Elles seraient à l'origine de plusieurs décès. Cet été, comme chaque année, elles ont envahi les côtes bretonnes. Voici l'histoire polémique des algues vertes en 8 moments clés, racontée par la documentariste Inès Léraud.
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00:00Au pied de la falaise, là-bas, il doit y avoir au moins 50 centimètres.
00:03On n'arrive plus à gérer tout ça, donc il va falloir qu'on fasse en sorte
00:07que ces algues vertes disparaissent de notre paysage.
00:08C'est des risques d'accidents aigus brutales, soit cardiaques, soit comas, voire décès.
00:22Juillet, août 68.
00:23En bête de l'Agnan et de Saint-Brieuc, apparaissent pour la première fois,
00:27échouées sur les plages, des algues vertes, des nappes d'algues vertes.
00:31En séchant au soleil, elles dégagent une odeur pestilentielle qui fait fuir les touristes.
00:35Depuis cette date, le phénomène a touché progressivement de nouvelles zones
00:38et aujourd'hui, il est toujours en pleine croissance.
00:57Ils ont eu une réaction, face à eux, très étrange, une réaction de gêne, de silence.
01:04Et finalement, les élus leur ont dit que ce n'était pas possible,
01:08qu'il fallait revoir ses conclusions et que, d'après leurs propres études faites en parallèle,
01:14les algues vertes seraient plutôt liées au phosphate émis par les stations d'épuration des villes.
01:28C'est la première fois qu'on parle du danger toxique des algues vertes.
01:44Il ne peut pas réaliser d'examen tellement l'odeur est insupportable.
01:49Et cette odeur n'est pas du tout liée à l'état du corps qui serait en putréfaction,
01:53pas du tout, le corps est frais, mais à l'état des algues dans lesquelles le corps est englué.
01:58Et tout de suite, il pense qu'en fait, ce jeune homme est peut-être mort
02:02à cause de ce gaz nauséabond qui se dégage de ses algues.
02:06Et il va demander une autopsie, dont il n'aura jamais les résultats.
02:24Toutes ces précédentes alertes n'ont jamais été prises en compte.
02:27Et finalement, chaque cas nouveau suspect est toujours invalidé.
02:54Tout ça s'est passé en moins de 30 secondes.
02:56J'ai vu mon cheval qui arrêtait de ventiler, qui mourait de manière extrêmement rapide.
03:02Et moi, dans la foulée, je me suis évanoui.
03:08Le cheval contient dans son poumon un taux explosif d'hydrogène sulfuré.
03:15Donc là, vous avez interdit l'accès ?
03:17Oui, oui.
03:24Pour la première fois, l'OMERTA est enfin brisée.
03:28La ministre de l'Environnement, Chantal Joanneau, déclare publiquement
03:32« J'ai demandé des analyses aux scientifiques et elles révèlent que les doses d'hydrogène sulfuré
03:39là où est mort le cheval sont le double des doses mortelles. »
03:43Et elle ajoute « Je suis étonnée par le nombre d'années
03:48pendant lesquelles on a joué la politique de l'autrouche. Il faut que ça cesse. »
03:52Il faut nettoyer les plages et c'est ce que nous allons faire.
03:54L'État va prendre à sa charge financièrement le nettoyage des plages qui sont les plus touchées
03:59de manière à ce qu'il n'y ait plus de problèmes de santé publique.
04:01Nous avons pris avec les agriculteurs des engagements extrêmement précis
04:05de réduction considérable des intrants agricoles.
04:14Là, on est en 2009 et on prévoit de réduire drastiquement le phénomène des marées vertes pour 2015.
04:22C'est ce qu'on va faire.
04:38Seules des analyses toxicologiques sur le sang, sur les poumons permettraient de mettre en évidence
04:45cette responsabilité des algues vertes.
04:47Alors que tous les éléments convergent vers le fait que l'hydrogène sulfuré soit bien la cause de ce décès collectif,
04:54comme le diront des instituts scientifiques, l'INERIS et l'ANSES,
04:58l'administration et notamment la préfecture des Côtes d'Armor va sans cesse mettre en doute ces conclusions scientifiques
05:06et dire qu'on ne sait pas à quoi sont liées ces morts collectives d'animaux.
05:17On a fait des efforts depuis 20 ans, ça va continuer, mais on ne peut plus accepter d'être pris pour les seuls responsables de tout ce qui se passe dans cette baie.
05:33Il n'y a aucun souci effectivement ici, là on est là, il n'y a aucune odeur, il n'y a aucune pollution apparente.
05:39Les agriculteurs mais surtout les décideurs économiques du monde agricole,
05:43les responsables de l'agroalimentaire vont par différents moyens essayer de maîtriser le discours sur les algues vertes,
05:50de créer un contre-discours, de produire du doute en disant que ces algues vertes on ne sait pas exactement d'où elles viennent.
06:00En 2015, les marées vertes n'ont pas vraiment diminué, donc à ce moment-là on met en place un deuxième plan algues vertes,
06:08à partir de 2016-2017, qui est censé durer jusqu'à 2021.
06:21L'homme de 50 ans serait décédé en tentant d'aller au secours de son chien.
06:25Pour les écologistes, le coupable se trouve à même le sol.
06:30Sur cette affaire, rien n'a été fait, pas de prise de sang, c'est simplement l'autopsie après, suite à notre demande.
06:38Or, il aurait fallu que la prise de sang soit faite comme quand il y a un accident sur la route.
06:44Comme la famille du mort le fait remarquer, à quoi sert cette autopsie, puisque des semaines après le décès,
06:51il n'est plus possible de savoir d'où provient l'hydrogène sulfuré, puisque le corps en putréfaction lui-même produit de l'hydrogène sulfuré.
06:58Un paradoxe qui surgit, c'est que le procureur de Saint-Brieuc va dire, au terme de deux mois,
07:05qu'aucun lien ne peut être fait entre les algues vertes et la mort de ce joggeur.
07:11Mais dans le même temps, il va demander aux mairies de mettre des panneaux pour dire que cet endroit, l'estuaire du Bouessan, est très dangereux.
07:22Le système de ramassage mis en place n'arrive pas à venir à bout de ces algues vertes.
07:26Donc, les mairies sont obligées de fermer certaines plages sur leur commune.
07:30Il y a un nombre exceptionnel de plages fermées cette année en Bretagne.
07:33Et puis même, les centres de retraitement des algues vertes n'arrivent pas à venir à bout de ces algues vertes.
07:38Ce qui fait que le centre de retraitement, par exemple, de l'Antique, a été obligé de fermer et que ces algues sont, dans les côtes d'Armor, épendues dans les champs.
07:56Pour arrêter de dire « il y a trois mètres carrés d'algues vertes fraîches sur la plage, on va tous mourir », il faut arrêter ce délire.
08:11A contrario, il ne faut pas être dans la dénégation du fait que si vous avez des grands amas en plus des factions, ça présente des risques.
08:19Ça va de soi.
08:21En fait, pour que les matières algues vertes diminuent de moitié, il faudrait que dans les cours d'eau bretons, les taux de nitrate soient de 10 mg par litre d'eau.
08:33Or aujourd'hui, ils sont autour de 30 mg par litre d'eau.
08:37Et on voit que ça fait des années et des années que la Bretagne dit « on va atteindre ces 10 mg par litre d'eau, mais il faut nous laisser plus de temps, il faut nous laisser des délais plus longs ».
08:47Et puis dernièrement, la FNSEA, le principal syndicat agricole, a même dit « non mais en fait, on a déjà pas mal réduit les nitrates, on est arrivé à 30 mg par litre d'eau, donc peut-être que maintenant on peut laisser les agriculteurs tranquilles ».
08:59Au terme de mon enquête, j'ai compris qu'il y avait une phrase qu'on ne pouvait pas dire en entier, c'est « les algues vertes proviennent de l'agriculture intensive et tuent ».
09:08C'est-à-dire qu'on peut éventuellement dire « les algues vertes proviennent de l'agriculture intensive ».
09:14Là, on n'aura pas trop d'objections. On peut éventuellement dire « les algues vertes tuent », on n'aura pas trop d'objections non plus.
09:20Mais dire la phrase complète, ça pose un vrai problème à la fois à l'administration en Bretagne et aux industriels.