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Le président élu a affirmé sur son réseau Truth Social qu’il allait augmenter les droits de douane de 25% sur les produits importés du Mexique et du Canada mais également de 10% supplémentaires sur les produits chinois. Trump évoque l’immigration et le fentanyl pour expliquer ces mesures. Il menace aussi de taxer les produits « Made in Europe ».

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00:00Bienvenue dans le débat. Donald Trump déclare-t-il la guerre commerciale ?
00:08Le président élu américain a affirmé sur son réseau Truth Social qu'il allait
00:12augmenter les droits de douane de 25% sur les produits importés du Mexique et du
00:17Canada et de 10% supplémentaires sur les produits chinois dès le premier jour de
00:22son arrivée au pouvoir. Trump évoque l'immigration et le
00:25fontanil pour expliquer de telles mesures. Il menace aussi de taxer les
00:29produits made in Europe. La commission européenne veut éviter une guerre
00:33commerciale avec les Etats-Unis. Et dans une interview au Financial Times Christine
00:37Lagarde affirme que l'attitude de Trump appelle à une négociation et non pas à
00:42des représailles côté européen. Alors la guerre commerciale est-elle
00:45déclarée par Trump ? Quel impact sur l'économie ? Comment réagissent les
00:49pays partenaires ? Le Mexique, le Canada mais aussi la Chine.
00:54L'Europe doit-elle effectuer un reset, une remise à zéro de sa politique ?
00:58Pour répondre à ces questions, nous allons poser à nos invités. J'ai le plaisir d'avoir à mes côtés Elvire Fabry.
01:02Bonsoir. Vous êtes chercheuse senior en charge de géopolitique du commerce à
01:06l'Institut Jacques Delors et également rapporteur du groupe de travail sur les
01:10relations Union-Européenne-Chine. Bienvenue à vous. En face de vous Grégoire
01:14Verdot. Bonsoir. Bienvenue. Directeur commerce international à l'Institut
01:18Sapiens. Vous étiez également collaborateur de Michel Barnier à la
01:22commission européenne. Bienvenue. Avec nous Benjamin Coria. Bonsoir.
01:26Économiste, professeur émérite à l'Université Paris XIII, membre des
01:30économistes atterrés. Et puis ce soir Richard Verly est avec nous, tout juste
01:35retourné des Etats-Unis. Bonsoir Richard. Bonsoir. Correspondant international du
01:39quotidien suisse Blic. Donald Trump qui a donc affirmé sur son réseau Truth Social
01:44qu'il allait augmenter ses taxes sur les produits importés de 25%, 10%
01:50encore plus sur les produits chinois. On fait un point en image d'abord avec
01:53Jules Boiteau. À quelques semaines de son retour à la Maison-Blanche,
01:59Donald Trump montre déjà que ses méthodes n'ont pas changé. C'est par un
02:04message sur son réseau Social Truth que l'ancien et futur président américain a
02:08promis des sanctions douanières au Mexique et au Canada, accusé de laisser
02:13passer aux Etats-Unis drogues et migrants illégaux. Le 20 janvier, pour l'un de mes
02:17premiers décrets présidentiels, j'imposerai au Mexique et au Canada des
02:21droits de douane de 25% sur tous les produits entrant aux Etats-Unis.
02:25Cette taxe restera en vigueur jusqu'à ce que les drogues, en particulier le
02:29fentanyl et tous les immigrants illégaux, arrêtent d'envahir notre pays.
02:33L'augmentation des droits de douane, l'une des armes diplomatiques et
02:37commerciales les plus utilisées par Donald Trump. Au Canada, où trois produits
02:42exportés sur quatre partent vers les Etats-Unis,
02:44l'annonce a fait l'effet d'une onde de choc et obligé le gouvernement de
02:49Justin Trudeau à contre-attaquer. Notre relation est équilibrée et
02:52mutuellement bénéfique. Le Canada est essentiel à l'approvisionnement
02:56énergétique des Etats-Unis et l'année dernière, 60% des importations américaines
03:01de pétrole brut provenaient du Canada. Personne ne gagnera une guerre
03:06commerciale, a aussi prévenu la diplomatie chinoise, à qui Donald Trump a promis
03:11d'imposer en plus de nouvelles taxes sur les produits importés aux Etats-Unis.
03:14Une bataille que le 47e président américain semble pourtant bien
03:19déterminée à mener.
03:22Richard Vallée, je commence par vous parce que vous arrivez tout juste des
03:26Etats-Unis, il va le faire Donald Trump ou pas ?
03:28Écoutez, il le dit et quand en général, quand Donald Trump dit quelque chose, il
03:33a plutôt tendance à essayer de le faire. Donc ce n'est pas du bluff ? Non, je crois
03:37en tout cas au niveau de l'intention et au niveau des annonces, ce n'est sûrement
03:41pas du bluff. Alors après, qu'est-ce qui va se passer ?
03:43Ça dépend bien sûr de la réaction des pays qui viennent d'être cités. Moi, j'arrive
03:47de la frontière mexicaine, j'y étais encore il y a trois jours. Je peux vous dire que
03:50sur la frontière mexicaine, là où j'étais, ce n'était pas des migrants
03:53clandestins que j'ai vu passer, c'est des camions remplis de marchandises qui
03:57passaient dans les deux sens d'ailleurs. Alors j'imagine qu'il y avait peut-être
04:00des camions pleins et des camions vides, je n'ai pas regardé à l'intérieur, mais en
04:03tout cas, le flot de camions n'était pas du tout interrompu et j'ai parlé
04:07notamment à des routiers qui transportent des marchandises et qui m'ont
04:10dit que leur carnet de commandes était plein pendant les six mois à venir.
04:13Donc il ne faut pas non plus dramatiser, la frontière, commercialement parlant, ne
04:18va pas être fermée, mais on peut faire confiance à Donald Trump pour
04:21essayer, avec le plus gros marteau qu'il a, de taper sur les clous.
04:25Benjamin Correa, donc d'instaurer 25% de droits de douane sur les pays les plus
04:30proches, c'est-à-dire Canada et Mexique, dès le premier jour, est-ce que ça va
04:33rendre l'Amérique plus forte ? Make America Great Again, c'est ça son objectif ?
04:38Il y a deux questions. La première, c'est jusqu'où va-t-il aller ? Est-ce qu'il va
04:44respecter sa parole de faire une augmentation des droits de douane de
04:48cette importance ? C'est très considérable, il faut que nos auditeurs se
04:52rendent compte. 25% c'est énorme. En plus...
04:56Donc va-t-il le faire ou pas ? Oui, à moi je pense qu'il en fera au moins une partie,
05:00sauf s'il considère qu'il a gagné le deal. C'est un deal maker, comme on dit,
05:05comme il se définit lui-même. Donc pour le moment, il fait monter les enchères
05:09très haut pour obtenir quelque chose, ça c'est sûr, donc on va voir après.
05:14Alors moi, ce qui me frappe quand même, c'est qu'il fait porter son offensive au
05:20cœur du système qui rend les Américains puissants, c'est-à-dire que la grande
05:26base arrière des sous-traitants américains, c'est le Mexique, en partie
05:30le Canada pour l'automobile, et par ailleurs, ça a été dit, le Canada les
05:35fournit en énergie. Donc c'est très curieux, c'est vraiment très curieux,
05:39parce que le bénéfice qu'il va tirer de ça, on peut vraiment se demander quel il
05:45va être, voilà. Mais je doute pas qu'il va essayer quelque chose.
05:48Même vous vous interrogez, Benjamin Correa, Grégoire Verdot, il avait signé, il faut le rappeler,
05:52l'acte 2 de l'ALENA quand même, Donald Trump. Oui, en plus, c'est son propre accord.
05:57C'est son propre accord, cet acte 2 de l'accord de libre-échange avec le Mexique et le Canada.
06:03Est-ce que c'est quand même Make America Great Again ? Est-ce que l'industrie
06:06américaine pourrait profiter d'une augmentation des taxes avec ses deux voisins ?
06:10Alors, sous le contrôle de Benjamin Correa, mais il y a une interdépendance
06:13extrême dans toute l'Amérique du Nord. Par exemple, on sait très bien que
06:18ce qui va heurter les fabriques, les maquiladoras, qui sont sur la frontière
06:23mexicaine, va faire du mal à Détroit, à l'industrie automobile.
06:26Moi, je regarde très différemment cette histoire du Mexique et du Canada, qui est
06:30comme une saga. Ça fait huit ans que ça dure. Et l'affaire chinoise, je ne sais pas si on va en parler.
06:35Parce que c'est très, très, très différent. Parce que c'est un petit pas, en réalité,
06:39par rapport à ce qui est le programme composé par Bob Lighthizer, qui est
06:45vraiment le deus ex machina des affaires de commerce derrière Donald Trump.
06:48Et donc ? La nomination de Jameson Grier, qui était le chef de staff de Bob Lighthizer
06:55comme représentant américain au commerce hier, quand on sait ce que
07:00Lighthizer a écrit l'an dernier, il le dit ouvertement, c'est-à-dire qu'il pense
07:02qu'il faut révoquer le statut de commerce normal de la Chine, qui a été
07:08fait, je crois, en 2000, et qui se passe sous l'égide de l'OMC. C'est-à-dire qu'il
07:12faut faire basculer la Chine dans la toute petite liste qui comprend la
07:15Russie, la Corée du Nord, Cuba. Et c'est 60% de droits de douane.
07:19Et ça, ça sera son ministre ? Ça, c'est son, oui, le représentant au commerce.
07:23Le représentant au commerce. C'est le vrai négociateur. Le vrai négociateur qui
07:26donc est favorable à ces droits de douane. On l'a compris. Elvire Fabry,
07:31justement, pour en revenir avec, on va ensuite parler de la Chine, de cet accord
07:34avec le Canada et le Mexique, il y a effectivement une échéance, c'est 2026.
07:38Est-ce qu'il sera reconduit ou pas cet accord de libre-échange ? Donc il y a
07:41quand même une chance qu'il ne soit pas reconduit.
07:43Là, on en a la preuve. C'est-à-dire que non seulement Donald Trump annonce la
07:49couleur avant d'être déjà à son poste de présidence, mais il n'attendra pas
07:542026 pour une éventuelle réforme, un ajustement. Là, on sort complètement
07:59des clous, c'est-à-dire qu'on sort des règles, des accords sur lesquels, en effet,
08:03repose l'économie américaine, des règles de l'OMC. Mais ce qui est intéressant,
08:08là, dans l'annonce de Donald Trump, ça n'est pas, il n'y a aucune surprise,
08:10la guerre commerciale, on y est. Et on pouvait s'y attendre.
08:13On y est à la guerre commerciale.
08:14Il l'avait annoncé. Mais là, ce qui est assez intéressant, c'est qu'il est en
08:18train de fermer la porte arrière de rentrée pour les pays qui voudraient
08:22contourner les futurs droits de douane qu'il va mettre en place, qui voudraient
08:25rentrer par le Mexique et le Canada. Et on a vu ces dernières années,
08:30d'abord la Chine, mais également les Européens, tout le reste du monde.
08:33C'est-à-dire qu'on a vu les investissements chinois ces dernières
08:35années au Mexique ont énormément augmenté, et en particulier dans la
08:38filière de l'industrie automobile, et c'est le cas également par le
08:44biais du Canada. Donc, ça donne un signal.
08:46Ça aura un double effet.
08:47Oui, exactement. Ça donnera plus d'effet au prochain droit de douane.
08:51Et puis, on voit aussi qu'il y a un mélange des genres.
08:53C'est-à-dire qu'on n'est pas simplement sur un raisonnement économique,
08:55quel qu'il soit, c'est qu'il y a un mélange entre des outils économiques,
09:00du commerce, des droits de douane, et puis des objectifs de migration,
09:04de fentanyl. Et pour les Européens, ça dit quelque chose aussi sur le
09:08signal qui est envoyé sur l'aide à l'Ukraine, ou nos garanties de
09:10sécurité après, et puis sur nos régulations dans le secteur du numérique.
09:14C'est-à-dire que tout est renvoyé à une forme transactionnelle.
09:17C'est un peu ça, Richard, mais à un moment, puisque vous en revenez,
09:20vous êtes États-Unis, ce qui est intéressant, c'est qu'il s'adresse
09:21quand même à sa base, Donald Trump.
09:23Il y a un problème de désindustrialisation aux États-Unis.
09:26Il a vraiment fait campagne sur ce sujet aussi.
09:29Donc, pour ces Américains déclassés qui font partie justement de ces
09:34endroits qui ont subi cette désindustrialisation au profit du Mexique,
09:38au profit du Canada, ça leur parle, ça ?
09:41Oui, alors je nuancerais un petit peu.
09:42Il ne parle plus à sa base maintenant.
09:44Il parle à tout le peuple américain.
09:45Il est président élu, donc la préoccupation de Donald Trump,
09:48finalement, ce n'est plus tellement sa base.
09:50Elle l'a élu, ça y est, il est revenu au pouvoir.
09:53Là où il est, je trouve très fort sur le plan politique,
09:56mais on verra ce que ça donnera au niveau pratique,
09:59au niveau de ce qu'il mettra en place.
10:01C'est justement en associant les choses.
10:03C'est justement en faisant croire aux Américains que ces droits de douane,
10:08ça va régler le problème d'immigrants, ça va régler le problème du fentanyl.
10:12Autrement dit, c'est la rhétorique de Trump qu'il a toujours tenue
10:15et qu'il continue de tenir.
10:17C'est-à-dire qu'à lui tout seul, par ces fameux deals, il va tout résoudre.
10:21Comme s'il y avait une sorte de deal magique et qu'en appuyant sur un bouton
10:24qui s'appelle les droits de douane, je fais disparaître le fentanyl,
10:27notamment de San Francisco, où c'est un problème endémique.
10:30C'est complètement fou, mais il faut reconnaître,
10:32et vous l'avez dit, je reviens des Etats-Unis, que ça marche.
10:35C'est-à-dire qu'à force de le répéter, de le répéter, de le répéter,
10:38pas mal de gens finissent par y croire.
10:40On va écouter le ministre de l'économie du Mexique,
10:42puisque bien sûr, le gouvernement mexicain a réagi.
10:47L'impact sur les entreprises est énorme.
10:53Nous pensons plus ou moins qu'en fin de compte,
10:55ces taxes affecteront le consommateur américain,
10:59mais aussi les entreprises, et qu'environ 400 000 emplois seront perdus.
11:03Et se perdraient environ 400 000 emplois.
11:08Grégoire Verdot, 400 000 emplois menacés, ça vous semble un chiffre ?
11:13Alors, on est dans l'escalade verbale.
11:18Il faut quand même reconnaître que Trump doit hausser le ton
11:21face à la nouvelle présidente mexicaine, parce qu'elle est aussi très, très forte.
11:25C'est-à-dire qu'elle succède à López Obrador,
11:28qui lui-même était quand même populiste et extrêmement direct.
11:32Et elle a gagné magnifiquement les élections.
11:34Elle a aussi, presque comme Trump aux Etats-Unis,
11:37un alignement complexe, aussi un pays fédéral, de tout derrière elle.
11:40Et pour la renégociation de l'accord nord-américain,
11:44il faut que Trump sait que s'il doit arracher quelque chose,
11:48par exemple, le management du secteur de l'énergie au Mexique a été fait,
11:53franchement, contre les intérêts des industries nord-américaines.
11:56Et le prédécesseur de Clea Chenbaugh en a dit l'accord.
11:59Vous savez, moi, franchement, je n'en ai pas grand-chose à faire.
12:02Donc, on est dans une bataille d'égo aussi et de chiffres.
12:05Oui, mais c'est intéressant ce que vous dites, Benjamin,
12:06car il faudrait réagir parce que,
12:08finalement, de remettre tout sur la table,
12:10d'avoir ce rapport de force bilatéral,
12:13ça permet un petit peu de remettre les choses à zéro.
12:15Donc, est-ce que ce n'est pas le rapport de force qui, ensuite,
12:18donc, va être le plus important ?
12:20Est-ce qu'effectivement,
12:21Clea Chenbaugh, face à Donald Trump, elle a aussi joué une carte ?
12:25Oui, oui, mais c'est la manière de faire de Trump.
12:27C'est de se porter en avant et d'expliquer que des trucs invraisemblables,
12:32qu'il va régler le problème du fentanyl avec des droits de douane.
12:37Donc, vous, vous n'y croyez pas ?
12:39Pas une seconde, pas une seconde.
12:41Il y a bien d'autres raisons à l'explosion du fentanyl aux Etats-Unis.
12:44Et si ce n'est pas le fentanyl, ça sera autre chose.
12:48Donc, c'est vrai que là, ils personnalisent, ils confrontent.
12:52C'est la manière de Trump.
12:54Sauf qu'il y a de la réalité derrière.
12:56Et la réalité, c'est le niveau d'intégration et d'échange
13:00entre au moins ces trois pays et ces trois pays et le reste du monde.
13:06On parle de l'automobile.
13:08Je vais donner juste un exemple.
13:10On parle de l'automobile.
13:12Avant qu'une automobile soit terminée,
13:14en moyenne, elle passe 8 fois la frontière avec le Mexique.
13:18Parce qu'il y a des sous-ensembles qui sont livrés,
13:20qui sont améliorés aux Etats-Unis,
13:22qui retournent au Mexique, etc.
13:24Donc, qu'est-ce qu'on va faire ?
13:26On va payer 8 fois 25% ?
13:28Ça ne tient pas debout.
13:30Donc, ça veut bien dire que dans une économie mondialisée,
13:32quand on parle d'hausse des taxes, des droits de douane,
13:34quelque part, c'est obsolète.
13:36Non, je ne veux pas généraliser.
13:38Parce que je ne suis pas un défenseur du libre-échange tel qu'il a été conduit.
13:44Mais je ne suis pas non plus un partisan de protectionnisme.
13:49Je dis que les accords comme ils ont été conduits
13:52ont été conduits par le bas.
13:54C'est-à-dire que ça a favorisé l'échange des produits
13:58les plus toxiques, les plus mal fabriqués.
14:02Il n'y avait pas de normes.
14:03Donc, je ne suis pas défenseur de ça.
14:04Vous, c'est le problème environnemental.
14:06Bien sûr, bien sûr.
14:07Mais pour revenir à notre sujet, si je peux dire,
14:10il croit toucher la Chine.
14:14Parce que ce que vous avez dit est évidemment tout à fait important.
14:17Une grande partie des installations au Mexique
14:22sont maintenant des installations chinoises.
14:24Parce que ça a été le moyen de contourner les barrières douanières.
14:26Mais, je veux dire, d'abord, il ne pourra pas,
14:29pour les raisons que j'ai dites,
14:30parce que ça va casser des flux d'échange essentiels
14:34dans l'automobile, dans l'électronique, dans l'aéronautique.
14:37Bon.
14:38Mais il va obtenir des choses.
14:40Il va essayer d'obtenir des choses.
14:42Vous êtes d'accord, Elvire Fabry ?
14:44Donc, au final, il ne le fera pas vraiment
14:46ou il va essayer d'obtenir des choses ?
14:48La question, c'est qu'on n'en est qu'au début.
14:51Mais si c'est suicidaire pour les États-Unis, vous savez ou pas ?
14:54Non, mais il y a tout un...
14:56L'objectif de Donald Trump, c'est d'abord la Chine.
14:59Et c'est surtout la Chine.
15:01Derrière la Chine, il y a la petite Chine, qui est l'Allemagne.
15:04Et il y a quelque chose qui a changé entre Trump 1 et Trump 2.
15:08Trump 1, c'était rééquilibrer le déficit commercial des États-Unis.
15:12Là, il y a une volonté qui est beaucoup plus forte,
15:15qui est de transformer le modèle chinois,
15:17et notamment de faire augmenter la demande chinoise.
15:20Parce qu'il considère que l'explication de ce déficit commercial,
15:24c'est que les Chinois exportent leur production
15:27et ne consomment pas assez, notamment des produits américains.
15:30Mais donc, c'est un enjeu de transformation de l'économie chinoise,
15:33bien au-delà des questions de distorsion commerciale,
15:36auxquelles il ne s'était pas attaqué, d'ailleurs, pendant son travail.
15:39C'est un enjeu politique, plus que juste économique ?
15:42Non, assez économique.
15:43Mais avec le raisonnement qui a ses limites,
15:46parce qu'il y a des contradictions.
15:48Là, le fait de vouloir maintenir un dollar fort,
15:51alors que la Chine est plutôt en train d'essayer de dédollariser son économie,
15:54on n'en connaît but.
15:56Mais alors qu'il aurait besoin aussi d'évaluer le dollar
16:01pour favoriser les exportations américaines.
16:03Donc il va y avoir plein de contradictions dans les mesures qui vont être adoptées.
16:06Mais l'idée, c'est de s'attaquer en profondeur
16:09au système d'investissement dans la production et des technologies chinoises.
16:14Alors justement, la Chine, puisque vous en parlez.
16:17On va écouter Xi Jinping.
16:18C'était au sommet Asie-Pacifique, à Lima, au Pérou.
16:24La Chine est prête à travailler avec la nouvelle administration américaine
16:28pour maintenir la communication, élargir la coopération et gérer les différences.
16:33Nous encouragerons une transition en douceur
16:36dans les relations entre la Chine et les États-Unis,
16:38dans l'intérêt des populations des deux pays.
16:41Si nous nous traitons mutuellement comme des adversaires ou des ennemis,
16:44si nous nous engageons dans une concurrence vicieuse,
16:47les relations entre la Chine et les États-Unis connaîtront des revers,
16:50voire des régressions.
16:52Grégoire Verdot, alors un discours chinois vraiment qui vise,
16:55attention, on ne veut pas de cette guerre commerciale.
16:58C'est tout à fait compréhensible.
17:00Avant que je parle de ça, il y a une chose sur Trump et la Chine.
17:04Trump a tiré la lumière, tout le monde le voit,
17:06mais c'est une position américaine.
17:08Le désarmement de l'OMC a été commencé sous Trump,
17:12mais il n'a jamais été rapporté sous Biden.
17:15Donc Biden a mis en place des droits de douane
17:18sur les véhicules électriques chinois, qui sont très très importants,
17:21très ciblés, mais très très importants,
17:24dans l'optique de protéger ce qui était considéré comme une industrie naissante.
17:28Mais il ne faut pas se tromper en disant Trump et la Chine.
17:31Non, non, ce sont les États-Unis et la Chine.
17:33C'est une position américaine et il bénéficie d'un très large soutien.
17:35Donc Trump est dans la continuité de Biden.
17:37Et Trump est dans la continuité de Trump.
17:39En fait, c'est Biden qui a été dans la continuité de Trump.
17:41Biden est dans la continuité de Trump, exactement.
17:43Maintenant, c'est un dealmaker, il sent la faiblesse chinoise
17:47et on sait tous que la Chine est dans une position économique critique.
17:50De situation de surcapacité, on dit toujours les trois D de la Chine,
17:55c'est-à-dire la dette, la démographie et la déflation.
17:59Et moi, personnellement, je pense, parce que Trump n'est pas exactement né hier,
18:03il a une longue mémoire, je pense qu'il croit que la Chine est dans la position du Japon,
18:09dans les années 80.
18:11C'est-à-dire au moment où la guerre commerciale entre les États-Unis et le Japon s'est déroulée
18:17et les États-Unis, objectivement, l'ont gagnée.
18:19Parce que les mots étaient assez semblables.
18:22Je crois réellement qu'il voit la surcapacité chinoise.
18:26Les Chinois ont besoin d'exporter.
18:29Et donc, toute la question est de savoir s'il va, lui, Trump,
18:32assumer le coût politique de l'inflation.
18:34Donc, c'est ça, en fait. Il faut quand même revenir.
18:37Le risque, c'est tout de même que ça ait un effet inflationniste,
18:39d'augmenter de 10% encore des droits de douane.
18:42Vous le disiez qu'il existe déjà entre les États-Unis et la Chine, Richard.
18:47Oui. Comme ça a été dit, la difficulté de la politique de Trump sur le plan économique,
18:51c'est que si vous la chiffrez et que vous mettez ces chiffres les uns à côté des autres,
18:54elle est incohérente. Elle est contradictoire.
18:57Puisque les mesures tarifaires qu'il veut prendre risquent de faire augmenter les prix
19:02et donc d'être défavorables à tous ceux qui l'ont élu.
19:05Parce que ce qu'ils veulent, et ça je peux en témoigner,
19:07c'était baisser leurs factures en fin de mois.
19:09Parce que c'est vrai, Stéphanie, vous y étiez aussi,
19:11les prix ont quand même pas mal augmenté aux États-Unis ces derniers temps.
19:14Moi, j'étais moi-même surpris du niveau des prix aux États-Unis.
19:18Mais l'incohérence pour Trump, ça n'a jamais été un problème.
19:21C'est ça qu'on a de la difficulté à examiner.
19:24Parce que lui, ce qui compte aujourd'hui, politiquement,
19:27dans ce moment qu'il faut bien qualifier, c'est la transition.
19:29Il n'est pas encore au pouvoir.
19:31Ce qui compte, c'est que non seulement la lumière soit sur lui,
19:34ça c'est pas difficile, les projecteurs sont sur lui,
19:36mais surtout que quoi qu'il arrive, on dise que c'est grâce à lui.
19:40Quoi qu'il arrive. Et il y a bel et bien des choses qui arriveront, c'est certain.
19:43Et il veut dire, c'est grâce à moi.
19:45Donc au fond, il est en train de maximiser, je dirais, l'effet Trump,
19:49dans l'espoir que, de toute manière, il en restera des choses
19:52qui le mettront en position de force lorsqu'il arrivera au pouvoir.
19:54Benjamin Correa.
19:55Si je peux me permettre, oui, ce que vous dites est juste.
19:58Mais, comment dire, il joue un jeu dangereux.
20:02Il joue un jeu très dangereux.
20:03Mais il aime ça.
20:04Oui, d'accord, mais il joue un jeu dangereux pour lui et pour l'ensemble de la planète.
20:07Pourquoi ? Parce qu'il faut bien mesurer que c'est le troisième choc dans l'économie.
20:13C'est-à-dire qu'il y a eu d'abord le choc Covid qui a désorganisé toute une série de chaînes.
20:18Après, il y a eu le choc Ukraine qui a de nouveau contribué à disloquer
20:24une partie de chaînes d'approvisionnement.
20:26Et maintenant, on la provoque, le troisième choc, si je peux dire,
20:29avec des risques de guerre tarifaire locaux au plus globaux.
20:35Donc, ce qui va en résulter, comment dire, Trump dans son coin et avec ses conseillers,
20:42il peut toujours rêver que ça va être ce qu'il espère.
20:45Mais des conséquences tout à fait contraires à ça.
20:49C'est-à-dire, effectivement, de l'inflation, effectivement, du chômage.
20:54Parce que, je pense à l'automobile.
20:57L'automobile, elle ne peut pas vivre avec le Mexique.
20:59Et elle ne peut pas vivre en payant huit fois des droits de douane de 25% avec le Mexique.
21:04Et le cours de GM a déjà baissé.
21:06Mais bien sûr, c'est totalement impossible et infaisable.
21:10Donc, comment dire, si c'est fait comme ça, c'est le chaos.
21:14Bon, alors, après, je pense que ça ne va pas être fait comme ça.
21:18Parce qu'il y aura des négociations, il y aura des tractations.
21:21Mais, comment dire, on est sur une telle corde raide que ça peut, à tout moment,
21:26basculer, on va dire, du côté sombre de l'affaire.
21:32Justement, Elvire Fabry, on voit bien que les marchés, au départ, étaient euphoriques.
21:35Et puis, dès qu'il y a eu cette annonce depuis lundi, d'ailleurs, ils sont moins euphoriques.
21:39Donc, ça, c'est aussi une variable.
21:41Enfin, j'imagine que ces ministres, le secrétaire au Trésor,
21:43c'est quand même quelqu'un, me semble-t-il, qui vient de Wall Street.
21:45Enfin, il regarde les marchés.
21:47Donc, dire qu'il va effectivement mettre en place...
21:50C'est pour ça qu'on se demande si c'est du bluff ou pas.
21:52Parce qu'en regardant les marchés...
21:53Non, ce n'est pas du bluff.
21:54Oui, mais en regardant les marchés...
21:55Alors, on a cette tension.
21:58On va le voir très vite au sein du cabinet de Trump.
22:01Parce qu'en effet, il y a les Wall Street Boys,
22:03où on le voit déjà au Trésor, au commerce.
22:07Et puis, il y a le bras droit de Lighthizer, pendant son premier mandat,
22:13qui, lui, va vouloir utiliser les droits de douane.
22:16Et qui va même, éventuellement, s'intéresser à des contrôles sur les capitaux.
22:20C'est quelque chose qui commence déjà à flotter.
22:22Donc, là, il va y avoir des intérêts très contraires.
22:24Et le paradoxe dans tout ça, c'est qu'on finit par avoir une Chine
22:26qui défend la mondialisation.
22:28Défend l'OMC.
22:29Ça, ça fait un moment déjà qu'elle défend la mondialisation.
22:31Oui, mais plus que jamais aujourd'hui.
22:32Et elle peut le faire d'autant plus que, là,
22:34les États-Unis s'apprêtent à vouloir renverser la table de l'OMC,
22:38avec un risque d'érosion, de non-respect des règles,
22:41que d'autres pays aient besoin de se protéger et de sortir des clous.
22:45Mais, encore une fois, avec cette idée...
22:47Je pense qu'il ne faut pas sous-estimer certaines cohérences
22:51dans le projet, là, d'un Trump 2.
22:54Qu'il y ait des contradictions, certes,
22:56mais il y a beaucoup plus de cohérence qu'on ne pense.
22:58Donc, la cohérence vers plus de protectionnisme, quand même,
23:00clairement, c'est ça, la cohérence ?
23:02Ben, là aussi, c'est plutôt utiliser les droits de douane
23:06pour, comme effet de levier...
23:08Pour faire pression.
23:09Mais en maintenant l'idée de pouvoir accéder
23:11à plus de marchés extérieurs.
23:12Donc, qu'est-ce que ça va donner comme marge ?
23:14C'est pas simplement s'isoler.
23:16Parce qu'on est vers une...
23:17On s'avance vers un scénario où,
23:19ça, c'est le risque, brutal,
23:21avec, éventuellement, des droits de douane
23:23qui monteraient à 60% avec la Chine,
23:25ce qui est colossal, et qui est totalement irréaliste.
23:28C'est vrai qu'il n'y a pas...
23:29Pardonnez-moi, Elisabeth Fabry,
23:30il y a déjà des droits de douane de 100%.
23:32Il me semble, sur les voitures électriques, c'est 100%.
23:34Ça va de 25% jusqu'à 100% aujourd'hui, déjà, avec la Chine.
23:37Oui, mais alors, il y avait déjà 25% pour les véhicules électriques,
23:40ce qui veut dire que la Chine ne vendait pas
23:42de véhicules électriques aux Etats-Unis,
23:44parce qu'ils ne pouvaient pas avoir accès.
23:46Donc, ça a été une mesure politique, symbolique,
23:48au creux de la campagne politique, de la part de Biden.
23:52C'est sur des mesures ciblées, en plus.
23:54Oui, donc, elles sont ciblées, et, en fait, le risque,
23:56c'est justement que ça soit plus ciblé,
23:58que ça soit tellement idéologique,
23:59que ça soit plus global,
24:01et donc, avec ses effets peut-être néfastes
24:03pour l'économie américaine.
24:04Vous êtes d'accord, Grégoire Verdot ?
24:06Oui, mais il est très fort, politiquement, à l'heure actuelle.
24:09Il y a une vision du monde qui est articulée par Trump.
24:11Je crois que c'est quelque chose d'assez risqué,
24:14de penser qu'il est incohérent.
24:15Il est très focalisé.
24:17Il est focalisé sur l'énergie,
24:19et il est focalisé sur la technologie.
24:21Et donc, dans les deux cas,
24:24on voit des décisions immédiates.
24:26Il veut que l'exploitation de pétrole
24:29puisse revenir aux États-Unis.
24:31Il fait filer la réglementation environnementale, etc.
24:33Sur la technologie, il y a une espèce de bras de fer,
24:36parce qu'il comprend la domination technologique chinoise,
24:39et ça ne lui va pas du tout.
24:41Ce que je crois...
24:42Mais là, on parle justement de protection sectorielle.
24:45Le passé peut nous informer, quand même,
24:47parce qu'il y a eu une première guerre commerciale avec la Chine,
24:50et elle s'est arrêtée.
24:52Vous parlez des années Trump, là ?
24:54Oui, des années Trump.
24:55Trump a eu une première guerre commerciale avec la Chine.
24:58Il l'a arrêtée.
24:59Une chose qu'il ne faut pas sous-estimer,
25:02c'est l'ampleur des liens.
25:04Xi et Trump se connaissent.
25:05Ils se sont vus à Beijing,
25:07ils se sont vus à Mar-a-Lago.
25:08Ils se connaissent.
25:09Et par ailleurs, il y a dans le circuit Elon Musk.
25:12Alors Elon Musk, c'est un super connaisseur de la Chine.
25:15C'est lui qui a, par exemple, négocié...
25:18Il fabrique ses Tesla en Chine.
25:19Exactement, la Gigafactory Tesla, qui, je vous l'indique,
25:22c'est ça qui est intéressant aussi,
25:23produit quand même un million de voitures par an,
25:26quand en Californie, c'est 650 000.
25:28Donc la production de Tesla est plus importante en Chine qu'aux États-Unis.
25:32Et Musk a négocié les crédits et les impôts
25:36directement avec celui qui est aujourd'hui le Premier ministre de la Chine,
25:39M. Li, qui à l'époque était le secrétaire du parti à Shanghai.
25:42Donc il y aura de l'accès.
25:44Il y aura des discussions.
25:45La seule chose, c'est que la vision du monde de Trump
25:47est articulée sur des éléments de puissance extrêmement durs.
25:50Et c'est vrai que nous, Européens,
25:52qui avons mis notre jeu sur les règles multilatérales,
25:56on est un peu perdus.
25:58Voilà, on va terminer sur l'Europe.
25:59Et pour terminer sur la Chine, justement,
26:01ce rapport de force,
26:03ces vendeurs aux États-Unis, tout de même,
26:05c'est aussi pour ça qu'il a gagné Richard Verli,
26:08Donald Trump.
26:09Oui, mais ce que vient de dire Grégoire est aussi très juste.
26:11À tout ce que fait Trump en ce moment,
26:13je dis bien en ce moment,
26:14alors qu'il n'est pas encore au pouvoir,
26:15il faut quand même le redire,
26:17il y a une grille,
26:18il y a une sorte de tamis qu'il faut passer,
26:19c'est le tamis Elon Musk.
26:21Qu'est-ce qui profite à Elon Musk ?
26:23Et si vous regardez les annonces de Trump
26:25et que vous mettez cette grille devant,
26:27regardez, par exemple, tout à l'heure,
26:29vous disiez que les marchés financiers
26:31étaient en train de punir l'automobile classique.
26:33Mais Elon Musk, c'est très bon pour lui.
26:35Si l'automobile classique va mal,
26:37c'est bon pour Tesla.
26:39Donc il faut faire attention
26:40parce qu'il y a une privatisation aussi,
26:42en tout cas pour le moment.
26:44Il y a une privatisation de la politique économique américaine
26:47parce qu'Elon Musk est en mesure
26:49de désigner au fond les secteurs
26:51qu'il veut pénaliser pour se favoriser.
26:53D'où la question que tout le monde se pose,
26:55est-ce que l'alliance Trump-Musk va tenir ?
26:58Et Elon Musk, il faut se rappeler,
27:00avait suspendu son projet d'investissement au Mexique.
27:02Est-ce que c'est un délit d'initié politique
27:04en sachant ce que peut venir de la part de Trump ?
27:07Il faut peut-être suivre l'évolution
27:09de la stratégie de Tesla pour comprendre.
27:11Tout ça est quand même plus complexe
27:13que juste on va augmenter les droits de l'homme.
27:15On n'a pas le temps, mais moi je voudrais rajouter
27:17un élément qui en l'occurrence n'est pas économique,
27:20qui est le projet politique,
27:22non seulement de Trump, mais du parti républicain.
27:24C'est une longue discussion,
27:26mais on ne comprend rien à ce que fait
27:28le parti républicain,
27:30qui est derrière Trump,
27:33si on n'a pas en tête que reconquérir
27:37pour eux le petit électorat blanc
27:40de la Rust Belt,
27:42est absolument indispensable.
27:45Parce que sinon,
27:47les questions de focalisation sur l'immigration,
27:50l'hispanisation des Etats-Unis,
27:52marginalisent à long terme le parti républicain.
27:55Il y a ça derrière ce projet économique.
27:58C'est aussi un projet pour essayer
28:01de nourrir cet électorat petit blanc.
28:05Mais ce n'est pas du tout sûr que ça réussisse.
28:07C'est ça la question.
28:09Il y a l'inflation au coin de la rue.
28:11Bien sûr, c'est très risqué ce truc.
28:13Un dernier mot sur cette volonté de tout négocier.
28:17On voit quand même que la présidente mexicaine
28:19a fini par dire à Trump
28:21on va faire en sorte que les caravanes
28:23ne passent plus la frontière.
28:25Et à ce moment-là, ça s'est très bien passé
28:27avec Donald Trump lors de mon dernier coup de fil avec lui.
28:29C'est lui qui dit ça.
28:31On sent qu'il discute sur les points
28:33sur lesquels Donald Trump veut discuter.
28:36C'est un peu ce que dit Christine Lagarde.
28:38On va le voir tout à l'heure.
28:40Pourquoi ne pas s'asseoir avec lui
28:42sur différents points et négocier ?
28:44Donald Trump regarde le commerce international
28:47comme un élément de puissance.
28:49Ce n'est pas forcément comme ça qu'on le conçoit.
28:52Ce qui est vraiment intéressant,
28:55c'est qu'il pense un coup en avance.
28:59Mais il regarde toujours.
29:01Sa vision du monde, c'est
29:03est-ce que je suis perdant ou gagnant ?
29:05Et si vous êtes un pays qui a
29:07un excédent commercial avec les Etats-Unis,
29:10aujourd'hui, vous avez du souci à se faire.
29:13Parce que c'est comme ça qu'il regarde.
29:15Et en particulier, lorsqu'en plus
29:17vous bénéficiez à ses yeux
29:19de la protection politique américaine,
29:21ça veut dire que vous allez en plus recotiser.
29:24Il a quand même dit à Taïwan
29:26qu'il fallait que Taïwan consacre
29:2810% de son PIB à la défense.
29:30Il a dit que c'est incroyable
29:32que vous gardiez le leadership
29:34des chips, des puces électroniques.
29:36Il faut que ça revienne des Etats-Unis.
29:38En plus, on vous protège.
29:40Donc, il est véritablement...
29:42Et c'est ce qui se passe avec
29:44Claudia Schoenbaum.
29:46Il pense que les Mexicains sont
29:48plus gagnants que les Américains
29:50dans le deal qui va être négocié.
29:52Pour en revenir, Elvire Fabry,
29:54pourquoi les différents Etats
29:56ne pourraient pas renégocier
29:58avec les Etats-Unis
30:00en ayant une meilleure position ?
30:02Est-ce qu'il y a un déséquilibre
30:04à la base parce que l'Amérique
30:06est plus puissante ?
30:08On dépend de garanties de sécurité
30:10venant des Etats-Unis ou pas.
30:12C'est le cas des Européens.
30:14Au-delà même de la résolution
30:16d'un conflit en Ukraine,
30:18il y a la question de la sécurité
30:20européenne vis-à-vis d'une Russie
30:22qui restera en place.
30:24Le Japon est dans la même situation.
30:26Et là,
30:28évidemment qu'il y a un dialogue
30:30à engager, mais il faut aborder
30:32ce dialogue en position de force.
30:34Pour les Européens, ça veut dire
30:36être soudés à 27.
30:38Ça veut dire prendre des initiatives
30:40très rapides pour envoyer ce signal
30:42d'investissement dans l'UE et de solidarité.
30:44Parce que, bien sûr,
30:46le « made in Europe » pour Donald Trump,
30:48c'est pas tellement mieux que le « made in China ».
30:50Je vais vous faire réagir
30:52parce que je voudrais montrer cette interview
30:54du Financial Times de Christine Lagarde
30:56aujourd'hui qui évoque en particulier
30:58l'attitude que l'Europe
31:00doit avoir à l'égard de Trump.
31:02Elle dit, regardez,
31:04acheter américain pour éviter
31:06la guerre commerciale de Trump.
31:08Elle appelle Christine Lagarde
31:10à des négociations et non pas
31:12à la confrontation aux représailles.
31:14Là, si vous voulez,
31:16Benjamin Correa,
31:18Lagarde dit, voilà, soyons puissants,
31:20on va s'asseoir avec Donald Trump
31:22et on va pas faire tout de suite.
31:24C'est pas parce qu'il décide de mettre
31:2610% de droits de douane sur les pays européens
31:28qu'il faut que les pays européens
31:30ripostent immédiatement.
31:32La question, c'est qu'il faille négocier
31:34avec Trump.
31:36De toute façon, on n'a pas le choix.
31:38Il va bien falloir.
31:40Il y a des éléments de négociation
31:42avec Trump. D'abord, le marché européen,
31:44c'est quand même le plus grand marché du monde.
31:46Surtout pour les produits
31:48sophistiqués.
31:50Trump dit
31:52qu'il veut se retirer de l'OTAN,
31:54qu'il assure la sécurité, etc.
31:56Ce qu'on ne dit jamais, c'est que
31:58l'OTAN, c'est une affaire magnifique
32:00pour les Etats-Unis.
32:02Tous les pays de l'OTAN sont obligés d'acheter américain
32:04sous prétexte de compatibilité
32:06technique, etc.
32:08Si on commence à ne plus acheter
32:10de l'armement américain, vous allez voir
32:12le visage qu'il va tirer.
32:14Ensuite, il y a toute l'affaire
32:16des technologies
32:18de l'information, c'est-à-dire tout le groupe
32:20Google,
32:22Apple,
32:24etc. qui est en violation complète
32:26de la législation européenne.
32:28Il y a des sanctions qui ont commencé à être prises.
32:30On a des éléments de négociation.
32:32Il n'y a pas de soucis
32:34de ce côté. Mais le problème, c'est que
32:36si vous voulez être crédible
32:38dans vos éléments de négociation, il faut être prêt
32:40à dire qu'est-ce que vous faites
32:42au cas où
32:44le deal n'arrive pas.
32:46Trump, lui, le dit.
32:48Il le dit. Il dit, moi, je vous mets
32:50des droits de douane, et puis c'est terminé.
32:52Donc, je veux dire,
32:54Madame Lagarde, elle est très gentille.
32:56Bien sûr qu'il faut négocier, mais après,
32:58on a quoi pour appuyer
33:00la négociation ? Là-dessus, elle est silencieuse.
33:02– Elle parle de reset.
33:04– Oui, oui.
33:06– C'est pas la seule, d'ailleurs.
33:08J'ai lu cet entretien.
33:10J'ai quand même l'impression qu'il manque
33:12un sous-titre. Quand elle dit
33:14acheter américain, c'est acheter
33:16des équipements militaires américains
33:18et ça calmera Donald Trump. C'est quand même ça.
33:20Elle ne le dit pas tel quel, mais c'est
33:22sans doute ce qu'elle pense. Et c'est aussi
33:24le calcul de Donald Trump. C'est qu'au fond,
33:26en imposant comme ça,
33:28en annonçant ces droits de douane, en annonçant
33:30cette guerre commerciale, les pays
33:32qui risquent d'en souffrir vont se demander
33:34comment je peux l'amadouer. Et comment
33:36l'amadouer quand on est européen, on sait très bien.
33:38On lui achète des F-35,
33:40la Roumanie vient de le faire, l'avion
33:42dernier cri, la Suisse l'a fait également il n'y a pas si longtemps.
33:44On lui achète des équipements
33:46militaires. Donc ça, c'est quand même un problème
33:48parce que c'est en contradiction avec un autre
33:50besoin urgent de l'Europe,
33:52c'est son autonomie stratégique. Donc,
33:54il va falloir choisir à un moment donné,
33:56est-ce qu'on est capable en Europe d'assumer
33:58à la fois une autonomie commerciale
34:00ou une confrontation commerciale
34:02et une autonomie stratégique. Parce qu'acheter
34:04la paix avec Donald Trump, ça coûte cher.
34:06Oui, mais c'est ça. Est-ce que l'Europe
34:08peut se passer des Etats-Unis, de se passer de l'Amérique ?
34:10C'est la question. Elvira Fabry,
34:12un peu à tous les niveaux.
34:14Ça nous renvoie à cette question de sécurité. C'est qu'immédiatement,
34:16on a besoin d'équipements
34:18et là, il va falloir en effet
34:20envoyer des signaux
34:22et c'était déjà l'obsession de Trump,
34:24un, de dépenser plus,
34:26donc acheter sur étagère
34:28aux Etats-Unis. Mais je dirais qu'au-delà de ça,
34:30on a quand même des instruments de défense commerciale,
34:32on a quand même,
34:34la Direction Générale du Commerce à la Commission
34:36est en train de préparer
34:38une stratégie qui serait plus ciselée
34:40que ce mur de droit de douane
34:42américain, mais est prêt éventuellement à utiliser.
34:44Qu'est-ce que prépare tout de même à une confrontation ?
34:46Oui, bien sûr. Et puis on a
34:48des instruments de défense commerciale
34:50maintenant sur la réciprocité des marchés publics,
34:52anti-coercition. Oui, mais
34:54on peut les activer
34:56et on pourrait faire très mal si on
34:58décidait de ne plus donner accès au marché public,
35:00aux entreprises américaines.
35:02C'est une multiplication. On peut monter en gamme,
35:04on ne le souhaite pas, mais les Européens
35:06sont là pour se défendre, y compris
35:08par de l'achat et par de la
35:10défense de Grégoire Verdot.
35:12Je vais peiner,
35:14Elvire, mais en plus,
35:16moi, ancien de la Commission à un moment donné, je vais dire un peu
35:18de mal, mais c'est
35:20une chose d'avoir des clous, c'en est une autre de les activer
35:22et de prendre action.
35:24Il y a quelque chose que je voulais compléter
35:26parce qu'on a une discussion intéressante
35:28depuis quelques minutes sur les droits de douane.
35:30Droits de douane, droits de douane, droits de douane.
35:32Mais il y a bien d'autres moyens.
35:34Et Trump, pendant son
35:36premier mandat, en a fait d'autres.
35:38Par exemple, il y a un équipementier
35:40de télécommunications chinois, ça ne s'est pas passé
35:42sur les droits de douane, ça s'est passé sur une éviction
35:44pure et simple du point de vue réglementaire
35:46du marché américain, parce que
35:48la licence a été retirée.
35:50La licence a été retirée.
35:52On a aujourd'hui, non seulement les droits
35:54de douane, mais également le contrôle
35:56des investissements étrangers.
35:58Et le dispositif américain se renforce singulièrement.
36:00Et, évidemment, des affaires
36:02de standards. Ce que je voudrais dire,
36:04c'est que, là aussi, il faut être un peu honnête
36:06intellectuellement, les Européens
36:08le font aussi. Heureusement,
36:10on a comme imposé, via
36:12la RGPD,
36:14notre vision de la protection
36:16des données au plan mondial, parce que tout le monde
36:18voulait pouvoir avoir des échanges de données.
36:20Même si certains contestent en disant que c'est trop tôt pour réguler.
36:22Il faut juste ouvrir les yeux.
36:24On est entré dans une guerre structurelle,
36:26tarifaire, de standards
36:28et d'investissement. Et, effectivement,
36:30on avait cette vision, peut-être Christine Lagarde
36:32avait cette vision de mondialisation
36:34heureuse et harmonieuse, mais malheureusement, c'est fini.
36:36C'est terminé ça.
36:38On dirait que c'est naïf aujourd'hui.
36:40Benjamin Coriassure, justement,
36:42il y a une différence entre activer
36:44et dire.
36:46Pour les Européens.
36:48J'abonde dans ce sens. Effectivement, il y aurait des outils.
36:50Et il y a des outils.
36:52J'ai aussi travaillé un certain temps
36:54en relation très étroite avec la commission.
36:56Mais il y a un manque de décision, de prise de décision.
36:58Alors, il y a premièrement, bien sûr,
37:00un manque de décision, mais je vais rajouter
37:02une pièce
37:04dans la machine.
37:06Ce qu'on paye
37:08aujourd'hui en Europe,
37:10c'est cette doctrine absolument
37:12mortifère et catastrophique
37:14qui était au cœur de l'Europe,
37:16qui était la doctrine de la concurrence.
37:18Et qui a empêché absolument
37:20de constituer
37:22des groupes, une capacité industrielle, etc.
37:24C'est terminé, ça ?
37:26Non, c'est pas terminé.
37:28C'est pas terminé.
37:30Le rapport Draghi, etc.
37:32essaye de pousser la porte
37:34en disant, il faut investir,
37:36il faut investir, etc.
37:38Disons que, idéologiquement,
37:40je pense que tous les gens
37:42qui ont fait cette Europe-là,
37:44qui est une Europe de la concurrence,
37:46sans politique industrielle...
37:48Oui, d'accord,
37:50mais il y a d'autres moyens d'avoir des prix.
37:52Si on produit localement, au lieu
37:54de payer des surprofits aux entreprises
37:56en monopole,
37:58on paye moins cher.
38:00C'était ça, mon point.
38:02Mon point, c'est pour dire,
38:04si, en même temps qu'on commence
38:06à négocier avec Trump,
38:08on n'a pas
38:10une menace crédible
38:12qui passe par le fait que
38:14on commence à produire
38:16chez nous ce dont on a besoin
38:18dans les secteurs existants.
38:20Et ensemble, pour avoir des secteurs
38:22plus importants, c'est ça ?
38:24On n'y arrivera pas.
38:26Les instruments qu'on évoquait tout à l'heure,
38:28c'est des nouveaux instruments.
38:30C'est pas qu'on ne veut pas les utiliser,
38:32c'est qu'ils sont nouveaux.
38:34Le contrôle des subventions étrangères,
38:36la réciprocité sur les marchés publics,
38:38ça date d'il y a un an.
38:40Après, il faut une volonté politique pour le faire,
38:42il faut être ensemble.
38:44C'est bien ça le problème,
38:46c'est la cohésion politique.
38:48Je voulais dire un mot là-dessus.
38:50En plus, il est d'actualité.
38:52Hier, à Strasbourg,
38:54Ursula von der Leyen a obtenu
38:56l'approbation d'un nouveau collège
38:58de 27 commissaires.
39:00Pardonnez-moi,
39:02mais pour avoir été en poste à Bruxelles,
39:04Donald Trump ramène tout
39:06à lui et à des négociations avec lui.
39:08C'est sa stratégie.
39:10C'est moi, Donald Trump, face au monde.
39:12Moi, Donald Trump face à Ursula von der Leyen,
39:14moi, je n'y crois absolument pas.
39:16À Ursula von der Leyen,
39:18qui activerait les fameux mécanismes.
39:20Elle est allemande,
39:22elle a un mandat allemand à la tête de cette commission,
39:24et l'Allemagne est dans le viseur de Donald Trump.
39:26Donc, politiquement,
39:28je peux me tromper, j'espère me tromper,
39:30mais je n'y crois pas. Deuxième exemple.
39:32La Roumanie, j'en parlais à l'instant.
39:34La Roumanie est un pays pour lequel la France,
39:36en particulier, s'est vraiment mobilisée pour sa sécurité,
39:38a envoyé des éléments militaires,
39:40s'est déployée sur sa frontière.
39:42Qu'est-ce que fait la Roumanie ?
39:44Elle achète des F-35 américains.
39:46À la fin, c'est quand même ce type d'acte qui compte.
39:48Grégoire Verdot,
39:50un mot d'espoir quand même pour l'Europe ?
39:52Pour faire le contrepoids.
39:54C'est la fin de l'émission,
39:56donc il faut qu'on dise quelque chose de positif.
39:58Ce qui ne vous le pensait pas du tout.
40:00Vous avez travaillé à la commission.
40:02Je pense qu'il est tout à fait possible
40:04de se réveiller.
40:06Il y a une forme de...
40:08Un reset.
40:10Ce reset, c'est d'abord de prendre conscience
40:12que l'étape de mondialisation
40:14que nous avons connue depuis 20 ans
40:16est en train de se terminer.
40:18Les mécanismes ont la vie dure.
40:20C'est très risqué
40:22de dire qu'une organisation internationale
40:24est en état de mort cérébrale.
40:26Quelqu'un en a fait l'expérience.
40:28Je me pose la question de l'OMC.
40:30C'est très important.
40:3290% du commerce mondial
40:34se déroule aujourd'hui
40:36sous ce que devrait être l'arbitrage de l'OMC.
40:38Or, ce qu'on voit...
40:40Organisation du commerce multilatéral.
40:42Elle est désarmée pour des raisons techniques
40:44qu'on vous épargne,
40:46mais elle ne fonctionne plus vraiment.
40:48Pour des raisons politiques aussi.
40:50On est passé dans ce bilatéralisme.
40:52Ce transactionnalisme.
40:54La question qui est devant les Européens,
40:56c'est comment s'organisent-ils
40:58pour être à la table
41:00et jouer la partie de poker et éventuellement la gagner.
41:02Merci beaucoup.
41:04Merci beaucoup pour ce passionnant débat.
41:06Merci à vous tous de nous avoir suivis.
41:08Vous retrouvez ce débat sur les réseaux sociaux
41:10et également en podcast.
41:12Je vous retrouve lundi.

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