• le mois dernier


Retrouvez "Au Coeur du Crime " sur : http://www.europe1.fr/emissions/au-coeur-du-crime

Category

🗞
News
Transcription
00:00Bienvenue au Cœur du Crime, un podcast issu des archives d'Europe 1.
00:08Savez-vous que plus d'un tiers des crimes et délits commis en France sont traités par la gendarmerie nationale ?
00:18Bonsoir, je m'appelle Jan Kermadek, je suis commandant de gendarmerie.
00:27Je dirige une section de recherche dont la mission essentielle est une mission de police judiciaire.
00:42L'histoire que je vais vous raconter est une histoire vraie.
00:46Tous les faits sont réels et se sont déroulés en France.
00:49Seuls les noms des personnes et des lieux ont été changés.
00:56M. Lynch, chef du rayon des vêtements féminins chez Martel, est ce qu'on appelle un beau diable d'homme.
01:04Sa haute taille, ses cheveux noirs ondulés, sa petite moustache et sa bouche sensuelle font de tels ravages parmi les clientes
01:14qu'il ne s'étonne pas ce jour-là d'éveiller l'attention de deux d'entre elles.
01:20Phénomène courant.
01:22Ce qu'il est moins, ce sont les deux dames, habillées comme des campagnardes, un peu trop rondes et plus très jeunes.
01:30Ce sont de vraies jumelles.
01:33« Pourriez-vous nous dire, monsieur, où sont les sacs à main ? » demande l'une d'elles en battant des cils.
01:41M. Lynch leur désigne le rayon d'un geste noble et adresse aux deux dames son sourire le plus photogénique, puis s'éloigne.
01:52Quelques minutes après, Marilyn, la vendeuse des sacs, le tire par la manche.
01:58« Ces béossiennes, lui dit-elle à voix basse, veulent acheter deux de nos sacs les plus coûteux et ont la prétention de me payer par chèque.
02:07Voulez-vous donner votre accord ? »
02:10M. Lynch s'en retourne d'un pas digne vers le comptoir des sacs.
02:15Les deux dames le regardent venir avec les yeux brillants.
02:19« Le chèque d'un montant de 750 dollars est signé Mademoiselle Régina Dunbar et l'adresse est Court Street à Thornbury.
02:31« Thornbury, dit-il. Où est-ce, Mademoiselle Dunbar ?
02:37« C'est à soixante kilomètres au nord, lui répond la dame en vert. Nous ne sommes pas exactement d'ici.
02:45« Pourriez-vous me montrer une pièce d'identité, s'il vous plaît, Mademoiselle Dunbar ? »
02:51Mademoiselle Dunbar sort de son sac une carte où il peut lire cette simple phrase.
02:56« En cas d'accident, veuillez prévenir Rosalie Dunbar. » L'autre, donc, la jumelle en marron.
03:05« Je crois bien que c'est tout ce que j'ai comme papier d'identité, dit Mademoiselle Régina.
03:11« Mais ne vous faites pas de soucis, monsieur. Nous avons plein d'argent en banque. »
03:16Et elle lui sourit.
03:18« Plein d'argent en banque, se répète machinalement M. Lynch. »
03:25Et soudain, il dit « Eh bien, d'accord pour le chèque, Mademoiselle Dunbar. »
03:30Les deux dames se confondent en remerciements, couvent M. Lynch du regard, puis s'en vont comme à regret.
03:38« Vous avez commis une grosse erreur, M. Lynch, dit Marie-Lyne. »
03:44Une semaine plus tard, M. Lynch apprend que le chèque Dunbar a été honoré.
03:52« Et voilà, ma petite Marie-Lyne, triomphe M. Lynch. Je sais, moi, reconnaître un visage honnête. »
04:00« Plein d'argent en banque, se répète-t-il. »
04:07« Combien de dames peuvent-elles, en effet, s'offrir un sac de trois cent soixante-quinze dollars ? »
04:14« Et elles sont célibataires, en plus, et sensibles à mon charme. »
04:20M. Lynch sourit. « Pourquoi ne pas tenter ma chance ? »
04:26Le dimanche suivant, dans sa petite voiture de sport, M. Lynch se rend à Tannbury.
04:34La situation qu'il découvre est des plus encourageantes.
04:38La maison des Dunbar est vieille, mais très bien entretenue.
04:42Une maison à un étage, de belle taille, fraîchement repeinte et entourée d'une magnifique pelouse.
04:49Sans hésiter, M. Lynch garde sa voiture, remonte l'allée jusqu'au Porsche et sonne.
04:58C'est une dame d'un certain âge qui lui ouvre, longue, maigre et sèche.
05:04« Excusez-moi, dit-il, je m'appelle Oscar Lynch, chef du rayon des vêtements féminins chez Martel.
05:12Les demoiselles Dunbar y ont fait un petit achat il y a une semaine et j'aimerais leur parler. »
05:19La vieille dame le dévisage avec méfiance, puis…
05:24« Une minute, je vous prie. »
05:27Elle disparaît, revient au bout d'une minute et lui jette, toujours aussi peu aimable,
05:34« Veuillez me suivre. »
05:37M. Lynch entre derrière elle dans un salon démodé où l'attend l'une des demoiselles Dunbar.
05:43« Laissez-nous, Jennifer, » dit-elle, puis d'un ton troublé, en battant des cils comme la première fois,
05:50« M. Lynch, un ennui pour notre chèque ? »
05:54« Oh non, mademoiselle, aucun ennui, mais ce n'est pas à propos du chèque que je suis venue. »
06:01Et avant qu'il n'ait pu s'expliquer davantage, son hôtesse sourit, tourne la tête vers le jardin et crie d'une voix aiguë,
06:08« Régina, viens au salon ! »
06:11« Celle-là, c'est donc Rosalie, en déduit M. Lynch. »
06:18« Il se trouve, » dit-il, lorsque Régina s'est assise près de sa sœur,
06:24« il se trouve que je me promenais en voiture dans les environs. »
06:28« Voyez-vous, je suis célibataire, sans famille, et chaque fois qu'il fait beau, le dimanche après-midi, j'explore le pays. »
06:36« Aujourd'hui, ma promenade m'a mené dans votre petite cité, et je me suis souvenu du nom de Tanbury et de vous, mesdames. »
06:45« Aussi, me suis-je permis de venir vous remercier. »
06:50« Comme c'est charmant ! Mais de quoi ? » fait Rosalie.
06:57« Oh, Régina ! »
06:59« Laquelle aise, bon Dieu ! » se demande M. Lynch en se frottant discrètement les yeux.
07:04« Voyez-vous, » dit-il, « étant donné que vous étiez tout à fait inconnu dans notre magasin, j'ai pris un risque en acceptant votre chèque. »
07:14« Or, le chèque était absolument valable. Je voulais vous en remercier de la part de Martel, et j'espère sincèrement que vous continuerez à nous honorer de votre clientèle. »
07:27Conquise, les dames l'invitent aussitôt à dîner.
07:32À table, avec tout le tact dont il se sait capable, M. Lynch poursuit sa petite enquête.
07:41« Vous savez, » dit-il, « je crois que j'ai vraiment fait preuve d'un excellent jugement au sujet de ce chèque. »
07:51« La chose n'avait rien le sûr. Trois cent soixante-quinze dollars, c'est beaucoup d'argent pour un sac à main. »
07:59« Et vous êtes si discrète. Enfin, vous n'aviez pas l'air tellement prospère. Il aurait pu s'agir d'une escroquerie. Vous auriez pu être en train de les voler, ces sacs. »
08:13Les sœurs sourient d'un air modeste.
08:17« Nous n'avons jamais rien volé, » fait l'une d'elles.
08:21« Non, bien sûr, je ne vous prenais pas pour des voleuses. »
08:25« Nous n'avons jamais été obligés d'en venir à de telles extrémités, M. Lynch. Nous n'avons même jamais eu besoin de travailler. »
08:34« Vraiment ? »
08:35« Oui, nous avons toujours eu de l'argent. Plus que nous n'en pouvions dépenser. Nous ne savons même pas combien. Oui, nous sommes terriblement gâtés par la vie. »
08:48Et toutes deux partent d'un joyeux petit rire.
08:52M. Lynch les trouve charmantes, soudain, avec leurs bonnes joues roses, leurs beaux bras ronds et leurs jolies cheveux clairs relevés en chignon.
09:05En partant, il promet de revenir, ce qu'il ne manque pas de faire les semaines suivantes.
09:11Les soirées agréables se succèdent et, un dimanche après-midi, l'une des sœurs, toute rougissante et se mordant les lèvres, lui parle ouvertement.
09:23« M. Lynch, quelles sont vos intentions ? »
09:28Pris par surprise, M. Lynch ne sait que répondre.
09:33« Ce que nous voulons dire, M. Lynch, c'est que Tambourie est une petite ville. Les gens commencent à jaser et nous aimerions savoir quoi leur répondre, cher M. Lynch. Vos intentions sont-elles honorables ? »
09:51Les yeux en boule de l'auto, M. Lynch demande. « Vous voulez parler de mariage ? »
10:00« Oui, de mariage, M. Lynch. Trouvez-vous l'idée repoussante ? »
10:07Et toutes deux le regardent les yeux humides.
10:11« Ah non, non, non ! Non, en aucune façon ! Quelle autre raison aurais-je de venir toutes les semaines ici depuis deux mois ? Je suis très seul, vous savez, et j'ai trouvé ici non seulement de l'amitié, mais une attirance, une attirance romantique, ce sentiment qu'un homme éprouve toujours quand il rencontre la femme de ses rêves. »
10:37Alors toutes deux, haletantes, se penchent et murmurent. « Laquelle ? »
10:45« Je vous demande pardon ? »
10:48« Laquelle de nous deux est la femme de vos rêves ? »
10:54« Seigneur ! » songe M. Lynch en se frottant les yeux. « Laquelle, en effet ? »
11:02« Mesdames, » répond-il, « voilà pourquoi j'ai attendu si longtemps avant de me déclarer. Vous êtes toutes les deux si charmantes. »
11:14« Est-ce la seule raison, M. Lynch ? »
11:20M. Lynch sursaut et bredouille. « Je ne comprends pas très bien. »
11:27« Avez-vous hésité, M. Lynch, en vous rendant compte que nous vous aimions toutes les deux et que l'une de nous serait terriblement déçue si vous demandiez l'autre en mariage ? »
11:41« Ça pourrait être une façon de présenter les choses, » réplique prudemment M. Lynch.
11:49« Eh bien, nous allons vous rassurer tout de suite, M. Lynch. Oui, nous sommes également éprises de vous, mais nous n'avons plus vingt ans, comme vous voyez, et notre désir de nous marier est si grand que chacune de nous deux est prête à se sacrifier pour le bonheur de l'autre. »
12:09« Donc, M. Lynch, » reprend-elle sur un ton solennel, « voulez-vous revenir samedi prochain ? Vous dormirez ici. Dimanche matin, ma sœur et moi irons prier à l'église, et à notre retour, au moment du déjeuner, vous pourrez prononcer sans crainte le prénom de celle que vous aurez choisie. »
12:36« Eh bien, me voilà au but, » se dit M. Lynch en regagnant sa voiture. Mais une ombre soudain se glisse près de lui. « Fichez le camp d'ici ! » siffle Jennifer.
12:50« Comment ? » bredouille M. Lynch interloqué, en voyant le visage convulsé de haine de la vieille gouvernante. « Vous êtes un ignoble individu, M. Lynch. Abusez ainsi deux pauvres femmes, deux innocentes, deux enfants qui ne connaissent rien à la vie. »
13:06« Mais vous êtes folles ! De quoi vous mêlez-vous ? C'est leur argent que vous voulez, hein ? Et vous vous en fichez bien d'elle. »
13:14« Jennifer ! » appelle soudain l'une des sœurs Dunbar sur le seuil de la maison. « Un conseil, M. Lynch, décampez et ne revenez jamais, sinon il vous en cuira. »
13:29« Ah, M. Lynch, vous voilà bien troublé. Allez-vous continuer votre cours aux jumelles ou cèderez-vous à la menace ? »
14:10Et ils ne cessent de les confondre. Leur gouvernante le met à la porte en lui conseillant de ne jamais revenir. Manifestement, elle se méfie des coureurs de dot.
14:22Le samedi suivant, lorsqu'il arrive en fin d'après-midi, M. Lynch a son plan tout prêt. Ce sera comme jeter les dés. Une affaire de hasard.
14:35Les demoiselles Dunbar l'accueillent avec une gravité émue. Puis, l'une d'elles l'invite à faire un tour de jardin.
14:44« Je suis désolée de l'incident de la semaine dernière, » dit-elle tandis qu'il marche sur la pelouse.
14:51« Jennifer est à notre service depuis si longtemps. Elle nous aime comme une mère et elle redoute ce qui va se passer. Il faut la comprendre, M. Lynch.
15:03Heureusement, elle est partie chez son frère pour le week-end. Elle ne reviendra que demain soir. Comme ça, nous serons tranquilles. »
15:12Elle lui glisse un regard tendre puis ajoute en souriant « Et c'est ma sœur qui est au fourneau. »
15:20« Rosalie ou Regina ? » se demande M. Lynch, mal à l'aise.
15:27« Vous verrez, c'est un vrai cordon bleu. Elle a toujours aimé les travaux pratiques. Moi aussi, mais je suis plus rêveuse. J'aime beaucoup la lecture. Dickens, par exemple. Ah, les grandes espérances !
15:42Or, M. Lynch, que diriez-vous d'un peu de lecture à haute voix en attendant le dîner ? »
15:49« Oh, quelle bonne idée ! » s'écrit M. Lynch. « Asseyez-vous sur le banc. Je vais chercher le livre au salon. Je reviens dans une minute. »
15:59M. Lynch s'assied et se met à rêver sur les rosiers qu'il aperçoit au fond du jardin.
16:05Si magnifiques rosiers de couleurs différentes !
16:10« Ils sont beaux, n'est-ce pas ? » dit la silhouette replète de Mlle Dunbar à nouveau près de lui.
16:17« Laquelle est-ce ? » se demande-t-il encore.
16:21« Oui, Régina et moi adorons les roses. »
16:26« Ah ! Régina, soupire M. Lynch, c'est donc Rosalie qui est près de moi. »
16:33Et Rosalie lit jusqu'au dîner.
16:38Et M. Lynch s'endort à moitié.
16:42Le dîner est très gai, délicieux et le vin coule à flot.
16:46« Mon Dieu ! » glousse l'une des sœurs. « Notre M. Lynch ne tient plus debout. Il va falloir le porter jusqu'à son lit. »
16:54Et tous trois, avec de grands éclats de rire, se transportent jusqu'à l'étage.
17:00Peu après, M. Lynch se réveille tout habillé sur son lit.
17:05« Est-ce qu'il a dormi ? »
17:07Il entend des voix en bas sur la terrasse.
17:11Il se lève et s'approche de la fenêtre.
17:15« Tu es sûr qu'il dort ? » dit l'une des sœurs.
17:19« Ah ! Avec ce qu'il a bu ! »
17:22« Pauvre M. Lynch ! »
17:24« Il va falloir lui expliquer que ce n'est pas possible. »
17:28« Le pauvre M. Lynch, comme tu dis, nous a trompés pendant deux mois. »
17:33« Sa tête, tout à l'heure, quand je suis arrivé à ta place avec le livre, il ne s'est rendu compte de rien. »
17:41« Jennifer avait raison. Encore un qui n'en veut qu'à notre argent. »
17:47« Il va donc falloir lui demander de partir et de ne plus jamais revenir. »
17:51« C'est bien triste. »
17:53« Mais nous resterons ensemble, ma chère Rosalie. »
17:57« En tout cas, nous n'utiliserons pas ceux qui se trouvent dans le secrétaire de ma chambre. »
18:02« Et qui est, sommes toutes, la seule manière de nous différencier avec certitude. »
18:08Elles se mettent à rire.
18:10« Enfin, ma chère Regina, nous voilà, une fois de plus, condamnées à ne faire qu'une. »
18:19Puis la terrasse s'éteint et elles rentrent toutes deux dans la maison.
18:26M. Lynch s'arrache à la fenêtre et se laisse tomber sur le lit.
18:32« Deux mois d'effort pour rien, » gémit-il.
18:36Et il se tord de rage sur les draps.
18:40« Mais ce secrétaire, ce secrétaire ! Demain, on verra bien. »
18:47Le lendemain, lorsque M. Lynch apparaît pour le petit-déjeuner, ça n'est qu'un cri.
18:53« Mon Dieu, M. Lynch, quelle tête vous faites ! On dirait que vous n'avez pas fermé l'œil de la nuit. »
19:01« Oui, j'ai mal dormi, en effet. »
19:03« L'alcool ! »
19:05« Pauvre M. Lynch ! Reposez-vous pendant que nous serons à l'église, et pas un mot avant le déjeuner, n'est-ce pas ? »
19:14dit l'une des sœurs en lui mettant un doigt sur la bouche.
19:18Et les voilà parties toutes guillerettes.
19:22« Ces grosses chipies me font marcher, » se dit M. Lynch furieux.
19:27Il monte à l'étage, ouvre la porte d'une des chambres, fonce sur le secrétaire qui l'aperçoit au fond.
19:34À l'intérieur, une carafe de vin, un petit sachet rempli de poudre blanche, deux enveloppes ouvertes.
19:43Deux lettres.
19:45Il en lit une.
19:47« Ma chère Rosalie, je ne veux pas faire obstacle à ton bonheur et je préfère la mort à notre séparation. »
19:54« Pardonne-moi. »
19:56La deuxième lettre, qui commence par « Ma chère Régina », est rédigée dans les mêmes termes.
20:03« Voilà donc ce qu'elles appelaient se sacrifier pour le bonheur de l'autre, » songe M. Lynch hypnotisé.
20:13« Eh bien, puisque tout est en place. »
20:17« Puisque tout est en place. »
20:22Il redescend avec la carafe et le sachet, prend trois verres à la cuisine et les remplit.
20:29Dans l'un des trois verres qu'il localise soigneusement sur le plateau, il verse d'une main tremblante le contenu du sachet.
20:39Puis il remplace la carafe par une bouteille de Bordeaux et rapporte le tout au salon.
20:46À midi tapant, les sœurs Dunbar reviennent de l'église et trouvent un M. Lynch frais et dispo.
20:54« Je vous ai préparé un petit apéritif », leur dit-il.
20:58« Vous êtes un ange, M. Lynch. »
21:02Elles enlèvent leur petit chapeau et s'approchent.
21:06Alors M. Lynch saisit le plateau et le leur présente.
21:11Elles acceptent chacune un verre.
21:13La sœur qui se tient à droite prend le verre empoisonné.
21:18« Après tout, je ne sais pas qui elle est », se dit M. Lynch pour calmer sa mauvaise conscience.
21:25Et puis tout ira très vite.
21:28Quand la sœur de droite sera étendue raide et froide sur le plancher,
21:33il saisira la survivante avec une ardeur passionnée et lui dira
21:37« Tout l'amour que j'avais pour vous deux, je peux maintenant te le donner à toi seule, Régina. »
21:44Régina ou Rosalie, on verra.
21:47Il y aura la lettre de suicide pour répondre aux préoccupations de la police,
21:52puis un mariage et enfin une vie facile.
21:58« Buvez, belle dame ! » séquette-t-il et il vide son propre verre pour donner l'exemple.
22:03Lorsqu'il le repose, il s'aperçoit que ni Régina ni Rosalie ne l'ont imité.
22:13« Buvez ! » insiste-t-il timidement.
22:18Elles échangent un regard.
22:22« Ah, il a mordu ! » soupire Lune.
22:27« Oui, il a mordu », dit l'autre.
22:32« Vous nous décevez, monsieur Lynch. »
22:36« Hein ? Qu'ai-je fait ? » demande-t-il.
22:41« Vous êtes comme les autres.
22:44Nous avons appris maintenant à deviner ce qui allait se passer avec une assez grande exactitude.
22:50»
22:51« Mais de quoi parlez-vous ? »
22:54Soudain, il se sent légèrement étourdi.
22:59Une faiblesse l'envahit.
23:01Il se laisse tomber sur le canapé.
23:03« Vis-là, monsieur Lynch, » dit Lune.
23:07« Oh oui, vis-là, monsieur Lynch, » répète l'autre.
23:12« Mais qu'est-ce qui se passe ? » murmure monsieur Lynch affolé.
23:17Toutes deux s'assoient près de lui, se penchent, et il entend Lune dire sur un ton pleurnichard.
23:25« Vis-là, monsieur Lynch.
23:27Nous étions pourtant parfaitement disposés à nous suicider pour vous.
23:32Mais aucune de nous n'a envie d'être assassinée,
23:35ni de mourir pour faire plaisir à un glouton chasseur de dots.
23:41« Mais qu'est-ce que vous racontez ? » bredouille monsieur Lynch, qui se sent de plus en plus lourd.
23:49« Voyez-vous, monsieur Lynch,
23:51la poudre que vous avez prise pour du poison n'était en fait que du sucre.
23:58C'est le vin qui était empoisonné.
24:02Monsieur Lynch pousse un râle.
24:05Ses jambes sont comme du plomb.
24:08Et maintenant, il va mourir, le méchant garçon. »
24:14Dans son champ visuel qui se rétrécit rapidement,
24:18il voit leurs deux visages ronds penchés sur lui.
24:22Il essaie de se débattre.
24:24« Calmez-vous.
24:26Détendez-vous.
24:30Voilà.
24:32Comme ça.
24:34Ça n'est rien, vous verrez.
24:36Et puis, vous n'êtes pas le premier, vous savez. »
24:41« Pas le premier ? » râle monsieur Lynch.
24:45« Oh non !
24:47Il y a eu monsieur Fitzmaison,
24:50et monsieur Penwell,
24:52et monsieur Spindle également.
24:55Tous comme vous, prêts à tuer pour de l'argent. »
25:00« Sauf ce pauvre monsieur Winkerley, naturellement.
25:03Oui, je reconnais qu'avec lui, nous avons fait une erreur.
25:07Il n'aurait pas fait de mal à une mouche, lui.
25:10C'est pourquoi nous lui avons donné de belles roses blanches.
25:15« Des roses blanches ? » expire monsieur Lynch.
25:20« Oui. Dans le jardin, vous savez, les rosiers,
25:24ils sont tous là, dessous.
25:27Et nous avons donné à chacun une couleur bien à lui.
25:31« Oh, monsieur Lynch, » s'écrit l'une des sœurs,
25:35« tant que vous vivez encore,
25:37dites-nous la couleur que vous aimeriez.
25:40Des roses rouges ou des roses jaunes ? »
25:45« Ah, je crois qu'il ne peut plus répondre.
25:50Seigneur, oui, il est mort. »
25:54« Il est mort ? »
25:56Les deux sœurs se regardent.
25:59« À quelle heure rentre Jennifer ? »
26:02« À cinq heures, je crois. »
26:04« Elle va encore nous gronder ? »
26:06« Oh, je l'entends d'ici, » dit l'une des sœurs en pouffant.
26:12Et elle imite soudain la voix stridente de la vieille gouvernante.
26:16« Qu'est-ce que vous avez encore fait, les filles ?
26:18Oh, les vilaines, les méchantes filles ! »
26:25Vous venez d'écouter « Au cœur du crime »,
26:28un podcast issu des archives d'Europe 1.
26:31Réalisation, Julien Tharaud.
26:33Production, Raphaël Mariat.
26:35Patrimoine sonore, Sylvaine Denis, Laetitia Casanova et Antoine Reclus.
26:40Promotion, Marie Corpet.
26:42« Au cœur du crime » est disponible sur le site et l'appli Europe 1.
26:47Écoutez aussi l'épisode suivant en vous abonnant gratuitement sur votre plateforme d'écoute.
26:54Sous-titrage Société Radio-Canada

Recommandations