui est à la fois très sobre dans son
05:27 décor, dans sa réalisation.
05:29 Presque austère.
05:30 Presque austère, mais moi je trouve que c'est très beau justement.
05:33 Moi, j'aime vraiment bien.
05:34 Et voilà, c'est assez chic, c'est vrai.
05:39 Mais à mon sens, ça peut être complètement accessible.
05:44 Quand vous voyez ce qui se passe en ce moment à l'Assemblée, la piètre qualité des débats,
05:50 les insultes, le brouhaha, que pense la philosophe que vous êtes ?
05:52 Alors, il y aurait beaucoup de choses à dire.
05:57 Par quoi commencer ?
05:58 En tout cas, ça rejoint un peu la question de ces émissions, c'est-à-dire offrir un
06:03 espace pour que puisse déployer une parole.
06:06 Un débat, il faut aussi qu'il y ait un espace et qu'il y ait un dispositif qui existe pour
06:10 qu'il soit organisé.
06:11 Ça ne peut pas se faire comme ça.
06:12 Et c'est vrai qu'on a de plus en plus de tendance à être dans l'invective, une forme
06:19 de violence verbale et que le lieu vraiment du débat, mais au sens fort du terme, c'est-à-dire
06:24 vraiment des arguments qui sont échangés, qui sont critiqués, qui sont amendés.
06:28 Ce lieu-là a tendance à disparaître.
06:31 Et pour moi, le service public, c'est justement ça devrait être un lieu où ce débat devrait
06:37 pouvoir être organisé.
06:38 Il y a des émissions de débat qui existent, je pense, assez ce soir ou assez politique.
06:40 Heureusement, je ne dis pas que la télé est mal faite.
06:43 Il y a évidemment des chaînes qui sont remarquables, avec des émissions qui sont absolument remarquables.
06:47 Mais bon, maintenant, c'est très éparpillé.
06:50 On sait qu'il y a une offre extraordinaire et que ce n'est pas forcément les plus regardées.
06:53 Et ce n'est pas toujours les émissions qui rendent possible un vrai débat citoyen ou
06:59 un débat politique qui sont malheureusement parfois plus d'audience que les autres.
07:06 Ça faisait, je crois, quatre ans que vous ne faisiez plus de télé.
07:09 Vous étiez chroniqueuse dans Sa Balance à Paris sur Paris 1ère.
07:12 Vous aimez travailler dans les médias ?
07:13 Ça me plaît beaucoup.
07:16 Je n'en ferai pas forcément mon métier.
07:18 J'ai un métier par ailleurs.
07:19 Je ne suis pas sûre d'être douée pour ça.
07:22 Je ne sais pas si je pourrais faire autre chose que la critique, puisque ça m'a pas
07:28 mal occupée pendant un certain nombre d'années.
07:30 Mais à chaque fois, c'est des aventures humaines qui sont assez formidables.
07:36 C'est aussi pour ça que je…
07:37 C'est le hasard des rencontres ?
07:38 C'est complètement le hasard des rencontres.
07:40 Et donc à chaque fois, c'est des rencontres, des bandes.
07:43 Alors là, ce ne sont pas des bandes parce que je suis toute seule, mais il y a quand
07:44 même une équipe derrière qui est très, très sympathique.
07:47 Et voilà, c'est un petit peu l'occasion.
07:52 Tout à coup, ça se présente.
07:54 Moi, ça me convient.
07:55 C'est quelque chose qui m'intéresse.
07:56 Et le format est parfait.
07:59 Et voilà.
08:00 Donc, ça ne veut pas dire que ça va se convertir en immense carrière télévisuelle.
08:05 On vous souhaite la bienvenue et bonne chance sur LCP Assemblée Nationale.
08:09 Merci d'être venue sur France Info, Mazarine Mitterrand-Pinjot.
08:11 Merci à vous.
08:12 - En tout.

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