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En 2023, on comptait 1142 start-up à impact. Elles ont contribué à la création de 32 000 emplois. Caroline Neyron, directrice générale du Mouvement Impact France, nous donne la définition de ce qu’est une entreprise à impact et de son rôle pour la société. Y a-t-il un backlash dans ce secteur ? Quel est l’intérêt que les entrepreneurs de ce secteur soient diversifiés ? Quel est l’enjeu de l’ampleur des ambitions des entreprises à impact ? Elle répond à ces questions dans un grand entretien.

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Transcription
00:00Prêt pour l'impact ? Une personnalité qui compte dans notre économie, 26 minutes d'entretien avec Caroline Neyron.
00:09Aujourd'hui, bonjour. Bienvenue. Vous êtes la directrice générale du mouvement Impact France.
00:14Forcément, vous deviez être invitée de cette rubrique. La question que je pose à chacune, à chacun de mes invités, c'est est-ce que vous êtes prêt pour l'impact ?
00:22Je ne vais pas vous poser la question parce que ça semble une évidence, mais quel sens vous donnez à ce mot ?
00:26Oui. C'est une bonne question parce qu'effectivement, il a été utilisé, réutilisé un peu, parfois, n'importe comment.
00:32C'est justement pour ça qu'on a choisi de s'appeler Impact France parce que l'impact en économie, c'est deux choses.
00:39La limitation de tous les effets négatifs qu'a aujourd'hui une entreprise, donc comment elle est consciente des effets négatifs qu'elle a
00:49et elle travaille en transparence avec une stratégie pour les limiter au maximum en sachant que tout n'est pas possible.
00:58Mais aussi, c'est l'impact positif, c'est-à-dire comment aujourd'hui une entreprise aligne une stratégie qui peut avoir des effets positifs
01:07sur les enjeux écologiques, sur les enjeux sociaux, sur les différents objectifs de développement durable.
01:12Et donc pas limiter son action à développer son business, mais avoir dans sa stratégie un développement d'impact aussi pour l'ensemble de l'association.
01:22C'est une question d'ambition quand on parle d'impact positif, c'est-à-dire que déjà c'est très bien de limiter son impact négatif sur la biodiversité, sur le climat, etc.
01:33Mais c'est une question d'ambition quand on essaye d'aller plus loin, de positiver ?
01:37C'est une question de stratégie. En fait, plein d'entreprises ont le droit de ne pas avoir une stratégie à impact.
01:44Mais effectivement, il y a un nombre important, et notre rôle c'est qu'il y en ait de plus en plus, d'entreprises qui intègrent cet enjeu au cœur de leur business
01:54pour des enjeux sociétaux, mais aussi pour des enjeux purement business.
02:00En se disant que cet alignement entre leurs objectifs de rentabilité et leurs objectifs sociétaux au grand sens du terme vont pouvoir s'aligner.
02:11Et que s'ils sont désalignés, ça peut les mettre en risque d'une certaine manière.
02:16Donc voilà, c'est la possibilité d'aligner sa stratégie sur des objectifs qui te dépassent, qui dépassent l'entreprise et en même temps qui vont la tirer vers le haut.
02:29Des objectifs aussi qui lui permettent de voir loin.
02:32Et la question d'accompagner une vision qui te permet de faire autre chose que de driver ton entreprise au mois au mois,
02:40mais peut-être penser à sa pérennité plus tard, c'est aussi une question qui tient à cœur de plus en plus aux entrepreneurs, aux dirigeants de l'entreprise.
02:49Vous avez créé le classement Impact 4020, c'est une façon de recenser et puis j'imagine aussi justement de susciter des vocations des startups,
02:58peut-être potentiellement des licornes à impact. C'est quoi ? C'est une alternative au Next 4020 déjà ? C'est l'idée de départ ?
03:05C'est exactement ça. Dans l'Impact, il y a effectivement des entreprises qui sont natives, qui sont vraiment créées pour résoudre une problématique écologique et sociale.
03:16Et notamment pas mal de startups qui sont plus ou moins bien repérées et qui ont pourtant une très haute valeur ajoutée.
03:24L'enjeu, c'était justement comme la French Tech s'est extrêmement bien développée en France et a vraiment soutenu toute une dynamique de startups très positive.
03:34Cette dynamique étant valorisée dans le Next 40 qui a fait école.
03:39Et là, on valorise quoi uniquement ?
03:41On valorise le chiffre d'affaires, la rentabilité, etc. Le niveau des levées de fonds, la valorisation.
03:46Donc on dit, une licorne aujourd'hui, c'est un milliard de valorisation en France.
03:52Et nous, notre enjeu, c'était de valoriser des entreprises qui vont pouvoir être des jeunes entreprises, qui ont des innovations de rupture, qui ont moins de 10 ans
04:00et qui peuvent être des licornes à impact.
04:03Donc ce n'est pas le milliard le critère ?
04:05Pas l'objectif de faire un milliard de valo, mais l'objectif d'avoir au moins 50 millions de coûts évités pour la société.
04:11Alors justement, c'est la question que j'allais vous poser. Comment vous les quantifiez ? Parce que ce n'est pas un milliard de valorisation, c'est facile.
04:18Ce n'est pas si facile. Et c'est extrêmement polémique.
04:21Je ne dis pas que c'est facile à atteindre. Effectivement, vous avez raison. Mais comment on quantifie les coûts évités à la société ?
04:29L'enjeu de l'Impact 40, c'est de valoriser cette nouvelle génération de startups qui vont pouvoir devenir des licornes à impact.
04:35Et comment on les quantifie ? C'est finalement assez simple, même si dans les détails, ça peut être complexe.
04:42Mais le principe est simple. Une entreprise comme Meille Santé, qui permet aux parents, dans les 1000 premiers jours de l'enfant, d'avoir accès à un réseau de soins beaucoup plus facilement
04:54et d'éviter d'aller chez le médecin 3 fois par semaine, comme chacun d'entre nous l'a peut-être fait, de se retrouver aux urgences et engorger les urgences pour pas grand-chose.
05:04Elle permet et elle évalue assez rapidement les coûts évités qu'elle a sur la société en remboursement de médecins, en engorgement des urgences.
05:12Et donc, elle valorise sa performance économique, mais aussi sa performance sociale via des coûts évités.
05:19Évidemment, on sait aujourd'hui que la tonne carbone a aussi un prix. Donc, pour toutes les entreprises qui permettent une décarbonation beaucoup plus rapide du pays,
05:28on sait les coûts évités qu'elles peuvent avoir. Et c'est de la même manière que Jean-Pyzani-Ferry évalue le coût de la transition pour le pays.
05:36On sait évaluer le coût évité de la transition par les entreprises qui s'engagent.
05:40Et ça rejoint les enjeux. Vous étiez déjà venu en parler de bilan extra-financier de CSRD. On y consacrera un chapitre dans cette interview pour savoir comment
05:50l'Europe est en train ou non de détricoter ce levier. Je voudrais qu'on donne quelques chiffres sur ces startups à impact, chiffres qui datent de 2023.
05:581 142 startups à impact. C'est vous qui les fournissez à 32 000 emplois créés, 10 milliards de fonds levés depuis leur création. Est-ce que ça progresse en 2024 ?
06:07Est-ce que vous avez déjà les chiffres de l'année passée ?
06:10On va voir justement parce qu'on va sortir le nouvel index Impact 40 à Change Now le 26 avril. Et on pourra voir justement si dans un environnement où
06:24d'aucuns parlent un peu de backlash, de recul, on va voir si effectivement il y a un recul ou pas. Nous, ce qu'on voit aujourd'hui, les signaux faibles nous montrent
06:34qu'il n'y a pas de recul de ces startups parce qu'elles sont ancrées dans le réel, parce qu'elles ont justement eu beaucoup moins des valorisations qui
06:46parfois étaient un tout petit peu extrapolées et qu'elles répondent encore une fois à de réels besoins.
06:53Elles sont dans quel secteur ? Le secteur de l'énergie par exemple ? Il y en a beaucoup.
06:56Le secteur de l'énergie mais aussi on a le secteur de la santé et des vulnérabilités. On peut avoir le secteur de l'économie circulaire dont vous venez de parler.
07:05On a des secteurs extrêmement divers finalement sur les enjeux de toute la palette des enjeux écologiques et sociaux.
07:14Ce qui est intéressant c'est de voir justement comme ça s'équilibre entre le social par exemple. Il y a aussi l'emploi et la formation.
07:21On a des belles startups aujourd'hui sur la formation, l'orientation et l'enjeu écologique.
07:27Et ça nous paraît intéressant de le souligner parce qu'on a eu des moments presque d'affrontements ou de questions.
07:35Est-ce que l'écologie allait prendre le pas sur le social ou l'inverse ?
07:40Et on voit finalement que les problématiques de transition concernent ces différents volets qui vont ensemble et qu'on a des solutions qui grandissent.
07:47Un autre exemple, c'est vous qui choisissez dans le secteur de l'énergie, de l'économie circulaire.
07:53Parce que finalement là où c'est intéressant c'est que ce sont souvent des entreprises qui ont un effet direct sur notre vie quotidienne, sur la vie quotidienne des Français.
08:01Exactement. Alors évidemment on connaît tous l'application Phénix sur le gaspillage alimentaire.
08:06Aujourd'hui ils ont révolutionné Phénix et Togo Togo. Aujourd'hui la question de traiter le gaspillage alimentaire.
08:13C'est non seulement une solution qui permet des coûts à éviter carbone parce qu'on gaspille moins, c'est aussi une solution solidaire.
08:20Alors on a les deux aspects et aujourd'hui c'est rentré dans le quotidien des Français.
08:25Et ce qui est intéressant c'est de voir comment ces acteurs, évidemment un grand acteur aussi qui va sortir cette année parce qu'il aura plus de dix ans de l'index.
08:35Donc je peux en parler, c'est Back Market. De la même manière il a révolutionné la consommation d'objets de réemploi.
08:44Donc c'est concrètement des acteurs qu'on a intérêt à soutenir, à développer.
08:50Parce que non seulement ils sont potentiellement des champions économiques mais aussi ils révolutionnent notre manière de faire.
08:57Ils nous permettent de faire évoluer notre manière de consommer, de produire et de s'organiser en société.
09:05Est-ce que c'est une préoccupation féminine ? Je vous pose la question.
09:11Pourquoi il dit ça ? Parce qu'en fait en préparant l'émission je vois qu'il y a plus de femmes finalement qui sont à l'origine, qui sont dans les équipes fondatrices de ces startups à impact.
09:20Alors c'est un indice qui a surtout montré la grande diversité des fondateurs de startups à impact.
09:27Parce que oui il y a une grande diversité femmes-hommes. Effectivement on a plus de 53% de femmes dans les équipes fondatrices, ce qui est très différent.
09:36On ne trouvera pas ces chiffres ailleurs.
09:38Non et voilà on a une femme dans le NEXT 40 qui est rentrée récemment.
09:45Effectivement c'est différent mais c'est aussi différent sur la part de seniors, la part de personnes qui viennent de quartiers prioritaires, de jeunes.
09:55En fait si on tire le fil on a une vraie diversité.
09:58Alors c'est intéressant, nous aussi ça nous a posé question.
10:02Et ce qu'on a compris c'est qu'on est tellement sur des enjeux du quotidien justement, de problématiques qui touchent les français
10:10que finalement les bonnes idées et les bons business pour les résoudre, ils viennent d'acteurs très différents, avec des expériences de vie aussi très différentes.
10:22Souvent ils ont été confrontés à une situation et ils se disent tiens de cette situation ça me donne l'idée de créer une boîte qui va améliorer le quotidien, le mien et celui des gens autour de moi.
10:32Exactement et puis évidemment avec des niveaux de valorisation financière attendus qui sont beaucoup moins importants.
10:42Donc finalement on est moins dans un stéréotype d'une personne qui a un peu le parcours obligé de l'entrepreneur.
10:51On a une diversité de parcours et en ça du coup on retrouve une diversité femmes-hommes mais comme d'autres critères.
10:59D'accord. Je voudrais qu'on parle des nouveaux imaginaires en m'appuyant sur cette tribune publiée dans Le Monde début janvier avec plusieurs responsables de l'économie sociale et solidaire.
11:08Vous êtes aussi vice-présidente de la chambre de l'économie sociale et solidaire française et vous écrivez ceci.
11:13Pour éviter un dérèglement civilisationnel il est nécessaire de rendre attirant le contenu de la transition écologique.
11:21Alors là on touche à une thématique qui nous tient à cœur ici à Smart Impact, c'est la question de l'acceptabilité.
11:29C'est quand même devenu un frein majeur à la transition aujourd'hui. Pourquoi ? Qu'est-ce qu'on a loupé ?
11:38Nous, je mets volontairement le « nous » des médias aussi.
11:43Ce qu'on nous en analyse c'est que le bâclage dont on parle tous les jours, il n'existe pas réellement aujourd'hui dans la population française.
11:51On a beaucoup étudié les chiffres qui sortaient d'une étude récente de Parlons Climat qui est un institut de sondage spécialisé sur ces questions.
12:02Très probablement il y a eu un clivage beaucoup trop fort entre les tenants d'une transition très rapide et en même temps les tenants d'une volonté de ne rien faire et de laisser passer.
12:24Pourtant aujourd'hui les Français sont très conscients qu'il va falloir faire évoluer les choses, qu'il y a une problématique écologique, une problématique sociale et ils sont prêts à faire beaucoup de choses.
12:35Même les climato-sceptiques aujourd'hui...
12:37Ils ont quand même plus voté RN qu'Ecologie Les Verts aux européennes.
12:41Oui mais justement, est-ce que l'écologie aujourd'hui, la prise de conscience écologique, est-ce qu'elle se traduit dans ce vote ?
12:49Aujourd'hui les études ne le montrent pas.
12:51Elles montrent même que des climato-sceptiques, donc vraiment la partie la plus rétive, sont d'accord pour des évolutions de politique publique sur ces enjeux.
13:02Donc en gros notre enjeu c'est comment on rend ça désirable mais possible.
13:08Et donc sortir les citoyens, mais nous pour notre côté les entreprises, des injonctions contradictoires.
13:15Nous on pousse les entreprises à voir loin, à avoir des stratégies à long terme et donc à accepter, à soutenir des dynamiques de transformation qui leur permettent de dérisquer aussi leur vie actuelle et future et de voir les opportunités.
13:32Et donc de ne pas forcément tenir compte du yo-yo électoral.
13:37Parce que quand on voit la situation aux Etats-Unis, la guerre faite par l'administration Trump, il s'est entouré de pas mal de climato-sceptiques.
13:46Donald Trump a sur tous ses enjeux notamment environnementaux et sociétaux d'ailleurs.
13:51Les entreprises elles font quoi ? Elles continuent de tailler leur route même s'il y a un pouvoir puissant qui dit on arrête tout.
13:58On reprend des pailles en plastique à usage unique.
14:01Alors c'est un pouvoir puissant qui dit on arrête toute réglementation.
14:05Après il n'empêche que les Etats-Unis restent des investissements extrêmement forts d'innovation.
14:10Donc il y a un peu de tout.
14:12C'est pour ça que je vous pose la question de la stratégie de l'entrepreneur homme ou femme face à ce yo-yo électoral.
14:18Il y a deux choses. Il y a un comment aujourd'hui justement j'accompagne mon entreprise en toute transparence à regarder comment je suis pérenne
14:29et comment j'intègre la réalité du monde tel qu'il est pour accompagner la pérennité de mon entreprise.
14:35Évidemment comme le disent plein d'investisseurs à qui on dit vos fonds climat, la décarbonation ce n'est pas une histoire d'hier c'est une histoire de demain.
14:42De toute façon les enjeux écologiques ils arrivent, le réchauffement climatique arrive.
14:47Il y a de grandes banques américaines, des sociétés de gestion américaines qui se sont retirées des accords internationaux NetZéro, Allianz etc.
14:58C'est factuel ça.
15:00La question c'est est-ce qu'ils se retirent pour faire plaisir et pour arranger leurs affaires publiques comme on dit.
15:09Mais est-ce qu'ils vont continuer à le faire ou pas c'est une question.
15:12Là on est en plein en train de regarder et de voir ce qui va se passer.
15:16Nous ce qui est sûr c'est qu'on a plein d'entreprises plus ou moins engagées qui sont sur les territoires,
15:22qui vont être impactées par le changement climatique, qui vont être impactées par la transition écologique,
15:26qui ont des enjeux sociaux par ailleurs d'inclusion, d'attraction de nouveaux talents.
15:31Et donc ces questions elles ne fluctuent pas par rapport à l'actualité.
15:35Et donc évidemment notre enjeu c'est de rationaliser et d'objectiver tout ça.
15:40Mais il ne faut pas non plus sous-estimer le bâclage dont vous parliez ou l'inquiétude d'une partie des électeurs.
15:48Parce qu'il y a un moment où si l'élection après l'élection ce ne sont pas ces enjeux-là qui priment,
15:53il y a un moment où les politiques publiques finiront par tenir compte de ce que les électeurs disent.
15:57C'est là où vous avez raison, il y a un enjeu hyper fort et c'est pour ça que nous on garde une position très forte sur la voie
16:03et l'échange avec les acteurs publics.
16:06Il y a un risque avec un retrait de politique publique qui favorise la transition.
16:11Parce que bien sûr dans l'absolu c'est mon intérêt, mais surtout à court et moyen terme,
16:16comment j'arrive à asseoir une compétitivité, un business, si je ne suis pas soutenue dans cette transition, qui coûte bien sûr.
16:23Et donc c'est pour ça que nous on multiplie les échanges avec les pouvoirs publics,
16:27pour évidemment que le recul ne vienne pas surtout des pouvoirs publics.
16:33Pour pouvoir continuer à avoir une confiance dans leurs paroles.
16:36Et effectivement les allers-retours, les attermoiements des acteurs publics sont une catastrophe pour les acteurs privés,
16:44parce qu'ils parient aussi sur cette parole et sur ces évolutions de réglementation pour construire leur stratégie.
16:52Donc nous notre enjeu c'est qu'il y ait une parole politique qui soit stable, qui soit solide,
16:58pour que les entreprises puissent accompagner leur transformation et leur stratégie à moyen et long terme.
17:06On va parler de l'économie sociale et solidaire, de ce qu'elle pèse dans notre société.
17:10Et pour ça je vais m'appuyer sur une question de votre président, parce que vous êtes vice-présidente de Métesse France.
17:16C'est Benoît Hamon qui était à votre place la semaine dernière, voilà sa question.
17:20– Salut Caroline, en fait j'ai une question, elle n'est pas piège je te promets,
17:25mais je vais vraiment regarder la réponse que tu vas nous faire.
17:29Évidemment tu es à la tête du mouvement Impact France,
17:33tu as des idées très précises sur la façon dont on peut permettre le changement d'échelle de l'ESS.
17:40Alors ma question est simple, comment augmente-t-on la part des entreprises de l'ESS dans l'économie ?
17:48Quelle stratégie et surtout quels objectifs raisonnables à aller à échéance de 2050 ?
17:54– J'ai l'impression qu'on est dans une réunion de la Chambre de l'économie sociale et solidaire.
18:01Comment faire changer d'échelle en fait à l'ESS ?
18:05– Cette question elle se pose dans la stratégie globale d'Impact France.
18:09Impact France c'est un mouvement qui aujourd'hui a réuni 30 000 entreprises
18:13qui sont engagées pour intégrer l'impact au cœur de leur modèle d'une manière ou d'une autre.
18:20L'enjeu c'est qu'il y ait de plus en plus d'entreprises,
18:24et donc une part d'entreprises de plus en plus importante qui l'intègrent.
18:28Elles ne vont pas toutes l'intégrer de la même manière.
18:31Et donc notre travail c'est de soutenir les pionniers,
18:35donc on a parlé d'Impact 40, on a parlé de ceux qui l'ont au cœur,
18:38et en même temps de faire la voiture balai,
18:40c'est-à-dire d'accompagner toutes les entreprises à monter leur niveau d'exigence
18:45pour qu'on puisse avoir aussi une concurrence juste,
18:49pour que ceux qui s'engagent ne soient pas défavorisés par rapport aux autres.
18:52– Ça veut dire pas forcément embrasser le modèle de l'économie sociale et solidaire
18:56avec tout ce que ça représente en matière de redistribution,
18:59ou non redistribution de dividendes, etc.
19:02– Ça veut dire que tout le monde n'aura pas vocation à le faire,
19:05mais par contre ce qui est hyper intéressant,
19:07c'est que l'ESS qui pèse aujourd'hui 10% de l'économie
19:10est vraiment le pionnier qui peut tirer et qui tire déjà la transformation.
19:14Et donc notre intérêt justement partagé avec Benoît,
19:18c'est comment de ces 10% on arrive à faire 20%,
19:22et comment finalement les principes de l'économie sociale et solidaire,
19:25donc la limitation de l'impact négatif, l'impact positif,
19:28tout ça c'est dans l'ESS, et le partage du pouvoir et de la valeur,
19:31qui sont le socle sur lequel on solidifie une stratégie
19:35qui n'est pas seulement axée sur la rentabilité, peuvent se développer.
19:39Et donc il y a deux volets pour faire grandir ce modèle.
19:43Il y a un, comment on arrive à développer des incitations claires
19:48et une prime finalement à l'engagement.
19:52– Donc ça, ça dépend des pouvoirs publics ?
19:54– Et ça dépend des pouvoirs publics.
19:56Et comment aujourd'hui dans certains secteurs clés
19:59où on a vraiment des alliances publiques-privées,
20:02on peut renforcer très fortement la part de l'économie sociale et solidaire.
20:08– D'accord.
20:09– Ces modèles hybrides, ces modèles nouveaux,
20:11ces modèles non lucratifs à lucrativité limitée,
20:14on pense aux personnes âgées, on pense aux enfants,
20:17donc tout le travail sur la vulnérabilité, on pense à l'économie circulaire.
20:20– Benoît Hamon disait, est-ce qu'il ne faut pas sortir finalement
20:23les EHPAD et les crèches du secteur lucratif, du secteur privé ?
20:28– Comment avec l'économie sociale et solidaire,
20:30on peut faire des alliances publiques-privées à haute valeur sociale ajoutée ?
20:36– Donc ça c'est l'incitation, ça c'est le premier levier, le deuxième c'est quoi ?
20:40– Le deuxième c'est la pollinisation, c'est comment on arrive
20:43à ce que ces principes puissent driver finalement l'ensemble de l'économie
20:48et donc quand on compare les entreprises entre elles,
20:52on a une prime à celles qui sont les plus engagées.
20:55Et donc on arrive à montrer, à différencier les niveaux d'engagement des entreprises.
21:00Pourquoi ? Parce que même si, vous disiez tout à l'heure,
21:03il y a un recul peut-être de l'acceptabilité et de l'envie,
21:07il y a tout de même aujourd'hui 75% des salariés
21:12qui regardent le niveau d'engagement de leurs entreprises pour les choisir.
21:15Il y a aujourd'hui dans les consommateurs une prime au Made in France,
21:20une prime au bio, elle reste et elle redevient forte.
21:24Donc voilà, il y a eu des modulations mais on voit que ça reste une tendance de fond.
21:29Donc aujourd'hui accompagner, soutenir les pionniers beaucoup plus,
21:33voire retravailler presque des exclusivités et en même temps pousser tout le monde
21:38et permettre la différenciation, c'est ça qui permet vraiment
21:43de driver une économie avec beaucoup plus d'intérêt général.
21:47Encore faut-il que l'Europe ne revienne pas sur ses ambitions,
21:53notamment en matière de bilan extra-financier, la directive CSRD.
21:59La dernière fois que vous êtes venu, c'était quelques jours je crois
22:02après que le commissaire européen Stéphane Séjourné,
22:05commissaire français, avait quasiment évoqué l'hypothèse
22:09d'une suppression du reporting extra-financier.
22:11On n'en est pas là, c'est plutôt l'histoire d'une simplification,
22:14c'est ce qu'on appelle je crois la directive omnibus.
22:18Vous, vous avez travaillé à faire passer vos arguments,
22:22on en est où aujourd'hui tout simplement ?
22:24Aujourd'hui on a réouvert en fait la boîte de Pandore,
22:27donc le Green Deal va être rediscuté au Parlement et après au Conseil européen.
22:33Donc aujourd'hui on en est à rediscuter les contours du Green Deal.
22:39Donc avec un risque de recul mais tout n'est pas perdu,
22:43c'est ce que…
22:44En fait un risque avéré, ça sera de toute façon moins dix ans
22:48par rapport à ce que ça a été.
22:51Le risque aujourd'hui est qu'il puisse faire table rase total du Green Deal.
22:58Il existe encore ce risque ?
23:00Il existe complètement, parce qu'on peut avoir une alliance aujourd'hui,
23:04on a des climatosceptiques qui se renforcent,
23:06une extrême droite qui se renforce au Parlement
23:08et donc le risque il existera jusqu'à la fin de l'année.
23:12La question aujourd'hui qui est posée à l'Europe,
23:16parce qu'en face de cette rediscussion de ces CRD, ces 3D,
23:20il y a aussi le Clean Industrial Deal,
23:22qui à l'inverse presque reprend beaucoup de nos propositions
23:27sur le soutien à l'économie circulaire,
23:29sur le soutien à l'industrie verte,
23:31sur les privilèges sur la commande publique.
23:34C'est aussi discuté au Parlement européen ?
23:37Discuté en ce moment.
23:39La question c'est la boussole.
23:41Comment on retravaille aujourd'hui une boussole ?
23:43Donc tout n'est pas perdu, c'est sûr.
23:45Il y a des feux et des contre-feux.
23:48L'enjeu c'est de pouvoir avoir une boussole cohérente pour les entreprises.
23:52C'est ce qu'elles demandent.
23:53C'est que rapidement on puisse avoir une cohérence
23:55pour qu'elles puissent se reprojeter.
23:58Mais vous avez fait un certain nombre de propositions,
24:01notamment une simplification pragmatique.
24:05Vous êtes d'accord pour dire que la CSRD version 1
24:09est trop compliquée ?
24:11C'est sûr.
24:12Il faut absolument simplifier.
24:14Il faut développer des lois qui sont plus axées
24:16sur la pratique des entreprises.
24:18On y travaille.
24:20La question, ce n'est pas celle-là finalement.
24:22La question de comment elle doit être travaillée.
24:25La question c'est plutôt celle de la vision, du pourquoi.
24:29Dans quel cadre vous pouvez opérer les entreprises ?
24:32Aujourd'hui, le problème, c'est que la réglementation, la norme,
24:36elle peut être rediscutée.
24:40Mais qu'est-ce qui va avec la norme ?
24:43Comment on protège les entreprises ?
24:45Les entreprises qu'on incite à avoir des normes écologiques et sociales
24:48de meilleur niveau,
24:49ce qui est sûrement très accepté par les citoyens
24:51et voire demandé par les citoyens.
24:53Comment ils peuvent être protégés et donc pas en concurrence ?
24:56C'est la question du Mercosur.
24:58C'est la question de la concurrence internationale.
25:01Est-ce qu'on peut aligner les normes de la concurrence ou pas ?
25:05Est-ce qu'on se tire une balle dans le pied quand on monte nos normes ?
25:08La deuxième question, c'est celle de l'investissement.
25:11Aujourd'hui, on voit des milliards en Chine,
25:15mais aussi aux Etats-Unis encore,
25:17sur l'investissement vert, sur l'innovation verte,
25:20sur l'innovation sociale aussi.
25:23Comment aujourd'hui on est en capacité de monter le son sur ces sujets ?
25:26Merci beaucoup Caroline Neyron.
25:28Et à bientôt sur Be Smart For Change.
25:30On passe tout de suite à notre rubrique innovation.

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