• il y a 19 heures
Remi Babinet, co-fondateur de l’agence de publicité BETC, pour la parution de son ouvrage Pas de publicité, merci (JBE Books, novembre 2024).

Réécouter : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-interview-de-9h20/l-itw-de-9h20-du-lundi-02-decembre-2024-8404834

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Transcription
00:00Et Léa, ce matin, vous recevez un publicitaire !
00:09Oui, considéré même comme une légende de la pub, bonjour Rémi Babinet !
00:14Bonjour !
00:15Bienvenue sur Inter, vous figurez dans le top 10 des meilleurs publicitaires de tous
00:18les temps.
00:19J'ai vu qu'il y avait un classement de tous les temps ! Classement du magazine Forbes,
00:23vous êtes rare dans les médias, vous avez fait une exception ce matin pour nous parler
00:26d'un livre, de votre livre, votre anthologie de la pub, on va y venir.
00:31Mais d'abord, si vous étiez un animal, un écrivain, une marque et une décennie, vous
00:37seriez qui, vous seriez quoi ? Alors d'abord, un écrivain ?
00:39Un écrivain, je dirais Malcolm Lorry, simplement parce que je l'ai lu très jeune et j'ai
00:47fait un voyage après, au fil du livre, j'ai passé six mois au Mexique après ce livre.
00:53Un animal ?
00:55Un animal, le guépard, un peu rapide, assez rapide, mais très tranquille, ça ronronne
01:03aussi, et puis j'ai deux petits chats à la maison qui ressemblent à des guépards.
01:06Un guépard, je pensais que vous alliez choisir la carpe, parce que votre grand-mère vous
01:11appelait la carpe, tellement vous étiez mutique, tellement vous aviez peur de parler, vous
01:15racontez que vous n'avez rien d'un grand communicant, que quand on vous invite pour
01:20un partipe à un jury, ou à une émission de télé, ou à un dîner avec des gens importants,
01:25ça vous donne des angoisses et des sueurs froides, et c'est très loin de l'image qu'on
01:29se fait du communicant très à l'aise.
01:31Alors, je me suis un peu guéri depuis, mais c'est vrai que ma grand-mère me surnommait
01:35la carpe quand j'habitais avec elle pendant un an, et j'ai progressé quand même, mais
01:40je n'ai jamais été friand, c'est vrai, de ces grands raouts et de ces grandes prises
01:44de parole et tout.
01:45Mais là, je suis ravi d'être là.
01:47Une marque ?
01:48Une marque ?
01:49Si vous étiez une marque ?
01:50Moi, je dirais Patogas, c'est la marque un peu de notre enfance, on faisait beaucoup
01:54de randonnées avec mes parents, et donc on mettait des Patogas, et j'étais loin d'imaginer
01:59que c'était une marque en fait, je l'ai découvert après, pour moi c'était vraiment
02:03des chaussures comme ça, c'était l'équivalent de chaussures en fait.
02:08Et une décennie ? Si vous étiez une décennie ?
02:10Une décennie, honnêtement, je suis curieux de celle qui va s'ouvrir là, vraiment très
02:17curieux, très inquiet, mais j'ai l'impression sans doute illusoire qu'on n'a jamais été
02:26autant au bord d'autant d'inconnus, disons.
02:30Très curieux, très inquiet, aussi pour votre métier, parce que c'est vrai que quand
02:33on parcourt votre livre passionnant sur l'histoire de la pub, on voit arriver au bout l'intelligence
02:39artificielle.
02:40Est-ce qu'un jour le robot, est-ce qu'un jour Chats GPT pourra faire une campagne de
02:44pub, un slogan de pub meilleur que l'homme ?
02:47Alors c'est marrant parce que moi, l'intelligence artificielle, ça ne m'inquiète pas.
02:50Quand on est publicitaire, on a côtoyé plein de révolutions techniques, un peu comme tout
02:58le monde d'ailleurs, mais particulièrement quand on est dans la communication, on a eu
03:02la radio, la télé, enfin tout.
03:04Et du coup, ça c'est une de… On a eu Internet, l'IA pour moi c'est Internet+++, mais je
03:12ne suis pas inquiet.
03:13Je suis inquiet des gens qui confondent intelligence artificielle avec intelligence.
03:18C'est un outil de plus et on va jouer avec.
03:21Voilà, il faut savoir ce qu'on utilise.
03:24C'est tout.
03:25C'est un simulacre d'intelligence avec lequel on peut rigoler.
03:30Rémi Bavinet, vous êtes le co-fondateur et le président de BETC qui a 30 ans cette
03:35année.
03:36Vous avez été sacré agence de publicité la plus créative du monde cette année par
03:39le classement de référence internationale Wark.
03:41Les bébés nageurs déviants, les spots élégants d'Air France, les pubs Petit Bateau où
03:46vous donnez l'âge des mannequins en mois, Christophe à 232 mois par exemple, ça c'est
03:53vous.
03:54Les jeux de mots pour les produits Monoprix, c'est vous également.
03:56Et vous publiez donc ce livre de plus de 1000 pages avec près de 900 photos aux éditions
04:02JBE.
04:03C'est d'ailleurs plus qu'un livre, c'est un objet.
04:06C'est un objet, petit par sa taille, gros, orange, petit livre orange, petit gros livre
04:11orange, dont le titre est « Pas de publicité merci », où l'on picore, où l'on lit
04:19l'histoire de la culture pop, l'histoire de la publicité avec les grandes campagnes
04:23de pubs qui nous ont marquées et ce qu'elles disaient de la société.
04:26Et puis il y a un bandeau évidemment de pubs autour du livre « Il vous a vendu de l'eau,
04:32des voitures, des yaourts, des slips, maintenant il veut vous vendre son bouquin ».
04:35C'est vous qui l'avez trouvé ?
04:37Oui, en fait, il y a des rédacteurs de l'agence qui ont eu la gentillesse de travailler là-dessus.
04:41On s'est bien amusés à faire la publicité d'un livre dont le titre n'était pas de
04:46publicité merci.
04:47C'était un peu, on avait les fils qui se touchaient, mais c'était drôle.
04:51Vous racontez des choses sur vous, et notamment que vous écrivez, comme vous, comme toi lecteur.
04:57Ça me saoule aussi la publicité, toutes ces affiches, tous ces stickers dans les rôles
05:00d'immeubles et dans les boîtes aux lettres, quand on était enfant.
05:03Si vous choisissez le boulot de publicitaire, une bonne partie de votre boulot va consister
05:08à devoir défendre votre métier.
05:10Pourquoi la publicité a-t-elle si mauvaise réputation ?
05:13Je pense que d'abord, elle envahit tous les espaces, donc il y a une question d'envahissement.
05:20Il faut savoir que cette critique, elle date pas d'aujourd'hui.
05:23J'ai retrouvé des textes du Moyen-Âge avec des écrivains qui se plaignaient, des enseignes
05:29dans les rues, des sangliers noirs et des cygnes bleus, et ils décrivaient simplement
05:34les enseignes des magasins dans la rue.
05:36Donc en fait, ce sujet-là, il est constant.
05:39Par contre, je suis d'accord pour dire qu'on a passé un cap, vu que notre espace se limite
05:46un peu à notre petit téléphone, donc c'est un petit espace dans lequel notre vie est
05:49rentrée.
05:50La pub prend énormément de place dans ce petit espace, donc ça fait beaucoup.
05:56Et moi, c'est vrai que je suis comme les gens.
05:58J'imagine que je suis comme vous.
06:00Ça me saoule, il y en a trop, et elle n'est pas forcément réjouissante, de qualité.
06:08Et quand on a créé cette agence, on ne réussit pas tous les jours, honnêtement, mais c'était
06:14aussi pour faire mentir ce destin de la pub d'être détestée, d'être évitée, d'être
06:20zappée.
06:21De faire des trucs un peu durables, un peu marrants, un peu sensés.
06:26Voilà, c'est un challenge.
06:28Oui.
06:29La perte de sens.
06:30D'ailleurs, vous dites que la pub, ça entraîne la consommation parce qu'on est dans une société
06:33qui est vide de sens et que ça permet de réenchanter un petit peu la vie.
06:38C'est en tout cas votre manière à vous d'expliquer que ce métier a du sens.
06:42D'ailleurs, vous parlez d'un métier créatif.
06:45Vous dites oui, c'est culturel.
06:46Les snobs qui disent que la pub, ça n'est pas un objet culturel.
06:51Ça vous énerve ?
06:52Moi, j'ai appris d'abord à aimer la publicité.
06:55J'étais dans un milieu, disons, publiphobe.
06:59Mon père était universitaire, ma mère libraire.
07:01Oui, vous dites que c'était impensable.
07:03C'était assez impensable.
07:04La littérature, oui.
07:05Les mathématiques, oui.
07:06Les arts, oui.
07:07Le commerce, non.
07:08La publicité, n'en parlons pas pour vos parents.
07:09Voilà, c'était un peu ça.
07:10Et du coup, je suis bien placé pour la défendre finalement parce que j'ai vraiment basculé
07:14dans un autre monde.
07:17Et finalement, ce monde, quoi qu'on dise, c'est peut-être un problème, mais cette
07:24société de consommation, c'est une nouvelle définition de la société.
07:30Avant, il y avait des sociétés religieuses.
07:32Ensuite, il y a eu des grands idéaux.
07:34Il y a eu le communisme.
07:35Maintenant, on est dans une société de consommation.
07:37Donc, on aime ou on n'aime pas.
07:38Mais à l'intérieur de cette société, il faut arriver à tirer son épingle du jeu,
07:43à faire circuler du sens, à dire des choses aux gens, quand même.
07:48Et d'ailleurs, c'est ça qui est intéressant dans votre livre qu'on picore, je dis.
07:52C'est marrant parce qu'on retrouve toute notre enfance et toutes ces campagnes de pubs.
07:56C'est que vous n'évitez aucune polémique.
07:57Vous citez notamment Virginie Despentes, l'extrait de Vernon Subutex où elle se moque de vos
08:03campagnes de pubs pour monoprire en disant « tant d'intelligence dans un bureau pour
08:07pondre des slogans aussi nasses ».
08:10Vous citez Naomi Klein, c'est aussi très référencé, c'est un livre qui explique
08:14la société et qui veut dire quelque chose.
08:16En fait, moi, ce que j'ai découvert, et puis c'est comme ça qu'on pratique l'agence,
08:19c'est qu'on est au cœur de la société, on fait travailler des artistes, on a des
08:24grands commerçants, des grandes industries qui nous balancent leurs problèmes.
08:28On est obligé de considérer des problèmes très, très, très différents.
08:33Tous les jours, j'ai un problème différent à traiter et je vais le traiter de manière
08:37différente à chaque fois, avec des gens différents.
08:40Et des gens, alors ça c'est extraordinaire pour moi, une agence de publicité aujourd'hui,
08:46ça branche des gens qui en général ne sont pas branchés ensemble.
08:50On peut parler art à un commerçant, on peut parler commerce à un artiste et il faut qu'on
08:56arrive à trouver quelque chose d'intéressant au milieu de tout ça.
08:59Vous débutez votre carrière chez BDDP, une agence montante dans les années 80, c'est
09:02là que vous apprenez votre métier.
09:03Vous évoquez une des pubs mythiques de cette agence dans les années 80, en 88, pour Virgin
09:08Megastore, qui mettait à l'honneur un mannequin de 130 kg, Anne Zemberland, qui s'est battue
09:12toute sa vie contre le formatage de l'idée des femmes.
09:15Elle disait « il a fallu la pub Megastore pour qu'on s'aperçoive qu'une femme
09:18pouvait être grosse et être belle ». Ça c'est un des exemples que vous donnez.
09:22Il y a aussi la pub McDo où il y a 15 ans, vous dites, avant que les marques fassent
09:28de l'inclusif, maintenant c'est devenu, tout le monde le fait, mais vous dites « McDo
09:32menez comme vous êtes », je crois, où vous parlez de ce gamin qui vient raconter
09:36à son père autour d'un McDo qu'il est homosexuel.
09:39C'est une prise de risque.
09:40Oui, parce qu'en fait, les marques, c'est comme les politiques, où elles sont obligées
09:44de prendre position.
09:45Alors on peut se dire, le fond du fond, c'est qu'elles sont toujours opportunistes.
09:50Elles peuvent aller dans un sens ou aller dans un autre.
09:54Par exemple, quand on pense à une marque comme Barbie, elle a promu le formatage absolu de
10:00la femme ou de la forme féminine idéale, et ensuite elle a été inclusive, etc.
10:07Elle a eu plein de degrés.
10:08Mais c'est intéressant quand même que des marques puissent prendre position dans un
10:12débat qui traverse la société.
10:14Et c'est vrai qu'Anne Zemberland, moi c'est une des premières campagnes que j'ai faites,
10:19et j'ai adoré toutes ces campagnes-là avec elle, parce qu'on avait l'impression qu'on
10:25faisait aussi quelque chose de très très très puissant, qui était la liberté pour
10:30chacun d'être beau à sa manière.
10:33Et elle, c'est vrai qu'elle faisait 130 kilos.
10:34Et on a fait des images que je trouve, quand je les regarde, je les trouve toujours aussi
10:38belles.
10:39Vous diriez aujourd'hui que la pub véhicule moins de clichés sexistes, ça c'est évident
10:44que les choses ont changé.
10:45Mais d'ailleurs, vous regrettez, vous dites c'est dommage, on n'utilise plus les stéréotypes.
10:49Longtemps, ça a été un terrain de jeu et un plaisir de jouer avec les stéréotypes.
10:53Vous parlez notamment de la pub Wanderbra, on ne pourrait plus la refaire avec Adriana
10:57Carambeu qui nous montre ses seins dans ce soutien-gorge galbant.
11:01C'est une des campagnes en anglais, vous la citez dans le livre, « I don't cook,
11:07who cares ? ». Traduction, je ne sais pas cuisiner mais on s'en fiche vu la poitrine
11:10que j'ai.
11:11Tout à fait.
11:12Donc ça, c'est des choses qu'on ne pourrait plus faire et honnêtement, je trouve ça
11:18bien en fait, là qu'on ne puisse plus faire ça facilement.
11:22Par contre, le fait de ne jamais pouvoir jouer avec aucun cliché est un peu désastreux.
11:27On tourne cette fois sa langue dans sa bouche avant de dire quoi que ce soit dans les bureaux
11:33et dans les campagnes.
11:34Et ça, ce n'est pas bon pour la créativité.
11:37En fait, la créativité, c'est aussi une manière d'être simple, d'être gay,
11:41d'être frais et de ne pas penser à ce qu'on dit forcément.
11:45Aujourd'hui, il y a une censure forcément dans les bureaux, les agences.
11:49Ah non, ça, on ne peut pas y aller, ça, ça va crisper et donc ça bride la créativité,
11:54c'est ce que vous dites.
11:55Tout à fait.
11:56Bon, le gros carton, ce qui vous a lancé, c'est les pubs, quand même, pour le coup
12:00Nicolas, vous vous en souvenez et tous nos éditeurs s'en souviennent, les bébés nageurs
12:03d'Evian.
12:04Et ça, l'immense carton de ces bébés que vous avez envoyés dans l'eau afin de nous
12:08faire des natations synchronisées pour la marque Evian, ça, ça a été votre coup
12:14de maître ?
12:15Oui, alors c'est marrant cette histoire-là parce que d'abord, les bébés, ça marche
12:20toujours.
12:21Je dis ça, mais en fait, on a fait mieux que ça, je pense.
12:25Mais c'est un mélange de raison et d'émotion.
12:28C'est toujours ça, en fait, la bonne pub, c'est qu'on a réfléchi, on a vu ce que
12:32les gens aimaient, etc.
12:33Et en même temps, on se lâche et c'est émouvant.
12:35En fait, Evian, c'est les maternités, c'est l'eau qu'on mettait dans le biberon
12:42des bébés.
12:43En fait, il y a un fond très, très puissant qu'on a tous en nous et là-dessus, on balance
12:49les bébés.
12:50Mais ce qui est intéressant, c'est que vous racontez dans le bouquin que cette pub a été
12:53précédée d'une pub qui a beaucoup moins marché, c'était les pépés et les mamies
12:56nageuses.
12:57Et donc, vous racontez quand même que la cure de jouvence, les années passent, les
13:00époques passent et c'est vrai qu'il y a moins la jeune blonde aux yeux bleus dans
13:05les pubs, beaucoup, beaucoup moins même, mais la cure de jouvence, la jeunesse reste
13:09quand même le truc qui fait mal.
13:11Un bébé par rapport à un vieux, il n'y a pas photo en publicité.
13:15Moi, ça me désole, mais c'est comme ça.
13:19Et c'est vrai qu'en plus, ces vieux-là, c'étaient des vieux de plus de 80 ans, des
13:23champions olympiques magnifiques qui jouaient comme les bébés et tout, mais ça a fait
13:28flop.
13:29Mais non, en fait, la jeunesse devient un tel culte.
13:35Nous, on est dans une époque jeuniste.
13:39Plus on vieillit vieux, plus on est jeuniste et plus on parle de jeunesse à la place des
13:46jeunes.
13:47Et c'est l'idée d'ailleurs de la pub Petit Bateau ensuite, quand l'âge des mannequins
13:50est indiqué par mois.
13:51Chantal a 241 mois, soit 20 ans, Robert a 888 mois, soit 74 ans, mais Robert, il a 74
13:57ans, il a 888 mois, mais il peut rester jeune.
14:00Et puis, je pourrais vous faire parler, parce que honnêtement, moi, ça m'a passionnée,
14:04je pourrais vous faire parler de plein de campagnes qui racontent aussi ce qu'on est.
14:07Je voudrais qu'on écoute le spot de présentation, parce que Air France, ça, c'était un noeud
14:11de votre gros carton.
14:12Air France, faire du ciel le plus bel endroit de la Terre, l'affiche qui associe un talon
14:16aiguille à la ligne aérienne, l'image de la France, l'esprit français, l'élégance
14:20et cette campagne qui nous raconte les consignes de sécurité.
14:37L'idée pour vous, c'était de casser le côté anxiogène des mesures de sécurité
14:52aigrénées au moment du décollage pour en faire un moment chic, un moment d'élégance.
14:55Tout à fait.
14:56Et puis, c'était aussi, moi, j'ai toujours vu Air France comme une ambassade de France
15:00à sa manière.
15:01Je ne voulais pas véhiculer des valeurs un peu conservatrices, un peu empoulées, parce
15:10que la France, elle est facilement caricaturée à l'étranger, dans une version un peu vieille
15:15et immuable d'elle-même.
15:17Donc, on voulait rajouter un peu de cet esprit français, cette espèce de French touch qu'on
15:23a du mal encore à promouvoir.
15:27Et moi, je me suis aussi servi de la compagnie pour porter ça.
15:31Rémi Babinet, est-ce qu'il faut être pas trop intelligent pour être un bon publicitaire ?
15:35Je vous pose la question, parce que c'est la question qu'a posée Anne Sinclair à Jacques
15:38Seguela il y a 40 ans.
15:39Écoutez.
15:40Vous dites un type trop intelligent, c'est un mauvais publicitaire.
15:43Alors moi, je voudrais savoir, est-ce que vous êtes intelligent ou est-ce que vous
15:45êtes un bon publicitaire ?
15:46Je crois que je suis passionné.
15:47Vous vous en tirez, là ?
15:49Non, non, je ne crois pas que je sois intelligent.
15:51Je crois que je suis passionné.
15:52C'est ma vraie qualité.
15:53Et la publicité ne demande pas d'en raisonner les choses.
15:56Elle demande de les lâcher avec son cœur, avec ses tripes.
16:00Voilà.
16:01D'être très instinctif et de se laisser aller.
16:03Pas de raisonner.
16:04Et donc, c'est un peu inquiétant, quand même.
16:06Dans la création.
16:07Parce que le marketing est plein, et justement, c'est la rigueur imaginative la définition
16:11de notre métier.
16:12C'est cette rencontre d'hommes de recherche qui sont très appliqués, très rigoureux,
16:16et puis de nous les créatifs qui nous laissons aller quand nous avons été bien mal axés,
16:20bien préparés.
16:21Il faut être plus instinctif qu'intelligent quand on est publicitaire, il a raison.
16:25Je pense qu'il faut se lâcher complètement à un moment.
16:29Mais en fait, c'est un métier, on ne l'imagine pas comme ça, mais c'est un métier d'écoute.
16:33Au sens où, si on ne comprend pas ce qui se passe, si on ne comprend pas les gens,
16:36si on ne comprend pas la situation, même la situation du monde avec toutes ces strates,
16:42on a peu de chances de faire un truc, alors on peut faire un truc gai, frais, etc., mais
16:47on a peu de chances de toucher.
16:48Les Impromptus, pour terminer, vous répondez rapidement si c'est possible.
16:53Paris ou Pantin ?
16:54Pantin, vous avez déménagé vos bureaux au BETC il y a huit ans.
16:56Le Grand Paris, donc Paris plus Pantin.
16:59Vous avez fait un espace ouvert, vert, à Pantin.
17:03On est loin de 99 francs et de l'univers de la pub raconté par Becbédé à l'époque,
17:07sous coq et plein de cynisme.
17:08Comment on lutte contre le cynisme quand on est publicitaire ?
17:12Comment on ne devient pas un cynique ?
17:13Ce n'est pas facile parce qu'on est caricaturé d'emblée, et c'est vrai que Becbédé a
17:17beaucoup aidé à cette caricature.
17:19J'ai trouvé ça très drôle aussi, je me le revois et je suis content.
17:22Mais on est tous au cynique parce qu'on n'a pas le choix.
17:27On est au milieu de tous ces courants qui nous traversent et qu'on doit prendre en
17:32compte.
17:33Donc il n'y a pas de place pour le cynisme.
17:34Roland Barthes ou Guy Debord ?
17:36Je dirais Guy Debord.
17:38Georges Pérec ou Michel Houellebecq ?
17:40Tous ces gens-là sont cités dans le livre.
17:42Oui, Georges Pérec.
17:43Votre meilleure campagne de tous les temps ?
17:46De vous, la vôtre, votre plus grande fierté ?
17:49Moi, j'ai fait une campagne pour Lacoste d'un style français autour du French Kiss.
17:57Et j'ai fait trois films.
17:59Je pense que c'est ces trois films dont je suis le plus fier.
18:02Et la pire ? Votre honte ?
18:03J'en ai fait quand même pas mal.
18:06Franchement.
18:07Parce qu'on a un tel rythme qu'on n'est pas capable de faire très très fort tout
18:14le temps malheureusement.
18:15Est-ce que vous auriez aimé trouver « Parce que je le vaux bien » ?
18:19Non, pas trop.
18:20Trump est-il une marque comme une autre ? Vous en parlez longuement de la marque Trump.
18:24C'est une marque extraordinaire et ça explique d'ailleurs la victoire de Trump parce que
18:30c'est de ce genre de marque totalement décomplexée, voire ridicule, voire dans lesquelles tout
18:36le monde peut se projeter parce que tout le monde a un problème, tout le monde a peur
18:39d'être ridicule.
18:41Donc il a aspiré plein de gens qui n'avaient aucune raison de se reconnaître en lui dans
18:47cette marque-là.
18:49Le chapitre sur la marque Trump est très intéressant.
18:53Instagram ou X ou pas de réseaux sociaux du tout ?
18:56Instagram depuis aujourd'hui.
18:59Comment ? Pardon ? Vous avez créé votre compte ce matin ?
19:02Voilà, ce matin.
19:03C'est pas vrai ?
19:04Si.
19:05Pourquoi ?
19:06Pour le livre.
19:07Parce que je suis content de ce livre.
19:09Je me suis dit tiens…
19:10Alors que vous étiez non réseaux sociaux avant ?
19:12Non réseaux sociaux.
19:13Pour terminer, liberté, égalité, fraternité, vous choisissez quoi ?
19:15Les trois, mon général.
19:17Pas de publicité, merci de Rémi Babinet qui est considéré… Sonia Devilleur me disait
19:23« tu te rends pas compte, à New York c'est une légende le mec Rémi Babinet, on dit Rémi
19:27Babinet à New York, laisse tomber ». C'est un livre orange, vous le retrouverez en librairie.
19:31Il est petit, gros, orange, pas de publicité, merci Rémi Babinet et belle journée à vous.
19:36Merci beaucoup.
19:37Merci Léa.

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