Jeudi 14 novembre 2024, SMART PATRIMOINE reçoit Vilaone de Serrant (Responsable pays pour la France, Belgique et Luxembourg, BNY Investments) et Alain Krief (Responsable de la gestion obligataire, Edmond de Rothschild AM)
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00:00Comment prendre en compte ces investissements monétaires ? Comment prendre en compte ces investissements obligataires ?
00:08Voici deux questions qui vont nous animer à présent dans Enjeu Patrimoine.
00:12Et pour cela, nous avons le plaisir de recevoir deux experts du sujet sur le plateau de Smart Patrimoine.
00:16Nous avons le plaisir d'accueillir tout d'abord Violenne de Séran. Bonjour Violenne de Séran.
00:19Bonjour Nicolas.
00:20Vous êtes responsable pays pour la France, le Belgique et le Luxembourg au sein de BNY Investment.
00:24Et à vos côtés, nous avons le plaisir d'accueillir également Alain Crièf. Bonjour Alain Crièf.
00:27Bonjour Nicolas.
00:28Vous êtes responsable de la gestion obligataire chez Edmond Rothschild Asset Management.
00:32Alors on va commencer avec vous Alain Crièf.
00:34On a suivi les décisions des différentes banques centrales à travers le monde,
00:38mais notamment en Europe, aux États-Unis, en Chine également, de baisser leur taux.
00:42Après une période effectivement de flambée presque de leur taux.
00:47On a suivi l'impact qu'ont pu avoir sur les taux des élections politiques,
00:52même si généralement ça dure quelques jours ou quelques heures.
00:55La question qu'on peut se poser aujourd'hui, avant d'aller sur une stratégie obligataire,
00:59c'est quel est le contexte de taux dans lequel on réalise des investissements à l'heure actuelle, en fin d'année 2024 ?
01:06Alors le contexte de taux, comme vous le dites, il va vite changer en fait.
01:12Aujourd'hui, on a entamé de la part des banques centrales une baisse des taux, un cycle de baisse des taux,
01:17que ce soit côté États-Unis, côté de la Fed ou côté de la Banque Centrale Européenne.
01:22Et donc en fait, les taux vont baisser encore et encore et pendant toute l'année 2025.
01:28Ce qu'on ne sait pas, véritablement, c'est le rythme de cette baisse.
01:32Est-ce qu'ils vont baisser rapidement, lentement, faire des pauses ?
01:35En tout cas, la baisse est vraiment marquée.
01:38Et vous avez peut-être une chose, c'est surtout parce que l'inflation est au plus bas et devrait rester basse.
01:43Donc à partir de ce moment-là, la politique monétaire restrictive des banques centrales n'est pas nécessaire.
01:50Et surtout, si elle continue, en fait, elle va mettre à mal les économies.
01:54Et donc, ce n'est vraiment pas l'idée des banquiers centraux.
01:56C'est plutôt de sortir bien de cette phase de forte inflation.
02:01Et donc, ce qu'on appelle en anglais un soft landing, c'est-à-dire un atterrissage en douceur et laisser l'économie recroître derrière.
02:10Donc, cette idée de baisse de taux des banques centrales est actée malgré une élection de Donald Trump
02:16qui pourrait laisser entendre que l'inflation pourrait, si le programme était appliqué, repartir un petit peu aux Etats-Unis.
02:22Non, ça, ce n'est pas un scénario central chez vous qui laisserait entendre que potentiellement, il y aurait un peu moins de baisse de taux que prévu ?
02:28Alors, en fait, c'est l'étau court qui devrait baisser assez rapidement.
02:32Bien sûr.
02:33L'étau long, compte tenu de l'inflation éventuelle par rapport à un programme fiscal qui pourrait être assez important
02:40et donc des dettes souveraines assez importantes, un déficit un peu plus fort, notamment aux Etats-Unis.
02:48Mais de façon générale, on n'attend pas des baisses de déficit.
02:51Oui, c'est un sujet en Europe aussi.
02:54Donc, à part en Allemagne, mais bon, c'est un autre problème.
02:57Mais en fait, en effet, on n'attend pas véritablement de baisse d'étau long, c'est clair.
03:03D'accord.
03:04Selon nous, si on se projetait, disons, à la fin 2025, on va vraisemblablement avoir une courbe de taux beaucoup plus pentue,
03:13c'est-à-dire des taux longs éventuellement plus haut et des taux courts certainement plus bas.
03:18Violaine de Serrand, dans ce contexte qu'on a posé brièvement pour essayer de comprendre effectivement une stratégie d'investissement,
03:26si je comprends bien, ça veut dire que le monétaire en oublie avant de passer sur l'obligataire.
03:30Mais le monétaire, ce n'est pas forcément une stratégie d'investissement qui va apporter de la performance à court terme ?
03:35En fait, le monétaire aujourd'hui offre encore des rendements de 3 à 3,2%,
03:40mais c'est vrai que si on anticipe une baisse des taux de l'ordre de 1% de la Banque Centrale Européenne d'ici la fin de l'année,
03:46on peut voir que le monétaire va apporter moins.
03:49Et ce qui nous semble intéressant, c'est dès aujourd'hui, dans cette perspective de baisse des taux progressive,
03:54finalement, d'accompagner cette baisse des taux en rentrant sur le marché obligataire.
03:58Il a été démontré lors de nombreuses études qu'en fait, en phase de baisse des taux,
04:02les investissements obligataires sont non seulement porteurs, je dirais, pour leur rendement,
04:06mais on peut aussi éventuellement engager des gains en capitaux avec une baisse des taux sur la partie 5 ans ou 10 ans.
04:14D'accord, en se positionnant dès aujourd'hui par exemple.
04:16Donc c'est vraiment ça notre idée et c'est vrai qu'il faut anticiper,
04:19parce que si on attend que les taux courts aient vraiment baissé,
04:22il sera peut-être trop tard pour se positionner sur l'obligataire fin 2025.
04:27Donc beaucoup de choses auront été anticipées par les marchés.
04:29Donc là, on est rentré dans la stratégie obligataire.
04:32Mais si je comprends bien, globalement, vous êtes plus tourné vers l'obligataire que le monétaire à l'heure actuelle.
04:37Peut-être un mot quand même sur le monétaire avant de revenir sur l'obligataire avec vous, Alain Krief.
04:41Vous avez mentionné effectivement les déficits.
04:43On ne peut pas prédire effectivement la dépense publique future.
04:49Mais globalement, c'est un sujet aujourd'hui.
04:51Et les États annoncent, notamment aux États-Unis ou en Europe, cette volonté d'emprunter plus.
04:55Est-ce que du coup, ça va dans le sens, malheureusement, d'une idée que le monétaire rapportera moins
05:03et que c'est peut-être moins attractif pour des investisseurs ?
05:06Pas forcément, parce que les déficits vont agir beaucoup plus sur la dette longue, sur les maturités longues.
05:12Donc pas forcément sur la dette courte.
05:14Ce qui agit vraiment sur les taux courts, c'est les actions des banques centraux pour lutter contre l'inflation.
05:20Il faut vraiment regarder l'inflation.
05:23En résumé, je dirais que les taux longs, c'est quand même une somme de croissance et inflation.
05:27Alors que les taux courts, c'est une décision des banquiers centraux pour ce qu'on appelle le taux neutre,
05:34pour bien faire fonctionner l'économie sans pour autant faire augmenter l'inflation.
05:38C'est bien sûr leur objectif de 2%.
05:40Aujourd'hui, on est de 5, on peut de 5, 1,7, 1,8, 2,2.
05:45Enfin, on est toujours autour de 2, mais on sent bien qu'on s'en approche.
05:49C'est pour ça que l'inflation, on en parle un peu moins aujourd'hui, parce qu'on va dire qu'on est toujours vigilant.
05:56Mais on en parle un peu moins.
05:58Maintenant, on s'occupe de la croissance.
06:00Pour avoir la croissance, vous avez différents programmes et stratégies.
06:05Et à partir de là, pour ne pas mettre à mal cette croissance, vous avez différentes stratégies des gouvernements.
06:12Et bien sûr, les banquiers centraux vont s'adapter.
06:15Jérôme Poel a dit que peu importe Donald Trump ou pas Donald Trump, il va continuer comme il l'a déjà commencé.
06:22Ceci dit, il attend quand même de voir le programme de Donald Trump.
06:26Et de toute façon, le temps qu'il le mette en place, on a un peu le temps.
06:29Donc, on devrait quand même avoir des baisses de taux de la part de la banque fédérale américaine,
06:35de la part de la banque centrale européenne, de façon assez régulière.
06:39Et donc ça, c'est plutôt sur les taux courts et ça touche directement le monétaire.
06:43Et sur l'obligataire, alors, quand on fait de la stratégie obligataire, si on veut investir...
06:48Je vous repose une même question, comme je vous l'ai posée sur le monétaire, Violaine de Séran.
06:53On entend de plus en plus de gens nous dire que l'obligataire, ça rapportait quand les banques centrales montaient leur taux.
06:59Maintenant, il faut retourner sur les actions.
07:01Ce n'est pas ce que vous nous avez dit tout à l'heure.
07:03Vous n'êtes pas forcément convaincu de cette stratégie-là.
07:05Il reste des choses à faire sur l'obligataire.
07:07Oui, c'est vrai que quand on parle d'obligataire, il faut distinguer.
07:09Évidemment, on peut parler d'emprunt d'État.
07:11C'est ce qu'on préconise et comme l'a dit Alain, c'est vrai qu'il y aura beaucoup de refinancements.
07:15Il y a un risque que les taux longs sur le 10 ans remontent un peu.
07:18Donc, nous, on privilégie plutôt ce qu'on appelle le crédit et les obligations d'entreprise.
07:23Donc, il y a deux approches.
07:25Soit vous avez un risque très modéré et vous vous dites, je vais aller prêter à des entreprises de qualité Investment Grade.
07:31Et là, on peut encore capter des rendements de 3,3%, 3,5% qui sont vraiment l'approche défensive.
07:38Et là, vous avez quand même un surcroît de rendement de l'ordre de 1% par rapport aux emprunts d'État.
07:43D'accord. Donc là, c'est des entreprises « sûres » mais avec un rendement du coup un peu moins élevé que si on allait sur des entreprises plus risquées.
07:50Oui, c'est exactement ça.
07:51Et en fait, pour nous, les deux se combinent.
07:53Donc, vous pouvez aller sur cette partie plus Investment Grade, donc crédit d'entreprise sûr,
07:57ou l'autre approche qui est un peu plus risquée et qui pour moi, aujourd'hui, offre des rendements très attractifs.
08:04Et puis, c'est aller sur les obligations dites à haut rendement, le « high yield » qui, en fait, aujourd'hui,
08:09offre encore en euros des rendements de l'ordre de 5,3%, 5,5% qui nous semblent en absolu des rendements attractifs à capter.
08:19Et il y a un autre point, c'est que la qualité de ce rendement « high yield », finalement, s'est plutôt améliorée au fil des ans.
08:25Le poids des obligations les plus spéculatives, ce qu'on appelle le « junk high yield » en jargon anglo-saxon,
08:30le « triple C », a fortement baissé dans les indices « high yield » pour une raison qui est, en fait,
08:36que beaucoup de ces entreprises les plus risquées ont été refinancées avec des crédits sur mesure par les marchés privés.
08:43Alain Krief, en matière de stratégie obligataire, quelles sont vos convictions chez Edmond de Rothschild Asset Management ?
08:50Je vous repose la même question, est-ce que c'est la fin de l'obligataire ou est-ce qu'il y a encore des belles histoires à raconter à fin 2024 en matière d'investissement ?
08:58Alors, ça tombe bien, il y a vraiment de belles histoires à raconter, de belles opportunités.
09:02La raison est simple, ça fait deux ans qu'on attend une récession qui n'est jamais venue.
09:06A partir de là, aujourd'hui encore, le marché reste relativement méfiant.
09:11Il n'y a pas d'effet, de levier important sur, justement, cette dette d'entreprise.
09:17Et donc, c'est pour ça qu'il y a encore du chemin à faire.
09:20Et pour capter ce chemin, il y a différents produits obligataires qu'on propose, différentes stratégies.
09:26Parce qu'en effet, comme l'a dit Violaine, il y a différentes catégories de dettes, plus ou moins risquées d'entreprise, moins risquées et moins risquées.
09:33Nous, on préfère quand même ne pas aller sur le trop risqué.
09:38Je m'entends, donc en effet, de toute façon, pas les triple C ou des choses comme ça.
09:42Donc, après, avec un risque de crédit très fort, donc par rapport à ces entreprises, on préfère rester sur la qualité.
09:49Pourquoi ? Parce que, mine de rien, même cet atterrissage en douceur, ça reste un atterrissage.
09:55Et on a toujours un ralentissement, pour l'instant, de l'économie en attendant que l'étau baisse.
09:58Bien sûr.
09:59Donc, c'est pour ça qu'on privilégie certaines stratégies comme des fonds datés qui vont chercher des rendements aujourd'hui
10:07et qui vont vous permettre d'extraire du rendement aujourd'hui pour au moins les trois prochaines années.
10:11D'accord.
10:12Et là, on parle de, même si on faisait aller dans le haut panier du high yield et un peu d'investment grade,
10:16on parle quand même de rendement de l'ordre de 5,40.
10:19Donc, le fonds daté reste une stratégie ?
10:21Reste encore une stratégie.
10:22D'accord.
10:23Plus pour longtemps.
10:24On va dire que l'année prochaine, si on a une vraie baisse des taux, ça va être un peu plus compliqué.
10:28C'est pour ça que c'est vraiment une belle opportunité aujourd'hui, un bon point d'entrée.
10:32Après, si on reste sur la qualité, on a ce qu'on appelle tout ce qui est subordonné de la partie investment grade.
10:39Je m'explique.
10:40Le côté financier subordonné, donc vous prenez des banques, et ce qu'on appelle de la dette subordonnée émise par ces banques,
10:47on appelle dans notre jargon les cocos.
10:49Et ça, ça vous offre un rendement de l'ordre de plus de 6% pour les champions nationaux.
10:57Je parle des BNP, des unicredits, des choses comme ça.
11:00Donc, c'est du crédit à une banque ?
11:02C'est du crédit à une banque qui, à cause du régulateur, pour des besoins de régulation, ont besoin d'émettre cette dette subordonnée.
11:12Donc, ça, c'est un véritable investissement qui nous apparaît très attractif encore aujourd'hui, qui vous rapporte plus de 6% au call.
11:20Ensuite, on a aussi, si vous éloignez les financières, vous avez ce qu'on appelle cette fois les subordonnées aux entreprises.
11:28Donc, on voit ici, il y a beaucoup de utilities, de télécom ou des choses comme ça.
11:34Et donc, là, vous avez aussi une prime de risque crédit supplémentaire et qui vous permet d'atteindre pareil des 5,5, 6%.
11:43Donc, ce sont des entreprises investissements de qualité qui vont émettre des dettes subordonnées tout simplement pour maintenir leur notation et pouvoir emprunter sur le côté senior.
11:57C'est vrai que c'est un peu technique, mais c'est quand même très intéressant d'avoir ce type de rendement.
12:02Et en effet, ça ne va pas durer.
12:04Violaine de Séron, je rebondis sur ce que vous dites, ça ne va pas durer.
12:07C'est-à-dire que là, il y a vraiment un timing quelque part à aller chercher pour les investisseurs avant potentiellement que le contexte se dégrade pour la performance.
12:15Alors, nous, c'est vrai qu'on n'a pas trop cette approche de fonds à maturité.
12:19On a plutôt une approche gestion active.
12:21Et par exemple, dans l'univers du high yield, nous, on privilégie une approche globale qui nous permet de naviguer selon les marchés.
12:27Alors, un exemple, ce serait plus récemment.
12:30Il fallait éviter, peut-être dans l'univers du high yield, les entreprises les plus cycliques européennes qui pourraient être impactées par les mesures de protectionnisme de Trump.
12:39Mais c'est vrai que dans l'univers du high yield, il n'est pas trop tard, il ne sera jamais trop tard.
12:44Parce que sur longue période, on voit que le high yield, en fait, ça fait des performances assez proches des actions sur très longue période.
12:49Donc, pour nous, il y a toujours des bons points d'entrée.
12:51Mais c'est vrai qu'aujourd'hui, je dirais du 5,40 avec des durations très courtes, des maturités assez courtes, ça nous semble attractif.
12:58Donc, pour nous, oui, le timing est bon.
13:01Mais il n'y a peut-être pas ce côté point d'entrée qui est peut-être plus marqué dans l'univers investment grade.
13:08Là, le point d'entrée est certainement plus marqué que dans l'univers du high yield.
13:11Là, je pense que ça reste toujours des bonnes thématiques sur le long terme.
13:13Donc, tout dépend effectivement de son rapport au risque et à sa recherche de rendement.
13:18Merci beaucoup en tout cas à tous les deux de nous avoir accompagnés.
13:20Violenne de Séran, responsable PI pour la France, Belgique et le Luxembourg chez B&Y Investment.
13:24Et merci Alain Krief, responsable de la gestion obligataire chez Edmond Rothschild Asset Management.
13:28Quant à nous, on se retrouve tout de suite dans l'œil de l'expert.