• il y a 15 heures


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00:00Bienvenue au Cœur du Crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:08Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la gendarmerie nationale ?
00:18Bonsoir, je m'appelle Jan Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:27Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:41L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:45Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:48Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:54La lettre était arrivée le lundi matin à mon domicile.
00:58Avant de l'ouvrir, des formations professionnelles obligent,
01:02j'avais remarqué qu'elle avait été postée à Paris le samedi matin
01:06et que l'expéditeur, dont le nom et l'adresse figuraient au dos de l'enveloppe,
01:10était Étienne de Mazière.
01:14J'avais connu Étienne de Mazière quand j'étais enfant
01:17et qu'il venait passer ses vacances à Carantech chez mes parents.
01:21Ma mère lui louait une chambre pour le mois d'août
01:24et le grand plaisir d'Étienne, c'était d'aller chaque jour à la pêche avec mon père et Titou, le matelot.
01:30Il m'arrivait souvent de les accompagner pendant les congés scolaires.
01:34On partait de très bonne heure et vers dix heures du matin, on cassait la croûte,
01:38on buvait sec et on riait beaucoup en chantant à tue-tête les chansons paillardes qu'Étienne m'avait apprises.
01:45Il avait le pied marin et, comme disait mon père,
01:49« Pour un homme de la ville, il se tient bien sur un bateau, il se tient bien à table, il mériterait d'être breton. »
01:56Quand on avait fini de relever les casiers à Homard,
01:59on rentrait à la maison où ma mère avait fait des crêpes en l'honneur d'Étienne
02:03et on ouvrait une bonne bouteille de cidre bouché.
02:07C'est lui qui m'avait appris à aimer la poésie, les beaux textes classiques,
02:12les comédies de Molière, les tragédies de Racine.
02:16Étienne était comédien ou régisseur quand il n'avait pas trouvé d'engagement.
02:21Enfin, il naviguait dans le théâtre et il s'y trouvait aussi à l'aise que sur le bateau du patron pêcheur Carmadec.
02:28À table, il ne cessait d'éclamer pour le plus grand plaisir de ma mère,
02:33« Madame, c'en est fait et vous êtes servie. Pyrrhus rend à l'hôtel son infidèle vie. »
02:41Et il lui arrachait des larmes quand il disait, avec des trémolos plein la voix,
02:46« Que le jour recommence ou que le jour finisse,
02:50Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice,
02:54Sans que de tout le jour je puisse voir Titus. »
02:59De temps en temps, il m'emmenait flâner dans les rues de Carantec,
03:03et je revenais toujours les joues barbouillées de chocolat
03:06et les poches pleines de carambars et de mistral gagnants.
03:09Et puis, le temps avait passé.
03:12J'avais grandi, j'avais poursuivi mes études, fait mon service militaire,
03:17j'étais entré dans la gendarmerie et on s'était perdu de vue.
03:21Mais de loin en loin, j'avais de ces nouvelles par mes parents qui l'aimaient beaucoup.
03:26Il venait toujours passer ses vacances à Carantec et il disait toujours des vers,
03:30« Vous vous troublez, madame, et changez de visage.
03:33Lisez-vous dans mes yeux quelques tristes présages. »
03:39Je me décidai d'ouvrir l'enveloppe.
03:42J'étais assez intrigué, car c'était bien la première fois que je recevais une lettre d'Étienne.
03:48Il correspondait avec mes parents à l'occasion des voeux du nouvel an ou des anniversaires,
03:51mais les relations épistélaires s'arrêtaient là.
03:56La lettre commençait ainsi.
03:59« Mon cher Yann, il y a bien longtemps que je ne t'ai vu.
04:04La dernière fois c'était, je crois, juste avant ton départ pour le service militaire.
04:09Ça ne date pas d'hier.
04:11Mais je suis toujours un fidèle de Carantec et avec tes chers parents on parle souvent de toi.
04:17Grâce à eux, j'ai suivi étape par étape toute ta carrière dans la gendarmerie
04:21et je sais que maintenant tu as le grade de commandant. »
04:26Après avoir longuement réfléchi, j'ai décidé de m'adresser à toi, le fils de mes amis,
04:31et de te confier ce qui, depuis des jours et des jours, empoisonne ma vie.
04:38Voilà en détail tout ce qui est arrivé.
04:42Tu sais que je travaille en tant que régisseur au Théâtre Harlequin à Paris.
04:48Tout a commencé le 17 décembre.
04:52La représentation devait avoir lieu à 21 heures.
04:55Comme chaque soir, depuis le début de la saison, j'avais fait ma mise en place,
05:00préparé les accessoires remplis, les bouteilles et la carafe de whisky avec un mélange de ma composition.
05:05J'avais vérifié le bon fonctionnement de la sonnette, du magnéto et du rideau de fer.
05:11J'avais passé l'aspirateur sur le plateau. Bref, tout était prêt.
05:16J'entendais, venant de la loge de l'habilleuse, le ronflement du fer à vapeur
05:21avec lequel elle repassait les costumes de scène des comédiens.
05:25Du côté des loges, des artistes, la belle Emmanuelle Verne était, comme d'habitude, la première arrivée.
05:32Enveloppée dans un peignoir moelleux, elle se préparait longuement,
05:36ondulant ses cheveux, peignant ses ongles et recouvrant son beau visage d'un maquillage savant.
05:43Vers vingt heures, la petite Nicole, qui jouait la soubrette,
05:47était venue m'embrasser gentiment après avoir salué l'habilleuse.
05:51Peu à peu, le reste de la troupe avait fait son apparition.
05:55Georges Pourret, le comique, Ève Seurat, la jeune première,
05:59François Gaillard, le jeune espoir qui monte,
06:02et, venant des loges, on entendait un joyeux tintamarre ponctué d'éclats de rire.
06:09À vingt heures quarante-cinq, j'avais fait ma première annonce.
06:11Mesdames et messieurs les comédiens, bonsoir, la représentation commencera dans un quart d'heure.
06:18Montant de la salle, on entendait ce brouhaha caractéristique des spectacles qui affichent complet,
06:25le bruit confus de la salle bondée dont les spectateurs ont retenu leur place depuis longtemps.
06:31Il y avait, en plus, cette euphorie qui précède les fêtes de Noël
06:35et qui s'empare du public, qui s'installe bien au chaud pour deux heures et demie de plaisir et de rêve.
06:43Et tout à coup, j'avais entendu claquer la lourde porte d'accès aux loges.
06:49Ça ne pouvait être que Verdurin.
06:52Il n'y a que lui pour claquer ainsi cette malheureuse porte qui, un jour, finira par tomber en morceaux.
06:59Depuis ma cabine de régie, j'entendais, comme chaque soir, Verdurin qui perrorait,
07:04se vantant d'être le plus beau, le plus intelligent, le plus malin, le plus talentueux.
07:10Pas plus tard qu'hier, il s'était même vanté d'être le comédien le mieux payé de Paris,
07:14et il m'avait avancé des chiffres.
07:16Quel salaud !
07:18Il disait ça devant moi, moi qui gagne à peine le smig.
07:22Moi qui gagne à peine le smig.
07:25Mais ce qui m'exaspère le plus en lui, c'est qu'il a beau être goujat, grossier, prétentieux,
07:31elles sont toutes folles de lui.
07:34Il paraît même que la patronne, la directrice du théâtre, a été sa bonne amie il n'y a pas si longtemps.
07:40Le mois dernier, c'était la belle Emmanuelle qui en pincait pour lui.
07:45Ève sera la jeune première, tout le monde le sait, c'était il y a trois mois.
07:51Quand Verdurin l'a laissé tomber, elle a tenté de se suicider.
07:54Tous les journaux en ont parlé d'ailleurs.
07:57Même la petite Nicole, la jolie soubrette qui m'avait pourtant l'air plus futée que les autres,
08:01est tombée dans les bras de cet imbécile.
08:05Ça fait trois soirs qu'il la raccompagne dans sa grosse voiture après la représentation,
08:09et ça, ça veut tout dire.
08:13À 20h55, j'avais fait ma deuxième annonce en coulisses.
08:17Mesdames et messieurs les comédiens, la représentation commencera dans cinq minutes.
08:21Dans cinq minutes. Veuillez vous préparer à entrer en scène, s'il vous plaît.
08:26C'est toujours à ce moment-là que Verdurin s'agit comme un beau diable.
08:30Odette ! Où est la billeuse ? Où est ma chemise ? Où sont mes chaussettes ?
08:34Odette ! Odette, mission de confiance, va me chercher un café,
08:37et surtout, va dans la salle applaudir mon entrée.
08:41Et cette pauvre Odette qui est aussi toquée de lui que les autres...
08:45Oui, M. Verdurin, j'y vais tout de suite, M. Verdurin.
08:48Voilà vos chaussettes, M. Verdurin.
08:52À 21h, la rumeur venant de la salle était celle des jours où le public a du talent.
08:57Avant même que le rideau soit levé, je peux la reconnaître.
09:02Mesdames et messieurs les comédiens, en scène, s'il vous plaît. En scène.
09:08Et la représentation avait commencé.
09:11Verdurin était en pleine forme.
09:13La petite Nicole y était peut-être pour quelque chose.
09:16Le public applaudissait chaque entrée, et tous les effets de Verdurin faisaient mouche.
09:20C'était vraiment une représentation exceptionnelle.
09:25Ève Seurat, elle, faisait Grisemines.
09:28Pendant le monologue de Verdurin, au début de la pièce, je peux observer les comédiens.
09:33Ils sont tous là dans le foyer du théâtre, bavardant ou feuilletant des journaux.
09:38Emmanuel et Georges Pouret jouent au scrabble et se disputent immanquablement.
09:42Ève se remaquille, et Nicole fait du yoga.
09:47Ce que le public ne sait pas, c'est que pendant le déroulement du spectacle,
09:51un autre spectacle a lieu en coulisses.
09:56Ève Seurat se préparait à faire son entrée.
09:59Je me souviens parfaitement.
10:01Elle venait de se repoudrer devant la glace,
10:04et elle a pris le revolver que j'avais préparé en début de soirée
10:07et déposé sur la table avec les autres accessoires.
10:11Et elle est entrée en scène.
10:14Au moment où elle tire sur Verdurin, il y a eu un coup de feu, comme tous les soirs.
10:20Jusque-là, rien d'anormal.
10:24En coulisses, nous n'avons pas bougé, on a l'habitude.
10:28Quand Ève tire sur son partenaire avec le revolver chargé à blanc,
10:32il y a toujours un murmure de frayeur venant du public,
10:35et puis on entend distinctement la voix de la comédienne qui crie
10:39« Tu l'auras voulu ! »
10:42Et le public applaudit.
10:46Ce qui nous a paru étrange, après le coup de revolver,
10:51c'est le murmure qui s'est un peu transformé en tumulte,
10:56et Ève qui, sortant de scène en titubant,
10:59balbutiait d'une voix tremblante
11:02« Je l'ai tué ! Je l'ai tué ! »
11:15Voilà.
11:17Verdurin était mort, assassiné.
11:21Quelqu'un avait remplacé la balle à blanc par une vraie balle.
11:25Qui avait tué la vedette du théâtre de l'Arlequin ?
11:31C'est ce que vous saurez dans quelques instants.
11:56Ce matin, j'ai reçu une lettre d'Étienne de Mazière,
12:00un vieil ami de mes parents que j'ai connu lorsque j'étais enfant.
12:05Étienne de Mazière est régisseur dans un théâtre parisien
12:08où se joue une pièce à succès
12:10et dont la vedette est le célèbre comédien Verdurin.
12:14Toutes les femmes sont folles de Verdurin,
12:16y compris les comédiennes de la troupe
12:18qui, tour à tour, lui ont accordé leur faveur.
12:21En fait, dans sa lettre,
12:23de Mazière me relate un drame qui a eu lieu au théâtre.
12:28Pendant la représentation,
12:30au moment où la jeune première tire sur Verdurin
12:33avec un revolver chargé à blanc,
12:36celui-ci s'écroule, mort.
12:40Quelqu'un a mis une vraie balle dans le revolver.
12:44Verdurin a été assassiné.
12:47La lettre d'Étienne de Mazière continuait ainsi.
12:51« J'ai baissé le rideau immédiatement
12:53et j'ai fait une annonce pour demander au public de quitter la salle.
12:58Le médecin de service est monté sur scène
13:01et n'a pu que constater le décès de Verdurin.
13:06Un vent de panique soufflait sur le théâtre.
13:09Certains spectateurs ne voulaient plus voir Verdurin mourir.
13:13Un vent de panique soufflait sur le théâtre.
13:16Certains spectateurs ne voulaient pas quitter leur fauteuil,
13:19espérant que le rideau se relèverait
13:21et que le spectacle reprendrait.
13:25Les comédiens, consternés et silencieux pour une fois,
13:30étaient réunis dans le foyer
13:32où le médecin essayait de calmer Ève Seurat en pleine crise de nerfs.
13:38Je fis une seconde annonce pour demander au public de sortir
13:41et se faire rembourser à la caisse.
13:45Puis la police est arrivée et l'enquête a été menée tambour battant.
13:51Encore sous le choc, Ève Seurat ne savait que répéter
13:55« Je l'ai tué, c'est moi qui l'ai tué ! »
13:59Et c'est entre deux policiers qu'elle a quitté le théâtre.
14:04Le lendemain, dans la presse, il y avait sa photo en première page
14:07à côté de celle de Verdurin.
14:09Crime passionnel au théâtre Harlequin.
14:14Tu as dû en entendre parler, Yann.
14:17Tous les journaux racontaient l'affaire.
14:19Ils expliquaient que Ève était en analyse, extrêmement fragile psychiquement
14:24et qu'elle était éperdument amoureuse de la vedette du spectacle
14:28qui, de tempérament volage, l'avait très vite délaissée
14:32et cette déception amoureuse l'avait complètement détruite.
14:36Alors, dans son esprit malade,
14:39elle avait réalisé que le meurtre était la seule solution
14:45et l'idée de tuer Verdurin avait dû s'immiscer en elle insidieusement.
14:51Changer la balle du revolver avait dû être pour elle un jeu d'enfant.
14:56Le revolver était placé, comme tous les soirs, au même endroit
14:59et chacun jouait avec, dans les coulisses, avant d'entrer en scène.
15:03Ève avait donc dû enlever la balle à blanc
15:06et mis une vraie balle, tout cela en quelques secondes.
15:12Elle s'était accusée et puis s'était enfermée dans son mutisme.
15:17Tout était contre elle, même son psychiatre
15:20qui expliquait, à qui voulait l'entendre, les raisons du geste de la criminelle.
15:26Pour lui, bien évidemment, cette affaire était une excellente publicité.
15:30Mais je sais bien, moi, qu'Ève est innocente.
15:36Je sais bien, moi, qui a tué Verdurin.
15:42Je te l'ai dit, Yann, je n'ai pas quitté la régie ce soir-là.
15:45Je sais qui a manipulé le revolver.
15:48Je te l'ai dit, tous les comédiens y touchaient avant d'entrer en scène.
15:52D'ailleurs, la police a trouvé les empreintes de chacun d'entre nous,
15:55sur l'arme du crime.
15:58Oui, Yann, je sais, moi, qui avait de bonnes raisons
16:02d'assassiner la vedette du spectacle le plus couru de l'année.
16:09Je vais te dire, Yann, qui a tué Verdurin.
16:15Celui qui a mis une vraie balle dans le revolver
16:18est un comédien qui a fait de l'art.
16:21Celui qui a mis une vraie balle dans le revolver
16:24est un comédien qui avait débuté en même temps que Verdurin,
16:27comme lui, élève au conservatoire,
16:29qui avait été son ami, son confident,
16:32qui avait eu les mêmes rêves, les mêmes espoirs,
16:35qui avait autant de talent, mais beaucoup moins de chance.
16:40Un comédien qui avait eu des seconds rôles,
16:43puis des petits rôles,
16:46puis des rôles de plus en plus insignifiants,
16:50et pour finir, plus de rôle du tout,
16:54jusqu'au jour où, pour vivre, pour subsister seulement,
16:59il avait accepté d'être le régisseur du théâtre.
17:05Oui, mon cher Yann, j'ai tué Verdurin
17:09parce qu'il ne méritait pas de vivre.
17:12Il ne méritait pas d'être une vedette.
17:15Je l'ai tué parce qu'il était méchant, cruel,
17:18misquin, prétentieux, mais surtout, surtout, Yann,
17:22surtout parce que la petite Nicole,
17:26il n'aurait pas dû y toucher.
17:29Tu sais, mon grand, Nicole, c'est tout ce qui me restait à moi
17:33d'espoir sur la terre.
17:35Non, la petite Nicole,
17:39il ne fallait pas qu'il y touche.
17:42Tu dois croire que, comme un vieux fou,
17:45tu es entiché de cette petite, mais non, non,
17:49ce n'est pas du tout ce que tu penses.
17:52Nicole, c'est une longue et vieille histoire.
17:56Permets-moi en deux mots de te la conter.
18:00Quand j'étais élève au conservatoire,
18:03il y a de cela fort longtemps,
18:05j'étais très amoureux d'une ravissante comédienne
18:09dont la passion pour moi ne dura qu'une saison,
18:13le temps de faire un très beau bébé.
18:17Et puis la belle comédienne devint une vedette,
18:20elle épousa un producteur connu qui éleva l'enfant
18:23et lui donna son nom,
18:26tandis que moi, je ratais ma carrière
18:31et je restais dans l'ombre.
18:35Tu l'as compris, Yann, Nicole est ma fille,
18:40mais elle n'a jamais su que j'étais son père,
18:42ni sa mère, ni moi ne la lui avons dit.
18:47J'étais son parrain, son vieux parrain,
18:53et de loin je veillais un peu sur elle.
18:57Elle était devenue ma passion,
19:01ma dernière passion, la plus belle.
19:07Alors tu imagines aisément, mon cher Yann,
19:11quand j'ai su que Verdurin posait ses sales pattes sur elle,
19:16combien je me suis inquiété, combien j'ai souffert.
19:23Je les surveillais discrètement,
19:25j'ai bien vu qu'elle était folle de lui,
19:28que pour la première fois de sa vie,
19:30elle aimait vraiment un homme,
19:34et lui, ce salaud,
19:38allait brutalement mettre fin à leur aventure.
19:42Elle ne le savait pas, elle,
19:44mais moi, j'avais surpris une conversation
19:47dans la loge d'Emmanuel Verne,
19:48avec laquelle Verdurin avait renoué la veille.
19:52Je n'ai pas supporté qu'il se moque ainsi de ma petite Nicole.
19:57Elle ne méritait pas cela.
20:00Elle était belle, jeune, sincère, confiante,
20:05et elle allait cruellement souffrir
20:08par la faute de cette ordure sans scrupule.
20:14Alors j'ai décidé de punir Verdurin
20:19pour tout le mal qu'il avait fait autour de lui.
20:25Mon cher Yann,
20:27quand tu recevras cette lettre,
20:30je serai loin, très loin,
20:35mais je te demande de faire le nécessaire
20:37pour Ève Seurat, qui est innocente.
20:42Je t'embrasse, mon grand,
20:45ainsi que tes chers parents,
20:47qui ont été pendant tant d'années
20:50mes seuls et vrais amis.
20:55Qu'en as-tu, Yann ?
20:58Qu'en as-tu ?
21:02Signé, Étienne.
21:07J'appelai aussitôt au Quai des Orfèvres à Paris
21:10le commissaire divisionnaire Thillet,
21:12avec qui j'avais souvent eu l'occasion de travailler
21:15et avec qui j'étais resté en amitié.
21:19Je lui relatai brièvement les faits
21:21et lui envoyai par faxe la confession d'Étienne.
21:26Peu de temps après,
21:27ce que je craignais m'était confirmé.
21:30On avait retrouvé Étienne de Mazière
21:33mort à son domicile.
21:36Il avait absorbé une forte dose de barbiturique.
21:43Cet été, mon père et son nouveau matelot
21:47iraient seuls à la pêche
21:49et ma mère ne pleurerait plus
21:51en écoutant les merveilleux vers de Racine.
21:55Étienne était devenu, enfin,
21:59malgré lui,
22:01un héros de tragédie.
22:05Je n'écoute plus rien
22:08et pour jamais, adieu.
22:11Pour jamais.
22:14Seigneur,
22:16penchez-vous en vous-même
22:18combien ce mot cruel est affreux
22:21quand on aime.
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