Charles Villa a filmé les crimes de guerre de l’armée russe en Ukraine.
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00:00Salut tout le monde, j'espère que vous allez bien.
00:01Dans cette vidéo, je vais vous parler d'un sujet extrêmement difficile,
00:05c'est les crimes de guerre de l'armée russe en Ukraine.
00:08Je vous préviens, il y a énormément d'images très choquantes à regarder dans ce reportage
00:12et qui peuvent heurter la sensibilité de certaines personnes,
00:15mais c'est la réalité de ce que j'ai filmé sur place.
00:18À partir de la fin du mois de mars 2022,
00:20les troupes russes se sont retirées de la région de Kiev,
00:23mais pendant plusieurs semaines, ils ont contrôlé des villes et des villages
00:27dans lesquels ils ont commis des atrocités.
00:29Quelques jours après la libération de cette zone,
00:31je suis parti sur place avec mes fixeurs
00:33pour rencontrer les Ukrainiens et les Ukrainiennes qui ont vécu l'occupation.
00:48Il y a énormément de personnes qui essaient de s'échapper en voiture,
00:52des civils avec des enfants, etc.
00:53qui se faisaient tirer dessus par les troupes russes.
00:56Il y a énormément de voitures sur le bas-côté,
00:58avec la carrosserie complètement défoncée
01:00et des impacts de balles partout.
01:11Je viens d'arriver à un ancien checkpoint militaire russe
01:14sur la route de Borodyanka,
01:15qui a été attaqué par l'armée ukrainienne et repris.
01:19Les combats ont été extrêmement violents.
01:23Il y a une dizaine de chars de véhicules blindés russes
01:27qui ont été détruits par l'armée ukrainienne.
01:34Il y a aussi un camp dans la forêt.
01:41Ils ont dû faire des pillages
01:43parce qu'il y a de la nourriture ukrainienne.
01:48Donc ça c'est un chariot par exemple,
01:50qu'ils ont dû remplir dans un supermarché ukrainien
01:53et qu'ils ont traîné ici jusqu'à leur camp.
02:16Dans la plupart des tanks,
02:19il y a des cadavres complètement carbonisés des soldats russes
02:23qui ont été tués pendant ces combats.
02:49Je viens d'arriver dans une grande base
02:51qui a été abandonnée il y a seulement quelques jours
02:53par les soldats russes.
02:54Elle se trouve à un croisement stratégique
02:56et vous allez voir,
02:57il devait y avoir beaucoup de soldats
02:59parce qu'il y a énormément de construction qui était en cours
03:01et ils ont tout laissé en plan.
03:06Là quand je me déplace,
03:07vu que je ne sais pas si ça a été déminé ici,
03:10je regarde où je mets les pieds
03:12et surtout j'essaie de marcher dans les traces des véhicules
03:16parce qu'il y a moins de chance
03:18qu'il y ait des mines à cet endroit-là
03:20ou en tout cas ils les auraient déjà fait exploser
03:22s'ils sont passés dessus.
03:27Dans beaucoup de checkpoints qui contrôlaient,
03:29les russes ont creusé des tranchées.
03:33Les planches en bois sont complètement neuves
03:37et c'était pour anticiper une contre-offensive ukrainienne
03:41et pouvoir se protéger des attaques.
03:44Il y a des rations de combat russes
03:47qui s'étaient même fait un endroit pour dormir.
03:54Ça veut dire qu'il y avait des soldats
03:56qui étaient postés là 24h sur 24
03:59pour surveiller ce point de passage.
04:02Il y a des douillets de balles un peu partout.
04:07Là ils ont creusé des trous profonds comme ça
04:10pour se protéger des attaques.
04:14Pour se protéger en cas de bombardement
04:16de tir de mortier, d'obus.
04:21Au-dessus de chaque trou
04:23ils recouvraient ça d'arbres
04:26pour que ça soit plus difficilement détectable.
04:30C'est impressionnant, ils ont construit tout ça
04:32en moins d'un mois.
04:34Mais c'était un très gros checkpoint ici.
04:40Là ils ont creusé un trou juste derrière moi.
04:43Il devait y avoir un engin motorisé, peut-être un tank.
04:46On peut voir les traces.
04:52Il y avait des branches juste ici.
04:54Ces branches devaient servir à recouvrir
04:56l'engin qui était juste là.
04:59Tout a l'air encore très intact.
05:02Il n'y a pas l'air d'avoir eu de combat ici.
05:05Mais tout est resté tel quel.
05:09Il y a des planches de bois
05:12qu'ils avaient découpées.
05:14Ils étaient en train de construire des choses.
05:19Ça donne l'impression qu'ils sont partis
05:21en vitesse de cet endroit.
05:23Et qu'ils ont tout laissé sur place.
05:28Sur la route et dans les petites villes
05:30qu'on a pu traverser,
05:32on a vu à quel point les Russes étaient partis
05:34rapidement du jour au lendemain
05:36pour se replier à l'est du pays.
05:38On a croisé plusieurs bases, plusieurs checkpoints
05:41La plupart du temps, l'armée ukrainienne
05:43une fois qu'elle a libéré certaines zones,
05:45elle les nettoie.
05:47C'est-à-dire qu'elle fait des prisonniers.
05:49Elle récupère les documents sensibles.
05:51En général, elle enlève les corps
05:53des soldats ukrainiens qu'elle a perdus
05:55et russes.
05:59La plupart des petits villages
06:01qu'on est en train de traverser,
06:03il y a un silence de mort.
06:05Quasiment tous les magasins, les maisons
06:07ont été endommagés par les combats.
06:11Je vous souhaite la santé!
06:13Vous avez besoin d'un pain frais?
06:15J'ai un bagage plein.
06:17Pouvez-vous que je vous donne du pain?
06:19Allez, mangez!
06:21Allez!
06:29Oh, vous filmez?
06:31Merci!
06:33Que Dieu vous donne de la santé!
06:35Que vous soyez en bonne santé!
06:37Et vous, comment allez-vous?
06:40C'est normal.
06:42Vous allez voir.
06:44En fait, la plupart des personnes
06:46qu'on croise dans les villages,
06:48ce sont des personnes âgées
06:50avec une mobilité réduite,
06:52qui ne pouvaient pas partir
06:54et qui ont dû rester pendant l'occupation.
06:56Vous n'étiez pas sortis?
06:58Non, nous n'étions pas sortis.
07:00Il y a des gens qui sont sortis,
07:02mais nous, nous ne sommes pas sortis.
07:04C'est qui?
07:06C'est qui?
07:09C'est terrible.
07:11On ne peut pas imaginer
07:13que nous vivons à un moment
07:15où il y a une guerre.
07:17Nos parents ont vécu une guerre.
07:19On ne peut pas le dire en mots.
07:27Tous les titans russes se sont réunis.
07:29Je leur ai dit qu'il n'y aurait pas de guerre.
07:31Il n'a pas ri.
07:33Tout l'Europe est contre lui.
07:35Il a peur.
07:38C'est le documentaliste français.
07:40J'ai quelques questions.
07:42Vous n'êtes pas contre?
07:44Non, je ne suis pas contre.
07:46C'est le documentaliste français.
07:48Pouvez-vous filmer ces morts-là?
07:50Filmez ces morts-là.
07:52Il y en a qui ont été tués.
07:54Oui, j'ai la documentation.
07:56J'ai vu comment ils ont tué un.
08:02On est dans la petite commune
08:04où se trouvent les morts.
08:07On est dans la petite commune de Vorzel
08:09juste à côté de Bucha.
08:11C'est un endroit qui a été contrôlé
08:13pendant plusieurs semaines par les troupes russes.
08:15Ils dormaient dans les maisons.
08:17Ils pillaient.
08:19Ils ont tué beaucoup de personnes.
08:21Les villageois veulent nous montrer.
08:25Les nerfs sont forts?
08:27Oui, on les a déjà regardés.
08:29Il y a des gants?
08:31Non.
08:33On ne va pas les toucher.
08:36Je vais les ouvrir.
08:48Vous connaissez cet homme?
08:50Oui.
08:52Vous le connaissez?
08:54Oui.
08:56C'est une femme.
09:02C'est le pire.
09:05C'est l'homme qui a tué 5 enfants.
09:31Et les enfants?
09:34Ils l'ont emporté.
09:36Les policiers l'ont emporté.
09:48Une fois que les Russes sont partis,
09:50c'est là qu'on a commencé
09:52à comprendre l'ampleur
09:54des massacres sur la population civile.
09:56On voyait déjà un peu avant
09:58des messages de gens sur les réseaux sociaux
10:00qui en parlaient ou qui prévenaient leurs proches.
10:02On a pu se rendre sur place.
10:04On a réalisé que tout le monde
10:06connaissait quelqu'un qui a été victime
10:08des soldats russes pendant l'occupation.
10:10C'est pour cette raison
10:12que les autorités ukrainiennes ont mis en place
10:14une unité spéciale qui est chargée
10:16de recenser les crimes de guerre de l'armée russe.
10:18J'ai pu les suivre à Irpin,
10:20une petite ville au nord de Kyiv
10:22où les combats ont été extrêmement violents.
10:32Euh...
10:34Bienvenue, enchanté !
10:50On ne voit pas très bien,
10:52mais c'est une autre excavation.
10:56Nous avons deux excavations.
10:58Attention avec le haut !
11:32et ça permet de documenter les crimes de guerre de l'armée russe.
12:03C'est mon frère.
12:06Il ne peut pas s'en occuper.
12:08Son enfant a 8 mois.
12:108 mois.
12:12Il portait avec sa grand-mère les 7 litres d'eau qu'il mettait sur les étages.
12:17Il les portait dans les bouteilles et les distribuait.
12:22Ils ne sont pas partis pour eux.
12:24Je ne suis pas partie pour les nourrir, les cuisiner.
12:27Je suis restée ici jusqu'à la fin.
12:32On est maintenant à l'étage de l'étage de l'église.
12:35On a une grande fête.
12:38C'est le premier étage de l'étage,
12:40du 2ème étage de l'étage,
12:41de la grande étage.
12:43On est à l'étage de l'étage de l'église.
12:55On n'a jamais vu un étage tel.
12:58Ils seront clairement menacés.
13:00On a fait des photos de satellite avec nos partenaires internationaux,
13:03où on a bien compris où se trouvait l'assassinat,
13:08dans quel jour ils se trouvaient, qui était à ce territoire,
13:11quelles colonnes étaient-elles, comment ils entraient et comment ils sortaient.
13:15Tout ça, c'est important pour nous d'apporter ça à la communauté internationale.
13:18Pour que vous compreniez bien de quoi on parle,
13:20il faut que je vous explique d'abord ce qu'on qualifie de crime de guerre.
13:24En fait, ce sont des attaques délibérées contre des populations civiles.
13:28Ça peut être de l'enlèvement, de l'esclavage, des violences sexuelles,
13:32de la torture, des expulsions ou encore des meurtres.
13:36Parce que dans un conflit, il y a évidemment des armées qui s'opposent et s'affrontent,
13:40mais il y a aussi quasiment toujours des populations civiles au milieu.
13:44Après la seconde guerre mondiale, plusieurs dizaines de pays
13:46avaient décidé de rédiger des traités pour encadrer le droit humanitaire international.
13:51On les appelle les conventions de Genève et il y a évidemment plusieurs volets,
13:55mais il y en a un qui vise spécifiquement à protéger les populations civiles
13:58et non combattantes de toute violence.
14:00Et je précise qu'évidemment, la Russie, à l'époque de l'URSS,
14:03avait ratifié ces conventions de Genève.
14:05Je reviens sur le travail d'enquête en Ukraine
14:07parce qu'il commence en fait déjà à avoir des résultats.
14:09Un premier procès a débuté à Kiev le 17 mai,
14:12où un jeune soldat russe est jugé pour avoir tué délibérément
14:15un civil qui ne portait pas d'armes.
14:16Il a été arrêté par l'armée ukrainienne alors qu'il essayait de fuir la ville.
14:25Nous avons des photos d'un soldat, des photos d'un soldat de l'armée,
14:28ils sont tous en physique, nous avons des photos,
14:31nous savons comment ils sont enregistrés sur les réseaux sociaux,
14:34leurs souvenirs, leurs données.
14:36Nous les documentons maintenant et dans le futur,
14:38nous donnerons une évaluation juridique
14:40et nous transmettrons tous les matériaux à l'Assemblée internationale des Criminels
14:43pour que la société puisse voir les atrocités qu'ils font ici.
14:55Je vais vous montrer un peu.
14:58Oui, bien joué.
15:01Alors, sur la tête,
15:05il y a une autre tête.
15:07Donc la tête est en forme de genou.
15:11C'est un genou.
15:13Dans ce jardin, ils ont sorti les corps de quatre personnes
15:16et le dernier que vous venez de voir,
15:18c'est celui d'une grand-mère qui a reçu des éclats d'obus dans la jambe
15:22et qui est décédée à cause de sa blessure.
15:24Au moment où j'y étais,
15:25l'unité spéciale récupérait plusieurs dizaines de cadavres par jour.
15:28Et début avril, les autorités ukrainiennes ont déclaré
15:30qu'ils avaient déjà retrouvé les corps de plus de 1222 victimes civiles
15:34rien que dans la région de Kiev.
15:36C'est bon.
15:54On va le régler.
15:55Comment vous vous sentez au cours de la travail ?
15:58Il est possible de se maquer ?
15:59Oui.
16:00C'est fou.
16:01C'est pas normal.
16:02Ça n'est pas comme ça que j'ai pensé.
16:04Je ne peux pas le transmettre.
16:05C'est vraiment difficile, honnêtement, je ne peux pas.
16:11Excusez-moi, je m'en vais, il y a du vent.
16:13Je n'y peux pas.
16:35C'est extrêmement intense et c'est sûrement une des villes les plus détruites par la guerre dans la région de Kiev.
17:06Le niveau de destruction est insensé.
17:10Il n'y a plus rien qui tient debout.
17:18Selon l'armée ukrainienne, clairement, les Russes voulaient faire des victimes civiles.
17:23Quand on voit l'état de la ville, c'est difficile de penser le contraire.
17:36Cet appartement a été complètement détruit.
17:41Il ne reste plus rien.
17:45Il n'y a plus personne dans cet immeuble.
17:49Tout le monde est parti.
17:56Là, il y a des Russes qui ont dormi ici.
18:00Il y a des restes de leurs rations.
18:02Ils ont essayé de pénétrer dans tous les appartements.
18:05Il y a vraiment partout des tentatives d'effraction.
18:15Les soldats russes sont passés par là.
18:17Ils ont mis des tags.
18:19Il y a marqué « Vendetta ».
18:25Je vais vous montrer.
18:27Sur la plupart des appartements, ils ont aussi tagué le V.
18:30C'est le signe de l'armée russe.
18:36Certains habitants sont revenus dans l'immeuble
18:39juste pour récupérer ce qu'ils pouvaient.
18:42Ils vont quitter la ville.
18:47Les gens ont vécu, travaillé, casiné.
18:51Nous n'avons rien demandé.
18:54La guerre s'est élevée.
18:56La guerre s'est élevée.
18:58Tout le monde était content.
19:00Qui leur a demandé de venir ici ?
19:03Personne.
19:19Après Borodyanka,
19:21on a décidé d'aller à Butcha.
19:23Vous en avez sûrement entendu parler dans les médias
19:26parce que les autorités ukrainiennes
19:28ont découvert un grand charnier
19:30derrière l'église de la ville
19:32où les corps de plus de 65 personnes ont été exhumés.
19:45Un charnier comme celui-ci,
19:47c'est une véritable scène de crime.
19:49C'est pour ça qu'il y a des enquêteurs,
19:51de la police scientifique,
19:53qui essaient de récupérer un maximum de preuves
19:55pour peut-être retrouver les responsables
19:57qui ont commis ces atrocités.
19:59Mais ils sont aussi là pour essayer de retrouver
20:01des affaires, des effets personnels
20:03pour confirmer l'identification de la personne
20:05et ensuite rendre le corps à la famille.
20:08Pendant l'occupation de Butcha
20:10par les armes russes,
20:12il y a eu un massif tir
20:14sur nos compatriotes.
20:16Je ne vais pas déterminer ce qu'il s'est passé
20:18dans ce lieu,
20:20mais je pense que c'est un lieu
20:22où les gens ont été tués.
20:24Ils ont été transportés
20:26dans la grotte de la famille.
20:28Des citoyens, des gens
20:30âgés, jeunes,
20:32mais pas des soldats.
20:34Et sans aucune preuve,
20:36ils ont été tués par ces inhumains.
20:38Peut-être qu'on va en savoir plus
20:40sur le nombre de personnes
20:42qui ont été tuées et écoutées
20:44sans aucune preuve.
20:50On a notamment croisé une grand-mère
20:52qui pleurait la mort de ses petits-enfants
20:54et de sa belle-fille qui ont été tués
20:56alors qu'ils essayaient de fuir la ville.
21:20Ils ont tué nos enfants.
21:22Qu'est-ce qu'ils ont fait
21:24pour être tués
21:26comme ça ?
21:28Je les regarde tous les jours.
21:30Je pense que ce n'est pas vrai.
21:32Je pense qu'ils reviendront,
21:34qu'ils sont vivants.
21:36Mais je ne peux pas attendre.
21:51J'espère que ce reportage vous a intéressé.
21:53Je sais, encore une fois,
21:55que ce sont des images très difficiles
21:57à regarder, mais je pense sincèrement
21:59qu'il faut qu'elles existent
22:01pour qu'on ne puisse pas nier ces crimes.
22:03Ça me rappelle évidemment
22:05les reportages que j'ai pu faire
22:07sur les crimes de guerre de l'État islamique
22:09en Irak et en Syrie.
22:11Je maintiens que ce travail de documentation
22:13est primordial et indispensable.
22:15Merci encore pour tout votre soutien.
22:17A très vite.