Samedi 22 février 2025, SMART WOMEN reçoit Caroline Gaches (présidente, Gaches chimie) et Agnès Bricard (présidente d’honneur, Conseil National des Experts comptables)
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Bonjour, bienvenue dans Smart Women, l'émission qui donne le pouvoir aux femmes en prenant
00:10la nécessité de leur juste place dans toutes les sphères de pouvoir économique, politique,
00:15médiatique, sans oublier bien sûr le domaine scientifique, la tech et l'enjeu essentiel
00:22de l'intelligence artificielle dont on parle beaucoup à juste titre aujourd'hui.
00:27Je pense que compte tenu de la situation, des défis auxquels nous sommes confrontés,
00:33il est assez clair pour tout le monde aujourd'hui que toutes les forces doivent être en action
00:37et que donc nous avons besoin de plus de femmes en responsabilité.
00:42C'est une question d'équilibre mais c'est surtout une question de performance économique
00:46et de capacité de progrès.
00:48Aujourd'hui pour en parler je vais avoir deux invités.
00:52Je vais commencer avec Agnès Bricard qui a été notamment la première femme à être
00:59nommée présidente du Conseil National des Experts Comptables et qui a bien d'autres
01:03casquettes également et qui nous parlera aujourd'hui plus particulièrement des femmes
01:09dans l'entreprise, dans le monde d'entreprise et du partage de la valeur.
01:12C'est un sujet sur lequel elle a été missionnée pour parler intéressamment, participation
01:18par le gouvernement il y a plus de trois ans et donc elle est amenée à rencontrer
01:22beaucoup de chefs d'entreprise, PME, ETI donc elle aura un regard particulier sur le lien
01:27entre les femmes, les dirigeantes et ce sujet essentiel du partage de la valeur.
01:31Ensuite je ferai le portrait de Caroline Gache.
01:35Caroline Gache est en train de reprendre la direction d'une entreprise familiale qui
01:40s'appelle Gache Chimie qui est localisée, c'est une ETI, qui est en région Toulouse-sur-Mer.
01:47Elle a été créée en 1948 par le grand-père de Caroline, c'est une entreprise qui est
01:56spécialisée dans tout ce qui est service à l'industrie autour de l'utilisation des
02:01produits chimiques donc avec plusieurs axes dans ses capacités.
02:06Voilà, écoutez, tout de suite je vais recevoir donc Agnès Bricard.
02:10Bonjour Agnès Bricard.
02:16Bonjour.
02:17Merci de votre présence Agnès.
02:19Alors Agnès, comment vous présenter parce que vous avez quand même énormément de
02:23casquettes différentes mais je crois que finalement s'il y a un fil commun à toutes
02:29vos activités et à tous vos engagements, c'est toujours finalement la parole de l'entreprise,
02:34des dirigeants, du fait d'entreprendre qui fait le lien entre tout ça.
02:39Alors, je le disais en préambule, vous êtes experte comptable, commissaire aux comptes
02:46de formation mais vous avez été la première femme, donc ça c'est important de le souvenir,
02:50la première femme à être nommée présidente du Conseil national de l'ordre des experts
02:55comptables.
02:56Vous êtes également vice-présidente de Pacte PME, j'avais d'ailleurs reçu François
03:00Perret le président de cette émission qui nous avait parlé de ce que vous faisiez
03:04à ce titre-là.
03:05Vous avez créé en 2012 la fédération des femmes administratrices, bref, beaucoup de
03:10choses à votre actif et aujourd'hui j'ai souhaité vous entendre non pas sur ces thèmes-là
03:15mais plus précisément sur le thème du partage de la valeur, donc tout ce qui tourne autour
03:20des systèmes de participation et d'intéressement puisque c'est un sujet important, que vous
03:25êtes ambassadrice de ces thèmes auprès de l'ensemble du tissu PME-ETI français donc
03:33dans toutes les régions, vous êtes amenée à rencontrer des chefs d'entreprise à ce
03:36propos.
03:37Donc voilà, je voulais commencer par une première question simple qui est finalement quel lien
03:42faites-vous, quel lien y a-t-il entre justement les femmes dans l'entreprise et le sujet du
03:49partage de la valeur ?
03:50Merci, alors ce partage de la valeur il est d'actualité aujourd'hui, tout simplement
03:55parce qu'une loi au 1er janvier impose dans les entreprises de 11 à 49, y compris dans
04:01l'entreprise sociale et solidaire, faut pas oublier quand même que c'est 10% de l'ensemble
04:06de notre PIB cette économie sociale et solidaire, impose dorénavant dans ces entreprises de
04:11parler de l'intéressement et donc du partage de la valeur.
04:15Alors il n'y a pas que l'intéressement puisqu'il y a aussi la prime partage de
04:18valeur, il y a aussi la participation dérogatoire, donc il y a plusieurs dispositifs.
04:22Mais c'est la première fois qu'on verra appliquer dans les 11 à 49.
04:25Or 11 à 49 on est des entreprises où il y a de l'intuité personnée, où il y a véritablement
04:30un dialogue qui doit se faire entre un dirigeant et ses salariés.
04:34Et donc le fait qu'il y ait un dialogue, le fait qu'il y ait une fabrication de richesse,
04:38le fait qu'il y ait une distribution de cette richesse, et bien ça donne du sens à ce
04:41que j'appelle une certaine égalité entre ces ressources humaines qui s'appellent un
04:45dirigeant et ses salariés.
04:47Et ce dialogue il va se faire, et ça me fait penser, c'est vrai, à cet équilibre qu'on
04:51a voulu entre hommes-femmes, puisqu'on est aussi dans cette époque de bonne gouvernance
04:57et où on a constaté qu'il y avait de la productivité, qu'il y avait de la performance
05:00dès lors que les femmes étaient dans les instances dirigeantes.
05:03Donc donner du sens à la partie employeur-salarié, là où il n'y avait souvent qu'un lien
05:08de subordination, mais donner du sens à cette fabrication de richesse en la partageant
05:12et en en discutant, suivant évidemment soit des critères économiques, soit des critères
05:17extra-financiers.
05:18Et c'est sur ces critères extra-financiers qu'on va évidemment assurer, pour une fois
05:22je crois vraiment, et peut-être une transition aussi écologique.
05:26Alors c'est très intéressant ce parallèle, d'ailleurs je ne l'avais jamais entendu
05:30ainsi, mais je trouve que ce parallèle est très intéressant entre justement cette
05:35nécessité d'égalité dans la gouvernance, et donc avec tout ce qui a été fait, la
05:39loi Rexin, avant Copé-Zimmermann, etc., mais beaucoup de choses ont été faites, pour
05:45autant on n'est pas aux boules d'histoire, et le fait de faire ce lien et ce parallèle
05:48avec également ce côté entre le salarié et l'employeur, je trouve que c'est tout
05:53à fait intéressant.
05:54Alors au-delà de ce point, vous rencontrez donc des chefs d'entreprise, vous rencontrez
06:00des femmes chefs d'entreprise, il n'y en a pas assez, mais il y en a quand même quelques-unes.
06:03Est-ce que vous constatez des différences dans l'appropriation des sujets participation
06:09et intéressement entre elles et leurs homologues masculins ou pas ? Qu'est-ce qu'on peut
06:13dire sur ces spécificités ?
06:16Alors on constate au niveau des chefs d'entreprise, notamment dans ces entreprises de 11 à 49,
06:22où on fait en sorte, et on le constate vraiment, homme-femme, on retrouve du sens, et notamment
06:28on le voit de plus en plus dans les transmissions d'entreprise, où les pères ou les grands-pères
06:31transmettent à leurs filles, là où il s'interdisait, il y a encore 40 ans, de transmettre à leurs
06:36filles ou à leurs petites-filles.
06:37Maintenant, systématiquement, ils ont compris.
06:40Donc je dirais que toute la culture a changé, dès lors qu'on a donné du sens au fait
06:46que quand on a une femme dans les instances dirigeantes, il y a une performance.
06:49Alors qu'est-ce que je constate sur le partage de valeurs ?
06:51Que les femmes ont souvent sur les sujets de partage une écoute favorable sur des sujets
06:59qui s'appellent de la durabilité, c'est-à-dire qu'on doit constamment préserver, pérenniser
07:04notre entreprise, et donc elle s'approprie plus facilement, quand on leur parle du partage
07:08de la valeur, ce sujet que les hommes.
07:10Les hommes, il faut plus les amener sur l'épargne salariale, à l'épargne.
07:14Suis-je intéressée, moi, en tant que dirigeante ?
07:16Oui, vous êtes intéressée, parce que le contrat d'intéressement vous permet justement
07:20d'être bénéficiaire.
07:21Donc parlons de l'épargne salariale, et là j'entends plus au niveau financier l'homme
07:25qui me dit « alors vous me parlez quoi de ma retraite par capitalisation ? »
07:29Ça c'est un sujet qui m'intéresse.
07:30Si moi je peux en bénéficier avec mes salariés, on y va tous ensemble.
07:34Et donc l'épargne salariale, ça cherche justement, par rapport à ce débat qu'on
07:38entend un peu mortifère sur la retraite, ça permet d'engager un vrai débat sur la
07:42retraite par capitalisation.
07:44Et ça donne de la motivation aux hommes.
07:46C'est très intéressant.
07:47Alors donc vous trouvez, bien sûr il ne faut pas être manichéen non plus en disant d'un
07:51côté les femmes intéressées par le côté engagement ELG, puis de l'autre les hommes
07:57uniquement pour l'aspect financier.
07:59Je pense que les deux sont vrais.
08:01Mais néanmoins, j'avais effectivement vu plusieurs études disant que dans les motivations
08:05des femmes dans la création d'entreprises notamment, où là on est encore sur le balbutiement
08:10non pas du nombre de femmes, parce qu'il y en a davantage, mais sur le début de l'entreprise,
08:15il y avait effectivement une motivation de sens qui était plus importante chez les femmes.
08:19Donc ça, vous le voyez effectivement.
08:22Vous avez des écarts puisque vous êtes également les régions, vous êtes également les secteurs
08:26d'activité.
08:27Est-ce que vous voyez des écarts entre secteurs d'activité, toujours par rapport au partage
08:30de la valeur ?
08:31Alors oui, il y a des écarts.
08:33Je vois bien que dans la partie prestations de service, c'est quand même très intuité
08:37personnée et donc chaque ressource humaine a une valeur.
08:41Ça, on le voit et ils acceptent et ils adaptent assez facilement ce partage de la valeur dès
08:46lors qu'il y a évidemment création de richesse et création de valeur.
08:49Sur l'industrie, je constate que c'est un tout petit peu plus difficile, mais que ça
08:53s'y met dès lors qu'il y a une loi et qu'il y a une obligation de l'inscrire au 1er janvier
08:572025, c'est très culturel à chaque fois.
09:01Nous, on a l'habitude dans notre beau pays de dire, il nous faut une loi pour comprendre
09:05et parfois des sanctions.
09:06Bon, là pour l'instant, je vous avoue qu'il n'y a pas de sanctions dans cette loi, mais
09:10il y a une obligation.
09:11Donc, ça va se faire un peu naturellement grâce aux experts comptables qui vont s'aimer
09:15et qui vont donner du sens en disant, vous voyez, vous ne trouvez pas de ressources humaines.
09:18Si vous aviez peut-être inscrit le fait que vous aviez un contrat d'intéressement, que
09:22vous aviez une politique sociale, peut-être que les ressources humaines viendraient plus
09:25naturellement vers vous.
09:26Donc, voilà, il y a toute cette partie de dialogue et d'échange.
09:29Donc, pour vous, le vecteur expert comptable, c'est votre profession d'origine, mais le
09:34vecteur expert comptable est particulièrement important dans cette idée de partage de la
09:38valeur.
09:39C'est à part là que passe l'information, etc.
09:41Et alors, dans le métier expert comptable, il y a pas mal de femmes, là, on a un pourcentage
09:47qui est relativement élevé, je pense, ou du moins qui est…
09:49On est encore à 30 %, 70 %.
09:51Ah, je pensais que c'était davantage, vous voyez, je croyais que le métier était plus
09:56en progrès alors que ce qu'il est réellement…
09:57Mais il y a eu une nette progression.
09:58Une nette progression, bon, donc, d'accord, donc, bon, je suppose que là, ces femmes
10:03sont aussi encore plus portées sur le sujet que leurs homologues.
10:07Alors, une question qui n'a rien à voir, mais comme on va arriver bientôt à la fin
10:10de notre échange, vous avez parlé de cette habitude culturelle qui n'est pas bonne,
10:16à mon sens, d'attendre la loi pour faire les choses alors qu'on peut les faire avant,
10:20à mesure où c'est fait pour faire avancer les quotas.
10:22Les quotas, c'est pareil.
10:24Les quotas, on en a parlé pendant des années, et il a fallu la loi Zyberman, 2011, pour
10:29qu'on parle définitivement d'un 40 % de femmes dans les conseils d'administration.
10:33Et on s'est aperçu que de cette loi, on est arrivé à la loi de Muriel Pénicaud,
10:38sur l'index de l'égalité professionnelle, parce qu'il ne suffit pas d'avoir de la
10:42représentativité féminine dans nos instances pour démontrer qu'en plus il y a de la performance,
10:47mais il faut de l'égalité professionnelle pour que, à fonction égale, on ait un salaire
10:51identique.
10:52Et puis ensuite, on a vu arriver l'idée que, par Marie-Pierre Rixain, qu'il fallait
10:56dans les instances dirigeantes au moins 30 % de femmes à partir de 2026 et 40 % à partir
11:02de 2029.
11:03Donc on est en 2025, là.
11:05Mais ce que l'on voit au niveau des quotas, c'est un vrai résultat positif.
11:10Et la parité, comme l'égalité, comme les instances dirigeantes avec des femmes, ça
11:16vient des quotas.
11:17Et aujourd'hui, culturellement, ça passe très bien.
11:19Il n'y a plus ce sens de dire non, on s'interdit, on ne s'interdit plus.
11:24Oui, bien sûr.
11:25Bon, nous sommes bien en phase sur ce thème-là.
11:28On attend avec impatience, néanmoins, le moment où il ne sera plus nécessaire d'eux d'avoir
11:33des quotas ou autre.
11:34Mais bon, pour l'instant, c'est toujours une nécessité.
11:35Écoutez, merci beaucoup, Agnès, de tout ce que vous faites.
11:39Continuez à porter cette bonne parole et cette pédagogie de l'économie, parce qu'on
11:42en a bien besoin.
11:44Alors maintenant, je vais recevoir une femme dirigeante d'entreprise qui, par rapport
11:49à tout ce que vous avez dit, est dans l'industrie, fait une reprise de direction d'entreprise.
11:55C'est une entreprise familiale.
11:56Donc son père, effectivement, transmet.
11:59Donc, on va trouver véritablement, et qu'il y a des idées sur le partage de la valeur,
12:04on va retrouver vraiment tous les thèmes que vous avez évoqués concrétisés dans
12:08un rôle modèle qui est donc Caroline Gache, qui va me rejoindre après vous.
12:12Merci beaucoup, Agnès.
12:13Merci à vous.
12:14Bonjour Caroline Gache, ravie de vous accueillir et merci d'ailleurs, je profite pour le dire,
12:25à Anne-Charlotte Fredenucci, qui est la présidente d'Ametra, que j'avais reçue ici en septembre
12:302023 et qui nous a mis en relation parce qu'elle trouvait que vous aviez vraiment des choses
12:34à apporter, justement, en tant que femme dirigeante dans le monde de l'industrie, où on n'en
12:39a pas suffisamment, comme on le sait.
12:41Donc Caroline, vous êtes en plein processus de reprise, de prise de direction, en fait,
12:48de l'entreprise familiale qui a été créée par votre grand-père, donc, en 1948.
12:54Votre grand-père, d'ailleurs, l'avait créée au niveau local, après votre père a continué
12:58à la développer, on reviendra sur les aspects géographiques.
13:00Et puis là, vous vous apprêtez, donc vous êtes dans le processus de transmission et
13:03vous vous apprêtez, épaulée par votre sœur d'ailleurs, à en prendre la direction.
13:09Alors, pendant que nous avons, quand nous parlions pour préparer cet entretien, vous
13:14me disiez que finalement, de tout temps, vous aviez été programmée, et volontaire, bien
13:20sûr, pour en l'être, mais programmée à être la succession de votre père.
13:25Donc, parlez-nous un petit peu de vous, depuis le début, je crois que c'est en 2014 que
13:30vous avez commencé.
13:31Votre parcours jusqu'à maintenant, et après on parlera bien sûr de l'avenir, mais votre
13:37parcours depuis le départ.
13:38Très bien.
13:39Merci beaucoup pour cette invitation.
13:40Oui, donc, comme vous l'avez justement dit, je me suis toujours destinée à reprendre
13:46l'entreprise familiale, bien que mon père a fait ça de façon très subtile, puisqu'il
13:52ne nous a jamais réellement imposé de le faire, mais il nous a toujours partagé avec
13:57tellement de passion ce qu'il faisait, que forcément, ça nous donnait envie, en partageant
14:04beaucoup les succès, ne cachant pas non plus les difficultés d'un chef d'entreprise,
14:07mais insistant surtout sur l'aventure passionnante qu'il vivait.
14:10Et de ce fait, quand j'ai choisi mon parcours supérieur, j'ai choisi une école de commerce
14:15de façon à être plutôt généraliste, et on a toujours été proche, avec ma sœur,
14:20de l'entreprise, à faire des petits boulots l'été, sur la chaîne de production, à
14:24remplir des bidons de solvants.
14:26Et donc, la force d'une entreprise familiale, c'est aussi d'avoir ces collaborateurs qui
14:30sont là depuis très longtemps.
14:32J'en profite pour dire qu'on est très fiers d'avoir remis 40 médailles du travail en
14:37septembre dernier, avec des collaborateurs qui étaient là, qu'on a fêté entre 20
14:42et 40 ans de carrière au sein de Gachimi.
14:45Donc, ces collaborateurs, ils nous ont vus depuis qu'on était toutes petites.
14:49Certains sont maintenant partis en retraite, mais il en reste encore.
14:52Et donc, c'est vrai que cette bienveillance de ces collaborateurs vis-à-vis de nous a
14:59été aussi un moteur supplémentaire pour reprendre l'entreprise familiale et continuer
15:02cette aventure.
15:03Alors, quand vous avez démarré dans l'entreprise, quand vous avez rejoint, sorti de vos études,
15:08vous avez commencé par quoi ?
15:09Votre parcours ouvri, entre guillemets.
15:10En fait, je ne voulais pas rentrer dans l'entreprise tout de suite parce que je voulais aller faire
15:15mes armes ailleurs.
15:16Surtout que je ne souhaitais pas non plus revenir à Toulouse tout de suite.
15:20Sauf que mon père, là aussi, a eu une opportunité qui l'arrangeait bien, c'est qu'on a eu l'opportunité
15:27de mettre en place et de gagner un contrat avec un gros client dans l'aéronautique et
15:32qui nous demandait de créer un site de zéro en région parisienne.
15:34Donc, le challenge était très tentant et je suis ravie de l'avoir pris puisque ça
15:40m'a permis de faire plusieurs années un petit peu mon projet en étant loin du siège
15:45social, tout en étant très soutenue par des collaborateurs et mon père, bien sûr,
15:49pour réussir ce challenge qu'il fallait commencer un site de zéro, recruter 15 personnes
15:54d'un coup, monter un site.
15:55Mais ça m'a permis de vraiment faire ma place tout en étant un petit peu éloignée
16:01physiquement de mon père et donc d'asseoir au fur et à mesure, je pense, ma crédibilité.
16:07Vous me disiez que vous aviez d'ailleurs été accompagnée et notamment mentorée
16:11par Patrick Daer, je crois.
16:12Voilà, on a eu la chance.
16:13Alors ça, c'était un peu plus tard, c'était dans le cadre d'un programme Ambition PME
16:17qui était soutenu par BPI et donc on a eu la chance d'être mentorée par Patrick Daer
16:23qui nous a beaucoup chamboulé dans le bon sens sur tous les aspects de gouvernance de
16:27l'entreprise et c'est un des chantiers que j'ai mené entre 2016 et 2019 et nous
16:33avons mis en place, grâce à lui, des instances de gouvernance comme un comité stratégique
16:38avec deux membres externes qui vit depuis 2018 et on est ravies puisqu'on a représenté
16:46les instances de l'actionnariat, donc chaque groupe de familles a une place.
16:49Vous êtes plusieurs branches familiales, c'est combien au total ?
16:52On est dix actionnaires de la troisième génération actuellement et nous avons réalisé
16:57en 2020, grâce au Pacte du Trail, la transmission entre les parts de la deuxième à la troisième
17:02génération.
17:03C'est le Pacte du Trail qui est aujourd'hui sur la scellette et dont on sait, quand on
17:05connaît le sujet de l'entreprise, à quel point il est important, à quel point il permet
17:09de faire grandir les entreprises, d'avoir des ETI alors qu'on n'en a pas assez et qui
17:14pourtant est remis souvent sur le devant de la scène, mais pas dans le bon sens.
17:19On a reçu Renaud Dutreil à Toulouse et on a eu l'occasion d'échanger sur le sujet,
17:23sans ce pacte, le futur de Gachimine n'aurait pas été nécessairement assuré.
17:29J'espère que notre conversation va être entendue.
17:32C'est très concret, vous avez même une boîte, c'est de l'industrie, c'est tout ce que l'on
17:37veut, c'est une ETI, elle est en région, c'est la succession.
17:40Les challenges opérationnels sont déjà très importants à vivre et à reprendre.
17:44Donc si en plus on doit gérer, simplement s'endetter de façon considérable pour pouvoir
17:50reprendre l'entreprise, il y a beaucoup de repreneurs qui vont hésiter et qui ne vont
17:55pas le faire et qui ne vont pas pouvoir le faire.
17:56Mais bien sûr, et qui vont donc se vendre et se vendre, on ne sait pas.
17:59Donc nous en avons profité et on en est très contents.
18:03Donc ça, ce sujet a été traité et maintenant nous sommes en pleine transition opérationnelle
18:07du management.
18:08Ça prend son temps.
18:10Oui, vous avez raison, il faut le faire.
18:12Je trouve que vous êtes un exemple familial assez remarquable de préparation, parce que
18:17ce n'est pas toujours le cas non plus.
18:19On voit d'ailleurs Agnès Bricard, si vous l'avez entendu le disiez juste avant, il
18:23y a eu toute une époque où les pères ne transmettaient pas aux filles, ou c'était
18:26vraiment parce que Anne-Charlotte explique que ce n'était pas ce qui était prévu
18:30au départ.
18:31Après c'est elle, mais bon.
18:32Et donc le fait que tout ça a évolué, votre père a donc vraiment lui bien programmé
18:37et a mis tous les atouts sans vous forcer la main, ce qui est quand même très important
18:40aussi puisque vous aviez envie de le faire, donc ça vous arme bien mieux pour démarrer.
18:45Il n'y a pas un modèle de reprise d'entreprise qui se fait de la même manière, mais c'est
18:49vrai que dans notre cas, ça se passe très bien parce que ce que dit mon père, c'est
18:54que pour transmettre une entreprise, il faut qu'il y ait la volonté du cédant de céder
18:58et de transmettre.
18:59Il faut qu'il y ait les capacités du repreneur et il faut qu'il y ait l'envie des repreneurs.
19:03Donc l'envie des repreneurs et la volonté du cédant a liété, les capacités il fallait
19:08nous tester un petit peu.
19:09Il fallait que vous les formiez, que vous les accentuiez.
19:13Donc c'est vrai que grâce à ça, nous on vit cette transmission, on prend le temps
19:18sereinement et c'est très agréable et en plus on aime travailler ensemble tout en
19:23préparant le futur.
19:24Parlez-nous maintenant de Gachimi parce qu'on n'a pas dit jusqu'à présent ce que c'était
19:28vraiment.
19:29Parlez-nous de Gachimi, de l'activité, les chiffres, la carte d'identité en quelque
19:33sorte.
19:34Avec plaisir.
19:35Donc Gachimi a été fondée en effet en 1948, donc après gare par mon grand-père et notre
19:38métier est toujours, mais était surtout à la base de faire de la distribution de produits
19:43chimiques.
19:44Donc des produits chimiques, il y en a partout et maintenant l'entreprise au fur et à mesure
19:46s'est spécialisée autour de quatre domaines principaux qui sont l'aéronautique défense
19:51et espace, le monde de la chimie industrielle et des commodités chimiques, le traitement
19:57des eaux pour les eaux de process, les eaux potables et les eaux de piscine ainsi qu'autour
20:01des matériaux qui sont plutôt utilisés autour des composites notamment dans la marine
20:07ainsi que la chimie des silicones, dans le nucléaire, dans l'énergie par exemple.
20:10Et notre métier est de faciliter l'utilisation des produits chimiques auprès du monde industriel
20:15autour de trois piliers.
20:16Le premier pilier c'est une expertise technique puisque Gachimi, nous venons de la chimie.
20:20Vous ne produisez pas mais vous avez cette expertise.
20:23Voilà exactement.
20:24Et alors on produit des certaines typologies qui sont des commodités chimiques soutenues
20:28par des laboratoires, donc on fait vraiment de la chimie applicative, les services et
20:32de la logistique, donc là nous venons faciliter d'un point de vue logistique avec nos forces
20:37de stockage, nos camions, nos capacités de conditionnement.
20:40Vous avez des sites Cveso.
20:41Plusieurs sites Cveso, j'en parlerai plus tard, c'est un atout essentiel de notre métier
20:46bien que difficile aujourd'hui de les exploiter et d'en créer en France.
20:50Et le troisième pilier, c'est notre pilier, ce qu'on appelle le e-chemicals qui est toute
20:55la gestion de l'information et des réglementations autour des produits chimiques.
20:58Et non seulement cet outil, qui est un outil digital de gestion de l'information, nous
21:03sert à nous-mêmes en tant qu'exploitants de produits chimiques, mais sert à nos clients.
21:06On l'a mis à disposition de nos clients.
21:07Donc voilà, ça c'est à peu près pour notre métier.
21:10Gaia Chimie aujourd'hui, c'est 225 millions de chiffres d'affaires en 2024, à peu près
21:14450 collaborateurs dans 10 pays et nous avons une dizaine de sites également en France
21:20et notre présence à l'international et en France, c'est basé sur des sites de stockage
21:24pour pouvoir stocker différents types de produits chimiques et dans différentes quantités
21:28par rapport à leur dangerosité et leur quantité.
21:32Et vous me disiez avec une ADN très marquée, croissance par la rentabilité et dans la
21:38rentabilité, donc avec d'ailleurs beaucoup d'autofinancement.
21:41100% d'autofinancement, avec bien sûr, en fait, ce qu'on souhaite, c'est de construire
21:49pour le long terme.
21:50Donc toutes les actions que l'on mène et les relations que l'on a avec nos clients
21:55et on les remercie aussi beaucoup pour ça, mais ce sont des relations que l'on crée
21:59sur du long terme.
22:00Et ça, c'est extrêmement important, le court terme ne nous intéresse pas et c'est
22:05un des fondements des entreprises familiales et je pense que c'est ce qui permet, surtout
22:10dans le monde industriel, de s'adapter aussi au cycle relativement long de nos clients
22:14industriels et donc on est tout à fait dans cette dynamique avec une volonté assez forte
22:20de s'internationaliser.
22:21Je crois que c'est votre défi, parce qu'on le disait au départ, mais c'est vrai que
22:25votre grand-père, lui, c'était vraiment local, votre père, c'était le national
22:28et le maghreb et vous, vous arrivez à des enjeux beaucoup plus importants et vous voulez
22:32aller plus loin en expansion géographique.
22:34Exactement, donc quand je suis arrivée, on devait être de l'ordre de 5-8% de notre
22:39chiffre d'affaires à l'international et là, nous en sommes aux alentours de 20%
22:42et l'objectif, c'est d'aller à 30% d'ici 2-3 ans.
22:46Avec des zones particulières ?
22:48Actuellement, en 2023, on a fait le Canada, en 2024, on a fait l'Allemagne et on fait
22:54par plusieurs moyens, puisque Gachimi est plutôt dans la promotion d'une croissance
22:58organique, j'en parlerai tout à l'heure, notamment par l'innovation, mais cependant,
23:03ça nous arrive aussi de faire des acquisitions et de la croissance externe et quand on se
23:06développe à l'international, on choisit les deux biais en fonction des pays, en fonction
23:09des besoins clients, en fonction des attentes et donc au Canada, on a commencé de zéro,
23:14en Allemagne, on a acheté une société et les deux prochains pays que nous avons en
23:19ligne de mire, ce sont les Etats-Unis et l'Inde, qui est le pays de demande notamment pour
23:23l'aéronautique, puisque notre internationalisation est très drivée par la demande de nos clients
23:28aéronautiques défensifs.
23:29En fait, vous accompagnez vos clients d'ailleurs, vous parlez du service à l'industrie, donc
23:32vous accompagnez, oui, très bien.
23:33Oui, alors il y a cet enjeu d'internationalisation, bien sûr, mais vous l'avez, vous venez de
23:38le dire, il y a le sujet de l'innovation qui est également pour vous important, il y a
23:41le sujet également, on va en parler aussi, de tout ce qui est environnemental, puisque
23:46vous êtes sur un métier.
23:47Alors comment, comment, d'ailleurs les deux sont liés, puisque l'innovation et l'environnement
23:51sont très liés, comment vous parvenez à un moment où il y a une grosse sensibilité
23:56sur tous ces sujets par rapport à la chimie ? Comment vous faites ?
23:59Alors, je vais d'abord parler du biais innovation, puisque ça fera aussi du lien vis-à-vis
24:03de l'environnement.
24:04Donc, en effet, nous on est convaincus qu'une société qui ne sait pas se développer par
24:09l'organique, par l'interne, n'a pas un avenir, en tout cas pour le très long terme.
24:13Donc vous l'avez compris, c'est pas notre objectif.
24:15L'innovation est un biais important et on a cette culture de l'innovation que l'on,
24:21comment dire, il n'y a pas une seule innovation chez nous, puisqu'en fait on a des domaines
24:24d'activité qui sont très différents.
24:26Donc dans chaque division, ou même dans les fonctions support, chacun peut être porteur
24:30d'une innovation.
24:31Donc on a des tas d'exemples, on a mis en place des vending machines dans les chaînes
24:36de production de chez nos clients pour distribuer les produits aux plus proches d'utilisation.
24:41Ensuite, on a mis par exemple en place un système qui s'appelle le GaroFilt.
24:44Donc ce sont des innovations certaines qui sont brevetées.
24:46Ça c'est un média filtrant à base de verre recyclé, donc qui fait lien aussi avec l'environnement,
24:53en remplacement du sable notamment dans les filtrations des eaux de piscine.
24:57Plus récemment, on a mis en place un procédé qui s'appelle le GaroBarrière, qui prévient
25:01des mélanges incompatibles de produits chimiques.
25:04On a aussi une innovation qui s'appelle le Garotech, qui lui est un process qui permet
25:10de laver le linge dans des grosses quantités pour des blanchisseries industrielles sans
25:14chauffer l'eau.
25:15Donc là aussi, qui permet de faire des économies d'énergie et donc de réduire les impacts
25:19CO2 de nous-mêmes et de nos clients.
25:22Et l'ensemble, donc en fait, chaque innovation en général a un impact positif pour l'environnement.
25:31On a aussi développé des produits qui permettent de traiter les zones où il y a beaucoup
25:34de corrosion, comme par exemple dans les chaînes de traitement de surface, c'est un revêtement.
25:38Et par rapport à l'environnement, on a des initiatives qui sont très tangibles, notamment
25:46nous aidant nos clients à ne pas jeter les produits chimiques.
25:50Parce que les produits chimiques, pour une grande partie, ont des dates de péremption.
25:53Et grâce à notre métier, nos clients réduisent de l'ordre de...
25:57On constate qu'ils ont entre 15 et 30% de produits qu'ils jettent.
26:00Et avec notre initiative, ils en jettent entre 0,5 à moins d'un pour cent.
26:05Donc il y a un vrai impact de la réduction de leur impact environnemental et également
26:11par la mise en place, par exemple, d'emballages consignés, qu'on a mis en place depuis 50 ans.
26:16Oui, c'est une solution simple mais qui est en vertueuse, parce qu'elles sont simples d'ailleurs.
26:20Donc on a défini avec la plupart de nos clients les plus importants, des feuilles de route environnementales.
26:27Et on est content d'avoir des actions qui sont tangibles.
26:30Nous, on ne traite pas forcément le tri des papiers, parce qu'on le fait, mais on a
26:35des actions qui sont réellement tangibles et c'est passionnant, parce que la chimie
26:39permet aussi toutes ces initiatives.
26:40Oui, il faut voir, en fait, c'est vrai que dès lors qu'on se positionne en regard positif
26:46sur le progrès, sur l'innovation, sur tout ce qui permet, on voit qu'il y a beaucoup
26:49de solutions qui sont développées par les entreprises pour justement améliorer tous
26:54les sujets environnementaux.
26:55Il faut simplement leur laisser les moyens et les capacités et le temps.
26:58Et un petit peu le temps.
26:59C'est une question de temps, bien sûr.
27:00Tout à fait.
27:02Pour terminer, juste une question dans votre industrie, la place des femmes.
27:06Comment vous la voyez ?
27:07Elle n'est encore pas très présente.
27:11Ce que je ressens et ce que je vis, c'est que d'être une femme dans l'industrie, c'est
27:19une réelle opportunité.
27:20C'est une opportunité et surtout, c'est un challenge qui est passionnant.
27:24On contribue à la construction, à notre petite échelle, à la construction du monde
27:28de demain.
27:29Et ce sont des challenges qui, en plus d'être passionnants, sont rationnels.
27:32Donc vraiment, moi, j'encourage toutes les femmes à venir dans l'industrie.
27:37Et être femme chef d'entreprise, là aussi, c'est plus rare.
27:41Et c'est vrai que les cas que je rencontre sont souvent des femmes qui font des reprises
27:47d'entreprise.
27:48Moi-même, j'en suis un exemple.
27:49Et donc, tout ce que je peux souhaiter, c'est que grâce à des initiatives comme les vôtres,
27:53de mettre aussi des femmes en avant, et merci, pour donner envie, pour donner envie, parce
27:58que ça vaut le coup.
28:00L'aventure industrielle vaut le coup.
28:01Bon, écoutez, votre témoignage est tout à fait convaincant, je pense, et je suis
28:05sûre qu'il aura des émules.
28:07En tout cas, très bonne continuation dans l'entreprise familiale.
28:12Vous allez garder l'ADN et vous allez faire face aux nouveaux défis.
28:15Merci beaucoup pour tout cela.
28:17C'est la fin de notre émission.
28:20Merci d'avoir écouté.
28:22Et puis, au mois prochain, pour de nouvelles découvertes entrepreneuriales.