Vendredi 22 novembre 2024, SMART IMPACT reçoit Benjamin Fremaux (Président, Idex) , Roger Narboni (Concepteur lumière) et Isabelle Dennieau (Directrice du développement, Efficacity)
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00:00Bonjour, bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans ce Smart Impact spécial en direct du Forum des projets urbains, on est au Palais des Congrès ici à Paris.
00:19Dans cette émission, on va parler de l'éclairage de nos villes et de leur consommation d'énergie. Voilà pour nos grands thèmes, c'est parti, c'est Smart Impact.
00:30L'invité de ce Smart Impact depuis le Forum des projets urbains, c'est Roger Narboni, bonjour.
00:41Bonjour.
00:42Bienvenue, heureux de vous accueillir, vous êtes concepteur lumière, inventeur entre autres de ce qu'on appelle les SDAL, Schéma directeur d'aménagement lumière.
00:49Alors on va rentrer dans le vif du sujet, de quoi il s'agit ?
00:52Alors le Schéma directeur d'aménagement lumière, c'est des stratégies d'éclairage qui permettent d'anticiper sur la lumière nécessaire dans la ville, avec souvent des échéances de 3 ans, 5 ans, 10 ans, voire plus.
01:04Et donc de se poser des questions sur le futur de la lumière en ville et son évolution et sa mutation.
01:10De son évolution, de sa mutation, de sa place, de son omniprésence parfois, c'est un vrai enjeu, c'est un débat ?
01:18C'est un débat contesté aujourd'hui par rapport notamment à la préservation de la biodiversité, mais qui est en même temps nécessaire, parce qu'on a besoin de pouvoir faire la promotion des activités nocturnes, que ce soit le travail de nuit ou les loisirs.
01:30Mais bien sûr, il faut aussi préserver la biodiversité et puis aussi protéger le ciel nocturne.
01:35Donc on a ces enjeux qui sont parfois un peu contradictoires, mais qu'on essaye justement de solutionner en travaillant une stratégie et en essayant de répondre à tous ces enjeux qui sont parfois un peu différents.
01:47Avec ce chiffre, plus 94% de lumière artificielle est mise de la nuit en France depuis 1990, donc elle a doublé en 30 ans.
01:56Oui, on est entre 11 et 12 millions de points lumineux.
02:00Alors on parle souvent de pollution lumineuse, c'est peut-être pas un mot que vous employez ?
02:04Si, parce qu'aujourd'hui on sait que ça crée et ça génère une pollution.
02:09Moi, quand j'ai commencé ce métier, c'était en 1987, on était des magiciens, on apportait du rêve, de la beauté, du décor dans la ville.
02:17Et puis petit à petit, il y a eu cette prise de conscience, mais aussi cette connaissance par les scientifiques de la pollution du ciel, puis de la pollution des espèces animales et végétales.
02:27Aujourd'hui, on connaît aussi bien les méfaits de la lumière artificielle que la nécessaire obligation de pouvoir encourager les liens nocturnes, la vie nocturne et la qualité de vie nocturne.
02:41Ce que vous proposez aux schémas directeurs d'aménagement lumière, comment ils intègrent ces enjeux aujourd'hui ?
02:47On crée ce qu'on appelle des trames noires, une méthodologie qu'on a mise au point depuis 2011.
02:52L'idée, c'est vraiment de faire une balance entre les activités, les usages nocturnes des humains et la préservation de la biodiversité en, si possible, restaurant l'obscurité ou en la préservant ou en l'instituant quand elle n'existe pas et qu'on en a besoin.
03:08C'est tout notre travail de concepteur de lumière et notre travail stratégique de trouver ces équilibres et de permettre qu'il y ait une très bonne cohabitation entre humains et vivants.
03:17On peut prendre un exemple qui va nous faire voyager jusqu'en Uruguay puisqu'on est à Montevideo. Vous y avez déployé vos schémas de lumière et ces trames noires. Donnez-nous des détails.
03:31Tout est parti de la volonté du service d'éclairage public de Montevideo de rénover la totalité de ses appareils d'éclairage public en LED et de le faire de manière massive puisque quasiment 80 à 90% des points lumineux sont en LED aujourd'hui.
03:46Alors que si on voit en France, on est entre 20 et 30% de rénovation en LED des luminaires d'éclairage public.
03:53On s'est posé des questions sur l'image nocturne de Montevideo qui est beaucoup tournée vers le tourisme qui est en bord du fleuve du Rio de la Plata.
04:01Mais aussi l'identité, les quartiers, l'inclusivité, la manière de faire participer les habitants, la concertation.
04:07Et puis on a effectivement développé une trame noire de manière à préserver aussi la biodiversité que ce soit au bord du fleuve ou à l'intérieur dans les parties rurales de la ville.
04:19Les parties rurales de la ville, ça donne envie de visiter Montevideo.
04:22Oui, c'est une ville qui est étonnante, qui fait 1,3 millions d'habitants à peu près et qui a une grande partie de son territoire qui est rurale avec des hameaux et une partie beaucoup plus dense urbaine.
04:31Et donc pour bien comprendre ces trames noires, c'est-à-dire que dans ces espaces où vous identifiez une biodiversité assez riche et à protéger, vous faites quoi ?
04:41Vous diminuez la lumière ? Vous la supprimez complètement par endroit ?
04:45Ça peut être les deux. Il y a aussi tout un travail sur les spectres des sources LED parce qu'on a beaucoup appris sur les espèces animales.
04:51Il y a des espèces animales qui sont très sensibles à certaines longueurs d'onde, par exemple le bleu, le violet, l'ultraviolet, et qui sont beaucoup moins impactées par l'orange ou le rouge ou le jaune orangé.
05:02Et donc en fonction des espèces animales, parce que chaque espèce animale est différente selon que c'est des chauves-souris, des batraciens, des oiseaux, des mammifères nocturnes,
05:11on va pouvoir adapter les spectres, on va pouvoir effectivement abaisser la lumière à certaines parties de la nuit, au début ou en fin de nuit quand il y a une activité animale, et selon les saisons aussi.
05:21Et puis on peut effectivement éteindre, et des fois c'est ce qu'on demande parce qu'il n'y a pas d'activité humaine, et donc il n'y a pas besoin d'éclairage, et donc on peut les éteindre.
05:31Donc si je comprends bien, ça commence par une espèce de recensement de la biodiversité avant de trouver et d'inventer les bonnes solutions ?
05:38Tout à fait, on a soit des inventaires qui existent déjà, en tout cas en France on a déjà pas mal d'inventaires qui existent, qui sont faits, soit on travaille avec des biologistes et des écologues dès le début de la mission,
05:47et on a ce travail effectivement de repérage des espèces animales et quels types d'espèces animales puisqu'elles sont toutes différentes et elles n'ont pas la même activité nocturne tout au long de l'année.
05:56Alors on a parlé de Montevideo, il y a des villes françaises qui sont dans des démarches similaires, que vous accompagnez ou que vous prévoyez d'accompagner ?
06:04Oui parce qu'on a commencé, comme je le disais, dès 2011 avec la ville de Rennes, la première trame noire en France c'était pour la ville de Rennes,
06:10depuis on a fait un certain nombre d'études, on a travaillé en France à Annecy, on a travaillé à Pleine Commune, donc en Seine-Saint-Denis,
06:18et on travaille aussi beaucoup à l'étranger, on a fait des trames noires en Chine, ça peut paraître paradoxal mais la Chine qui a signé le plan climat,
06:24elle est aussi demandeuse de ce travail contre la pollution lumineuse et pour la préservation de la biodiversité,
06:30et en Suisse on a travaillé à Lausanne, à Fribourg, autour de Genève, donc les Suisses sont aussi très promoteurs de ces trames noires.
06:37Est-ce que c'est forcément un investissement important ? Vous parliez de Montevideo qui prend la décision de remplacer 85% de son éclairage urbain par de l'aide.
06:48Alors c'est un investissement important mais il y a un retour sur investissement colossal et c'est ça qui devrait motiver les communes françaises,
06:54c'est qu'avec les économies d'énergie qu'on fait en l'aide, on peut diviser par deux, on peut même être des fois à 80% d'économies d'énergie dans certains cas,
07:01et donc en quelques années on a le retour sur investissement quand on sait quel est le prix de l'électricité aujourd'hui,
07:07donc c'est sûr que c'est un investissement, mais c'est un investissement productif et qui ramène beaucoup d'argent dans la commune.
07:12Est-ce que ça c'est l'argument qui pèse plus que l'argument de l'impact environnemental, de la lutte contre la pollution ?
07:18Vous voyez ce que je veux dire quand vous arrivez pour convaincre un élu ou un conseil municipal.
07:22Quand on est dans des petites communes rurales, puisqu'on travaille beaucoup dans les communes rurales, on a travaillé dans le parc naturel régional de l'Aubrac,
07:28les communes sont très intéressées par la biodiversité, par l'environnement naturel, mais bien sûr la question de l'économie d'énergie elle est aussi essentielle.
07:35Alors elle n'est pas toujours une économie financière, parce que ce n'est pas toujours aussi simple, parce que des fois il y a des abonnements, des forfaits,
07:43qui fait que quand vous réduisez la consommation énergétique vous n'avez pas forcément gagné beaucoup d'argent,
07:48mais par contre à terme oui c'est quelque chose qui est de toute manière une obligation,
07:53puisque plus aucune source n'est produite aujourd'hui en France et dans le monde, on est obligé de passer en LED, il n'y a pas le choix,
08:00toutes les autres sources soit sont interdites, notamment par la communauté européenne, comme les lampes à décharge,
08:05soit elles ne sont plus produites ni fabriquées, donc de toute manière on fait le changement en LED, on a une obligation.
08:12Et d'ailleurs j'aurais pu commencer par là, le comparatif entre nos modes d'éclairage classiques et le LED, c'est quoi par exemple en consommation d'énergie,
08:25et peut-être aussi ça se rejoint en impact sur la biodiversité s'il y a des différences ?
08:32Alors aujourd'hui la LED c'est la meilleure source en termes d'efficacité énergétique,
08:37c'est-à-dire qu'elle produit le plus de lumière possible par rapport au Watt consommé,
08:41si on prend l'exemple par rapport au sodium qui est la lumière orangée que tout le monde connaît,
08:45on était à 110-120 lumens par Watt, avec les LED on est déjà à 140 lumens par Watt,
08:50donc le lumen c'est vraiment notre quantité de lumière produite par une source,
08:54et donc on a déjà cette performance énergétique colossale, on a des spectres qu'on peut choisir,
09:00et donc ça c'est fondamental alors que le sodium, le spectre était déterminé par le sodium lui-même.
09:05Donc ça c'est ce que vous expliquez tout à l'heure, le spectre, c'est-à-dire les...
09:08Le nombre de rayonnements qu'émet la source, puisque une source LED peut émettre du blanc, du jaune, du orangé,
09:14on essaie de limiter le bleu, parce que c'est le bleu qui est dommageable à la fois pour la santé des humains,
09:19et à la fois pour les espèces animales, et puis surtout on a une qualité de lumière,
09:23parce que c'est une source qui est toute petite, qui n'est pas chaude,
09:26qui ne brûle pas comme pouvaient le faire les lampes à décharge,
09:29et qui nous permet aussi de créer des luminaires piétonniers, des candélabres,
09:33des mobiliers qui intègrent de la lumière sous un banc, dans une structure,
09:37de créer des espaces et des salons nocturnes par exemple, qui vont changer notre vie nocturne.
09:42Ça vous permet d'être plus précis dans ce que vous proposez vous comme concepteur lumière ?
09:47Aujourd'hui on met des LED partout, dans le fer à repasser, dans la cafetière, dans le thermos, on en met partout.
09:53Mais en ville on peut en mettre aussi dans les façades, dans les mobiliers, dans les structures,
09:58et puis surtout être très créatif au niveau du design des appareils d'éclairage.
10:02On a par exemple développé des lanternes portatives, toutes petites,
10:05que les gens peuvent emmener pour se substituer à l'éclairage public,
10:08permettre l'extinction de l'éclairage public,
10:10mais avoir quand même une indépendance, une liberté quand on a envie de se promener la nuit.
10:14Dans les solutions que vous proposez aux villes, est-ce qu'il faut mettre des capteurs par exemple,
10:21pour se dire dans tel quartier, si personne n'est en train de marcher dans la rue, pourquoi l'éclairer ?
10:27Ça peut être intéressant, ce n'est pas forcément systématique,
10:30parce que le capteur a quand même des nécessités de captation.
10:36Ce n'est pas toujours évident, par exemple si vous avez une rue avec plein d'intersections,
10:39et que vous avez des capteurs pour détecter les voitures,
10:41vous allez avoir de la difficulté parce qu'il faudra en mettre à chaque intersection.
10:44Même chose pour les piétons, des fois quand le piéton est sur le trottoir d'en face, c'est compliqué, etc.
10:48Donc bien sûr qu'à terme on peut imaginer qu'il y a des technologies qui vont nous permettre,
10:53notamment des caméras qui font de la détection de présence,
10:56et qui permettent de différencier une personne d'un gros chien,
10:59ou de quelqu'un qui passe par rapport à un animal ou un oiseau.
11:03Mais il y a aussi des possibilités de grader la lumière, de l'abaisser,
11:07et ça peut être fait en amont avec un centre de contrôle,
11:11il y a la possibilité d'éteindre en fonction de ce qui se passe,
11:13et puis aussi à la demande si les services de sécurité ont besoin d'éclairage,
11:17de remonter l'éclairage, parce qu'aujourd'hui il y a des centres de contrôle que les villes peuvent piloter,
11:21et donc elles peuvent le faire en fonction des besoins.
11:24Vous l'avez évoqué, mais très rapidement, je veux bien vous entendre un peu plus longuement là-dessus,
11:27sur la santé humaine, parce que là on a beaucoup parlé de biodiversité,
11:30et c'est très bien, mais les solutions que vous proposez finalement sont moins agressives pour nos yeux ?
11:36Alors il y a déjà le fait qu'on s'est rendu compte que l'éclairage artificiel à forte dose
11:41était dommageable pour le sommeil par exemple.
11:44Si vous avez de l'éclairage public qui rentre dans votre chambre,
11:47ça réduit vos capacités de sommeil, puisque ça fait de la production de mélatonine.
11:52Et on s'est rendu compte aussi que le bleu des LED n'était pas forcément bon pour nos yeux,
11:56et par exemple pour les enfants, on a interdit aujourd'hui d'avoir des LED qui émettent du rayonnement dans le bleu.
12:02Après il s'agit aussi de combiner ces éclairages avec les besoins et les usages.
12:08Donc on n'est pas obligé d'éclairer les villes toute la nuit,
12:11il y a des villes d'ailleurs qui éteignent entre 11h du soir et 5h du matin,
12:15de plus en plus, il y a près de 40% des communes moyennes qui commencent à éteindre,
12:19à la demande des habitants la plupart du temps,
12:21donc ça permet d'améliorer le sommeil et une meilleure qualité de vie.
12:25C'était la dernière question que j'avais prévue sur nos usages,
12:29parce qu'il y a ces impératifs biodiversité, santé, économie d'énergie,
12:34mais il y a aussi des impératifs de sécurité, de sentiment de sécurité, etc.
12:38Comment vous combinez les deux ?
12:40J'espère qu'on va pouvoir réenchanter la nuit,
12:43et justement redécouvrir l'obscurité avec du plaisir.
12:46Il y a beaucoup de fantasmes sur la question de l'obscurité,
12:49il y a aussi beaucoup d'idées reçues sur la sécurité et l'éclairage.
12:52C'est vrai que l'absence d'éclairage peut générer un sentiment d'insécurité,
12:55mais il y a beaucoup d'études qui ont montré que les gens préfèrent être dans l'ombre,
12:58et ne pas être sous le feu des projecteurs,
13:01parce qu'ils se ressentent beaucoup mieux en étant dans la pénombre et en étant observateurs.
13:05Et donc je pense qu'on doit pouvoir notamment éduquer les enfants sur cette question de l'obscurité,
13:10qui aujourd'hui pour eux est peuplée de monstres et de tout un tas de choses terribles,
13:15mais dans d'autres civilisations, comme en Asie où je travaille beaucoup,
13:18le noir et l'obscurité c'est le bien, et la lumière c'est le mal.
13:22Voilà, on termine sur cette belle pensée,
13:25et on pense aux histoires qu'on racontait à nos enfants sans leur faire peur, j'espère.
13:29Merci beaucoup Eugène Harbonnier, bon forum des projets urbains.
13:33On passe tout de suite à notre débat, on parle, et ça se rejoint,
13:36maîtrise des consommations d'énergie en ville.
13:38Le débat de Smart Impact ici depuis le forum des projets urbains au Palais des Congrès à Paris.
13:52On parle maîtrise des consommations d'énergie en ville avec Isabelle Degnaud, bonjour.
13:58Bonjour.
13:59Bienvenue, vous êtes directrice du développement chez Efficacity, et Benjamin Frémaux, bonjour.
14:03Bonjour.
14:04Bienvenue à vous aussi, le président du groupe IDEX.
14:06IDEX, on commence par des questions toutes simples de présentation Efficacity en quelques mots.
14:11Oui, écoutez, Efficacity c'est un institut de recherche et développement et d'innovation.
14:16Il a été créé par l'État il y a 10 ans, on va bientôt fêter notre anniversaire.
14:21Et en fait, nous sommes précisément dédiés à la transition énergétique des villes,
14:27donc à la réduction des consommations énergétiques.
14:31Pourquoi on a été créé ?
14:33Parce qu'en fait, les villes, c'est deux tiers des gaz à émissions de serre en France,
14:38et c'est la même chose pour la demande énergétique, c'est les mêmes proportions.
14:43Et donc ça suppose pas mal de partenariats publics, privés, ça fonctionne beaucoup comme ça ?
14:49Oui, absolument, ça a été une volonté de l'État à notre création de disposer de trois grandes chaires,
14:56une chaire académique recherche publique, nous sommes quand même en R&D,
15:00une deuxième qui est vraiment les meilleurs experts français industriels et ingénierie,
15:07donc d'où le privé, et puis évidemment tout le collège des collectivités.
15:12Présentez-nous Benjamin Frémaux, le groupe IDEX existe depuis combien de temps et qu'est-ce qu'il propose comme service ?
15:18Le groupe IDEX a 64 ans cette année, c'est un groupe qui a été créé dans les années 60 par la famille Planchot,
15:25qui progressivement s'est autonomisé, on est présent dans les infrastructures locales et décarbonées,
15:33notamment dans le domaine de la chaleur, donc nous on fait tout ce qui est réseau de chaleur et de froid,
15:38usine de valorisation énergétique de déchets, décarbonation de l'industrie également,
15:43et enfin à l'échelle d'un bâtiment comme celui-là, on peut être amené à intervenir,
15:48et d'ailleurs moi je joue à domicile aujourd'hui puisqu'on a des équipes qui sont présentes au palais des congrès
15:52pour faire le chaud et le froid de ce bâtiment et notamment de l'hôtel Athenon qui est l'hôtel Ayat,
15:57qui est un des très grands hôtels de Paris.
15:59On va rentrer dans le détail, qu'est-ce qui nous permet d'avoir ni trop chaud ni trop froid ici par exemple ?
16:05Là si vous voulez on a des solutions de production, notamment à l'aide de thermofrigo-pompe,
16:11on va également faire de la récupération de chaud sur groupe froid,
16:17parce que lorsque vous produisez du froid vous générez également du chaud,
16:20c'est-à-dire que c'est de la chaleur fatale qui peut ou pas être récupérée,
16:23et en l'occurrence ici on récupère cette chaleur fatale,
16:28et c'est ce type de solution qui nous a permis au cours des années de diminuer très sensiblement les consommations du bâtiment,
16:36et donc ça fait des économies d'énergie pour le bâtiment,
16:39ça fait évidemment des euros en plus pour les locataires et les propriétaires,
16:44et ça fait moins d'émissions de CO2 dans l'atmosphère, c'est vraiment l'essence du métier d'IDEX aujourd'hui.
16:49On va rentrer dans le détail des solutions que vous proposez les uns et les autres,
16:53Isabelle Degnaud, votre approche repose sur un certain nombre de grands principes,
17:00est-ce qu'on peut dire que ça commence toujours par la mesure d'une performance,
17:05performance énergétique, performance carbone des villes ou des quartiers ?
17:09Oui absolument, il faut d'abord pour maîtriser sa demande énergétique, savoir quantifier, mesurer,
17:18et pour cela ça se fait sur quatre sujets, et ça rebondit sur ce que vous disiez,
17:26c'est maîtriser d'abord les consommations énergétiques des bâtiments,
17:29en commençant par les bâtiments publics, du patrimoine public de la ville,
17:33maîtriser son approvisionnement énergétique, c'est sur quoi vous travaillez,
17:38c'est-à-dire les systèmes de production de chaleur, de froid, des réseaux,
17:41mais aussi grâce à plus de flexibilité inter-énergie, avec par exemple le photovoltaïque,
17:47et du stockage sur batterie, il faut aussi verdir son mix énergétique,
17:53donc intégrer le maximum de gisements disponibles locaux et exploitables dans son mix,
18:01et puis effectivement, comme vous le disiez, évaluer l'empreinte environnementale des projets d'aménagement,
18:07ce qu'on fait avec UrbanPrint, et cette méthodologie que je viens de vous décrire,
18:14elle correspond exactement à la fois aux besoins des collectivités et aux logiciels qu'on a pu développer.
18:19Quand vous parlez de demande énergétique, c'est quoi la demande énergétique d'une ville ?
18:24C'est ce dont elle va avoir besoin pour chauffer, éclairer, c'est quoi exactement ?
18:30La demande énergétique, ça couvre tous les besoins de consommation des bâtiments,
18:36mais aussi des besoins de production des systèmes de chaud, de froid, de gaz, ELEC,
18:45qui vont permettre de chauffer, de refroidir ces bâtiments en temps réel.
18:50Benjamin Frémaux, les réseaux de chaleur, on va rentrer un peu dans le détail,
18:55c'est peut-être la principale activité du groupe ELEC.
18:59C'est une activité très importante pour UrbanPrint.
19:01C'est une activité importante.
19:02Déjà, c'est quoi ? Je vais poser vraiment une question de base, de BOC, quand on parle d'un réseau de chaleur.
19:07C'est vrai que c'est des métiers qui ont pénétré beaucoup plus des pays comme l'Europe du Nord ou l'Europe de l'Est.
19:17En France, on se chauffe encore beaucoup et c'est un peu bizarre au gaz individuel ou à l'électricité,
19:25les grippes qui se sont multipliées dans les années 70 dans nos villes.
19:32Le réseau de chaleur, ça permet d'avoir à l'échelle d'un quartier ou d'une ville des solutions de production centralisées,
19:40une production unique à l'échelle d'un quartier ou d'une ville.
19:43Et puis le réseau va amener cette chaleur ou ce froid à la disposition des différents bâtiments
19:50et faire monter cette chaleur ou ce froid à la destination des usagers.
19:55C'est ça un réseau de chaleur.
19:57Ça ne veut pas dire que le réseau de chaleur est nécessairement décarboné.
20:01Nous, c'est ce qu'on déploie aujourd'hui.
20:03Mais historiquement, les réseaux de chaleur ont fonctionné à tout type d'énergie.
20:06Oui, on peut avoir une centrale à charbon à côté qui va l'alimenter à un réseau de chaleur.
20:11Je vous donne un exemple très concret parce que nous, on est délégataire du réseau de chaleur de la Défense.
20:15C'est Généaria qui est l'entité publique, qui est le délégant.
20:19Et historiquement, dans les années 70, ce réseau fonctionnait au charbon.
20:23Ce n'est pas si loin.
20:25Le quartier d'affaires a été chauffé au charbon.
20:27Et c'est la force des réseaux de chaleur que d'accompagner le mix énergétique en fonction des besoins du moment.
20:33Et donc, on est passé d'un réseau charbon à un réseau gaz, fuel.
20:38Et puis progressivement, biogaz, biofuel.
20:40Et récemment, on a mis en service un très gros investissement pour faire fonctionner ce réseau en partie aux agropelées.
20:47C'est de la biomasse.
20:48On va formuler des déchets agricoles pour leur permettre d'être transportés, stockés et puis utilisés dans nos chaudières, dans d'anciennes chaudières fuel.
20:57Vous voyez avec cet exemple l'évolution du mix énergétique d'une ville qui a besoin à la fois d'énergie, mais d'énergie de plus en plus décarbonée.
21:07Et c'est ça que permet le réseau de chaleur aujourd'hui.
21:09Et avec un enjeu de souveraineté aussi.
21:11Parce que plus on avance vers les solutions que vous décrivez, moins on est dépendant de sources énergiques qui peuvent venir de loin.
21:17Effectivement, ces dernières années, on a beaucoup parlé de décarbonation et de lutte contre l'effet de serre.
21:22Lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.
21:25La souveraineté s'est venue très fort dans le débat public avec la crise énergétique liée à la guerre en Ukraine.
21:33Avec l'explosion du prix du gaz et donc par conséquence du prix de l'électricité.
21:37On a vu des tarifs multipliés par 5, par 10.
21:40C'était vraiment délirant.
21:41Et pour les abonnés, qu'ils soient industriels ou bâtiments publics, privés, connectés à des réseaux de chaleur qui fonctionnaient à la biomasse.
21:50On a une stabilité du tarif.
21:52Et ça, ça permet effectivement d'avoir accès à une énergie qui est souveraine.
21:57On ne dépend pas de l'extérieur.
21:58On ne dépend pas de pays tiers.
22:00Parce que nous, on ne produit pas de gaz en France.
22:01On ne produit pas de pétrole.
22:02On ne produit pas de fuel.
22:03Donc, utiliser de la chaleur fatale, de la géothermie, de la biomasse en substitution de ces énergies là.
22:10Ce n'est pas simplement avoir une énergie à prix stable.
22:13C'est aussi être souverain.
22:15C'est-à-dire être indépendant de pays tiers.
22:18On voit bien que lorsque Poutine veut fermer le robinet, il peut le faire.
22:22Demain, Trump, on ne sait pas encore ce qu'il va faire de son gaz de schiste.
22:25Les réseaux de chaleur, c'est aussi une solution souveraine pour se chauffer dans nos villes.
22:29Et donc, évidemment, ça pose la question des moyens à la disposition des municipalités.
22:34En ce moment, il y a le congrès des maires qui se tient pas très loin d'ici, à Porte de Versailles, à Paris.
22:40Ça fait partie des enjeux sur lesquels vous travaillez, vous, à budget contraint.
22:45Comment réduire sa demande en énergie ?
22:48Comment adapter sa demande en énergie à ce contexte budgétaire ?
22:51Oui, absolument.
22:52En fait, un seul moyen pour justement arriver à maintenir l'effort malgré les restrictions budgétaires,
23:00c'est de prévoir à l'avance, de modéliser.
23:04C'est ce qu'on fait.
23:05Les quartiers, les villes, les différents besoins, etc.
23:10Et en fait, quand on dit maintenir l'effort, précisément avec moins d'argent,
23:17il faut faire autant ou en tout cas plus efficacement.
23:21Et donc, justement, ce n'est pas qu'une question d'argent.
23:24C'est une question aussi d'intelligence.
23:26Et moins on dispose d'argent, je dirais, plus il faut être efficace.
23:29Mieux il faut choisir ses investissements.
23:31Et dans le cas précis, en fait, par exemple, lors de la rénovation énergétique,
23:35parce qu'on parlait là, du coup, des consommations des bâtiments,
23:38nous utilisons un outil qui s'appelle Power 10, qui a été développé avec le CSTB.
23:44Donc, on travaille avec, comme je le disais, beaucoup d'instituts de recherche.
23:49Et donc, en fait, sans se déplacer dans les bâtiments, sans entrer dans les bâtiments,
23:54on est capable désormais de modéliser des centaines de bâtiments, justement, dans les villes,
23:59à partir de données de simulation et de répondre à un temps record, en fait,
24:03à la question majeure qui est, avec le budget dont je dispose,
24:07autant réduit qu'il soit, à quelles économies d'énergie je peux prétendre ?
24:11Autrement dit, par euro investi, comment je fais le maximum d'économies d'énergie ?
24:17Où est-ce que je vais économiser le plus de mégawattheures ? Et avec quelle ratio ?
24:21Donc, en fait, le logiciel, il va identifier les meilleurs scénarios de rénovation
24:25et il va sortir, en termes économiques et environnementaux, du coup, les meilleurs résultats.
24:31Ça permet de tester une solution avant de la déployer, c'est ça ?
24:35Ça permet de la tester, ça permet de scénariser, parce qu'en fait, avec autant de données et de variables,
24:40vous vous retrouvez parfois, en fait, à devoir faire des dizaines de simulations, par exemple, par bâtiment.
24:46On a le cas, par exemple, de la ville de Noisy-le-Grand, sur une rénovation de bâtiment de 200 bâtiments,
24:54c'est colossal, ça représente 2000 simulations, si vous en faites 10 par bâtiment.
24:59Donc, voilà, moi, je ne peux pas le faire, un Excel ne peut pas le faire,
25:03il faut vraiment un vrai logiciel, un moteur de calcul, des belles interfaces, etc.
25:08Je voudrais qu'on parle de déchets aussi, Benjamin Frémaux,
25:11parce que vous travaillez aussi sur la valorisation énergétique des déchets.
25:15Alors, on parle de quels déchets et de quelles valorisations ?
25:17On parle de tous les déchets, notamment des ordures ménagères.
25:20On produit une quantité stupéfiante d'entreprises et ménages de déchets qui doivent être d'abord triés.
25:30Donc, il y a évidemment énormément de contraintes réglementaires pour pousser au tri.
25:35Mais ensuite, ce qui n'est pas trié en France est soit enfoui, et ça coûte de plus en plus cher,
25:41avec, heureusement, des taxes, la TGAP qui vient pénaliser l'enfouissement,
25:46et puis le reste est valorisé.
25:48Et donc, nous, on est des énergéticiens qui concevons, construisons,
25:53et puis exploitons des grosses infrastructures qui permettent de valoriser ce type de déchets.
25:58C'est ce qu'on fait, par exemple, à Villers-Saint-Paul pour le SMDO.
26:01On va investir une centaine de millions d'euros pour une troisième ligne
26:04qui sera haute performance énergétique et qui permettra d'accepter des déchets industriels.
26:08Alors, c'est la question que j'avais vous posée.
26:09Est-ce qu'il y a des déchets qu'on ne pouvait pas intégrer à cette ligne de valorisation énergétique
26:13qu'on réussit à intégrer maintenant ?
26:14C'est exactement ça.
26:15Et donc, on va pouvoir intégrer des déchets industriels à haut pouvoir calorifique,
26:19ce qu'on appelle haut pouvoir calorifique,
26:20c'est-à-dire qui génère plus d'énergie que des ordures ménagères classiques.
26:26Et avec ça, on va produire de l'électricité,
26:28mais surtout, on va produire de la vapeur pour un industriel qui est Arkema, qui est attenant.
26:32Donc, lui, il va bénéficier d'un prix là aussi souverain, garantie sur la durée,
26:37qui va lui permettre de se substituer au gaz.
26:40Et puis, on va alimenter de nouveaux réseaux de chaleur qui vont alimenter toute la zone.
26:45Et donc, c'est vraiment l'exemple typique de ce qu'on peut faire grâce à un outil qui est une UVED,
26:51une unité de valorisation énergétique de déchets, reliée à des réseaux de chaleur.
26:56Donc là, on a un écosystème local à la fois industriel,
27:01à la fois en termes de consommation, de production, qui fonctionne de manière autonome.
27:08Merci beaucoup. Merci à tous les deux.
27:10Et bon, Forum des projets urbains, voilà, c'est la fin de ce numéro de Smart Impact.
27:15À très vite sur BeSmart for Change, la chaîne des audacieuses et des audacieux.
27:19Salut !