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Patrick Stefanini, représentant spécial sur l'immigration du ministre de l'Intérieur, était l'invité de BFM Politique ce dimanche 23 février 2025.

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00:00Vous êtes bien sur BFM Politique pour une émission spéciale aujourd'hui. BFM Politique, au plus proche de l'actualité, nous recevons Patrick Stefanini.
00:13Bonjour, merci d'avoir accepté notre invitation. Vous êtes le représentant spécial du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau sur la question de l'immigration.
00:21On a bouleversé notre programme parce qu'évidemment, on est au lendemain de cette attaque terroriste qui a touché la ville de Mulhouse.
00:28A mes côtés, pour vous interroger, Amandine Attalaya de BFM Politique, éditorialiste de BFM, et Bruno Jody, directeur de La Tribune Dimanche.
00:37Bonjour, Bruno. Juste avant de vous donner la parole, on va prendre la direction de Mulhouse, cette ville qui a donc été touchée par cette attaque hier.
00:45C'est la maire de cette ville qui nous attend, Michèle Lutz. Bonjour, merci de nous accorder quelques instants ce matin.
00:52Première question, quel est l'état de santé des policiers qui ont été touchés par l'assaillant ? Je rappelle, il y a une personne qui a été tuée,
01:00une personne d'origine portugaise qui a été tuée, personne de 69 ans à laquelle s'est prise l'agresseur. Où en sont les autres personnes qui ont été touchées ?
01:12Eh bien, au moment où nous nous parlons, deux personnes ont pu regagner immédiatement leur domicile hier soir.
01:20Il reste un seul agent du stationnement qui est encore hospitalisé en ce moment à Colmar pour des soins.
01:28Mais en tout cas, son pronostic vital n'est fort heureusement plus engagé et il va, on va dire, au mieux des circonstances.
01:36Alors, quelles sont les dernières informations dont vous disposez sur la façon dont ça s'est déroulé ? J'imagine qu'au fur et à mesure de la nuit,
01:43vous avez pu avoir de nouvelles informations. Qu'est-ce que vous avez pu apprendre ?
01:48Alors, on ne connaît pas encore la chronologie des événements. Mais en tout cas, ce qui est certain, c'est que ce terroriste voulait s'en prendre
01:57à nos agents du stationnement. Donc ça, c'est une première chose. Malheureusement, vous l'avez dit, il y a une victime, un monsieur de 69 ans qui est décédé.
02:04Nous ne savons pas quelle est la chronologie quant à l'intervention de ce monsieur puisqu'il faut attendre que les enquêteurs terminent leur travail.
02:12Et donc, c'est d'abord les agents du stationnement qui ont été impactés. Tout de suite après, la police municipale, les agents de la police municipale
02:20sont intervenus fortement puisqu'ils étaient en proximité. Et c'est eux qui ont réussi à juguler l'assaillant et à l'arrêter.
02:28Est-ce que cet assaillant était connu sur Mulhouse ou pas du tout ?
02:33Alors, en tant que maire, je n'avais absolument pas de connaissances de l'identité de ce monsieur. Je ne savais même pas qu'il était sur notre territoire.
02:43Et c'est d'autant plus grave qu'on ne sait pas toujours certaines choses. Mais je comprends qu'il y a aussi une forme de respect, même si on parle du respect
02:53de l'identité d'un terroriste.
02:55Est-ce que vous avez pris de nouvelles mesures de sécurité pour votre ville après ce qui s'est passé hier ?
03:01Alors oui, en ce qui concerne la police municipale, bien entendu. J'ai déjà échangé ce matin avec le sous-préfet.
03:08Monsieur le préfet, hier soir, m'a assuré aussi de forces policières supplémentaires pour le week-end. J'ai demandé des nouvelles également
03:18de la situation de Mulhouse. Pour l'instant, tout est calme, fort heureusement. Mais on sait que dans les prochains temps, effectivement,
03:25nous aurons des renforts en matière de police.
03:29Merci beaucoup, Madame la maire, d'avoir été avec nous ce matin dans ce BFM politique spécial.
03:34Après cette attaque terroriste qui a donc touché votre ville de Mulhouse, hier, où une personne de 69 ans a été tuée, et on l'apprend à l'instant,
03:43effectivement, les pronostics vitaux des autres personnes ne sont plus engagés ce matin.
03:48Patrick Stefanini, je vous le disais, vous êtes représentant spécial du ministre de l'Intérieur.
03:52Le suspect, c'est un Algérien sous EQTF, fiché pour terrorisme.
03:57Dix fois, la France a souhaité le renvoyer en Algérie. Dix fois, ça a été refusé.
04:02Finalement, malgré l'activisme de Gérald Darmanin hier, de Bruno Retailleau aujourd'hui,
04:07est-ce que ce n'est pas l'illustration que nous, la France, nous sommes totalement impuissants ?
04:13Non, c'est d'abord l'illustration de ce que l'Algérie ne respecte pas le droit international.
04:19Et lorsqu'on lui présente un de ses ressortissants, parfaitement documenté, parfaitement identifié,
04:27qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français,
04:31l'Algérie, pour des raisons incompréhensibles, refuse de le reprendre en charge.
04:37Je voudrais rappeler à vos auditeurs que l'auteur de ce crime qui s'est produit hier à Mulhouse
04:47est un ressortissant algérien qui est arrivé en France en 2014
04:52et qui s'est signalé par des faits d'apologie du terrorisme dès le début de l'année 2023.
05:00Il a d'ailleurs à l'époque fait l'objet d'une OQTF,
05:03mais il a également fait l'objet d'une interdiction judiciaire du territoire pour une durée de 10 ans.
05:11Donc voilà un individu qui depuis le premier semestre de l'année 2023
05:17aurait dû en pratique quitter le territoire français pour être reconduit en Algérie.
05:24Les autorités algériennes ont toujours refusé de lui délivrer le laissé-passer consulaire
05:31dont nous avions besoin pour le renvoyer en Algérie,
05:35alors même que l'autorité préfectorale a fourni aux consuls d'Algérie en France
05:45des renseignements très précis sur la fratrie de l'intéressé,
05:50sur ses parents, sur ses frères et soeurs.
05:53Donc l'identification de l'intéressé par les autorités algériennes n'aurait dû soulever aucune difficulté.
06:00Alors on va venir justement effectivement à ce bras de fer qui est engagé avec l'Algérie,
06:04mais déjà sur ce qui s'est passé malheureusement hier.
06:07Est-ce qu'au vu de ce que vous savez, il y a des fautes, des erreurs qui ont été commises ou non ?
06:12Je ne connais pas dans le détail le déroulement des événements qui se sont produits hier après-midi à Mulhouse.
06:21Ce que je peux dire à vos auditeurs, c'est que l'intéressé non seulement était connu pour des faits d'apologie du terrorisme,
06:32mais qu'il souffrait également d'antécédents psychiatriques.
06:37Et là, on voit qu'on bute sur une difficulté extraordinairement sérieuse qui se pose malheureusement à la société française depuis des années.
06:45Soit vous êtes diagnostiqué comme étant un malade psychiatrique,
06:49mais dans ce cas-là, votre place doit être dans un établissement médical dont vous ne pouvez pas sortir.
06:55Soit on considère que les troubles dont vous souffrez sont bénins,
07:00et dans ce cas-là, la marche normale de la justice doit reprendre son cours,
07:04et l'intéressé doit être éloigné vers son pays d'origine,
07:07puisqu'à l'évidence, c'est un individu qui présente un risque majeur pour l'ordre public en France.
07:13Ce qui peut poser question, c'est qu'il était sous contrôle judiciaire,
07:17et il a refusé de signer hier matin, alors qu'il aurait dû, sous contrôle judiciaire.
07:23Comment est-ce que c'est possible qu'un individu sous contrôle judiciaire puisse avoir un tel refus et repartir libre ?
07:32Je ne sais pas si l'intéressé a refusé de signer ou s'il a refusé de pointer, ce n'est pas la même chose.
07:39S'il a refusé de pointer, ça veut dire qu'il s'est dérobé à une des obligations qui pesaient sur lui
07:45en vertu de son assignation en résidence, qui consistait à venir régulièrement au commissariat pour pointer,
07:52et l'intéressé est à l'évidence, dans ce cas-là, fautif.
07:57Mais vous savez, il y a eu un enchaînement très rapide des faits.
08:00Il devait se présenter au commissariat, il ne l'a pas fait, et quasiment dans la foulée, il s'est rendu coupable de ce crime abominable.
08:11C'est une affaire qui synthétise malheureusement toutes les difficultés que la France rencontre avec l'Algérie en matière migratoire.
08:19Et je voudrais vous dire ce matin avec beaucoup de solennité que le moment est venu avec l'Algérie de changer la donne.
08:26C'est-à-dire ?
08:27D'abord, je vais citer quelques chiffres. L'année dernière, en 2024, les éloignements de ressortissants étrangers en situation irrégulière
08:35ou ayant troublé l'ordre public en France ont augmenté de 27%.
08:40De très bas.
08:42On part en effet, Bruno Jeudy, on part de très bas. Je vais être précis, je pense que vos auditeurs ont droit à la précision.
08:50En 2024, on a interpellé en France 147 000 étrangers en situation irrégulière et on en a éloigné effectivement 27 000.
09:0227 000, c'est un chiffre en progrès de 27% par rapport au résultat de l'année 2023.
09:09Donc 27% de progression, c'est bien. Et en même temps, ça reste évidemment insuffisant par rapport au nombre total d'interpellations d'étrangers en situation irrégulière.
09:20Et si on prend le cas particulier de l'Algérie, on constate que l'année dernière, en 2024, les éloignements à destination de l'Algérie ont augmenté de 17% seulement.
09:32Je vous rappelle que la moyenne, c'est 27%.
09:35Et si on prend le cas des autres pays du Maghreb, à destination du Maroc, l'année dernière, les éloignements ont augmenté de 50% et à destination de la Tunisie, de 46%.
09:47Donc l'Algérie n'est pas, c'est le moins qu'on puisse dire, le bon élève en matière d'éloignement.
09:53– Vous illustrez là les difficultés, la relation difficile qu'il y a entre la France et l'Algérie actuellement sur le plan diplomatique et sur bien d'autres plans,
10:03mais sur le plan aussi de la sécurité. Quelles mesures dispose le gouvernement et donc le ministre de l'Intérieur pour pouvoir, quels leviers il a pour essayer d'améliorer
10:16cette possibilité de renvoyer chez eux des ressortissants qui commettent des fautes ?
10:21– Je voudrais rester d'abord un instant sur le diagnostic avant d'en venir à la thérapie, si j'ose dire.
10:27Ce qui pose problème aussi avec l'Algérie, c'est l'imprévisibilité du comportement et des décisions qui sont prises par les autorités consulaires algériennes.
10:37Voyez, on avait ici affaire à un individu qui était parfaitement identifié et l'Algérie a refusé de le reprendre.
10:44Ça n'est pas la première fois. Vos auditeurs, vos téléspectateurs ont tous en tête le cas de l'influenceur à l'encontre duquel Bruno Retailleau avait pris
10:54une décision d'expulsion dans le courant du mois de janvier et lui aussi était parfaitement identifié.
11:00Il était d'ailleurs en possession d'un passeport en cours de validité.
11:04Donc dans le cas de cet influenceur, nous n'avions même pas à solliciter un laissé-passer consulaire et pourtant l'Algérie a refusé de le reprendre.
11:12Regardez, quand le ministre de l'Intérieur dit justement qu'il faut durcir le ton, on va l'écouter.
11:18Regardez ce qu'il disait hier soir. On va essayer de voir concrètement avec vos diagnostics comment on peut travailler ou pas avec l'Algérie.
11:24Écoutez Bruno Retailleau.
11:26La France a tendu la main. Quels que soient les plais parfois vifs de l'histoire, aucun pays, aucun pays, quelle que soit l'histoire,
11:36qui peut nous séparer n'a un droit de tirage pour humilier la France.
11:41Je suis partisan puisque la méthode douce a été utilisée avec l'Algérie de poser un rapport de force.
11:51Donc moi je suis pour ce rapport de force parce que je vois bien qu'on a des individus dangereux qui devraient être en Algérie et qui sont sur le sol français.
12:01Le rapport de force concrètement ça veut dire quoi ? Quand il dit il faut passer au rapport de force.
12:07D'abord je suis très frappé par l'émotion qui étreint le ministre de l'Intérieur hier soir alors qu'il est à Mulhouse
12:13et qu'il a rencontré les policiers municipaux et les policiers d'État qui ont fini par arrêter cet individu extraordinairement dangereux.
12:22Et je voudrais dire que s'agissant du ministère de l'Intérieur, vous l'avez rappelé d'ailleurs, nous sommes allés au bout de ce que nous pouvions faire.
12:31Ça veut dire quoi ?
12:32L'autorité préfectorale a demandé à dix reprises aux consuls d'Algérie compétents pour délivrer le laissé-passer de délivrer ce laissé-passer.
12:40Et nous nous sommes heurtés à un refus.
12:43Ça veut dire qu'il faut changer la donne et qu'il faut maintenant que le Premier ministre et le Président de la République,
12:52et je pense notamment au Président de la République parce que c'est lui qui négocie les traités et qui les signe au nom de la France,
13:00le moment est venu de poser à l'Algérie la question de la remise en cause de l'accord de 1968.
13:06Cet accord, il est complètement obsolète.
13:09Il est complètement obsolète.
13:10Il a été négocié et signé dans les années qui ont suivi l'indépendance de l'Algérie,
13:16à un moment où la France comptait encore en Algérie une communauté française très importante,
13:21et à un moment où on pensait que les relations entre ces deux pays allaient rester très étroites.
13:27Jusqu'alors, le Président de la République n'a pas été suffisamment dur avec l'Algérie, vous le trouvez ?
13:31Jusqu'à maintenant, la question de la renégociation de cet accord, je n'ai pas dit de sa dénonciation,
13:39mais la question de sa renégociation...
13:42Il faut dire à nos téléspectateurs qu'il a été renégocié déjà trois reprises, il me semble,
13:46et qu'il a été amputé de cette facilité qu'il y a pour les ressortissants des deux pays de passer de l'un à l'autre.
13:52Il a été renégocié sur des points tout à fait mineurs.
13:55Cet accord est aujourd'hui totalement obsolète.
13:58Il encourage une immigration familiale massive en provenance d'Algérie,
14:04alors que la politique française d'immigration depuis le quinquennat de Nicolas Sarkozy
14:09est une politique d'immigration choisie qui vise à favoriser la venue en France,
14:13soit des étudiants, soit des travailleurs.
14:16Cet accord est totalement obsolète,
14:19et on voit bien à travers l'imprévisibilité des décisions prises par les autorités algériennes
14:25en matière de délivrance de l'essai passé consulaire,
14:28qu'aujourd'hui cet accord n'est absolument plus satisfaisant pour la France.
14:32Il faut donc désormais dire aux autorités algériennes que nous souhaitons renégocier cet accord,
14:40et que nous souhaitons le renégocier de fond en comble, comme nous l'avons fait.
14:45Et à l'époque, j'ai été un des négociateurs de la renégociation de l'accord avec la Tunisie,
14:51qui est intervenu en 2008.
14:53Nous étions liés à la Tunisie par un accord qui ressemblait beaucoup à notre accord avec l'Algérie.
14:59Il y a eu en 2008, sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy,
15:02une volonté politique de renégocier l'accord avec la Tunisie,
15:06et nous sommes parvenus à le renégocier.
15:08Eh bien, il faut faire la même chose avec l'Algérie,
15:12et il faut que cette renégociation englobe naturellement le sujet qui préoccupe aujourd'hui vos téléspectateurs,
15:19c'est-à-dire le sujet de la réanimation en Algérie des ressortissants algériens
15:25qui vivent en France de manière clandestine ou qui ont troublé l'ordre public.
15:29Et il faut en finir avec un certain nombre de faux semblants.
15:36Moi, j'étais sur votre plateau, il y a trois semaines, avec Madame Ségolène Royal,
15:41et c'est tout juste si je ne me suis pas fait reprocher que les décisions de Bruno Retailleau
15:47étaient une forme de provocation à l'égard de l'Algérie.
15:51Voilà ce qu'a dit Madame Ségolène Royal sur votre plateau.
15:54Et elle a dit qu'il faut être plus gentil avec l'Algérie, il faut discuter, c'est un partenaire historique, etc.
16:02Voilà ce sur quoi on débouche aujourd'hui avec le drame de Mulhouse.
16:07Et malheureusement, nous ne sommes pas à l'abri que d'autres drames de ce type se produisent.
16:12Le moment est venu d'élever le ton, de changer la donne,
16:18et de dire avec beaucoup de clarté aux Algériens, nous voulons renégocier l'accord de 68
16:25et nous voulons renégocier de manière plus globale l'ensemble de notre politique migratoire avec l'Algérie.
16:31En un mot, Juste Patrice Stéphanie, comment vous qualifiez l'attitude des autorités algériennes ?
16:37Dilatoire et imprévisible, et donc inadmissible.
16:43Est-ce que le risque de cette attitude du rapport de force, ce n'est pas de se mettre définitivement,
16:48c'est déjà le cas, mais complètement à dos l'Algérie,
16:51qui ne peut plus jamais rien obtenir, ni de renégociation du traité, ni d'effort pour reprendre leurs ressortissants ?
16:57Et la question qui subsidiaire, c'est est-ce que nous n'avons pas été jusque-là naïfs dans notre rapport avec l'Algérie,
17:03en faisant des efforts pour que ça aille mieux, sur par exemple le dossier du Sahara occidental,
17:08en tournant un peu le dos au Maroc ? Est-ce que la seule façon que ça se passe bien avec eux,
17:12ce n'est pas d'avoir un minimum d'entente ?
17:16Pour renégocier un accord, Madame, il faut être deux.
17:20Donc en effet, il faudra bien trouver les bases d'une entente avec l'Algérie.
17:24Mais ce qui est désolant dans la situation actuelle, c'est que ça fait des années
17:30qu'un certain nombre d'observateurs, dont je fais partie, disent que l'accord de 68 est obsolète et qu'il faut le renégocier.
17:39Nous n'avons pas attendu, je voudrais insister sur ce point, nous n'avons pas attendu la crise diplomatique récente,
17:46qui est liée au choix qui a été fait par le président de la République d'appuyer la position du Maroc
17:52sur la question de l'ancien Sahara espagnol.
17:56Nous n'avons pas attendu ce tournant diplomatique pour dire que cet accord migratoire était dépassé
18:02et qu'il fallait le renégocier.
18:04Donc nous n'allons pas aujourd'hui vous dire qu'à cause de cette crise diplomatique,
18:09nous allons renoncer à notre objectif qui est la renégociation de cet accord.
18:14Nous en avons besoin.
18:15Naturellement, madame, quand on négocie un accord, on est deux.
18:19On est deux partenaires autour de la table et on cherche le meilleur compromis possible.
18:23Mais ce qui pose difficulté dans la situation d'aujourd'hui, c'est qu'il n'y a aucune discussion sur ces sujets avec l'Algérie.
18:30Patrick Stéphanie, je vous posais question courte, réponse courte.
18:33Est-ce qu'il faut suspendre les relations diplomatiques ? Oui ou non ?
18:36Non, ça c'est une question qui dépasse totalement ma zone de compétence.
18:40Il faut renégocier l'accord de 68 et cette négociation, elle fait partie d'une relation diplomatique complexe
18:49qui va bien au-delà des compétences du ministre de l'Intérieur avec l'Algérie.
18:53Elle doit donc être portée et par le Premier ministre et par le président de la République.
18:57Mais dans cette négociation, la question migratoire est une question majeure.
19:03Dans l'arsenal des mesures sur lesquelles le ministre de l'Intérieur, la France peut agir,
19:09il y en a d'autres, on peut aussi durcir notre relation avec l'Algérie sur d'autres points.
19:15Je pense par exemple à la question des visas que nous délivrons.
19:20Est-ce que ça c'est un levier qui peut permettre au ministre de faire levier sur les autorités algériennes ?
19:26Il y a la question 13% de notre gaz vient de l'Algérie.
19:30Est-ce que ça c'est un levier aussi qui peut faire réagir les autorités algériennes ?
19:36Bruno, vous venez de prendre deux exemples qui n'ont rien à voir l'un avec l'autre.
19:41Ça fait partie d'un rapport de force.
19:44La question du gaz, ce n'est pas une question qui relève des compétences du ministre de l'Intérieur.
19:49En effet, vous avez raison, ça fait partie d'un rapport de force qui pourrait être instauré.
19:53J'ai tendance à penser que plus la France sera indépendante sur le plan énergétique de pays comme l'Algérie, mieux elle se portera.
20:04L'autre question, c'est la question des visas.
20:07Là, nous sommes sur une compétence partagée entre le ministre de l'Intérieur et le ministre des Affaires étrangères.
20:12Donc on peut en effet, comme l'avait fait d'ailleurs en son temps Xavier Drianco lorsqu'il était ambassadeur en Algérie,
20:20diminuer le nombre des visas accordés à des ressortissants algériens.
20:24Mais cette politique, elle a des limites.
20:27Nous avons en France une communauté algérienne importante.
20:31C'est même sur notre territoire la communauté étrangère la plus importante.
20:35Nous n'allons pas interdire aux ressortissants algériens qui vivent en France de circuler entre la France et l'Algérie.
20:44Donc nous serons toujours contraints de délivrer un minimum de visas.
20:47Il ne faut pas biaiser devant la difficulté.
20:50La difficulté, c'est l'accord de 68 et c'est les conditions dans lesquelles l'Algérie procède à la réadmission sur son territoire
20:58des clandestins et des algériens qui troublent l'ordre public en France.
21:02Il ne faut pas biaiser devant cette difficulté. Il faut maintenant l'affronter.
21:07On vous retrouve dans quelques instants.
21:09On entendra notamment la toute première réaction de Jordan Bardella, le patron du RN, qui s'est exprimé sur cette attaque terroriste.
21:29Vous êtes bien sur BFM Politique.
21:31Une émission spéciale ce matin au lendemain de l'attaque terroriste qui a touché la ville de Mulhouse et qui a fait une victime.
21:39Notre invité Patrick Stéphanigny est encore avec nous.
21:42Représentant spécial du ministre de l'Intérieur.
21:45Merci d'être avec nous.
21:46Et puis Driss Haïti Youssef, on va vous demander un éclairage dans quelques instants.
21:50Vous êtes un spécialiste des questions justement de sécurité.
21:53On va essayer d'aller un petit peu plus loin.
21:55On vient d'apprendre justement ce matin qu'il y a actuellement quatre personnes en garde à vue.
22:00L'assaillant, deux personnes de son entourage familial, mais également une personne qui le logeait.
22:06Une attaque qui a bien sûr fait réagir de nombreux responsables politiques.
22:10Le dernier en date, c'est le patron du RN.
22:13Il est actuellement au Salon de l'Agriculture.
22:15Écoutez Jordan Bardella au micro de Léopold Odebert.
22:19Il y a beaucoup aujourd'hui de problèmes qui touchent notre pays, des problèmes qui se répètent.
22:24Et s'agissant de ce type de profil et de ce type d'attaque terroriste,
22:28à chaque fois, ce sont systématiquement les mêmes personnalités, les mêmes profils,
22:32des gens qui sont fichés, qui sont suivis pour leur proximité avec le fondamentalisme islamiste
22:37et que nous n'expulsons pas du territoire français.
22:39Donc le ministre de l'Intérieur a fait énormément de communications.
22:41Mais maintenant, il faut agir ou partir.
22:43Vous voyez, parce que les effets de com' c'est très beau quand on est à la télévision.
22:47Mais quand on n'agit pas derrière, c'est la sécurité des Français qui est en jeu.
22:52Bruno Retailleau, il fait de la com', Patrick Stefanini.
22:55Il doit agir ou partir, dit Jordan Bardella.
22:57Non, monsieur Bardella parle beaucoup, mais Bruno Retailleau, lui, il agit.
23:02Il agit au quotidien.
23:04Je rappelle à l'ensemble de vos téléspectateurs que le nombre des éloignements d'étrangers clandestins
23:10ou fauteurs de troubles à l'ordre public a augmenté l'année dernière de 27%.
23:15Donc voilà un premier résultat.
23:17Et je rappelle que Bruno Retailleau n'est ministre de l'Intérieur que depuis le mois de septembre.
23:22Mais ça ne peut pas être grâce à lui quand ça fonctionne et pas de sa faute quand il y a un dysfonctionnement.
23:28Donc je reviens sur le rapport de force, puisque hier soir, Bruno Retailleau a dit qu'il fallait établir
23:33désormais avec l'Algérie un rapport de force.
23:35Et je voudrais rentrer dans le détail et voir quels sont les instruments dont la France dispose.
23:41C'est quels alors ?
23:43Le prédécesseur de Bruno Retailleau, Gérald Darmanin, avait essayé d'agir
23:48en limitant le nombre des visas de court séjour accordés à des ressortissants algériens.
23:54Le problème, c'est que cette politique était largement vouée à l'échec,
23:57puisque dans le cadre de Schengen, la délivrance des visas de court séjour est mutualisée entre les pays européens.
24:05Ça veut dire que lorsqu'un ressortissant algérien se présente aux consulats de France
24:10et n'obtient pas son visa de court séjour, il peut sans difficulté aller en demander un
24:15aux consulats d'Espagne ou aux consulats d'Allemagne, pour prendre deux exemples précis.
24:21Si on veut changer la donne de nos relations migratoires avec l'Algérie,
24:25il faut agir sur un tout autre levier, sur le levier des visas de long séjour.
24:31Là, la France est souveraine, comme n'importe quel autre État membre de l'Union européenne,
24:37elle est seule à décider du nombre des visas de long séjour.
24:40C'est sur cela qu'il faut agir, par exemple.
24:44Et derrière la restriction de la politique de délivrance des visas de long séjour,
24:49il faut, j'y reviens, remettre en cause l'accord de 68 et proposer aux Algériens
24:55d'entrer vraiment dans la renégociation de cet accord.
24:58Question d'Amandine Attalaya sur ce que certains décrivent comme le mur de la réalité
25:02que Bruno Retailleau est peut-être en train d'affronter pour la première fois.
25:05Oui, c'est ce que sous-entend voir dit clairement Jordan Bardella,
25:09c'est-à-dire qu'il y a des promesses de changement.
25:13Et en réalité, vous constatez que ce n'est pas entre vos mains
25:16et que si l'Algérie n'y met pas du sien, on sera éternellement confronté au même problème.
25:21Est-ce que Bruno Retailleau ne se heurte pas tout simplement à la réalité ?
25:24Non, Bruno Retailleau se heurte simplement au fait qu'il n'est que ministre de l'Intérieur
25:29et que la remise à plat de nos relations avec l'Algérie,
25:35la nouvelle donne que Bruno Retailleau appelle de ses voeux,
25:40passe par l'action du Premier ministre, du ministre des Affaires étrangères naturellement,
25:47du Premier ministre et du Président de la République.
25:50Mais sur ce qui est entre vos mains, est-ce qu'il faudrait par exemple,
25:53alors autre solution, un projet de loi immigration,
25:56mais pour cette fois par exemple, étendre la durée de rétention dans les centres de rétention ?
26:02Ça avait été à un moment donné une proposition de Bruno Retailleau
26:05pour remettre en place le délit de séjour irrégulier.
26:08Toutes ces mesures qu'avait proposées la droite
26:10et qui ne sont toujours pas mises en œuvre pour le moment.
26:12Alors toutes ces propositions restent d'actualité.
26:15La situation politique à l'Assemblée nationale n'a pas permis jusqu'à maintenant
26:21à Bruno Retailleau de porter à nouveau une grande loi immigration.
26:26En revanche, comme vous le savez, un certain nombre de propositions de loi
26:31ont été déposées notamment au Sénat par des personnalités qui sont proches de Bruno Retailleau.
26:37Ces propositions de loi vont venir en discussion dans les semaines et dans les mois qui viennent
26:42et elles vont permettre d'agir sur plusieurs des leviers que vous avez mentionnés.
26:48Je pense notamment à la durée de rétention.
26:51Regardez le dossier qui nous préoccupe ce matin et le drame qui s'est produit hier à Mulhouse.
26:59On est allé jusqu'au terme du délai de rétention pour cet individu, pour l'assaillant.
27:06Il a fait ses 90 jours.
27:08Il a fait ses 90 jours.
27:09On pouvait même ajouter 30 jours, je crois, sous réserve de décision de justice.
27:13Mais ça ne suffit pas.
27:14Pour un certain nombre de ressortissants, qui sont des ressortissants particulièrement dangereux,
27:19originaires de pays avec lesquels nous avons du mal à obtenir les laissés-passer consulaires,
27:25il faut que la rétention soit beaucoup plus longue.
27:28C'est la raison pour laquelle Bruno Retailleau a souhaité que pour un certain nombre d'individus,
27:33on puisse aligner la durée de rétention sur celle qui est aujourd'hui applicable en matière de terrorisme.
27:40Patrick Stéphanidi, vous dites que la remise en cause de cet accord de 1968,
27:44ça relève notamment du président de la République.
27:46Ça veut donc dire que si cela n'est pas fait, la faute en reviendra au président de la République ?
27:51Ça veut dire ce que ça veut dire.
27:53Dans la constitution de la Ve République, c'est le président de la République
27:57qui conduit la politique étrangère de la France et qui signe les traités.
28:02Donc la responsabilité politique de ce qui se passe avec l'Algérie aujourd'hui,
28:05s'il n'y a rien de bouge, c'est celle du président de la République ?
28:07Ça n'est pas ce que je suis en train de dire.
28:09Ce que je suis en train de dire, c'est que pour remettre à plat,
28:12et nous en avons besoin, nos relations, notamment dans le domaine migratoire avec l'Algérie,
28:17nous en sommes parvenus au point où il faut une initiative du président de la République.
28:22Bruno, je dis question sur l'un des projets du ministre de l'Intérieur dont vous avez été chargé,
28:27qui est de chercher des pays avec lesquels on pourrait passer des accords
28:31pour renvoyer justement ces personnes que la France ne souhaite plus voir sur son territoire.
28:35Oui, Bruno Rotailleux s'est déjà exprimé sur le sujet de créer des sortes de hubs
28:40à l'extérieur de nos frontières, dans des pays tiers,
28:46qui pourraient permettre de reconduire à l'extérieur de nos frontières
28:50ces clandestins ou ces personnes étrangères qui auraient commis des défauts de son territoire.
28:56Qu'est-ce que vous en dites ? Est-ce que le projet du ministre a avancé concrètement ?
29:02Alors, ce que voudrait faire Bruno Rotailleux et qui est très important,
29:07c'est qu'un certain nombre de pays par lesquels transitent des étrangers
29:14qui viennent ensuite s'installer sur le territoire français de manière irrégulière,
29:21que ces pays transitent, acceptent de reprendre les ressortissants,
29:27non seulement leurs propres ressortissants, mais également les ressortissants de pays tiers.
29:32Je vais prendre un exemple. Vous avez aujourd'hui des ressortissants soudanais ou maliens
29:40qui passent par le territoire de la Tunisie pour venir ensuite en Europe,
29:45en Italie d'abord, puis en France. La Tunisie reprend dans des conditions
29:53qui sont sans doute perfectibles, mais reprend aujourd'hui ses propres ressortissants.
29:58Nous souhaiterions que des pays comme la Tunisie, qui voient transiter par leur sol
30:05des ressortissants de pays tiers, acceptent de reprendre ces ressortissants de pays tiers.
30:11Est-ce qu'il y a déjà certains pays qui ont donné leur accord ?
30:14Et nous avons engagé des discussions avec une série de pays.
30:19En effet, la lettre de mission qui m'a été adressée au mois de novembre par Bruno Retailleau
30:24porte précisément sur ce sujet. Certains pays ont signé des accords de ce type.
30:33Je vais prendre un exemple très concret qui est l'accord signé avec le Kazakhstan.
30:39Vous allez me dire que le Kazakhstan ne fait pas partie des pays qui ont en France
30:44une communauté importante, mais en revanche le Kazakhstan est un pays qui est proche de l'Afghanistan.
30:50Il n'a pas de frontières avec l'Afghanistan, mais qui est proche de l'Afghanistan.
30:55Et l'accord conclu avec le Kazakhstan permet la réadmission dans ce pays de ressortissants de pays tiers.
31:03En un mot, il y a combien de pays avec lesquels on a passé un accord ?
31:06Il y a le Kazakhstan, il y a des accords qui sont sur le point d'être signés.
31:13Avec combien de pays ? Juste un nombre, je ne vous demande pas de les citer.
31:15Six ou sept pays.
31:16Merci beaucoup. Driss Haït Youssef, je le disais, vous êtes docteur en droit public spécialiste des questions de sécurité globale.
31:22On évoque ce qui s'est passé hier à Mulhouse avec Patrick Stefanini, depuis hier sur l'antenne de BFM TV, bien sûr.
31:29Qu'est-ce qui vous a marqué particulièrement dans cette attaque ?
31:32Est-ce qu'elle est malheureusement traditionnelle de ce qu'on a pu voir ces derniers mois, ces dernières années ?
31:36Ou il y a un élément particulier qui vous a sauté aux yeux ?
31:39Il y a deux éléments. Le premier, c'est qu'on a affaire à un profil qui, depuis maintenant quelques années,
31:44le profil classique qu'on retrouve, ça veut dire atteint de troubles psychiatriques ou psychologiques.
31:50C'est à peu près la moitié des individus ayant commis un attentat sur notre territoire depuis 2018.
31:55Ça veut dire que sur neuf personnes, on en a plus de la moitié.
31:58Ensuite, on voit bien que l'administration a plutôt bien fonctionné, contrairement à ce qu'on dit.
32:02C'est-à-dire que c'est un individu qui est arrivé de manière illégale sur notre territoire en 2014,
32:06qui a fait l'objet d'une judiciarisation et qui a fait l'objet d'une condamnation, notamment pour apologie du terrorisme,
32:12effet quand même assez rare. C'est-à-dire que le juge l'a interdit définitivement de territoire.
32:17Donc, il était emprisonné et de la prison, il a immédiatement été transféré dans un centre de rétention administrative
32:22pour être expulsé dans son pays. Donc, à la fois, la machine judiciaire et administrative ont plutôt bien fonctionné.
32:28C'est un élément extérieur, c'est-à-dire le refus de l'Algérie à dix reprises de le reprendre,
32:33qui a à un moment donné conduit inévitablement à, effectivement, cet attentat absolument inacceptable.
32:38Donc, on a ces deux éléments qui sont rentrés en compte.
32:41On a tradition de dire que, justement, il y a désormais essentiellement cette menace endogène, si j'ose dire,
32:46venue de l'intérieur et que la menace terroriste venue de l'extérieur n'existerait plus.
32:50Est-ce qu'on va un peu trop vite quand on dit cela ou est-ce que c'est vraiment le cas ?
32:53Non, la menace endogène, elle est encore très présente et elle inquiète d'ailleurs les services...
32:57Exogène, menace qui vient de l'extérieur.
32:59Exogène, exactement. La menace exogène est une menace très présente qui inquiète les services de renseignement
33:04qui sont, par ailleurs, très mobilisés. On le voit bien, effectivement, sur la montée en puissance des organisations terroristes,
33:09que ce soit, effectivement, en Afghanistan ou dans d'autres pays, y compris dans le Sud Sahel.
33:14On voit bien qu'il y a une montée en puissance. Et puis, sur la menace endogène, avec plus de 5000 individus
33:20qui font l'objet d'un suivi particulier des services de renseignement, en plus de ces individus qui sont emprisonnés.
33:25Donc, ça fait partie, effectivement, de ces menaces qui sont prises en compte par l'administration.
33:28On entend de nombreux responsables politiques dire aujourd'hui que cet attentat, cet acte terroriste est dû à l'immigration.
33:37Est-ce qu'il y a, à vos yeux, en tant que docteur Androit, une multiplication d'actes dus à l'immigration ?
33:45Ou est-ce que ce sont des fadaises politiques ?
33:47Si on prend le profil de l'individu, on va forcément dire qu'on a un sujet avec l'immigration.
33:53Moi, j'ai plutôt tendance, effectivement, à séparer un petit peu les deux.
33:56On a, c'est vrai, des individus qui reprenons les frères Kouachi, reprenons Amélie Koulibaly, reprenons Mohamed Merah.
34:03Ce sont des individus qui ont commis des attentats sanglants dans notre pays et qui sont nés sur le territoire de la République
34:08et qui ont fréquenté les écoles de la République.
34:10Donc, on peut toujours, quelquefois, faire un lien entre l'immigration et le terrorisme.
34:13Je ne suis pas sûr que ce soit de nature, à un moment donné, à alimenter le débat de manière objective
34:18sur comment fait-on pour prévenir la menace, pour prévenir l'action terroriste sur notre territoire.
34:22Patrice Stéphanény, je vois que ça vous a fait réagir.
34:24Oui, parce que j'ai sur vous un privilège dont je me passerai volontiers, qui est le privilège de l'âge.
34:29Et donc, j'étais déjà en fonction au ministère de l'Intérieur dans les années 80.
34:36La France n'était pas épargnée par le terrorisme dans les années 80.
34:40Souvenez-vous des attentats de 86, notamment.
34:43Ces attentats, ils étaient commis par des terroristes venus de l'étranger,
34:49qui venaient sur le territoire national, commettre des actes terroristes.
34:52Avec que le chal.
34:53Oui.
34:57Malheureusement, on constate, et votre invité l'a dit avec beaucoup de pertinence,
35:02on constate qu'aujourd'hui, même si la menace exogène n'a pas disparu,
35:08c'est la menace endogène qui est aujourd'hui la plus importante.
35:12C'est-à-dire, c'est la présence sur notre territoire de ressortissants étrangers
35:18qui s'y sont installés, soit sous couvert d'un visa,
35:22soit sous couvert d'un titre de séjour, soit de manière clandestine,
35:26qui malheureusement débouchent sur des drames du type de celui que nous avons vécu hier à Mulhouse.
35:32Alors, je ne crois pas que ce soit particulièrement pertinent sur ce plateau
35:38de vouloir organiser un débat sur le lien entre le terrorisme et l'immigration.
35:45Ce lien, malheureusement, il a été établi à plusieurs reprises au cours des 20 dernières années.
35:53Ce qu'il faut, c'est faire le point sur la manière dont la France peut aujourd'hui mieux se protéger contre ces périls.
36:02Et le ministre de l'Intérieur dispose d'instruments, notamment l'expulsion des étrangers
36:09qui présentent une menace grave pour l'ordre public.
36:12La justice elle-même n'est pas inactive.
36:15Vous avez rappelé à juste titre, et je l'avais dit au début de l'émission,
36:19que l'assaillant d'hier a fait l'objet d'une interdiction judiciaire du territoire.
36:24Ce qui pose problème aujourd'hui, c'est la mise à exécution des décisions souveraines
36:30prises notamment par la justice au nom du peuple français.
36:34Bruno, je vous donne la parole dans une seconde.
36:36Dries, une question. On disait qu'il y a aussi beaucoup de personnes qui vont sortir de prison.
36:42Comment on les gère, des personnes qui ont été emprisonnées pour terrorisme ?
36:46Est-ce que c'est la menace, j'allais dire de demain, mais déjà d'aujourd'hui ?
36:50Oui, c'est une menace, d'autant plus que ceux qui vont sortir environ 70 cette année
36:54sont des individus condamnés pour des faits de terrorisme.
36:57Donc vous avez d'une part des services de renseignement, notamment la DGSI
37:01et le renseignement territorial qui, en fonction de la dangerosité de l'individu,
37:04vont prendre en charge. Et puis vous avez l'autorité administrative
37:06qui sait prononcer ce qu'on appelle des MICAS, des mesures individuelles
37:09de contrôle administratif de surveillance.
37:10C'est-à-dire qu'ils sont obligés d'aller pointer ?
37:12Pointer ou alors rester à leur domicile, etc.
37:14Mais qui ne sont pas non plus infaillibles.
37:16On l'a vu, l'histoire récente nous a démontré que même avec des mesures
37:19administratives de surveillance, ils pourraient être à l'attentat.
37:22Y compris hier, semble-t-il, sous réserve d'avoir plus d'éléments sur l'enquête,
37:26l'individu se promenait dans les rues de Mulhouse
37:31en criant des Allah Akbar, semble-t-il.
37:34Et il a pu continuer quand même un certain temps.
37:38Donc la mesure individuelle, visiblement, est faillible également
37:43dans la façon de le surveiller.
37:47Ah oui, absolument, puisque la mesure administrative,
37:50elle pèse sur vos épaules, c'est une charge.
37:52Vous devez aller au commissariat, vous devez faire un centre de déclaration,
37:55vous ne devez pas apparaître sur un territoire,
37:57mais vous pouvez parfaitement vous en passer.
37:58Si vous avez décidé de vous en passer, il y allait commettre un attentat.
38:00Donc là, c'est limite.
38:02Mais vous avez des services de renseignement,
38:04en fonction de la dangerosité de l'individu.
38:06Ils font un travail assez formidable.
38:08Je rappelle qu'on a eu des attentats déjoués ces dernières années,
38:11importants, neuf l'année dernière.
38:12Bon, trois qui, effectivement, préparaient des actions violentes
38:14contre les Jeux olympiques et paralympiques.
38:16Et aucun attentat en 2020.
38:18Donc on en a eu un en 2023 au pont de Bir Hakeim,
38:20qui a causé un mort.
38:21Donc on voit bien que les services de renseignement sont très mobilisés.
38:24Vous avez des individus qui vont sortir,
38:26qui présentent une menace extrêmement grave pour l'ordre et la sécurité publique.
38:29Certains ont renoncé à organiser ou, en tout cas,
38:32commettre des attentats sur le territoire.
38:34Et il n'en demeure pas moins que ce sont des individus
38:36qui resteront radicalisés et qui posent un véritable problème
38:39en matière de séparatisme.
38:40Vous qui connaissez parfaitement cette question,
38:42est-ce qu'il y a des façons de faire dont la France peut s'inspirer à l'étranger ?
38:46Comment font les autres pays qui peuvent être confrontés à ce type de problème ?
38:49Ou est-ce que c'est un cas un peu particulier en France ?
38:51Non, non.
38:52D'autres pays vivent des moments, hélas, difficiles.
38:56Nous avons la chance en France d'avoir dans notre arsenal judiciaire
38:59une qualification qui s'appelle l'association de malfaiteurs terroristes
39:03et qui permet de prévenir, j'ai envie de dire, la commission d'un attentat.
39:06Et dès lors que des individus, en concertation de leur propre volonté,
39:10imaginent même commettre un attentat,
39:12à ce moment-là, le juge judiciaire peut intervenir.
39:14Et voilà.
39:15Donc nous avons des individus...
39:16Et pour les questions de rétention, d'expulsion ou autre,
39:18est-ce qu'il y a des pays où ça fonctionne mieux ?
39:19Alors, vous avez par exemple, si on parle d'un centre de rétention,
39:23il y a 2000 places dans un LRA, local de rétention administrative,
39:27ou centre de rétention administrative, 2000 places.
39:29Le ministre de l'Intérieur souhaite faire porter à 3000 d'ici 2027.
39:32En Allemagne, c'est 12 mois.
39:34En Italie, c'est 18 mois.
39:36On voit bien que la réflexion en France allait d'augmenter
39:38de manière assez légitime.
39:39Finalement, la capacité pour l'autorité administrative
39:43de conserver des individus dans des centres,
39:45pour peu que le juge judiciaire, en l'occurrence le JLD,
39:48qui peut donner son mot, mais tout ça,
39:50ça reste évidemment conditionné à la nature des accords
39:53que nous avons à ce genre de pays,
39:54parce que si les pays ne répondent pas ou refusent,
39:56on ne peut pas les garder indéfiniment dans un centre
39:59de rétention administrative.
40:00Ça, ce n'est pas possible.
40:01En fait, le sentiment quand on vous écoute,
40:03tous les deux, malheureusement,
40:04il est celui d'une forme d'impuissance totale.
40:07C'est-à-dire, en tout cas face à ce type d'individus,
40:09est-ce qu'on est condamné à subir ?
40:11Non. Non, parce que je pense qu'on sous-estime
40:14quelquefois le poids de l'Europe.
40:15Je pense qu'à un moment donné, quand nous avons
40:17quelques difficultés, je rappelle qu'il existe
40:19des dispositifs européens qui permettent notamment
40:21de centraliser, au travers de systèmes d'information,
40:23les demandes d'asile dans un certain nombre de pays
40:25de l'espace Schengen.
40:26Je pense que l'Europe doit hausser le ton,
40:28elle doit parler d'une voix commune.
40:29Patrick Stefanini le disait à juste titre,
40:31sur les cours et les longs séjours,
40:34on n'a pas du tout la même philosophie
40:36avec un certain nombre de pays européens.
40:37Je pense qu'il faut qu'il y ait une dynamique
40:39qui soit commune, parler à des pays qui refusent
40:41à un moment donné de reprendre des individus
40:43que nous ne voulons plus sur notre territoire.
40:46Je pense que ça peut marcher, que si et seulement si,
40:48il y a une voix qui est forte au niveau de l'Europe.
40:50Patrick Stefanini, vous avez une minute.
40:52Deux pistes de progrès.
40:54La première, c'est d'améliorer l'articulation
40:57entre ce que fait le ministre de l'Intérieur
40:59et ce que fait la justice.
41:00Car cet individu, il a d'abord été placé
41:04en prison pendant quelques mois,
41:06c'est pendant sa période d'incarcération
41:08qu'il aurait fallu préparer son éloignement
41:10vers l'Algérie.
41:11Et là-dessus, je pense que nous avons
41:13une vraie piste de progrès,
41:14à législation constante.
41:16La deuxième piste de progrès,
41:18elle nous vient des États-Unis.
41:20Et même pas des États-Unis de Donald Trump.
41:24Elle nous vient des États-Unis
41:25depuis plusieurs années.
41:26Aux États-Unis, le contingent des personnes
41:32admises au séjour est indexé sur le nombre
41:37des clandestins qui sont repris
41:40par leur pays d'origine.
41:42Donc on établit un lien entre la délivrance
41:45des autorisations de séjour
41:47et le nombre de réadmissions
41:49que l'on obtient dans le pays d'origine.
41:51Voilà une piste qui pourrait,
41:53alors évidemment il faudrait modifier
41:55notre législation,
41:56mais voilà une piste qui pourrait,
41:57me semble-t-il, être explorée.
41:59Merci beaucoup Patrice Stefanini.
42:00Merci beaucoup Driss Haïti-Ossef
42:02d'avoir été avec nous ce matin.
42:03Merci Amandine.
42:04Merci Bruno.
42:05Vous restez bien sûr sur BFM TV
42:07pour suivre cette actualité extrêmement forte
42:10ce week-end.
42:11Tout de suite, vous retrouverez
42:12l'affaire suivante qui va bien sûr
42:13s'intéresser de très près à l'affaire Amras.

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