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00:00Rebonjour, bonjour à tous dans ce journal, le dossier élection Trump, avec notre invité tout de suite, Kirsten Maier, une des porte-parole des démocrates de Belgique.
00:16Nous aurons tout à l'heure aussi l'analyse de Régis Dandoy, qui est professeur en sciences po et qui était en Floride en tant qu'observateur international.
00:23Mais tout d'abord, nous recevons Kirsten Maier, l'une des porte-parole des démocrates abroad Belgique. Bonjour.
00:30Bonjour.
00:30Merci d'être avec nous sur Arabel. Peut-être avant d'aller aux États-Unis, tout d'abord chez nous, ici en Belgique.
00:36Comment s'est déroulée tout d'abord la campagne avant les élections et comment par la suite vous avez vécu l'annonce des résultats ?
00:45La campagne « Voilà les démocrates à l'étranger », c'est que nous cherchons, nous sommes toujours à la recherche des Américains à l'étranger qui ne savent pas qu'ils peuvent voter.
00:54Donc même quand il n'y a pas une grande campagne, toute l'année, nous les cherchons. Voilà aussi en faisant des présentations, des médias et tout ça.
01:03Parce que ce droit de voter pour notre pays, même de l'étranger, nous nous trouvons très très important.
01:09Et donc, ça c'est toute l'année, bien sûr, au fur et à mesure, mais il y avait moins de motivation, sauf jusqu'au moment que Biden a démissionné et Harris a pris le relais.
01:25Et là, il y avait tellement de gens qui sont sortis en disant « qu'est-ce que je peux faire ? Comment je peux aider ? »
01:30Et nous faisons beaucoup de, ça s'appelle « phone banking », on a des listes des Américains à l'étranger, pas seulement au Bruxelles.
01:37On les téléphone pour les encourager de s'enregistrer, de voter, de retourner le bulletin de vote et tout ça.
01:44Et ça va même plus loin qu'un de mes confrères ici de « Democrats Abroad », il a pris dix jours de congé.
01:51Il a pris un avion, payé lui-même pour aller à Pennsylvania, en Pennsylvanie, et pour frapper aux portes, pour encourager encore une fois les gens à voter.
02:00Juste rappeler, entre parenthèses, pour nos auditeurs, la Pensylvanie, c'est un « swing state » très important qui a basculé, je pense, pour les résultats de la présidentielle.
02:08Oui, exactement. Et donc, vous imaginez que son épouse lui a donné... « Oui, tu peux payer pour ça, mon chéri, tu peux aller prendre dix jours et tout ça ».
02:18Il est revenu la veille de l'élection, ici à Bruxelles, et là, il y avait un...
02:24Voilà, ce n'était pas vraiment une fête démocrate, mais c'était organisé par une autre entreprise, là, dans un hôtel.
02:30Et l'atmosphère était déjà très bizarre. Il y avait des gens avec des casquettes « pro-Trump » à cette réunion-là, parce que ce n'était pas, comme je dis, organisé par les démocrates.
02:41Et on se sentait un peu... Voilà, il faut dire que je suis restée presque toute la nuit, que avec quatre ou cinq confrères, en regardant les résultats.
02:50J'ai dormi pendant deux heures, et parce qu'à partir de cinq heures du matin, j'étais dans un TV studio pour, voilà, commenter les résultats.
03:00Et là, on a vu très rapidement et très clairement dans quel sens ça se bouscule.
03:06J'étais bien sûr sur mon WhatsApp avec les confrères ici en Belgique, avec la famille aux États-Unis, les amis.
03:14Affreux, mais vraiment d'une manière... Et jusqu'à maintenant, ça fait... On a quel jour aujourd'hui ?
03:20Jeudi.
03:21Donc ça fait un peu plus de 24 heures. C'est incroyable, parce que pour moi, le temps a complètement changé.
03:28Maintenant, ça c'est... Oui, un peu plus de 24 heures, et ça n'est toujours pas rentré là-dedans.
03:34Et exactement la même chose pour beaucoup de mes amis démocrates ici à Bruxelles.
03:39On peut pas s'accepter, c'est pas le cas, mais on a un sentiment assez... presque zen, parce que les sentiments qu'on va sentir sont trop forts,
03:50et donc tout le monde est un peu serein pour le moment. Je crois que le rage, la colère, le désespoir va arriver un peu plus tôt.
03:58On parle de cette victoire de Trump. Est-ce que c'est une surprise ou une demi-surprise, d'après vous ?
04:04Les sondages étaient tellement serrés, tellement serrés, que tout le monde était prêt. Pas tout le monde était prêt, mais c'était assez possible qu'il va gagner.
04:13C'était fifty-fifty. Et voilà, ça c'est... Donc l'autre chose qui est très très différente, c'est la troisième fois qu'il se met à la candidature.
04:23Et il a déjà gagné une fois, et donc quelque chose qui est arrivé une fois peut toujours arriver une deuxième fois.
04:30Donc la surprise qu'il a gagnée, non, non, c'était fifty-fifty qu'il va gagner. La surprise est quand même avec le vote populaire qu'il a gagné.
04:44Il y a tellement de voix. La surprise, c'est que même la Chambre des représentants peut-être va tomber dans les mains des Républicains.
04:54Et c'était pas, vous voyez toujours, je déteste cette carte des États-Unis qui montre toujours, avec tout ce rouge.
05:02Et il faut savoir que même si 50% et une personne votent pour Trump dans un État rouge, toute la carte est rouge.
05:11Et donc pendant toute la matinée, je dis je veux pas voir ça. Parce que quand on voit cette carte, ça ne vous montre pas la réalité aux États-Unis.
05:21La réalité, c'est que oui, il a gagné. Il a gagné avec plus qu'on imaginait. Il n'y a que deux parties.
05:27Il a gagné maintenant avec quoi ? 52% vers 48%. Quelque chose comme ça.
05:35Donc c'est pas parce que vous voyez tout ce rouge sur cette carte que c'était un énorme choc. Il a gagné 67% de la vote.
05:45– Kirsten Mayer, comment on peut expliquer cette victoire ou cette défaite ?
05:49Ça dépend dans quel camp on se pose.
05:51Est-ce que c'est le racisme et le sexisme qui étaient trop importants pour les démocrates pour être surmontés ?
05:57Est-ce que c'est ce vote pro-Trump des électeurs masculins, blancs, mais pas seulement blancs,
06:01il y a aussi ce qu'on dit les noirs et les latinos ?
06:04– Il y a un peu de tout ça, absolument.
06:07Il y a en 2008, les démocrates avaient le choix pendant les élections primaires
06:13qui va être le candidat pour être président, entre Barack Obama et Hillary Clinton.
06:19Et à ce moment-là, Hillary Clinton, une femme d'une stature incroyable, avec beaucoup d'expérience,
06:23mais quand même les démocrates ont choisi Barack Obama, un jeune sénateur,
06:27vraiment pas du tout connu, très très peu d'expérience.
06:30Et là j'ai dit, les États-Unis, mon pays, est très très raciste, très raciste, mais encore plus misogène.
06:38Et ça s'est resté, ils étaient prêts à avoir un homme noir dans la Maison-Blanche en tant qu'une femme,
06:45quelque femme, et donc ça n'a pas changé jusqu'en 2024.
06:51Et en plus maintenant, avec une femme comme Kamala Harris, très qualifiée,
06:55mais une femme de couleur, de race mixte, contre un homme comme Trump
07:00qui se présente comme le saveur des hommes.
07:04Et il ne faut pas oublier qu'il y a la religion qui joue un très très grand rôle.
07:09Je crois que c'est difficile en Europe toujours de s'imaginer que la religion chrétienne peut être extrémiste aussi,
07:16et que les femmes doivent toujours jouer un rôle secondaire dans tout parti de la vie.
07:22Justement, Trump a eu le soutien des évangélistes et cette question du droit à l'avortement, donc ça aussi c'était important.
07:28Mais ça va plus loin que le droit à l'avortement.
07:31Le droit à l'avortement, ça va contrôler les femmes.
07:34Vous savez qu'il y a maintenant, c'est vraiment dans leur planification pour les républicains,
07:40que le mariage homosexuel va être illégal, être illégal encore une fois,
07:47et aussi que le divorce s'en faute.
07:52Une personne peut dire je veux vous divorcer, après un an vous êtes divorcés.
07:56Avant il faudrait aller chercher, voilà il m'a trempé, des choses horribles et affreuses.
08:01Ils veulent réintroduire ça, et pourquoi ? C'est parce que les évangélistes disent
08:05que ce sont toutes les femmes qui introduisent la demande de divorce.
08:09Donc l'avortement, le droit à un avortement, c'est seulement une partie contrôle des femmes,
08:16que les femmes ne prennent pas la place, comme c'est écrit dans la Bible,
08:21que c'est l'homme qui gère et la femme qui soutient l'homme.
08:24Ils veulent rentrer vraiment à cette phase-là.
08:28Alors Kristen Maher, certains pensent que Biden n'aurait pas dû se représenter,
08:34que cette entrée en compagne trop tard et pas assez distancée de Joe Biden
08:38a peut-être joué sur les résultats finaux.
08:41Oui, là il y a des opinions différentes, mais très peu.
08:46La partie démocrate, quand il s'est postulé en 2020, il a dit
08:51« Je vais être président pendant seulement un mandat, et après on va trouver quelqu'un d'autre. »
08:56C'est clair que voilà, c'est difficile à expliquer parce que c'est la politique,
09:04c'est l'égoïsme et tout ça.
09:05La sphère du pouvoir.
09:06La décision qu'il a prise pour mettre son pays avant son besoin de rester en pouvoir,
09:12ça c'est quand même quelque chose d'exceptionnel.
09:15Je crois qu'il y aura très très peu d'hommes dans cette position qui aura pu pris cette décision.
09:22Il est un homme où l'État, où le gouvernement, où le pays, le peuple est plus important que lui-même.
09:28Quand même, c'était de mon point de vue un grand souci qui l'a traîné tellement longtemps.
09:37Alors Kamala Harris, on le sait, a prononcé un discours devant ses partisans,
09:42beaucoup d'émotions et un ton de défi.
09:44Elle accepte la défaite, mais elle dit « Je vais retrousser les manches et le combat va continuer. »
09:48Votre avis ?
09:49Bien sûr que le combat va continuer.
09:52Il n'y a pas de peuple dans le monde qui accepte seulement que l'autre partie a gagné,
09:57comme j'ai dit, avec des marges assez fines.
09:59Et on va accepter que c'est comme ça pour toujours.
10:03La question c'est comment continuer le débat ?
10:07Pour moi, personnellement, et pour quelques-unes de mes amies, nous avons déjà un certain âge.
10:12On s'est battus pour beaucoup de choses.
10:15On a vraiment lancé des grands appels aux femmes, à tous les gens qui soutiennent nos valeurs,
10:22qui ont les mêmes valeurs que nous.
10:24On ne nous a pas écoutés.
10:26Et voilà, maintenant, c'est très très difficile de relancer cette bataille
10:32quand une majorité des Américains ont décidé autrement.
10:38Franchement, je suis un peu…
10:40Voilà, faites comme vous voulez.
10:42Est-ce que le parti démocrate devra peut-être se réinventer, reprendre un nouveau souffle,
10:49pour revenir plus tard, dans quatre ans, peut-être un peu plus fort,
10:52peut-être revoir un peu sa base et ses idéologies ?
10:54Il y a déjà des discussions.
10:56Franchement, mon WhatsApp et tous les articles des démocrates,
10:59il y a déjà une grande discussion.
11:02Parce que quand on n'a que deux partis, il faut avoir une grande gamme de programmes différents.
11:08Il faut parler à beaucoup de gens avec des visions différentes.
11:12Les Républicains ont complètement changé depuis huit ans.
11:15Ils sont devenus le parti Trumpiste.
11:17Et si vous n'êtes pas 100% pour la vision…
11:20La vision, ce n'est pas la vision de Trump, c'est la vision des gens derrière lui.
11:25Mais vous êtes contre, vous n'êtes plus dans le parti républicain.
11:28Vous avez vu ça.
11:30Et donc, il y a une discussion.
11:32Pourquoi, quand on a cet aigle très gauchiste pour les Américains,
11:37ça reste plutôt centriste pour les Européens,
11:40mais que Harris et les démocrates étaient très, très fiers de dire,
11:45regarde tous ces Républicains qui ne vont jamais voter pour Trump,
11:49qui ont dit qu'il est le plus grand danger pour les États-Unis.
11:52Et Harris et les autres ont dit, voilà, ils sont maintenant de notre côté.
11:55Ça a vraiment isolé beaucoup de démocrates en disant,
11:59mais vous êtes maintenant trop au centre.
12:01Et donc, oui, il y aura une grande, grande discussion
12:05sur comment trouver la moitié de la population
12:11qui peut suivre un programme.
12:16Et c'est presque impossible, vraiment.
12:20Sauf si vous avez une figure de culte comme Trump.
12:24Justement, à propos de Trump, maintenant,
12:26comment voyez-vous cette arrivée, une nouvelle fois, à la Maison-Blanche ?
12:31Les conséquences, d'abord en interne, il a dit qu'il allait tenir ses promesses.
12:36On pense aux murs, on pense à pas mal de choses.
12:38Et ensuite, à l'international et en particulier ses relations avec l'Europe,
12:41et je pense à l'Ukraine.
12:45Quelqu'un d'autre, un politologue hier a dit quelque chose
12:48que je trouve 100% incroyable.
12:50Les gens qui n'aimaient pas le premier mandat de Trump,
12:53ils vont détester celui-là.
12:55Les gens qui aimaient, qui trouvaient ça intéressant,
12:57ils vont adorer les prochains quatre ans.
13:00Et c'est vraiment comme ça.
13:02Moi, j'étais dans le premier camp.
13:03J'ai souffert beaucoup, vraiment, vraiment, psychologiquement,
13:07d'avoir un tel homme en charge de mon pays,
13:10avec son attitude, avec les mots de grossesse,
13:13avec tout ce qu'il faisait, tout ce qu'il disait.
13:15Et pour moi, c'était vraiment pas acceptable, beaucoup de choses.
13:19Et donc, un deuxième quatre ans comme ça,
13:22maintenant, la grande différence, c'est que quand il était élu en 2016,
13:26il n'attendait même pas d'être élu.
13:29Donc, il n'était pas du tout préparé.
13:31C'était vraiment le chaos tout le temps.
13:33Maintenant, ça ne va plus être le chaos,
13:35parce que ça va être beaucoup pire.
13:37Et là, depuis, oui, en tout cas quatre ans,
13:41il y a toute une gamme de gens qui travaillent,
13:44qui n'étaient pas dans son cabinet, qui n'étaient pas à la Maison Blanche,
13:48qui sont intelligents, qui savent gérer les choses
13:51et qui savent mettre les États-Unis en tant que c'est ça qu'ils veulent faire.
13:56C'est un pays cristofasciste.
13:59C'est ça où ils veulent aller.
14:01Et donc, autour du chaos des premiers quatre ans,
14:05Trump, lui-même, va toujours s'aimer le chaos.
14:07Il adore.
14:08Mais derrière lui, il y a maintenant toute une gamme de gens
14:11très, très dangereux, très sérieux,
14:14avec beaucoup d'argent.
14:16Et donc, le danger, le changement,
14:19vous avez tous vu ce plan de 2025,
14:23où seulement pour dire des choses,
14:26voilà, il veut complètement annuler le FBI.
14:29Il veut qu'il n'y ait plus de ministère d'éducation.
14:33Il y a vraiment, bien sûr, les droits des femmes, on va serrer.
14:37Les bureaucrates, vous devez faire un test de loyauté au Trump
14:42pour rester démocrate, pour rester bureaucrate.
14:45L'expulsion des immigrés et tout ça.
14:49Il a parlé de beaucoup de choses comme ça les premiers quatre ans.
14:52Maintenant, il a dit pendant son campagne, il va le faire.
14:56Et son discours hier matin, il a dit,
14:58les promesses que j'ai faites, je vais tenir à ces promesses-là.
15:02Et ça, ça me rend peur pour les changements aux intérieurs des Etats-Unis.
15:07Et bien sûr, pour l'Europe, pour l'Ukraine,
15:10c'est un désastre, un échec total.
15:12– Voilà, peut-être avant de nous quitter, le temps passe très, très vite.
15:16Il me reste encore peut-être une minute, Kirsten Maher.
15:20Si vous avez un message à faire passer, le mot de la fin,
15:24après cette folle élection aux Etats-Unis.
15:28– Oh non ! Ma tête ne fonctionne plus depuis hier.
15:32Comme j'ai dit, on est toujours dans un sens assez irréel.
15:36Ça va arriver dans les jours et les semaines à venir,
15:39qu'on va accepter que notre pays a changé complètement, totalement,
15:43pour le futur, peut-être pour une génération.
15:46Là, bien sûr, on va toujours essayer de faire sans mœurs
15:49que nos valeurs sont bien écoutées.
15:51– Voilà, c'est la conclusion de Kirsten Maher.
15:53Je rappelle que vous êtes l'une des porte-parole des démocrates de Belgique.
15:56Merci d'avoir été avec nous. – Merci.
15:58– On se retrouve dans quelques instants après la pause
16:00avec l'analyse de Régis Dandoy, professeur en Sciences Po
16:03et qui était justement en Floride en tant qu'observateur international.
16:06À tout à l'heure.