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La magistrate et secrétaire générale du syndicat Unite-Magistrat FO, Béatrice Brugère, était l’invitée de La Matinale, ce lundi 25 novembre, sur CNEWS. Elle s’est exprimée sur la violence subie par les agents du secteur judiciaire : «Il y a plusieurs formes de menaces, celles quotidiennes qui peut s’exercer lors d’une audience ou en cabinet, et aussi quelque chose d’organisé, où l’on s’attaque à l’État de droit».

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Transcription
00:00Oui, vous avez tout à fait raison. En fait, la violence contre les magistrats, mais pas que les magistrats, d'ailleurs, on pourrait dire que c'est toute la chaîne pénale.
00:06On pourrait partir police, gendarmerie, greffier, juge d'instruction, magistrat du siège, et après, administration pénitentiaire, puisque vous avez aussi eu pas mal d'articles,
00:17vous savez, aussi sur des répressions, sur des gardiens de prison qui voient leurs voitures qui sont brûlées, qui sont menacées, etc.
00:24Donc, c'est toute la chaîne, aujourd'hui, qui est sous pression et sous menace. Et vous avez raison, la situation des magistrats est très peu évoquée.
00:31Ou quand elle est évoquée, c'est un peu quand il y a un fait un peu spectaculaire qui est très grave, comme celui que vous venez de dire, c'est-à-dire une tentative...
00:40Alors, l'affaire est en cours, je ne connais pas le mobile de cette affaire, mais une tentative quand même d'agression très, très violente contre un haut magistrat.
00:48Et le fait que ça soit adoué n'est pas anodin, parce qu'on est sur un secteur d'une grande criminalité, mais on est aussi sur un secteur qu'on appelle une GIR,
00:58c'est-à-dire une juridiction interrégionale spécialisée. Vous en avez 8 en France, vous avez Marseille, Rennes, Lyon, Lille, et il y en a d'autres.
01:06Ce sont des endroits où vous avez des magistrats spécialisés qui luttent contre la criminalité organisée. Et donc, c'est un sujet qui est très peu évoqué,
01:17qui est très peu pris en compte aussi, je le dis, par notre ministère de la Justice. Parce que, vous voyez, je me souvenais de mémoire que la dernière fois que ce sujet a été évoqué,
01:25c'était en 2016. À l'époque, c'était Jean-Jacques Hurvoas, et on avait déjà eu une tentative d'assassinat sur un magistrat dans la région de Lille, et beaucoup d'autres agressions comme ça.
01:37C'est à quel moment de la procédure que les menaces s'exercent ? Qu'un trafiquant de drogue ou un braqueur vous disent, je ne sais pas, je vous menace ? Quelle forme prennent ces menaces ?
01:49Alors en fait, vous avez plusieurs sortes de menaces. Il n'y a pas de raison que la justice ne soit pas touchée comme tous les acteurs publics. Je pense au maire, je pense à l'éducation nationale,
02:00je pense évidemment à tous ceux qui représentent de l'autorité, police, gendarmerie. Il n'y a pas de raison que nous ne soyons pas menacés non plus à tous les stades.
02:08Et vous avez les menaces quotidiennes, c'est-à-dire la violence que l'on voit aujourd'hui, qui est un peu décomplexée, débridée, qui peut s'exercer tout simplement lors d'une audience,
02:16lors d'une audience en cabinet, juge des enfants, juge d'application des peines, etc. Et puis vous avez autre chose, c'est ce que là, vous avez évoqué tout à l'heure,
02:27c'est-à-dire quelque chose de plus organisé, où vous avez envie de vous attaquer à un magistrat, c'est-à-dire vous attaquer à l'état de droit et au fonctionnement même de la justice.
02:36Et là, il faut remettre ça dans un autre contexte, qui est celui de la montée de la criminité organisée et d'une deuxième menace sur laquelle on est aussi, qui est l'islamisme.
02:45Je rappelle quand même qu'on est en train d'évoquer le procès Paty et que c'était dans une forme un peu d'indifférence également que ce professeur d'histoire avait tiré la sonnette d'alarme.
02:57Moi, ce que je peux dire aujourd'hui, c'est que je ne pense qu'on n'a pas du tout pris la mesure de cette violence qui est en train de monter.
03:04Moi-même, j'ai des magistrats que je soutiens au sein de mon syndicat, qui font l'objet de menaces très graves.
03:10J'ai en tête aussi cette présidente de cour d'assises qui était venue se faire tirer quasiment à bout portant à son domicile il y a quelques années, qui présidait une cour d'assises.
03:20Il faudrait absolument aujourd'hui que le ministère fasse une évaluation réelle de cette menace, notamment suite à cet article qui est assez intéressant, parce que depuis 2016, il n'y a rien.
03:33– En préparant cette interview, vous dites que c'est un impensé pour le ministère de la justice ?
03:37– Je pense qu'on ne prend pas du tout la mesure. Et d'ailleurs, je vous donne un autre exemple, on a dans les salles d'audience et dans les tribunaux, une baisse de la sécurité.
03:46– Il y a de moins en moins de gendarmes.
03:48– Oui, vous pouvez, vous magistrat, sortir à minuit d'une salle d'audience, quasiment dans la même porte, en tout cas le même couloir que celui que vous avez condamné ou contre qui vous avez requis,
03:59voire prendre le même RER. Si vous voulez, il n'y a pas de pensée stratégique sur la sécurité des acteurs de la justice.
04:05– Que risquent ceux qui menacent ?
04:07– Alors là, si c'est une tentative de séquestration, on peut être… je ne connais pas le dossier, mais on est sur des infractions, j'allais dire, assez classiques.
04:17– On est quelqu'un qui, dans le bureau d'un juge d'instruction, menace de mort, si tu me condamnes, je te tue, qu'est-ce qu'il risque ?
04:24– Il risque une infraction pénale de menace de mort, mais le problème, si vous voulez, et c'est comme dans l'éducation nationale, et c'est comme sur d'autres profils d'acteurs…
04:32– Est-ce qu'il va aller en prison plus longtemps ?
04:34– Est-ce que, il faudrait faire, c'est pour ça que je vous parle d'une évaluation, est-ce que les magistrats vont systématiquement signaler les choses,
04:40ou est-ce qu'eux-mêmes, ils sont dans cette idée, bon, c'est le risque du métier ?
04:44Et je pense qu'il y a beaucoup de magistrats qui ne prennent pas ce temps d'aller nécessairement le signaler,
04:51parce qu'ils n'ont pas le temps, parce qu'ils se disent, c'est le risque du métier.
04:53Moi, je pense qu'il faut être extrêmement sensible à ça, parce qu'on est sur une mutation, notamment, et je terminerai par ça,
05:00non seulement une violence débridée, qui est souvent liée d'ailleurs à la prise de toxicomanie,
05:05mais un rajeunissement aussi des acteurs qui sont de plus en plus violents.

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