• l’année dernière
Avec Anne Rosencher, journaliste, écrivaine et directrice déléguée de la rédaction de l’Express.

Retrouvez "En toute subjectivité" sur https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/en-toute-subjectivite

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Transcription
00:00 7h20 en toute subjectivité ce matin avec la directrice déléguée de la rédaction
00:08 de L'Express, Anne Rosencher, bonjour !
00:10 Bonjour Nicolas, bonjour à tous !
00:11 Vous vouliez, Anne, nous parler ce matin du débat sur la laïcité et de ces trompe-l'œil
00:17 médiatiques.
00:18 Oui, sans le vouloir, ce sont les lecteurs et les auditeurs qui m'ont soufflé l'idée
00:21 de cette chronique.
00:22 Cela fait plusieurs années déjà que j'écris sur la laïcité et je suis désormais habituée
00:27 à une chose, beaucoup des messages de soutien ou de remerciements que je reçois proviennent
00:32 de personnes qui se présentent à moi comme des Français musulmans laïcs.
00:36 En fait, je n'avais jamais songé à le noter, ça me paraissait une évidence que
00:39 ce combat est partagé par tous ceux qui ne veulent pas des injonctions politiques, des
00:43 religions.
00:44 Mais en voyant passer récemment des extraits de débats sur C8 ou sur les réseaux, je
00:48 me suis dit que la nouvelle économie médiatique, la recherche du buzz et de la caricature des
00:53 oppositions aboutit à une représentation mentale du débat qui est faussée, notamment
00:59 auprès des jeunes générations.
01:00 Comme si la défense de la laïcité était une guerre entre blancs et racisés ou entre
01:05 athées et musulmans.
01:07 Il existe de nombreux Français musulmans laïcs, mais ils ne sont pas toujours représentés
01:11 ou en tout cas pas partout.
01:13 Et ce trompe-l'œil est un piège pour la laïcité qui se retrouve taxée d'intolérance
01:17 mais aussi pour beaucoup de musulmans qui se voient renvoyés à une orthodoxie supposée.
01:22 C'est-à-dire ?
01:23 Cela dépasse le débat sur la laïcité.
01:25 De manière générale, il y a une guerre de représentation mentale concernant les
01:29 Français musulmans qui bien entendu ne sont pas d'un seul tenant.
01:33 D'un côté, certains, les islamistes tout comme les identitaires, veulent installer
01:37 l'idée et pousser l'image qu'un musulman ne peut être séculier.
01:41 De l'autre côté, il se développe une assignation identitaire bienveillante.
01:46 C'est cette école publique qui demande par deux fois à un couple au nom à consonance
01:50 arabe si leur enfant a bien le droit de manger du porc à la cantine.
01:53 C'est un commerçant qui précise à un client d'origine maghrébine que s'il préfère,
01:58 le sandwich là, il est halal.
01:59 Ces anecdotes m'ont été rapportées par des amis que ces prévenances ont fait tiquer.
02:04 Ils les ont vécues comme un présupposé de distinction, une norme qui n'existait
02:09 pas auparavant.
02:10 Autre exemple, plus grave car politique celui-là.
02:13 Souvenez-vous lors du débat sur le Burkini à Grenoble en mai dernier.
02:16 Une tribune signée notamment par les militants de Caroline Dehaesse ou Alice Coffin soutenait
02:21 l'initiative du maire d'autoriser le port du Burkini dans les piscines municipales.
02:25 Sinon, précisait la tribune, les femmes musulmanes sont exclues des piscines.
02:29 Les femmes musulmanes, première nouvelle.
02:32 Prenons garde, la passion de l'époque pour l'exaltation des différences conduit
02:36 souvent à l'assignation identitaire.
02:38 Et dans une période où la République est de plus en plus attaquée, les essentialisations
02:43 n'arrangent rien.
02:44 Pour ma part, je continuerai de goûter les instants de fraternité spontanée que suscite
02:48 la défense de la laïcité.
02:50 Pour cela, chers lecteurs et auditeurs, merci !

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