• il y a 2 semaines
Transcription
00:00Alors bonjour, on vient ici vous présenter la rentrée littéraire de Plon, donc je suis
00:09accompagnée de Marie-Laure Nollet, qui est éditrice chez Plon, et de Pierre Chardeau,
00:14qui est responsable éditorial, et j'en profite pour vous présenter Lise Rosé, qui est notre
00:19relation libraire et salon, donc voilà, qui est votre interlocutrice et qui est arrivée
00:24dans notre équipe depuis un mois et demi. Alors, vous savez que Plon est en plein redéploiement,
00:31donc on est ravis d'avoir une rentrée littéraire, voilà, avec deux titres, un titre français
00:38et un titre étranger, que nos éditeurs vont vous présenter. Le titre français, c'est
00:44une belle découverte dont Pierre va vous parler, et le titre étranger, c'est le deuxième
00:51volet du titre de Bellux que vous avez déjà découvert à la rentrée littéraire, puisque
00:58vous avez déjà eu le plaisir de lire Noirdos, et donc nous avons la suite de ses mémoires,
01:05donc pour la fin janvier. Pierre, je te laisse débuter.
01:09Bonjour, moi je vais vous parler des Week-End de Bruno Nassim Aboudrar, vous connaissez
01:16peut-être Bruno Nassim Aboudrar, il est professeur d'histoire et théorie de l'art à la Sorbonne,
01:21il a écrit un certain nombre d'essais consacrés à l'art, notamment un texte sur Vélasquez
01:26qui s'appelait Qui veut la peau de Vénus, qui était paru chez Flammarion, et c'est
01:29un auteur confirmé, mais c'est un jeune romancier, puisque les Week-End c'est seulement
01:32son second roman, il en avait écrit un premier chez Gallimard en 2009, qui s'appelait Icibar.
01:37Les Week-End, ça raconte principalement l'histoire d'une maison, c'est-à-dire que c'est d'une
01:42certaine manière la biographie d'un lieu, une maison étrange, fin de siècle, un peu
01:46biscornue, installée à la Selle Saint-Cloud en banlieue de Paris, qui est très largement
01:51décrite pendant le livre, qui est un peu le personnage principal du roman, puisque
01:55tout se passe dans cette maison, qui est tour à tour une maison d'habitation, une maison
02:00de Week-End, une maison de vacances, dans laquelle viennent s'installer Ida et Missy
02:06à la fin des années 10, un peu après la fin de la Première Guerre mondiale, qui sont
02:11deux immigrés juifs hongrois qui fuient la Hongrie pour venir s'installer en France,
02:15et on va suivre l'histoire d'Ida et Missy, de leurs enfants, de leurs petits-enfants,
02:21dans une sorte d'épopée familiale qui va s'étendre sur presque un siècle, traverser
02:25la Troisième République, la libération, la décolonisation, les mouvements pré- et
02:32post-mai 68, et donc assister dans les murs de cette maison à des querelles de génération,
02:38à des crises conjugales, à des crises d'adolescence, on va suivre cette famille sur presque un
02:44siècle, on va voir les difficultés qu'elle aura à s'intégrer, et puis on va aussi assister
02:51à un certain nombre de drames, notamment un drame vraiment fondateur et traumatique
02:55qui a lieu dans la maison pendant l'occupation allemande, je ne vous en dirai pas plus, je
03:00vous invite à lire le livre pour découvrir ce qui se passe à ce moment-là.
03:05C'est un roman qui est vraiment porté par une écriture très riche, très picturale,
03:10très descriptive aussi, et c'est vrai qu'on n'est pas étonné à la lecture du texte
03:14quand on apprend que l'auteur est critique d'art, puisqu'il y a vraiment un sens de
03:18l'image, de la description, du cadrage, il y a vraiment quelque chose de très fort
03:23là-dessus, on sent que l'auteur est habitué à commenter, à critiquer, à analyser des
03:29oeuvres d'art, et puis c'est aussi beaucoup un roman d'ambiance, un roman d'atmosphère,
03:36à travers cette maison, dans le siècle, à travers cette famille aussi, c'est vraiment
03:40un roman qui restitue d'une certaine manière le sentiment du passage du temps avec quelque
03:44chose d'assez nostalgique, d'assez mélancolique, d'un peu de Whammer qui peut faire penser
03:48à, dans l'ambiance, évidemment toute proportion gardée, mais à quelques grands romans, notamment
03:53de Patrick Modiano, sur ce sentiment du temps qui se fait et qui se défait.
03:58Bonjour à toutes et tous, alors vous avez sous les yeux la couverture de Rouge Feu,
04:12que l'on a conçue comme disait Alexandra en doublon, si je puis dire, en écho en tout
04:20cas à Noirdos, puisque Rouge Feu est donc une sorte de suite de Noirdos, Noirdos étaient
04:26donc les mémoires de jeunes filles de Belloux et Rouge Feu sont plutôt les mémoires de
04:33l'écrivaine.
04:34Donc quand elle écrit Rouge Feu, en 1997, Belloux a déjà pas mal d'ouvrages à son
04:42actif, à peu près une quinzaine, et elle est relativement déjà reconnue par des titres
04:49assez forts comme Ne suis-je pas une femme, notamment.
04:52Elle poursuit ici avec Rouge Feu son versant intime, donc avec un approfondissement arrivant
04:57à l'âge adulte de fait, et elle continue de réfléchir vraiment le milieu duquel elle
05:06vient.
05:07Elle vient donc d'une famille pauvre du Kentucky ségréguée, une fratrie de cinq sœurs,
05:12un frère, donc une fratrie assez nombreuse, pour faire sa place, ce n'est pas toujours
05:16évident.
05:17Et assez tôt, comme on a pu le voir dans Noirdos, elle se questionne sur sa place à
05:24la fois dans cette famille, mais aussi dans la société.
05:28Elle se rend bien compte que l'époque à laquelle elle vit est encore une époque assez
05:33verrouillée pour les femmes, où l'horizon est généralement le mariage, les enfants,
05:39qu'elle ne remet pas spécialement en cause, mais où elle aimerait pouvoir avoir le choix,
05:44et en effet, à l'époque à laquelle elle vit, à la fois la ségrégation qu'elle a
05:48connue et cette situation sociale et sociétale la font beaucoup, beaucoup réfléchir sur
05:56ce qu'elle sent monter en elle, à savoir une vraie destinée liée à l'écriture.
06:00Et passionnée de lecture, évidemment, ça va sans dire, elle arrive à l'université
06:07et elle se rend compte que le sexisme et le racisme qu'elle a pu déjà vivre sont également
06:12présents dans ce lieu censé être un haut lieu de l'esprit et de la réflexion, et
06:19elle va se confronter donc à ses pères, aux professeurs, majoritairement de couleur blanche,
06:26et elle va questionner sa propre place et la place des écrivaines et intellectuels
06:32noirs dans la société intellectuelle de façon plus globale.
06:37C'est rouge feu et très intéressant dans le sens où elle alterne, alors pas de façon
06:42systématique, mais le jeu et la troisième personne, donc le jeu où elle n'hésite pas
06:46à puiser dans des propres exemples personnels, très personnels, très intimes, de sa propre
06:52vie mais celle de sa grand-mère et de sa mère également, donc cette filiation féminine,
06:58et la troisième personne où elle analyse avec un peu plus de recul ce qu'elle a pu
07:03vivre dans cette intimité ou à l'université par exemple, en ayant toujours en tête cette
07:10obsession vraiment qui coule dans ses veines de devenir une penseuse, c'est vraiment une
07:15sorte d'horizon qu'elle se fixe, de vouloir être indépendante intellectuellement, économiquement
07:21également, et un des grands pans intéressants de Rouge Feu aussi est le versant amoureux,
07:31le titre original est « Woods of Patience » et le terme « patience » renvoie à la fois à la
07:36passion amoureuse mais également christique et religieuse qui est, je passe un peu plus
07:41rapidement là-dessus, mais qui est aussi très important pour Bellux, et elle déploie une
07:47relation qu'elle a eu d'une quinzaine d'années avec un poète qui l'a vraiment poussé à écrire,
07:53qui l'a vraiment encouragé et soutenu dans ce travail, mais elle se rend bien compte que dans
07:57cette relation, malgré tout, la notion de charge mentale, de position de la femme, d'y croire en
08:05elle et en même temps il se questionne lui-même sur ce qu'elle va pouvoir faire en tant que femme
08:09noire dans ce domaine, donc c'est vraiment toujours sur un fil de réflexion extrêmement intéressant
08:14chez elle, où elle ne part pas comme un acquis et elle donne à lire vraiment un combat perpétuel,
08:20enfin un combat plutôt réflexif là en l'occurrence, mais qui est d'une grande importance de nos jours,
08:25à mon sens, où elle soulève déjà à l'époque des sujets éminemment d'actualité, la sororité,
08:31l'entraide féminine où elle questionne l'intellectualisme et le féminisme blanc,
08:38où elle cherche vraiment sa place et où elle trace son sillon de plus en plus de façon intéressante,
08:45où elle l'a fait dans ses essais et là par le versant intime, et donc je finirai en disant
08:50qu'à travers Rouge Feu, elle cherche vraiment à s'inventer, à mettre en mots ce qui est en
08:57elle cette vocation d'écrivaine et son désir le plus profond, à savoir de dédier sa vie à
09:04l'écriture et à l'esprit. Merci à tous et bonne lecture.

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