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L’effort de défense va-t-il réindustrialiser la France ?

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00:00Ravis de vous retrouver comme chaque samedi matin pour les informer de l'écho
00:12votre débat autour de l'actualité économique et sociale en votre compagnie
00:17Emmanuel Cuny. Bonjour Emmanuel. Bonjour à tous. Et avec nos deux informés.
00:21Bonjour Anne-Sophie Alsif, professeure d'économie à la Sorbonne,
00:24chef économiste du cabinet d'études BDO France et bonjour à vous Pierre Jacquet,
00:29membre du cercle des économistes, professeur d'économie internationale à l'école nationale
00:33des ponts et chaussées. Un sujet qui nous a beaucoup occupé cette semaine avec notamment
00:38la locution d'Emmanuel Macron, Emmanuel Cuny, c'est le réarmement de la France et donc on va se
00:44poser une question ce matin. Comment peut-on se réarmer ? Peut-on y arriver ? Nos industries
00:48sont-elles prêtes et à quelles conditions ? Oui, réarmer la France effectivement sans
00:51affaiblir encore plus des finances publiques totalement exsangues. Il faut dire que le
00:55gouvernement se trouve là devant un nouveau casse-tête après l'adoption, on le sait,
00:59très laborieuse du budget 2025. Le président de la République Emmanuel Macron l'a encore fait
01:05cette semaine. Il appelle en fait les secteurs publics et privés à tout simplement se lancer
01:11dans des investissements supplémentaires en matière de défense. Seulement voilà,
01:15cet appel intervient alors qu'on l'a vu en janvier, la production industrielle de la France a baissé
01:23de manière inattendue. On est tombé de 0,6% précisément au niveau de la production industrielle
01:27alors que les prévisionnistes s'attendaient plutôt à une hausse de 0,3%. Les investissements
01:33prévus dans le cadre de l'effort de défense sont-ils de nature justement à donner un coup
01:37de pouce et peut-être permettre une certaine réindustrialisation, contribuer en tout cas
01:42à cette réindustrialisation de la France ? Écoutez ce qu'en disait sur France Info jeudi matin
01:47l'historien Sylvain Kahn.
02:17Ce que je trouve très intéressant et même très rassainérant, c'est qu'on va enfin avoir un débat dans l'espace public, dans les médias, à l'Assemblée nationale
02:26sur les priorités ou les choix qu'on a envie de faire et si on veut augmenter la défense, comment on s'y prend ?
02:33Sylvain Kahn, chercheur au centre d'histoire de Sciences Po. Alors précisons que les achats militaires ce ne sont pas uniquement des armes.
02:40Il y a aussi du matériel de transport bien sûr mais aussi de la haute technologie, des équipements numériques.
02:45Donc il n'y a pas que les armes, il n'y a pas que les munitions.
02:49En tout cas la commande publique à venir en matière de défense est-elle une planche de salut pour notre industrie ?
02:55Et puis si oui, effectivement à quelles conditions ? C'est ce qu'on va voir à travers cette émission.
02:59On commence avec vous Anne-Sophie Alsif. Planche de salut ou pas cette possible commande publique d'armement ?
03:05On sait que par ailleurs l'industrie de l'armement français se porte déjà plutôt pas mal.
03:09Tout à fait. C'est un des secteurs, même si on est très désindustrialisé, qui se porte bien.
03:13Une contribution positive au commerce extérieur. Donc c'est vraiment un secteur où on est attractif.
03:18Et en effet c'est vrai que ce qui se passe pose la question de la demande publique mais plus globalement de comment on va financer ses dépenses
03:25et surtout comment on va la financer avec nos partenaires européens.
03:28Moi ce qui me fait un petit peu peur c'est que chaque état, maintenant qu'il y a eu le plan qui a été voté, se mette dans des investissements
03:34mais sans avoir une politique industrielle et militaire commune où chacun en fonction de ses capacités propres se dise
03:41moi l'Italie je vais me spécialiser par exemple dans la sécurité, moi dans le transport, moi j'ai une valeur ajoutée sur tel ou tel domaine.
03:47Vous dites sur la commande ou sur la réalisation ?
03:49Les deux, c'est-à-dire que la commande, on le voit on va devoir se réindustrialiser dans l'armement
03:54donc on va avoir besoin d'énormément de matériel et là encore le risque c'est que chaque pays se dise
04:00je vais passer une commande en Allemagne pour mon industrie allemande, en Italie pareil et en France pareil
04:06alors qu'on a des avantages comparatifs les trois pays différents dans différents secteurs.
04:10Beaucoup lesquels par exemple ?
04:12Alors par exemple en France on va être très attractif, on l'a vu dans les transports, bien sûr on parle souvent du rafale
04:18dans tout ce qui est en effet intelligence technique, on sait que le ministère de l'armée a énormément de compétences dessus
04:26on a beaucoup de start-up dans la haute technologie pour l'information
04:30donc ce genre de choses, quand on va penser à la défense européenne, il faut vraiment que les pays se mettent autour de la table
04:35et dire voilà toi, toi, toi, tu as telles compétences, on va faire un effort d'investissement certes national
04:40mais il faudra aussi que ce soit européen et chacun va se spécialiser.
04:43Les fameux avantages comparatifs, j'y tiens pour qu'on ait vraiment une sécurité certes nationale
04:49et orienter la commande publique comme on peut le faire mais aussi européen
04:52puisque c'est ça à mon sens qui permettra vraiment d'avoir une armée, une défense valable.
04:56Vous êtes d'accord avec ça Pierre Jacquet ? Si on commande tout chacun dans son coin, qu'on fabrique tout chacun dans son coin, ça ne va pas marcher ?
05:02Je vois par exemple, on a le fameux char franco-allemand qui n'existe pas alors qu'il y a une entreprise qui est censée être à peu près la même.
05:08Oui je suis tout à fait sur la même ligne.
05:12La chose encourageante aujourd'hui c'est que le débat vient de ce souci de construire une défense européenne
05:18donc on a une occasion un peu unique de réparer ce qui a été fait dans le passé
05:22qui est de construire chacun ses systèmes séparément sans intégration
05:26et je crois que c'est en effet la bonne façon de procéder.
05:31Je voudrais quand même rappeler que notre débat aujourd'hui il est sur les effets induits d'une politique qui est nécessaire.
05:37Nous avons besoin de recréer les conditions d'une sécurité européenne
05:42qui devient fragilisée par le fait que l'adhésion des Etats-Unis à leur rôle historique
05:48a été très affaiblie par les déclarations récentes.
05:52Donc on ne sait pas ce qui va se passer mais je crois que c'est vital de construire une sécurité européenne.
05:56Nous avons en effet en France un tissu industriel qui est propice à un effort d'investissement.
06:01Il y a dans la base industrielle et technologique de défense française
06:05il y a 4000 industries, 200 000 emplois, c'est quelque chose de très dynamique.
06:11Ce qui manque cependant c'est à la fois la coordination européenne et aussi la diffusion.
06:17C'est un secteur qui est dominé par des grands et donc il faut que le réinvestissement dans les dépenses de défense
06:24soit organisé dans le cadre d'un plan intégré qui permette la diffusion vers tout un ensemble de petites et moyennes entreprises
06:30qui participeront à cet effort de réindustrialisation.
06:33Emmanuel Cuny.
06:34Alors il y a l'aspect financier très important donc l'endettement public, il y a l'épargne, on va y revenir en détail.
06:40L'épargne abondante des français et puis il y a le système bancaire.
06:43Et le système bancaire il est bien embêté parce que certains disent qu'il y a trop de régulation en France aujourd'hui.
06:49Les organisations non gouvernementales font pression, on le sait sur toutes les entreprises dont les banques,
06:53pour dire attention n'allez pas trop dans le financement des armes, c'est pas éthique.
06:56Allez plutôt sur le financement de l'environnement etc.
06:59Donc les banques sont confrontées à des choix éthiques aujourd'hui.
07:02La fédération bancaire française se dit non non non vous inquiétez pas on est prêt.
07:05Mais les ONG, les organisations non gouvernementales sont là.
07:09Et puis il y a la BEI, la Banque Européenne d'Investissement qui est le bras financier de la Commission Européenne
07:15qui normalement dans ses statuts elle finance uniquement les projets à base d'environnement, les projets sociétaux etc.
07:22Et là elle vient de faire une petite entorse cette semaine la Banque Européenne d'Investissement
07:26pour investir justement dans la défense.
07:29Elle vient de dire qu'elle mettait sur la table 2 milliards d'euros.
07:33Mais attention pas d'achat d'armes et pas d'achat de munitions.
07:36Est-ce que vous avez le sentiment quand même qu'il y a aussi une petite révolution qui se fait malgré tout ?
07:41Anne-Sophie Alcif ?
07:42Oui je pense vu ce qu'on a vu cette semaine, vu le plan qui a été adopté, bien évidemment qu'il y a une révolution.
07:47Maintenant il y a une prise de conscience qu'on ne peut plus être totalement dépendant des Etats-Unis.
07:51Et en effet comme c'est très justement dit c'est une opportunité et c'est aussi une opportunité de gouvernance politique.
07:57Pourquoi je dis ça ?
07:58Là ce qu'on explique si on arrive à avoir une défense européenne, une politique industrielle européenne sur ce secteur-là,
08:04c'est qu'on soit très dépendant les uns des autres.
08:07Et on le sait, le problème de l'Europe c'est qu'en termes de gouvernance on est divisé.
08:11On le voit avec les Etats-Unis, la tentation est forte d'aller vers l'Italie et de dire attention venez vers le Giro.
08:16Si l'Italie est excessivement intégrée avec la France, l'Allemagne sur des aspects tout à fait stratégiques,
08:21ça va être beaucoup plus difficile pour les puissances étrangères de créer de la dissension en Europe.
08:26Parce qu'on sait que c'est la gouvernance notre problème.
08:27Mais justement j'allais vous dire, et c'est intéressant qu'on parle de cela puisque nous avions, il y a une heure sur ce plateau,
08:33la députée LFI Alma Dufour qui nous disait de toute façon,
08:36cet argent il y a un fort risque que nos alliés continuent à aller acheter américains avec ça.
08:42Est-ce que Pierre Jacquet c'est aussi ce que vous craignez ?
08:45C'est un risque qui est lié aux pratiques passées.
08:48Est-ce qu'on peut se permettre aujourd'hui d'acheter des biens de défense sans acheter américains ?
08:54Est-ce que c'est possible en Europe ?
08:56Pas dans tous les domaines.
08:58En France, la chaîne de production des industries de défense est relativement bien intégrée.
09:03Et une partie de cette chaîne de production dépend des voisins européens.
09:07Mais c'est des petites quantités que nous on fait.
09:09Ce sont des quantités assez significatives quand même.
09:12Mais on importe aussi des Etats-Unis.
09:14Et ça je crois que pour un certain temps ça sera nécessaire.
09:16C'est d'ailleurs pour cela qu'il ne faut pas rompre la discussion avec les Etats-Unis.
09:21Il faut construire cette stratégie européenne en connaissance de cause.
09:24Et donc on note effectivement que même si on réinvestit, ça passera sans doute aussi par les Etats-Unis.
09:29Alors réinvestir, comment ? On a esquissé le sujet, on l'a évoqué.
09:33Mais maintenant avec quel argent ? On se pose la question juste après votre file info 10h-10.
09:37Mathilde Romagnon.
09:38Nous sommes le 8 mars, journée internationale des droits des femmes.
09:41Des manifestations sont prévues dans toute la France.
09:43Collectifs féministes et syndicats appellent à défiler contre les écarts de revenus entre les hommes et les femmes.
09:48A Paris, la manifestation partira à 14h de la place de la République.
09:52Le bilan s'alourdit. En Syrie, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme,
09:56plus de 300 civils halawites ont été tués en deux jours par les forces de sécurité et des groupes affiliés.
10:02Le dirigeant déchu Bachar al-Assad est issu de cette minorité halawite.
10:06C'est une première.
10:07Deux collectifs appellent à manifester cet après-midi à Ajaccio, en Corse,
10:11contre la mafia et la criminalité organisée.
10:13Et ce, deux semaines après la mort de Chloé, une étudiante de 18 ans,
10:17tuée par balle dans sa voiture, sur fond de règlement de compte.
10:21Irlande, France, c'est l'affiche cet après-midi pour la quatrième journée du tournoi Destination de Rugby.
10:27Le 15 du trèfle est tenant du titre et toujours un vaincu pour l'instant dans ce tournoi.
10:32Coup d'envoi à 15h15.
10:44Et toujours avec Anne-Sophie Alsif, professeure d'économie à la Sorbonne.
10:47Pierre Jacquet, professeur d'économie internationale à l'École nationale des ponts et chaussées.
10:53On se demandait, Emmanuel Cuny, comment on pourrait arriver à investir ?
10:57Est-ce que les entreprises de défense, les industries de défense européennes pourraient suivre ?
11:02On a une réponse.
11:03La question maintenant, c'est pour investir.
11:05Comment on fait ? Avec quel argent ? Où est-ce qu'on le trouve ?
11:07Alors, il y a effectivement les investisseurs publics, les investisseurs privés.
11:11Et puis, la petite musique monte.
11:13Que faire de l'abondante épargne des Français ?
11:16Je rappelle quelques chiffres.
11:18Rapidement, 6200 milliards d'euros.
11:216200 milliards d'euros.
11:23C'est l'encours total, c'est-à-dire les sommes.
11:25Deux fois notre richesse nationale.
11:26Voilà, exactement.
11:27Deux fois notre produit intérieur brut épargné en France.
11:30Alors, à travers les actions à la bourse, l'assurance-vie, les livrets d'épargne défiscalisés,
11:34le livret A, l'épargne populaire, etc.
11:366200 milliards.
11:37Et un record vient d'être franchi, c'est l'assurance-vie.
11:40En janvier, on vient de passer les 2000 milliards d'euros d'encours précisément.
11:45Donc, est-ce qu'il faut s'attaquer, entre guillemets, pardon du terme, à cette manne financière ?
11:49C'est toute la question.
11:50Pierre Jacquet, je vois que vous voulez parler. Allez-y.
11:52Moi, je ne comprends pas trop ce débat.
11:54Parce que cette épargne, elle n'est pas sous les matelas.
11:57Elle est dans des titres financiers.
11:59Non, mais par exemple, le livret A, il est affecté pour le logement.
12:02Voilà, exactement.
12:03Donc, on revient au débat que l'a lancé Sylvain Cade sur les priorités.
12:06Si on alloue autoritairement l'épargne vers un autre secteur, c'est un choix de priorité.
12:12Il faut qu'il y ait un débat, il faut le dire.
12:14Donc, le débat, à mon avis, n'est pas vraiment sur l'utilisation de l'épargne.
12:17Il ne faut pas prendre cette épargne comme étant une manne non utilisée,
12:21qu'on va, sous le drame, utiliser pour la défense.
12:23Oui, les PEA, par exemple, sont utilisées dans les actions.
12:25Donc, il faut faire très attention à cela.
12:27Alors, je voudrais ajouter une chose.
12:29Sylvain Cade a parlé fort, justement, du rôle de la commande publique,
12:33ce qui va permettre aux entreprises d'investir.
12:35Parce qu'un investissement, c'est un choix de long terme.
12:37C'est de la commande publique à long terme.
12:39Donc, il ne faut pas que ce soit un coup d'épée dans l'eau,
12:41avec un gros effort à court terme, et puis plus rien après.
12:44Donc, il faut qu'on ait de la lisibilité et une commande publique.
12:47Et donc, le problème du financement, c'est comment on finance la commande publique.
12:50Ce n'est pas comment les privés vont financer l'effort de dépense.
12:54Ils ne s'auto-commandent pas leurs avions.
12:57Et là, il y a plusieurs pistes envisageables, bien entendu,
13:00mais le vrai sujet, il est là.
13:02Et il se produit à un moment, comme Emmanuel le rappelait tout à l'heure,
13:05où les États sont très endettés.
13:08Explorons un petit peu les pistes, si vous le voulez bien.
13:10Anne-Sophie Alsif, comment on oriente possiblement de l'épargne ?
13:13Faut quoi ? Faut un livret à LD ? Un livret de défense ?
13:17Moi, je parlerais d'un... J'avais parlé, prenez le livret industrie.
13:20D'ailleurs, Michel Barnier en avait parlé lors de son discours de politique générale.
13:24Bien sûr, ça n'a pas été mis en œuvre.
13:26Les sénateurs sont déjà penchés sur cette question de l'orientation de l'épargne.
13:30Là où je serais plus nuancée, c'est qu'en effet, cette épargne, elle sert à financer des choses.
13:34Par contre, ce taux d'épargne, il a augmenté de deux points
13:37par rapport à ce que l'on avait avant le Covid.
13:39Cet argent de deux points d'augmentation, c'est beaucoup le résultant du quoi qu'il en coûte.
13:43Donc de l'argent de l'État, de nos impôts qui a été donné pendant cette période
13:47et qui aujourd'hui n'a pas été dépensé.
13:49Donc c'est vrai que très souvent, on a ce débat d'orientation de l'épargne.
13:52C'est une question très ancienne.
13:54Et donc très souvent, on nous dit attention, l'épargne, ça finance en effet les actions,
13:57mais surtout quand même de la dette de l'État français et de l'assurance-vie.
14:01Donc si on prend un peu d'argent, ce sera moins pour ça.
14:03Là, on a une opportunité extraordinaire puisqu'on a deux points en plus
14:07qui est le résultant du quoi qu'il en coûte et donc de l'argent que l'État français a donné.
14:11Deux points, ça représente combien de milliards ?
14:12Je ne sais pas exactement en termes de milliards, combien ça représente.
14:15Mais en tout cas...
14:16C'est une belle somme quand même.
14:17Voilà, exactement, parce que ça dépend comment on compte.
14:18Mais voilà, en tout cas, c'est une bonne somme.
14:20Le Sénat en a parlé.
14:23Et donc là, on a en fait une opportunité extraordinaire, au moins juste.
14:27Parce que quand on dit orientation de l'épargne, on a l'impression que toute l'épargne
14:30va aller à cet effort de guerre.
14:31Là, ce n'est pas du tout ça.
14:32Là, l'objectif, c'est d'avoir quelques pourcents pour financer sous la forme d'un fonds.
14:36Ça pourrait être créé.
14:37Donc moi, je parle du livret à l'industrie.
14:39En effet, on pourrait orienter une partie de cette épargne, comme vous l'avez dit,
14:42avec la caisse des dépôts et le logement social, sur l'industrie et financer plus les dépenses militaires.
14:46Deux questions encore sur deux instruments.
14:49François Bayrou évoque la question d'une forme de grand emprunt.
14:53Il y a aussi, on a pu voir par le passé, un emprunt obligatoire pour les plus riches.
14:58C'est possible, c'est possible ça ?
15:00Enfin, tout est envisageable, mais on parle d'emprunt.
15:03Et ça m'amène à une remarque.
15:05On est obligé d'épargner, mais on nous rembourse quand même à la fin avec des intérêts.
15:08Ça m'amène à une remarque qu'on oublie parfois dans les débats sur la dette publique.
15:11L'endettement public, c'est une façon d'orienter l'épargne vers des secteurs où elle n'irait pas naturellement.
15:17Puisque pour s'endetter, l'État fait appel à l'épargne.
15:21Et donc, il fait appel à cette épargne.
15:23Et ensuite, la dépense publique utilise cette épargne par le biais de l'emprunt
15:26vers des secteurs qui paraissent prioritaires.
15:28Ça revient au choix de priorité.
15:30Et ce choix de priorité, il se fait dans un contexte éthique particulier,
15:34puisqu'on souhaite quand même maintenir l'attachement au développement durable,
15:38à la lutte contre le réchauffement climatique, etc.
15:41Et il faut comprendre, je crois, que la sécurité est à la base de tout ce qu'on peut faire.
15:44Si on oublie la sécurité, comme on l'a fait pendant des décennies parce qu'on était sous parapluie américain,
15:48on fait une erreur fondamentale, on est en train de s'en rendre compte.
15:51Ça pourrait freiner les Français, ça, Emmanuel Cuny ?
15:53C'est toute la question, comme dit Pierre Jaquet, de l'éthique.
15:56Un petit épargnant populaire, le Livret A.
15:59Aujourd'hui, ce sont 55 millions de Français qui en détiennent un.
16:02Est-ce que tous les détenteurs du Livret A vont dire
16:04« Je vais me placer quand même, à condition d'avoir un produit qui me rémunère
16:08avec un taux d'intérêt intéressant, je vais déplacer mon épargne sur un livret de défense ? »
16:13Éthiquement parlant, est-ce que culturellement, on est prêt ?
16:16En France, on a quand même une culture très humaniste.
16:18Investir dans l'armement, etc., c'est peut-être, même pour les jeunes générations,
16:22ça pose certainement un problème.
16:24Il faut créer des produits, et puis surtout communiquer.
16:26Il ne suffit pas de faire des produits comme ça,
16:28il faut que le gouvernement dise « Écoutez, chers Français, on est dans la panade,
16:31il faut qu'on finance, ne vous inquiétez pas. »
16:34Convaincre, ça peut être un bon taux d'intérêt, peut-être aussi, je ne sais pas.
16:37Oui, ça fait partie.
16:39Ça coûte de l'argent, un taux d'intérêt.
16:41Et il faut, je crois aussi, dans le débat public, faire comprendre
16:44que la seule façon d'éviter au monde de s'écarter de l'humanisme aujourd'hui,
16:48c'est d'investir dans la défense.
16:50Anne-Sophie Alsif ?
16:51Par rapport aussi à ça, en effet, on parlait d'un livret à l'industrie,
16:54c'est excessivement important, la communication qui va accompagner,
16:57si on met en place, ce produit d'épargne.
16:59L'idée, ce n'est pas de dire « Voilà, vous allez acheter des chars
17:01pour, on veut redevenir excessivement puissant militairement »,
17:04c'est vraiment d'aller sur la question de la défense.
17:06Demain, si on est agressé, on aura les moyens de répondre en France
17:10et au niveau européen.
17:11Voilà, on rappelle une chose aussi importante,
17:13quand on parle d'épargne et d'utiliser l'épargne des Français,
17:16il ne s'agit pas d'aller piocher dans l'épargne,
17:18il s'agit de l'affecter, d'une certaine façon, de l'orienter,
17:21comme le dit plus justement Emmanuel Cuny.
17:23L'humanisme à travers la défense, ça c'est très important,
17:26notre défense commune, humanisme avec un grand H, ne l'oublions pas.
17:30Merci à vous Emmanuel Cuny, on vous retrouve évidemment
17:32tous les jours à peu près sur France Info.
17:35Merci à vous Anne-Sophie Alsif, professeure d'économie à la Sorbonne,
17:39chef économiste du cabinet d'études BDO France
17:41et merci Pierre Jacquet du Cercle des économistes
17:43et professeur d'économie internationale
17:46à l'école nationale des ponts et chaussées.
17:48Merci d'avoir suivi les informés de l'éco sur France Info.

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