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Samedi 3 juin 2023, SMART WOMEN reçoit Alexandra Curiel (présidente et directrice générale, Geismar)

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Transcription
00:00 Générique
00:02 -Bismart.
00:03 -Bonjour, Alexandra Curiel. -Bonjour, Marie-Claire.
00:06 -Heureuse de vous recevoir.
00:08 Donc, Alexandra, quand je vous ai invitée,
00:10 j'avais envie de montrer une autre facette
00:13 de la direction d'entreprise que ce que je fais habituellement,
00:16 car je fais des portraits de femmes entrepreneurs.
00:19 Je voulais vous montrer comment ça se passait
00:23 pour une DG salariée d'un groupe familial qui plus est
00:27 dans une activité qui est une activité en plus traditionnelle,
00:31 activité quasi centenaire, le groupe GESMA,
00:34 vous allez nous en parler, bien sûr,
00:36 mais équipement ferroviaire, donc véritablement du lourd,
00:40 comme on peut dire, en la matière.
00:42 Avant de parler de GESMA en tant que tel,
00:44 comment fait-on pour devenir DG salarié d'une telle boîte
00:48 quand on démarre dans les fusions acquisitions chez Lazare ?
00:51 -Souvent, comme beaucoup de choses dans la vie,
00:54 c'est des hasards et c'est du travail.
00:57 J'ai effectivement fait du MNA pendant une quinzaine d'années.
01:00 Il est arrivé un moment dans ma vie où j'avais envie d'essayer autre chose.
01:04 J'étais à la fin d'un cycle.
01:06 J'ai beaucoup aimé le MNA, c'est un métier passionnant,
01:09 extrêmement prenant, mais très enrichissant.
01:11 Mais on est à côté de l'opération.
01:14 Je me souviens assez précisément du déclic que j'y ai eu.
01:17 C'était une nuit où je travaillais sur les synergies
01:20 dans une fusion qui devait être annoncée
01:22 quelques semaines plus tard pour les actionnaires.
01:25 C'était une équipe opérationnelle qui élaborait le plan de synergie,
01:29 les synergies opérationnelles, de coût, d'investissement,
01:32 qu'ils allaient déployer sur plusieurs années.
01:35 Je me suis dit que c'était la vraie économie,
01:38 contribuer à la création de valeur.
01:40 J'aimerais pas être juste à côté, passer d'un deal à l'autre,
01:43 même si c'est un rythme que j'aimais.
01:45 J'ai eu envie de rentrer dans l'économie réelle,
01:48 contribuer sur un cycle de plus long terme.
01:51 La bonne opportunité est arrivée au bon moment.
01:54 J'ai été approchée pour rejoindre le groupe GESMAR.
01:56 -C'est l'envie de faire.
01:58 C'est l'envie d'entreprendre, en réalité.
02:00 On y reviendra peut-être, mais c'est les mêmes ressorts
02:04 de créer et d'entreprendre véritablement soi-même
02:07 qui vous a motivés.
02:08 Vous êtes arrivée dans le groupe GESMAR.
02:12 Vous aviez eu une discussion, je crois,
02:15 sur l'éventualité d'opérations à faire.
02:17 Et donc, ça a accroché avec l'actionnaire familial
02:21 et il vous a proposé de venir.
02:24 Vous êtes rentrée il y a maintenant une dizaine d'années.
02:27 -Ca fera bientôt 10 ans, l'année prochaine.
02:29 Bientôt mon 10e anniversaire.
02:31 Oui, j'avais été embauchée au départ
02:33 parce qu'il était question d'une réorganisation actionnariale.
02:37 La société est restée dans la famille.
02:39 J'ai contribué, de par mon expérience,
02:41 à organiser la réorganisation.
02:44 Effectivement, après, j'ai eu la chance
02:46 que l'actionnaire décide pour la première fois
02:49 dans l'histoire de la famille qu'il ne voulait plus diriger
02:52 la société, puisqu'une famille actionnaire
02:54 est devenue un actionnaire unique.
02:56 Il ne voulait plus diriger la société
02:59 et il a mis en place un comex.
03:00 Il m'a nommée directrice financière.
03:03 -Vous avez commencé par là.
03:04 -Ca sortait un peu de ma confort zone,
03:06 mais ça restait des choses que je maîtrisais à peu près
03:09 puisque c'était de la finance.
03:11 Deux ans après, il m'a nommée directrice générale.
03:14 Pour la première fois, c'était quelqu'un
03:17 qui n'était pas actionnaire ni de la famille Gismar.
03:19 -Ca, par expérience, dans mon métier précédent,
03:22 je sais à quel point c'est pas toujours facile
03:25 tant pour l'actionnaire familial
03:27 que pour le salarié ou la salariée qui arrive.
03:29 Surtout que l'entreprise, on le disait,
03:32 a 100 ans l'an prochain.
03:33 C'est une entreprise très installée,
03:35 dans un domaine très traditionnel.
03:37 Comment ça s'est passé ? Vous avez été confrontée à quoi
03:40 quand vous avez pris la direction de l'entreprise ?
03:43 Vous étiez très jeune, une femme jeune,
03:46 dans un monde traditionnel.
03:47 -Ca s'est bien passé, mais je pense que ça s'est bien passé
03:51 parce que l'actionnaire m'a donné les facteurs
03:53 pour que ça se passe bien.
03:55 J'avais eu trois ans de transition,
03:57 donc j'avais appris le groupe.
03:59 Je pense que j'étais légitime au sein du groupe,
04:01 pas forcément tout de suite comme DG,
04:04 mais dans ma position financière,
04:06 ma légitimité n'était pas mise en cause.
04:08 C'est toujours pareil, quand on travaille,
04:10 on apprend, on fait des efforts,
04:12 on arrive à faire reconnaître aux équipes,
04:15 même si on est extérieur, qu'on est capable et légitime.
04:18 Il y a trois facteurs essentiels pour que ça fonctionne
04:21 dans une société familiale.
04:23 Quand vous venez de l'extérieur,
04:24 il faut que la famille assoie votre légitimité,
04:27 vous donne l'autorité,
04:29 alors pas le côté autoritaire, mais la capacité à diriger.
04:32 C'est quelque chose qu'il a fait, et qu'il a tout de suite fait.
04:36 J'avais une autorité assez naturelle,
04:38 de par mon passé, sur les aspects finances.
04:40 La société est très industrielle, très technique.
04:44 La finance n'était pas la chose la plus importante dans le groupe.
04:47 J'ai tout de suite apporté de la plus-value.
04:50 Quand j'ai été nommée DG,
04:51 c'était la première fois,
04:53 donc c'était par un geste-marque qu'on décidait,
04:56 et certaines personnes de la société
04:58 allaient vérifier ce que j'utilisais.
05:00 J'ai pris des orientations
05:01 qui n'étaient pas les mêmes que ce que la famille prenait.
05:05 Il y a eu beaucoup de modernisation.
05:07 L'actionnaire a été sollicité pour savoir s'il était d'accord.
05:10 -Il validait. -On l'appelait.
05:12 -Il validait. -Il a tout de suite renvoyé
05:14 à mon autorité en disant que c'était la DG qui décidait.
05:18 -C'est bien. -C'était absolument indispensable.
05:20 Le deuxième aspect qui est important,
05:23 je pense, c'est que, quoi qu'il arrive,
05:25 même si vous avez l'autorité,
05:27 vous avez toujours la famille qui est présente.
05:30 Il faut arriver à bien délimiter qui fait quoi.
05:32 Dans mon cas, l'actionnaire est au Conseil de surveillance,
05:36 donc il y a des décisions qui sont la prérogative
05:38 du Conseil de surveillance.
05:40 J'ai d'accord avec certaines décisions,
05:42 mais je respecte, et lui, les miennes.
05:45 À un moment, nous avons refondu complètement la marque
05:48 et changé l'identité de marque.
05:50 C'était plutôt de l'opérationnel, mais ça touchait.
05:53 -Ah oui, bien sûr, le coeur. -C'était son nom,
05:55 c'était le logo de la société,
05:57 donc il a voulu être beaucoup plus impliqué.
06:00 J'ai respecté, évidemment.
06:01 Il y a une délimitation claire.
06:03 Il faut une délimitation claire, sinon,
06:06 ça revient vers la problématique d'autorité.
06:08 -C'est le cas dans n'importe quel métier,
06:11 mais c'est encore plus le cas dans une société familiale.
06:14 Il faut une confiance et un alignement des directions.
06:17 Dans une autre société, si ça ne va pas,
06:19 vous changez de département, de boss.
06:22 Dans une société familiale, il y a un boss.
06:24 Si on n'est pas aligné, ça ne fonctionne pas.
06:27 Ca s'est bien passé.
06:28 -C'est très intéressant, ce que vous dites,
06:31 parce qu'encore une fois, comme c'est pas toujours évident,
06:34 de donner vos trois règles fondamentales
06:37 pour que ça fonctionne, je trouve ça très bien.
06:39 Parlons de GESMAR,
06:41 parce qu'on n'a pas encore abordé.
06:43 C'est quoi GESMAR ?
06:44 Ca fait quoi ?
06:45 Quels sont les enjeux de GESMAR, aujourd'hui ?
06:48 -GESMAR, c'est une très belle ETI française
06:50 qui a été fondée à Colmar en 1924,
06:53 donc on aura 100 ans l'année prochaine,
06:55 qui est spécialisée dans les machines.
06:57 Nous concevons et nous fabriquons des machines
07:00 pour la pose et l'entretien des voies ferrées,
07:03 tout type de voies, les lignes à grande vitesse,
07:06 les voies urbaines, tram, métro,
07:07 les lignes conventionnelles de fret
07:09 ou les ports et les réseaux miniers.
07:11 Nous sommes très fortement implantés à l'international,
07:15 80 % du chiffre d'affaires est fait à l'export.
07:17 -80 %, c'est très bien.
07:19 -On a des filiales dans tous les continents.
07:21 4 usines en France, une usine en Italie,
07:24 une usine aux Etats-Unis,
07:25 parce que les besoins sont différents.
07:27 On est le leader de notre marché,
07:29 un des leaders sur certains segments.
07:32 Il y en a une des gammes les plus étendues
07:34 qui est la chaîne de valeur du rail.
07:36 On a des petites machines légères,
07:38 qui sont utilisées toutes les nuits,
07:40 par exemple, par la RATP,
07:42 pour entretenir les réseaux des meuleuses
07:44 ou des tire-fauneuses, à des machines
07:46 qui valent plusieurs millions,
07:48 des véhicules roulants pour mesurer
07:50 les paramètres de la voie ou des très gros portiques
07:53 pour poser les voies.
07:55 C'est une gamme large qui va des soudeuses
07:57 aux camions et rail-routes ou aux pelles.
08:00 On est sur toute la chaîne de valeur du rail.
08:03 -Et donc, c'est un métier,
08:04 encore une fois, très industriel,
08:07 et en même temps, vous avez beaucoup d'innovation.
08:10 -Oui. L'innovation, c'est absolument clé.
08:12 On a la chance d'être sur un secteur
08:14 qui est assez porteur.
08:16 Il y a des enjeux très clairs.
08:18 Il y a une augmentation de la densité dans les villes.
08:21 Il y avait moins de 50 % de mille d'habitants dans les villes.
08:24 On estime que ça sera plus de 70 % dans 20 ans.
08:27 Donc, il y a un besoin de productivité,
08:31 de systèmes de transport qui fonctionnent pour les villes.
08:34 Nos enjeux, c'est d'être de plus en plus productifs
08:37 pour nos clients, de leur permettre de faire des travaux
08:40 de plus en plus vite, de façon plus sécurisée,
08:43 surtout dans les réseaux urbains.
08:45 La R&D est importante.
08:46 Le rail est un métier assez traditionnel.
08:48 Les méthodes n'ont pas énormément changé
08:51 depuis les débuts du rail.
08:52 En France, on a la chance d'avoir un des marchés
08:55 qui est le plus... Il y a des normes très élevées.
08:58 Il y a un client qui est extrêmement rigoureux
09:01 et qui veut beaucoup de produits. -Exigeants.
09:03 -Ca nous permet de développer des innovations en France
09:06 qu'on peut exporter dans le reste du monde.
09:09 La R&D, c'est très important.
09:10 Il y a eu peu de changements dans les façons de travailler
09:14 depuis des décennies.
09:15 Aujourd'hui, il y a un besoin de développement
09:18 beaucoup plus massif du rail,
09:19 grâce à tous les plans d'investissement
09:22 et au besoin de développer
09:23 aussi bien les trains grande vitesse de transport,
09:26 les passagers, les frettes,
09:28 que dans les villes où il y a un besoin.
09:30 -Avec l'impact de la transition énergétique
09:33 et donc de ce que vous pouvez faire par rapport à ça.
09:36 Je suppose que vous travaillez beaucoup
09:38 sur cette thématique-là en lien avec vos clients.
09:41 -Nous sommes la société qui a été la première
09:43 à électrifier complètement sa gamme.
09:46 Aujourd'hui, tous les travaux qui sont faits sur les rails
09:49 peuvent être faits avec des options complètement vertes.
09:52 On permet aussi le rétrofit de nos machines,
09:55 toujours dans une optique de diminuer la consommation,
09:58 d'engagement écologique pour ne pas obliger les clients
10:01 à acheter des machines.
10:02 Certains de nos produits, on peut les rétrofiter.
10:05 On a été en avance de phase
10:06 puisqu'on a compris ce besoin.
10:08 Maintenant, c'est très bien,
10:10 car toute l'industrie s'y est mise.
10:12 Il y a des réseaux qui ne notorisent plus
10:14 les moteurs thermiques sur leur ligne.
10:16 C'est bien, parce que ça permet d'accélérer le mouvement.
10:19 Donc, l'ARD, c'est très important,
10:21 parce qu'il y a effectivement ce besoin écologique
10:24 et aussi d'accompagner nos clients
10:26 et être de plus en plus productif.
10:28 -Je crois que là, vous avez fait la démonstration
10:31 d'en était besoin, de ce qu'une femme qui dirige
10:34 une entreprise industrielle, d'une part, ça existe,
10:37 à la tête, en plus des ETI, qui sont vraiment la partie
10:40 qu'on veut voir développée en France.
10:42 On a de très beaux grands groupes, on a beaucoup de TPE,
10:45 mais la partie ETI, c'est la plus faible,
10:48 donc on a besoin de la développer.
10:50 Il y a des appels permanents aux femmes
10:52 pour rejoindre le monde de l'industrie
10:54 et pour être dans le cadre d'ETI, donc bravo pour tout ça.
10:58 Et on voit bien que ça fonctionne et que ça performe,
11:01 donc bravo et merci pour tout ce travail.
11:03 Voilà, écoutez, notre émission, alors, se termine.
11:06 Donc là, c'est la fin de la saison 1,
11:08 avec ses 12 épisodes, si j'emprunte un petit peu
11:11 le langage des séries, qui sont toujours très à la mode,
11:15 et je vous donne rendez-vous désormais à la rentrée,
11:18 donc pour vous dire à quoi ressemble
11:20 la saison 2, en septembre, avec des témoignages
11:23 qui, je l'espère, continueront à donner la pêche,
11:26 puisque c'est ça, l'objectif.
11:28 Merci, très bon été à toutes et à tous.
11:30 Merci, très bon été à toutes et à tous.

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