80 000, c’est le nombre de travailleurs indépendants handicapés en France. Les accompagner face aux enjeux spécifiques auxquels ils font face, changer le regard des entreprises et de la société sur eux et qu’ils peuvent avoir d’eux-mêmes, c’est la mission de l’association H’Up Entrepreneurs. Cette année, elle décerne un trophée à Romain Deffrenne, fondateur de Reyouzz.
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00:00L'invité de ce Smart Impact, c'est Damien Cailliau. Bonjour.
00:10Bonjour Thomas Hugues. Merci beaucoup pour l'invitation.
00:12Bienvenue. Vous êtes le président de HushUp Entrepreneurs, également cofondateur de Quid,
00:16qui est un cabinet de conseil spécialisé dans les politiques handicap.
00:19HushUp Entrepreneurs, association qui existe depuis 17 ans.
00:24BeSmart, Smart Impact ont souvent été partenaires, notamment des Trophées.
00:28Déjà, on va commencer par présenter l'association en quelques mots.
00:32En quelques mots, HushUp Entrepreneurs, en fait, on a une vocation d'accueillir, d'accompagner et d'accroître.
00:37D'accueillir, en fait, toute personne en situation de handicap qui peut avoir un projet de création d'entreprise,
00:42qui peut aussi avoir déjà créé son entreprise et qui est dans un cadre peut-être de rebond, le cas échéant,
00:48ou de développement ou autre. On accueille à ce jour à peu près 800 personnes,
00:54800 personnes en situation de handicap qui sont créatrices de leur propre entreprise.
01:00Et on en incube à peu près 600, en fait, par an.
01:03Et pour vous donner d'autres chiffres, pour vous donner quelques éléments d'échelle, en fait,
01:08il y a 8000 personnes en situation de handicap qui créent leur entreprise par an.
01:128000 par an. Donc, nous, on en capte, si vous m'autorisez l'expression,
01:15à peu près 10% de volonté, d'ailleurs, et d'en capter un peu plus.
01:19Et comment vous les accompagnez ? J'ai vu qu'il y avait une communauté de 7000 soutiens,
01:24des partenaires, des membres, des sympathisants.
01:26Qu'est-ce qu'ils apportent ? Des conseils, de l'expertise, de l'accompagnement ?
01:29Alors, c'est un peu tout cela. En fait, c'est-à-dire qu'on a ce qu'on appelle une communauté de bénévoles.
01:34Alors, avec un terme qui est un peu mal choisi, d'ailleurs, il va falloir qu'on travaille dessus,
01:39sur la sémantique, parce qu'ils sont bien évidemment bénévoles, mais ce sont des personnes
01:42qui sont à la tête de leur entreprise, des coachs, mais aussi des dirigeants,
01:46des dirigeants de jeunes cadres, parfois de cadres beaucoup plus confirmés,
01:52beaucoup plus capés, et en fait, ces personnes-là donnent de leur temps,
01:55donnent de leur temps sur elles, sur ce qu'elles ont en termes d'expertise,
01:59en termes de compétences, et dans du mentorat, dans du tutorat, d'apporter des conseils,
02:04des tips sur la faisabilité éventuellement du projet de création d'entreprise,
02:08mais aussi parfois sur l'obtention de prêts, de comment créer un business plan,
02:12d'un point de vue marketing, enfin sur tous les champs que l'on peut avoir
02:15quand on crée sa propre entreprise.
02:17Et alors, c'est toujours du gagnant-gagnant, le mentorat, donc je vois bien ce que ça apporte
02:22aux personnes qui sont en train de créer leur entreprise et qui sont accompagnées par H-Shop,
02:27mais ces bénévoles, je reprends, ces coachs, quels retours d'expérience ils vous font ?
02:33Alors, les retours d'expérience sont bien évidemment positifs, voire extrêmement positifs,
02:38d'une part parce que très souvent, si vous m'autorisez une nouvelle fois cette expression,
02:42ils remplissent pour l'année suivante, donc ce qui est plutôt bon signe.
02:46Et est-ce que leur regard change aussi, parce que c'est une des questions centrales de votre action
02:50et aussi de notre entretien ce matin, est-ce que leur regard change aussi ?
02:53C'est exactement ce que j'allais dire, c'est qu'en fait leur regard change,
02:55leur perception vis-à-vis du handicap de ce que peut être une société inclusive,
03:00quand je dis une société, pas qu'à l'échelle de l'entreprise,
03:02le monde dans lequel nous vivons, la ville, le pays dans lequel nous vivons,
03:05et en fait ça change complètement leur regard et avec une notion de se dire, c'est possible en fait.
03:10Donc c'est possible à la fois pour la personne qu'ils accompagnent,
03:13mais même pour eux en se disant, parce qu'on peut avoir parfois certaines représentations négatives
03:17vis-à-vis du handicap en disant, mais est-ce que la personne va bien pouvoir créer son entreprise
03:22avec ce type de handicap ou autre ? Et en fait on s'aperçoit que dans 99,99% des cas,
03:28on y arrive en fait, donc c'est bénéfique et il y a vraiment ce côté win-win,
03:31ce côté un peu gagnant, gagnant de part et d'autre.
03:34Je voudrais qu'on regarde un chiffre, la source c'est la GEPI,
03:3939% c'est le taux d'emploi des personnes en situation de handicap en France en 2023,
03:45c'était 38% en 2022. Bon, est-ce que c'est stable ?
03:49Est-ce que sur le long terme il y a quand même une amélioration ?
03:52Quel constat, quel bilan on peut faire ?
03:54Alors, on est quasiment aux 20 ans de la loi du 11 février 2005,
03:59c'est-à-dire dans quelques jours on va fêter les 20 ans.
04:01Je serais tenté de dire durant ces 20 années-là, il y a eu des avancées qui se sont faites,
04:05il ne faut pas les négliger, il faut même plutôt les mettre en avant.
04:08Mais en revanche, on partait de tellement loin qu'il en reste encore beaucoup d'autres
04:12à effectuer de ces avancées, il reste encore plein de pas de géant à faire.
04:15Et en fait, en effet, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup de sociétés,
04:18mais beaucoup d'entreprises aujourd'hui et quelle que soit leur taille,
04:20quel que soit le secteur d'activité, qui ont vraiment la volonté en fait
04:23de réellement devenir ce qu'on appelle anti-accueillante,
04:25c'est-à-dire se dire mais moi je veux mettre en place une politique handicap,
04:28moi je veux recruter des personnes en situation de handicap,
04:31moi je veux collaborer aussi avec des entreprises qui sont dans cet écosystème-là ou autre,
04:36donc ça bien évidemment.
04:37Et après derrière, c'est comment ça se met en marche,
04:39parce qu'en fait il y a aussi de la part parfois, je le dis,
04:42et je suis moi-même en situation de handicap, donc je serais tenté de dire,
04:45je parle en connaissance de cause, c'est qu'il existe aussi parfois
04:48une forme d'auto-censure parfois de personnes en situation de handicap
04:51qui se disent mais non, mais moi je ne peux pas prétendre à ce tel métier ou autre,
04:54ou à cette formation, quand on est encore en scolarité ou autre,
04:58alors que pas du tout en fait.
05:00Tout est possible en fait, et fort heureusement.
05:02Vous souffrez de, c'est dur à dire, spondyliartrite ankylosante, c'est ça ?
05:07Bravo, bravo Thomas.
05:08C'est un peu mon métier, donc heureusement que je ne m'en suis pas totalement sorti.
05:11Diagnostiqué il y a une quinzaine d'années, 16 ans,
05:13est-ce que vous avez craint de voir votre vie professionnelle s'arrêter ?
05:17Alors, moi non, je ne l'ai jamais ressenti.
05:22Je ne l'ai jamais ressenti.
05:23En revanche, moi je travaillais dans un grand groupe de l'agroalimentaire auparavant,
05:28avec une voie qui était un peu tracée,
05:30enfin voilà, cadre, différentes fonctions, enfin autre,
05:33avec le sentiment de me dire, bah moi voilà,
05:35je suis voué à faire ma carrière peut-être dans ce groupe.
05:38Et un jour on est venu me dire, c'est la médecine du travail à l'époque,
05:41qui m'a dit, mais monsieur Cailliau, vous pouvez continuer d'exercer votre métier,
05:45il n'y avait pas d'incompatibilité entre ma fonction et on va dire ma maladie.
05:48En revanche on ne voulait plus que j'emprunte le train, l'avion,
05:50et surtout la voiture.
05:52A l'époque j'étais directeur commercial,
05:54j'avais une soixantaine de commerciaux sur l'ensemble du territoire.
05:57Vous vous doutez bien que si lui, d'un point de vue médical,
06:00ne voyait pas d'incompatibilité, moi j'en voyais beaucoup,
06:03sur la continuité de mon métier.
06:05Et donc je suis parti en formation RH,
06:08pendant plus de dix mois en fait,
06:10pour me réorienter en fait,
06:12parce qu'en me disant, bah même si je viens quitter cette fonction là,
06:15je ne peux pas prétendre à faire ce métier là ailleurs,
06:17puisque je vais avoir les mêmes obstacles, les mêmes barrières.
06:19Et donc, au sortir de cette formation,
06:21je me suis installé, on va dire from scratch comme on dit,
06:24en partant vraiment d'une feuille blanche,
06:26pour faire ce que je fais maintenant,
06:28à la tête du cabinet Quid et de l'entreprise.
06:30Et vous avez créé ce cabinet Quid,
06:33cabinet de conseil spécialisé dans les politiques handicap.
06:35Je reviens à ce chiffre sur le taux d'emploi,
06:37parce que, est-ce que ça explique aussi
06:39le fait qu'il y ait beaucoup de personnes en situation de handicap
06:42qui se disent je vais créer mon entreprise.
06:44Parce que, soit parce qu'il n'y a pas de quoi les aider,
06:48il n'y a pas de quoi les accueillir dans les entreprises,
06:50soit parce que, ce que vous disiez, il y a peut-être un peu d'auto-censure.
06:52Est-ce qu'elles se disent, je vais créer ma boîte, ça sera plus simple.
06:56Très certainement.
06:58C'est-à-dire que très souvent,
07:00il y a un projet de création d'entreprise
07:02sur une idée géniale, un outil génial,
07:04enfin bref, ça bien évidemment ça existe.
07:06Mais il y a aussi les personnes qui se disent,
07:08mais moi je vais créer mon propre emploi en fait.
07:10C'est-à-dire qu'à la fois en créant mon entreprise,
07:12je vais créer mon propre emploi
07:14avec tous les tenants, les aboutissants
07:16liés à ma pathologie ou lié à mon traumatisme
07:18ou lié à mon trouble, avec les aménagements nécessaires
07:20et sans subir éventuellement
07:22quelques aléas
07:24que certains ou certaines peuvent connaître.
07:26Parce que, même si je le disais,
07:28il y a des avancées qui sont faites et des pas de géant qui ont été faits,
07:30pour autant il en reste encore d'autres à faire.
07:32L'entrepreneur,
07:34vous avez remis au mois de décembre
07:36les trophées HEP Entrepreneur,
07:38c'était le septième trophée,
07:4036 lauréats, il y a pas mal de catégories différentes.
07:42L'entrepreneur de l'année c'est
07:44Romain Dufresne, son entreprise s'appelle
07:46Riouz.
07:48C'est quoi le service, qu'est-ce qu'il propose ?
07:50Riouz, c'est un service
07:52de collecte, de borne
07:54ou autre, où ça permet
07:56pour des produits usagers
07:58que vous ayez un retour
08:00sur des
08:02bons d'achat.
08:04Le système est très vertueux.
08:06Et si je reprends
08:08l'exemple de Riouz,
08:10Romain est en situation d'handicap
08:12en effet, en revanche,
08:14son activité n'est pas liée au handicap.
08:16C'est ça aussi que je tenais à dire,
08:18c'est que parfois,
08:20et fort heureusement la plupart du temps,
08:22la création d'entreprise n'est pas liée
08:24au handicap ou pour compenser l'handicap.
08:26Ça peut arriver, mais pas tout le temps.
08:28C'était justement la question que j'allais
08:30vous poser.
08:32Est-ce qu'il y a pas mal de femmes et d'hommes
08:34qui créent leur entreprise parce que leur propre
08:36handicap n'est pas sous
08:38les radars de l'action publique
08:40et se disent qu'il faut bien faire quelque chose
08:42donc je prends mon bâton de pèlerin, j'y vais.
08:44En effet, pour le handicap,
08:46indéniablement, en revanche,
08:48on s'aperçoit aussi très souvent que
08:50les personnes créent leur entreprise
08:52liée à leur handicap, mais en fait pour compenser
08:54leur handicap. C'est-à-dire qu'ils ont
08:56l'idée, ils ont la solution,
08:58qu'elle soit technique, technologique
09:00ou autre, ils ont la solution pour permettre
09:02de compenser leur handicap.
09:04Pierre Delignage
09:06qui fait partie du public,
09:08qui a créé Afazix,
09:10c'est-à-dire que lui, ça répond
09:12réellement à un besoin. C'est-à-dire qu'il s'est
09:14retrouvé dans une situation
09:16où le personnel médical
09:18qui l'accompagnait ou autre
09:20avait un temps de vacances, ce qui est parfaitement
09:22normal au mois d'août, sauf que lui, il savait
09:24que dans son temps, le moindre
09:26repos, ne serait-ce que de
09:28quelques jours, allait avoir des conséquences
09:30donc là, quelques semaines, ça allait être
09:32quelque chose de suffisamment pénible pour lui
09:34donc il a créé quelque chose, il a créé un outil
09:36internet qui maintenant fonctionne
09:38où les gens viennent, je dirais, adhérer
09:40et même le corps médical
09:42c'est là où ça devient fabuleux, c'est que je dis
09:44souvent, les solutions
09:46qui sont souvent apportées pour compenser le handicap
09:48deviennent très souvent universelles
09:50on le sait à travers le SMS
09:52on le sait à travers la télécommande
09:54qui ont été à l'origine inventées pour compenser
09:56le handicap et on s'aperçoit très bien que dans notre
09:58quotidien, qui que l'on soit
10:00on les utilise fréquemment, même sur le SMS
10:02peut-être un peu moins maintenant, parce qu'il y a
10:04d'autres applications le permettant
10:06mais pour autant, ça finit par s'universaliser
10:08Merci beaucoup Damien Cailliau
10:10et à bientôt
10:12bon vent évidemment à HushUp
10:14et au trophée HushUp Entrepreneur
10:16on passe à notre débat
10:18la viticulture, les enjeux
10:20du bio, du réchauffement
10:22de la sécheresse