Doria Chouviat, veuve du livreur tué à Paris le 3 janvier 2020, invitée de franceinfo le 4 janvier 2025
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00:00Merci d'être avec nous. Vous êtes la veuve de Cédric Chouviat. Comment avez-vous réagi à cette décision de renvoi donnée par les juges d'instruction ?
00:09Écoutez, à la fois satisfait, à la fois un peu déçu, on a vu que
00:14la justice d'une certaine manière avait fait son travail dans le sens où il y a une enquête qui a été menée à bien et qui
00:21nous a révélé
00:23la vérité et des preuves qui restent vraiment irréfutables.
00:27Donc ça nous rassure déjà de connaître la vérité dans un premier temps.
00:33Après, ce qui est décevant, c'est que l'homicide involontaire ne correspond pas à la réalité des faits,
00:38mais
00:39on va quand même vers un procès qui va nous donner l'opportunité justement de pouvoir
00:45dénoncer tout ce qu'il y a à dénoncer et de mettre
00:49une partie des responsables
00:52face à leurs responsabilités.
00:54Étant donné que, comme vous devez le savoir, la quatrième policière qui a également une implication directe dans...
01:01Elle n'est pas renvoyée. Elle n'est pas renvoyée. En fait, il y a eu un tour de passe-passe. Donc dans un premier temps, elle a
01:07bénéficié d'un traitement de faveur dans le sens où elle a bénéficié du statut de témoin assisté.
01:14Par rapport à ça, on a fait des appels et aujourd'hui elle est carrément
01:18sortie de cette affaire judiciaire.
01:20On va revenir sur cette qualification. Vos avocats se sont déjà exprimés, vous aussi, sur cette qualification qui est retenue. Homicide
01:26involontaire. Pourquoi, selon vous, homicide involontaire, ça ne correspond pas aux faits ?
01:30Parce que Cédric est décédé suite à des violences volontaires et délibérées,
01:36et non justifiées, et disproportionnées, et illégitimes, tout simplement. Et je pense qu'aujourd'hui,
01:44entre les vidéos, et les témoignages, et surtout l'expertise médicale, c'est quelque chose qu'on ne peut pas refuter.
01:52C'est quelle qualification que vous voudriez ? Violence volontaire, ayant entraîné la mort sans intention de la donner ?
01:57Voilà, exactement. C'est le minimum.
01:59C'est une qualification pénale qui
02:01entraîne, en tout cas rend possible, une peine beaucoup plus lourde que homicide involontaire, ce qui a été
02:06retenu. Selon vous, la peine maximale qui est encourue par les trois policiers, qui pour l'instant sont
02:11renvoyés en procès, elle est beaucoup trop faible par rapport à ce qu'ils ont connu ?
02:14Non, je crois que ce n'est même pas une question de
02:16peine, en fait, qu'ils aillent en prison, qu'ils aient du sursis.
02:20Le plus grave dans tout ça, ce n'est pas ça, c'est qu'ils puissent continuer à exercer leur fonction.
02:27Dans tous les métiers, il y a des brebis galeuses, mais une fois qu'elles sont signalées, qu'est-ce qu'on en fait ?
02:32Moi, le meurtrier de mon mari, aujourd'hui, il est chef de poste. Et c'est ça qui fait peur, en fin de compte.
02:36Et c'est pour ça que vous menez
02:38ce combat qui est devenu un combat médiatique, symbole des violences
02:43policières, c'est pour ça que vous vous engagez, que vous prenez la parole, ce matin, et dans d'autres médias ?
02:46Oui, ce n'est pas que pour moi, en fait, c'est pour tous les citoyens français.
02:49Cet homme, il a commis les réparables, il ne devrait plus faire partie de la police, tout simplement, parce qu'un policier,
02:56malgré la politique du chiffre, etc., qu'il subit aujourd'hui, il faut revenir à sa mission première,
03:00c'est de protéger, c'est de sauver, c'est de secourir.
03:04Ce n'est pas de tuer et de se retrouver chef de poste. Non, ça, c'est
03:07c'est le monde à l'envers, là.
03:08Victoria Chouviat, vous dénoncez donc le sort de ces policiers qui, donc, restent en poste, malgré leur mise en cause dans cette affaire.
03:15Il y a quelque chose qui interpelle aussi, c'est que votre époux est mort il y a cinq ans, et que nous avons cette décision de renvoi,
03:22quasiment cinq ans après.
03:24C'est un long délai, vous l'avez vécu comme telle ?
03:27Oui, c'est un long délai, et puis on voit que la justice est parfois timide.
03:33Maintenant, ce que j'espère, c'est qu'elle n'ira pas jusqu'à se rendre
03:36complice de ce meurtre, en fait, j'ai envie de vous dire. De quelle manière ?
03:40L'institution policière, avec le déni, tout simplement, l'institution policière a couvert déjà les policiers
03:46dans leurs mensonges, etc. On ne va pas revenir sur ça, mais j'espère que maintenant, la justice, ça fera la différence.
03:52Ce procès, qu'est-ce que vous en attendez ? Qu'est-ce que vous attendez de cette audience qui s'annonce
03:56à plus ou moins longue échéance ?
03:59Qu'on accepte une réalité qui est triste, mais qui existe, c'est-à-dire qu'il y a des policiers, effectivement, qui, pour des raisons X ou Y,
04:07font n'importe quoi, et
04:09il faut les mettre hors-sicrui. Déjà, les sortir de la police, dans un premier temps. Mais dans ce procès, vous attendez des excuses,
04:15des explications, des aveux ? Ah oui, des explications, quand même, parce que comment il a pu dégénérer ?
04:21Comment on peut déchaîner une tête violente sur une personne qu'on vient de connaître, il y a à peine 15 minutes, et
04:27comment on peut en arriver là ?
04:30Il y a beaucoup d'interrogations, mais pas que pour moi, en fait. Je pense que
04:36pour tous les Français, ils doivent se dire, mais comment on peut en arriver là ?
04:39Mais malheureusement, on en est là.
04:41Cette enquête, elle a duré cinq ans, donc avant ce renvoi, c'est l'IGPN qui a
04:47déménagé les enquêtes, donc la police des polices, qui a fait un travail, franchement,
04:50formidable. Je leur tire ma révérence. Vous mettez, d'une certaine manière, en cause l'institution policière. L'IGPN est souvent critiquée pour, justement, être des policiers
04:59qui enquêtent sur des policiers. Là-dessus, vous n'avez pas senti de problèmes majeurs ? Non, pas du tout.
05:05Vous n'êtes pas volontaire d'étouffer la forme ? Non, pour le coup, là, je parle en connaissance de cause.
05:09Franchement, l'IGPN et le juge d'instruction, quand je vois toutes les ordonnances,
05:13les reconstitutions qui ont été faites, les expertises
05:17sonores, etc. etc. Il n'a pas lésé sur... Les moyens étaient là ? Ah ouais, les moyens étaient là.
05:21Tous les moyens ordonnés par les juges d'instruction ?
05:24Exactement, parce que c'est lui qui fait l'ordonnance. Si c'est l'ordonnance, vous ne l'avez pas, il n'y a rien qui se fait derrière. Et nous,
05:29après, c'est dans nos... Enfin, on n'a pas eu de privilèges,
05:32mais en tous les cas, les choses, elles se sont faites dans les règles de l'art. Une parole modérée, vous dénoncez à la fois des débordements,
05:39mais vous reconnaissez, Doria Chouviat, ce matin sur France Info, que l'enquête a été bien menée
05:44sur la mort de votre mari, je rappelle, Cédric Chouviat, mort en 2020, livreur qui avait été
05:50interpellé et plaqué au sol. Merci d'avoir été avec nous ce matin pour réagir à ce renvoi des trois policiers mis en cause. Merci à vous.