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00:00...
00:04Bonjour à tous.
00:06Cher Roch-Olivier Mestre, que je ne vois plus,
00:09M. le Président, je ne le vois plus.
00:12Il est là.
00:15Cher membre du collège, cher Antoine, cher Alban,
00:19que je vois désormais régulièrement à l'INSP
00:22et que je retrouve avec plaisir ici.
00:25Merci pour cette invitation.
00:27Je suis ravie aujourd'hui d'être parmi vous.
00:31Alors, ce titre,
00:34ce vœu un peu provocateur aussi,
00:36j'avoue que j'avais envie de faire de l'IA
00:41un partenaire plutôt qu'un opposant.
00:44Et je crois que, d'ailleurs, c'est comme ça
00:46qu'il faudrait aujourd'hui tous le voir.
00:49Ravi aussi de revoir Didier, Pauline,
00:52les équipes anciennes de la DOPI.
00:56Et toujours avec ce travail de grande qualité.
00:59Merci beaucoup pour ces premières conclusions
01:02que je trouvais très intéressantes.
01:04J'ai hâte de voir le détail.
01:07Alors, d'abord,
01:09pourquoi l'IA est opposée,
01:13en tout cas, est confrontée aujourd'hui
01:16au secteur des médias ?
01:17Peut-être parce que le contexte
01:19est favorable à cette confrontation,
01:22à la fois le contexte de création,
01:24mais aussi le contexte d'information
01:26et vous reconnaissez ici
01:28un exemple de contexte de création
01:30avec Edmond de Bellamy,
01:32cette peinture vendue plus de 400 000 dollars
01:35chez Christie's.
01:36Vous reconnaissez aussi peut-être
01:38cette fausse publicité,
01:41cette deepfake, cet hyper-trucage de Joe Biden
01:45qui fait une publicité.
01:47Également, le deepfake avec Taylor Swift
01:51sur des images à caractère pornographique.
01:55Et puis, sur l'information, vraiment,
01:58ce réseau structuré qui a été,
02:02comment dire, mis en lumière,
02:04réseau de propagande pro-russe
02:07qui a été mis en lumière par Virginium.
02:10Donc, on voit bien l'intelligence artificielle
02:12dans le contexte social
02:14qui devient une vraie réalité.
02:17Le contexte politique, également,
02:20le règlement européen sur l'intelligence artificielle
02:22a été l'occasion de fortes oppositions,
02:26notamment, fallait-il réguler
02:30versus innover ?
02:32Alors, comme si les deux étaient en opposition,
02:35comme si les deux étaient contradictoires,
02:36j'avoue que ça me laisse toujours un peu perplexe,
02:39surtout quand le législateur européen
02:40intervient sur le fondement du marché,
02:43puisque c'était le fondement de son intervention
02:45dans le règlement européen.
02:46Il crée un marché, il crée un marché unique.
02:49Et donc, dans une version un peu schizophrénique,
02:52il créerait un marché, mais en étant anti-marché.
02:56Tout ça laisse un peu perplexe.
02:58Réguler n'est absolument pas s'opposer à l'innovation.
03:01Réguler est poser un cadre,
03:03comme l'ont dit les intervenants,
03:05c'est-à-dire être favorable, au contraire,
03:07à l'intelligence artificielle,
03:09mais préserver un certain cadre,
03:10parce qu'en Europe, nous avons un certain nombre de valeurs
03:13et qu'il nous appartient, et qu'il appartient
03:16aux législateurs comme aux régulateurs,
03:17de protéger ces valeurs européennes.
03:20Donc, une opposition assez stérile
03:23entre la régulation et l'innovation.
03:26Une fois que cette opposition est un petit peu passée,
03:28on s'est demandé réguler comment, avec quelle normativité.
03:33Vous savez qu'au début, on a plutôt basculé,
03:37on avait plutôt une faveur pour l'éthique, la soft law,
03:40les règles molles, l'autorégulation des acteurs.
03:43Et puis, rapidement, on a basculé de l'autorégulation
03:47à la régulation par le législateur,
03:49pour une raison qui est assez logique,
03:53ce qui est juste de dire, en réalité,
03:55l'intérêt général ne relève pas des acteurs privés,
03:58l'intérêt général appartient aux législateurs,
04:01et donc, il lui appartient de fixer les orientations
04:04qu'appliqueront ensuite, évidemment, l'ensemble des acteurs.
04:08Et puis, au niveau national, en France,
04:11un contexte politique un petit peu chargé,
04:13pardon, je vois que j'ai mis la mauvaise version
04:15de mon PowerPoint, c'est très bien,
04:17je l'ai envoyé hier soir assez tard,
04:19et j'ai, pardon, un décalage de 7 heures,
04:22puisque je reviens d'Asie,
04:23donc je vois bien que je me suis trompée.
04:26De quoi je voulais vous parler
04:27lorsque je vous parlais de la méthode nationale ?
04:29Eh bien, vous savez sans doute qu'au niveau français,
04:33la Première ministre Elisabeth Borne
04:37avait nommé une commission interministérielle
04:40de l'intelligence artificielle, dont j'ai fait partie,
04:42pour remettre un rapport,
04:44rapport que nous avons remis au président de la République
04:46en mars dernier, sur...
04:49Alors, avec une promesse
04:54et une commande assez haute,
04:58enfin, assez intéressante,
04:59on nous demandait de faire de la France
05:01un champion de l'intelligence artificielle
05:03grâce à nos recommandations.
05:04Alors, je ne suis pas sûre qu'on ait abouti,
05:08mais en tout cas, du point de vue de la création
05:10et du point de vue de l'information,
05:11il y a quelques recommandations
05:13qui sont importantes aussi dans ce rapport,
05:15notamment le soutien à la transparence,
05:18le principe d'autorisation et de rémunération,
05:21qui sont des choses dont on reparlera,
05:23mais qui me semblaient importants à l'échelle nationale
05:28de rappeler comme grand principe.
05:30Et puis, un contexte juridique aussi
05:32qui nous fait confronter l'intelligence artificielle
05:34et les médias.
05:36Contexte juridique, aux Etats-Unis,
05:38plus de 25 actions judiciaires, dont des class actions,
05:42sur le sujet de l'utilisation d'oeuvres non autorisées
05:48par les fournisseurs d'intelligence artificielle
05:50pour entraîner, donc, des modèles.
05:54L'US Copyright Office, du coup,
05:56qui s'intéresse énormément à ce sujet,
05:57qui a déjà rendu des décisions,
05:59notamment des décisions d'exclusion de la protection
06:02pour des créations générées par l'intelligence artificielle,
06:05mais plus largement.
06:07L'US Copyright Office s'intéresse aussi à beaucoup de sujets
06:11et passera en revue, notamment, le sujet de la transparence,
06:13le sujet de la rémunération dans de futurs rapports,
06:16mais a déjà rendu un premier rapport
06:18sur les répliques numériques,
06:21et donc, notamment, l'utilisation de la voix et de l'image,
06:25comme on a pu le voir, soit avec Taylor Swift,
06:30soit avec le président Biden.
06:32En France, et au sein de l'Union européenne,
06:35d'ailleurs, plus largement,
06:38le contexte juridique a aussi été assez heurté,
06:42puisqu'il y a eu, dans le cadre de l'IACT,
06:45du règlement européen sur l'IA,
06:47il y a eu une mobilisation sans précédent
06:49des titulaires de droit, des acteurs de la culture,
06:52qui se sont fédérés pour...
06:55Voilà, pour peser dans la discussion
06:58sur le règlement européen,
07:00considérant qu'il y a ici une question existentielle.
07:05Alors, évidemment, comme l'a dit David Elsayegh,
07:09à l'avenir, nous le dira,
07:11mais la chose était suffisamment importante
07:16pour qu'on le signale
07:18et pour aussi qu'on y prête attention
07:21à cette démarche,
07:23à plusieurs fois réitérée, d'ailleurs,
07:26une démarche collective
07:28pour dénoncer un certain nombre de comportements
07:30et pour peser sur la discussion de l'IACT.
07:35Alors, lorsque j'imaginais l'IA
07:39qui pouvait devenir un partenaire,
07:40eh bien, un partenaire de la culture,
07:44eh bien, c'est se poser deux questions.
07:45En amont, c'est la question de la création
07:47qu'on vient de voir,
07:49et puis, en aval, c'est la question de l'information.
07:52Alors, en amont, d'abord,
07:56ça, c'est le cycle de vie d'une IA générative,
07:59et vous voyez qu'un modèle,
08:01en fait, pour créer un modèle d'IA,
08:03eh bien, il faut des datas, il faut des données
08:06qu'on veut obtenir par web scrapping ou web crawling.
08:10On a soit...
08:12Soit, par exemple, beaucoup utilisent le Common Crawl,
08:14le répertoire Common Crawl
08:16pour récupérer l'adresse des contenus.
08:19Soit vous avez des bases d'entraînement
08:21comme Lion, Book3,
08:24qui permettent l'entraînement des modèles.
08:29Ça, c'est indispensable,
08:30et c'est bien l'idée qu'on est là sur une technologie qui...
08:34On appelle ça l'IA connexionniste.
08:37C'est une IA qui est fondée sur l'apprentissage.
08:40C'est une technique d'IA qui est fondée sur l'apprentissage.
08:43On va donner au système des contenus.
08:49Le système va déconstruire ces contenus
08:51pour en inférer un certain nombre de règles mathématiques,
08:54et ce sont ces règles, ensuite, que le système va appliquer
08:58pour générer du contenu.
08:59Donc c'est vraiment une technologie fondée sur l'apprentissage,
09:03et pour apprendre, il faut des données,
09:05il faut des masses de données.
09:07Il faut des contenus, donc, et souvent,
09:09il faut aussi des contenus, bien sûr, culturels.
09:12Sur cette opération d'entraînement de l'intelligence artificielle,
09:17eh bien, on considère que...
09:20En tout cas, beaucoup considèrent qu'il existe une exception
09:24aux droits d'auteur et aux droits voisins,
09:26l'exception texte and data mining, ou fouille de texte et de données,
09:30qui est une exception qui a été adoptée en 2019
09:33dans la directive marché unique numérique.
09:37Evidemment, en 2019, on était loin d'imaginer
09:41les modèles de fondation, les IA génératives,
09:45TCHEL-GPT, évidemment, on n'était que...
09:48Je me souviens très bien d'en 2019,
09:51pour être intervenue sur d'autres dispositions de la directive.
09:55Cette exception, elle est apparue par amendement,
09:59bizarrement.
10:01Elle était d'ailleurs exclue dans l'étude d'impact.
10:03Et puis, quand elle est apparue, tout le monde disait,
10:06mais ça, c'est pour les progrès, les progrès médicaux.
10:08Alors, évidemment, ça va servir beaucoup aussi aux progrès médicaux,
10:12mais on n'avait pas imaginé les modèles de fondation,
10:16les grands modèles de langage ou les grands modèles d'image en général.
10:20Et puis, c'était quand même...
10:26Pendant un certain temps, l'exception allait rester un peu en sommeil
10:29sans qu'on comprenne vraiment à quoi elle servait.
10:32Cela étant, cette exception,
10:34eh bien, elle est très large,
10:36puisqu'elle couvre tous les usages,
10:38quelle que soit la finalité,
10:40y compris la finalité commerciale,
10:43au bénéfice de tous les acteurs,
10:45que ce soit des acteurs privés, des acteurs publics,
10:47des acteurs qui interviennent sur le marché ou pas,
10:51ou en matière même de recherche,
10:54mais de recherche appliquée, par exemple.
10:56Et donc, elle était tellement large
10:58que des conditions y ont été accolées, bien sûr.
11:01Première condition, un accès licite au contenu.
11:06Deuxième condition, l'absence d'opt-out,
11:09l'absence d'opposition du titulaire de droit.
11:12On en a parlé lors de la première table ronde.
11:16Le titulaire de droit peut s'opposer.
11:17Vous avez donc ici une exception très bizarre,
11:20qui est une exception obligatoire,
11:21donc que les Etats membres avaient l'obligation de transposer,
11:26mais une exception obligatoire
11:29qui...
11:30sur laquelle le titulaire de droit peut revenir,
11:34c'est-à-dire peut récupérer, finalement, son droit.
11:39Il peut y avoir un retour à l'exclusivité
11:42du seul fait de la volonté du titulaire de droit,
11:45alors même que l'exception est obligatoire.
11:46Donc, c'est un mécanisme assez inédit.
11:51Cette exception, on considère qu'elle s'applique,
11:55en tout cas, majoritairement,
11:57certains considèrent qu'elle s'applique
12:00à l'entraînement des IA,
12:02même si c'est contesté par d'autres.
12:04Ce qui est évident, c'est qu'en 2019,
12:08on n'avait pas conscience de cet usage, ça, c'est clair.
12:12Maintenant, c'est vrai que le règlement européen
12:15renvoie notamment à certes articles
12:17et renvoie notamment à l'opt-out, donc aux droits d'opposition.
12:21Il y a eu une question au Parlement européen
12:25pour savoir s'il fallait appliquer l'article 4,
12:27et la réponse a été positive.
12:29Donc, jusqu'à ce que l'accord de justice nous dise un jour
12:32que ça ne s'applique pas, pour le moment,
12:34on considère qu'il y a cette exception
12:36pour l'entraînement des IA.
12:37On peut considérer, en tout cas, qu'elle existe.
12:40Sous réserve, bien sûr, des conditions.
12:43Et là, les conditions, pour le coup, elles sont quand même
12:46assez compliquées à remplir, assez compliquées à respecter.
12:52Pourquoi ? Parce que l'accès licite.
12:55Comment savoir si le fournisseur d'IA qui a utilisé des contenus
13:01avait ou pas un accès licite à ces contenus ?
13:06Déjà, le sujet, c'est quoi un accès licite ?
13:08La directive nous dit que c'est un accès sur abonnement,
13:10c'est un accès autorisé, c'est un accès licité
13:14par l'article 17 de la directive marché unique numérique.
13:17Donc, c'est un accès couvert par une licence.
13:20C'est très bien, mais on sait pertinemment
13:25que dans les bases d'entraînement, il y a des contenus piratés.
13:30Aujourd'hui, c'est avéré.
13:32Il y a même des images, vous voyez, pédopornographiques
13:35dans certaines bases d'entraînement.
13:37Donc, de manière très claire, on sait que le sujet même
13:41de l'accès licite, c'est une difficulté,
13:44puis c'est surtout une difficulté à prouver.
13:46Comment vous faites pour savoir si la condition a été remplie ou pas ?
13:52Soit le fournisseur d'IA vous déclare ce qu'il a utilisé
13:55et comment il y a accédé,
13:56soit il y a...
13:58C'est quand même très compliqué de remplir cette condition.
14:01Ensuite, il y a la condition de l'opt-out du droit d'opposition.
14:05Même chose.
14:06Comment on fait l'opt-out techniquement ?
14:10Comment on le rend efficace, l'opt-out ?
14:13Il y a un certain nombre de méthodes
14:16qui commencent de plus en plus à se développer,
14:20mais il n'y a pas encore de standardisation.
14:22Donc, comment on fait en l'absence de standardisation ?
14:25Est-ce que ce n'est pas nécessaire, justement,
14:27qu'il y ait une réflexion sur une méthode d'opt-out
14:31qui serait efficace ?
14:32Sauf que, souvent, les contenus,
14:33ce n'est pas forcément la même manière de faire l'opt-out.
14:37La Commission européenne réfléchit aujourd'hui
14:40sur ce sujet de l'opt-out,
14:42et elle se demande même s'il ne faudrait pas,
14:44en plus des méthodes d'opt-out,
14:47créer un registre, un registre des opt-out en plus,
14:52mais qui ne pourrait pas être un registre solution unique,
14:55qui serait une solution alternative, supplémentaire
15:01pour informer sur l'opt-out.
15:03Mais là, c'est toujours pareil.
15:05Il y a quelques semaines,
15:07j'avais une démonstration dans le cadre d'une mission,
15:11j'avais une démonstration, une mission sur la transparence,
15:15une démonstration par un acteur technique
15:18qui me montrait que, parfois, les contenus sont opposés,
15:23enfin, on fait l'objet du droit d'opposition,
15:25et pour autant, vous avez des robots qui passent outre
15:29et qui récupèrent les contenus.
15:30Donc, là encore, comment faire pour savoir
15:34si l'opt-out a été respecté ?
15:36Comment faire pour savoir si l'accès est bien licite ?
15:41Eh bien, c'est là qu'on a cette question de transparence.
15:46Et parce que, en fait, les dispositions de l'article 19,
15:51de la directive de 2019, pardon, de l'article 4,
15:54donc de la directive de 2019, étaient très difficiles à vérifier,
15:59et donc parce que cette exception, si elle s'applique toujours,
16:02eh bien, était compliquée à mettre en oeuvre,
16:06alors le règlement européen a imposé, selon ma lecture,
16:11une double obligation de transparence.
16:13Une 1re obligation de transparence...
16:16En fait, 2 obligations en silo, en quelque sorte.
16:19La 1re, c'est de mettre en place pour les fournisseurs d'IA,
16:24donc de modèles,
16:26de mettre en place une politique de conformité,
16:29un peu comme en matière de RGPD,
16:32une compliance pour respecter le droit d'auteur et les droits voisins,
16:37et notamment pour respecter l'opt-out.
16:40Alors ça, c'est intéressant, parce que le fait
16:42que les fournisseurs d'IA doivent mettre en place
16:45cette politique de conformité by design,
16:48ça va peut-être pousser un peu ce processus de standardisation
16:54dont je vous parlais tout à l'heure,
16:55puisqu'ils vont devoir rapporter la preuve qu'ils sont conformes,
16:59qu'ils mènent une politique interne conforme,
17:02et donc ça va peut-être engager un peu plus le dialogue
17:06sur la standardisation de l'opt-out.
17:09Ici, le bureau de l'IA, l'IA Office,
17:12qui est un nouvel organe qui a été créé
17:14par le règlement européen,
17:16eh bien, travaille à un code of practice,
17:19qui a été traduit par un code de bonne pratique, peut-être,
17:23dans le RIA, je ne sais plus la traduction en français,
17:26mais donc il va y avoir ici une aide, justement,
17:30pour mettre en place cette politique de conformité.
17:33Et puis la 2e disposition qui a été adoptée,
17:36eh bien, c'est cette disposition de transparence,
17:39vraiment au sens premier du terme, dont on en parlait,
17:42et dont David Alsayegh vient de parler.
17:46Le règlement européen impose que le fournisseur d'IA
17:50fournisse un résumé suffisamment détaillé,
17:53ne rigolez pas,
17:55des contenus utilisés pour l'entraînement.
17:57Un résumé suffisamment détaillé.
18:01Évidemment, normalement, un résumé,
18:02comment il est détaillé ?
18:04Suffisamment, mais pas trop.
18:07On sent bien ici, vous imaginez bien
18:09que cette disposition, elle a été vraiment adoptée
18:11dans la douleur, elle a même failli faire échouer
18:14la négociation sur le règlement européen.
18:18Cette obligation de transparence,
18:22elle a été conçue, elle a été imaginée,
18:26elle a été poussée aussi sur le terrain du droit d'auteur
18:29et des droits voisins.
18:30Donc il s'agissait pour les fournisseurs d'IA
18:32d'être transparents, en quelque sorte,
18:35sur les sources d'entraînement qui sont protégées
18:38par le droit d'auteur et les droits voisins.
18:40Maintenant, je vous invite à aller lire cet article
18:4253.1.D du règlement européen.
18:46Ca n'est plus lié uniquement aux droits d'auteur
18:49et aux droits voisins.
18:50D'ailleurs, il y a écrit, y compris les contenus protégés
18:53par le droit d'auteur et les droits voisins,
18:55notamment les contenus protégés par le droit d'auteur
18:58et les droits voisins dans les considérants.
19:00Donc j'avoue que cette disposition
19:04va être une des dispositions les plus compliquées, je pense,
19:08et les plus contentieuses dans la mise en oeuvre.
19:12Là encore, le bureau de l'IA va fournir un template
19:16ou un modèle de résumé suffisamment détaillé.
19:19Oui, eh oui.
19:21Vous avez le résumé suffisamment détaillé,
19:22le modèle de résumé suffisamment détaillé, etc., etc.
19:29Alors, en France, la France s'intéresse quand même
19:33à ces questions et notamment à cette question de transparence
19:37parce que la transparence, ça peut être un levier
19:41pour la rémunération.
19:42Evidemment, parce que lorsque, quand on vous dit,
19:45oui, la réponse qu'on obtient, c'est, dites-nous
19:48quelles oeuvres sont utilisées par nous.
19:51Comme ça, on les retire.
19:53Eh oui, sans transparence, c'est quand même très difficile
19:56de lister les oeuvres qui sont utilisées
20:00par le modèle pour l'entraînement.
20:02C'est vraiment assez étonnant ce retour,
20:08cette inversion, finalement, dans la demande.
20:13Pour créer un marché, pour créer un véritable marché,
20:16il va falloir respecter la chaîne de valeurs
20:19et pour respecter la chaîne de valeurs,
20:20il va falloir rémunérer les contenus.
20:23Et pour ça, en France, 2 missions ont été lancées
20:27à la demande de la ministre de la Culture
20:29dans le cadre du Conseil supérieur de la propriété littéraire
20:32et artistique.
20:33Vous voyez, je vous ai mis sur le côté.
20:35Une 1re mission sur le template.
20:37Donc, l'idée, c'est quoi ?
20:39L'idée, c'est...
20:40La France a une grande tradition d'influencer un petit peu
20:44la législation européenne.
20:46En tout cas, ça a été une tradition pendant très longtemps,
20:48et notamment dans les secteurs de la culture.
20:50La France est un grand producteur de culture.
20:53Et donc, l'idée, c'est d'élaborer un template en France
20:58qui serait proposé au Bureau de l'intelligence artificielle.
21:03Donc ça, c'est la 1re mission au sein du CSPLA.
21:06Et puis, la 2e mission, c'est une mission juridico-économique,
21:10avec ma collègue Joëlle Farchy, qui est là.
21:13Elle s'occupe de l'économie, moi, je m'occupe du droit.
21:16L'idée, c'est quoi ?
21:18C'est qu'on essaye de définir des modèles de rémunération.
21:24Qu'on essaye de comprendre la chaîne de valeurs
21:26et de définir les modèles de rémunération.
21:28C'est-à-dire qu'est-ce qu'on pourrait appliquer
21:30comme méthode juridique qu'on connaît
21:34à la rémunération pour l'entraînement des IA ?
21:37Et ça, ça va dépendre un peu de quelle est la valeur,
21:41en quelque sorte, de la donnée d'entraînement.
21:44Donc elle va nous dire
21:45quelle est la valeur de la donnée d'entraînement.
21:48Et nous, derrière, juristes,
21:50on va essayer de s'adapter à cette vision économique.
21:55Tout ça, ça pose beaucoup de questions,
21:57vous l'avez compris.
22:00L'élaboration du résumé, du modèle de résumé...
22:08C'est très difficile,
22:09parce qu'il y a des injonctions parfois contradictoires
22:11un petit peu dans les considérants.
22:15On sent bien qu'il y a eu une forte tension
22:17dans l'adoption de cette disposition.
22:18Et donc c'est quand même très compliqué à mettre en oeuvre.
22:23Pour les modèles de rémunération, c'est pareil,
22:25c'est très compliqué.
22:26Il y a besoin d'acteurs qui veulent collaborer, déjà.
22:30Et puis tous les secteurs de la culture
22:32n'ont pas le même modèle d'affaires
22:36et donc pas la même chaîne de valeurs.
22:37Et donc tout ça n'est pas uniforme d'un secteur à l'autre.
22:42Et donc la question que je me suis posée,
22:44c'est est-ce qu'il n'y aurait pas besoin,
22:45dans certains aspects de ces missions,
22:48peut-être d'un relais national, peut-être d'une autorité ?
22:51Alors je ne pense pas à une autorité en particulier, bien sûr,
22:54mais je suis ici au sein d'une autorité
22:57qui, je me souviens que l'ARCOM est aujourd'hui
23:00un lieu de dialogue qui pourrait accueillir
23:04un dialogue sur ces sujets.
23:08Le résumé suffisamment détaillé, c'est une vraie difficulté
23:11parce qu'il faut l'articuler avec le secret des affaires.
23:14Donc est-ce qu'une autorité aurait aussi ici un rôle à jouer ?
23:19Ce sont des questions qu'on peut se poser
23:22sur cet amont, sur la création.
23:26Et puis je n'oublie pas que, bien sûr, sur l'amont,
23:30eh bien, les Etats généraux de l'information
23:33ont aussi fait des propositions,
23:35alors sur l'amont comme sur l'aval, d'ailleurs,
23:38parce qu'on change un peu de modèle
23:41avec ces IA génératives.
23:44L'économie du lien va disparaître
23:47puisque, finalement, lorsque vous allez avoir de l'IA
23:52qui sera associée à un moteur de recherche,
23:54vous n'allez plus cliquer sur les liens,
23:55vous allez avoir du contenu qui va être directement généré.
23:59Et donc il faudra s'interroger, mais comme je vous dis,
24:03en fait, ça va dépendre beaucoup du secteur concerné.
24:08Tous les secteurs n'auront pas le même besoin,
24:12les mêmes velléités.
24:14Vous avez certains secteurs qui sont très organisés
24:17en gestion collective,
24:18vous avez d'autres secteurs qui sont très capables
24:21de donner des licences et des licences sur des masses de données.
24:26Donc tout ça devra être adapté en fonction des secteurs.
24:30Quelques mots ensuite sur l'aval
24:33et donc plus sur l'information ici.
24:35Donc on quitte, finalement,
24:38les modalités de fonctionnement de l'IA générative
24:42et donc la déconstruction de ces contenus en amont
24:47qui peuvent être des contenus
24:49protégés par le droit d'auteur et les droits voisins.
24:51Et puis on s'intéresse à ce qui sort,
24:55finalement, au sortant, à l'output, comme on dit,
25:01ce qui est généré par l'intelligence artificielle.
25:05Alors d'abord, un mot pour dire que...
25:09Et ça a été dit dans la première table ronde et c'est très bien.
25:12Je veux dire, il ne s'agit pas ici de dire
25:14que de ralentir le développement de l'IA.
25:16Enfin, vous voyez, on peut continuer dans les postures
25:19en disant qu'elle est anti-techno,
25:22les régulateurs sont...
25:25Le législateur est...
25:26Enfin, on peut continuer.
25:28Ou on peut construire un marché éthique et compétitif
25:32et un marché qui prenne en compte la chaîne de valeurs.
25:35De manière évidente,
25:36l'intelligence artificielle, c'est une chance,
25:38c'est une promesse.
25:41On va tous s'augmenter, en quelque sorte.
25:43En tout cas, on est nombreux, on sera nombreux à l'utiliser
25:49et à bénéficier, grâce à cela, de nouvelles compétences
25:52ou de nouveaux services ou de nouveaux...
25:54Voilà, je veux dire...
25:55Et puis si, de toute façon, on ne monte pas dans le train de l'IA,
25:58le train de l'IA, il passera,
25:59puis on lui dira au revoir dans quelque temps.
26:02Donc je crois qu'il faut qu'on l'emprunte,
26:07il faut qu'on investisse ce secteur
26:09et il faut que la culture investisse, bien sûr,
26:11le secteur de l'intelligence artificielle.
26:14Et en aval, l'information, le journalisme,
26:17utilisent déjà beaucoup l'intelligence artificielle
26:20pour des résumés, des recherches,
26:23pour une assistance à la rédaction,
26:26avec, bien sûr, toutes les conditions
26:30de la vraie information du journaliste,
26:32des vérifications,
26:33une responsabilité, dans tous les cas, qui leur incombe.
26:36Et donc tout ça peut paraître fort utile.
26:41Moi, je me suis posé une question
26:44qui est du droit d'auteur,
26:46vous savez, sur le sortant.
26:47Est-ce que le sortant, c'est une oeuvre ?
26:49Est-ce que c'est protégé par le droit d'auteur ?
26:52C'est sans doute une question qu'on se posera
26:54dans quelques temps, dans quelques années,
26:57parce qu'on est très occupés par l'amont pour le moment.
26:59Mais avant de s'occuper de cette question,
27:02moi, ce que je voudrais dire, c'est qu'il ne faut surtout pas
27:05disqualifier les créateurs qui utilisent
27:08de l'intelligence artificielle.
27:09C'est pas parce que vous avez un journaliste ou un créateur,
27:12un auteur qui utilise de l'intelligence artificielle
27:14comme un outil, comme vous nous disiez tout à l'heure,
27:17comme un espèce de compagnon de création,
27:20un outil qui challenge.
27:23Il ne faut pas, juste à cause de ça,
27:26dire à l'auteur qu'il n'est plus auteur
27:27et donc que ce qui est généré n'est plus une oeuvre.
27:31Ce serait complètement inique, finalement, dans une société
27:34où on invite tout le monde à utiliser l'intelligence artificielle,
27:37de punir les créateurs qui, eux, utilisent l'intelligence artificielle
27:40comme un outil.
27:41Alors bien sûr, il va y avoir une zone grise,
27:44parce que pour être protégé par le droit d'auteur,
27:47il faut exprimer sa personnalité dans la création.
27:50Donc ça va être difficile de voir à quel moment
27:53on est sur le terrain du droit d'auteur
27:56et à quel moment on bascule sur la non-protection,
27:59parce que c'est une génération par la machine
28:03sans intervention humaine.
28:05Mais je crois qu'il nous appartient de réfléchir, justement,
28:07à ce basculement et d'aider aussi le juge dans la qualification
28:12pour que les auteurs, les journalistes, les artistes,
28:16tous puissent utiliser aussi l'intelligence artificielle
28:19sans être inquiétés dans la protection,
28:22parce qu'on aura identifié la manière pour eux
28:25d'exprimer leur personnalité
28:28en utilisant cet outil d'intelligence artificielle.
28:31Et puis, il y a aussi l'utilisation de l'IA
28:33dans l'information elle-même.
28:35Alors, j'ai mis ici, information entre guillemets,
28:37parce qu'évidemment, il n'y a pas que des conséquences positives.
28:41Il y a des conséquences positives à l'utilisation de l'IA.
28:44Et puis, il y a aussi des conséquences négatives
28:46et que vous avez sans aucun doute relevé
28:50dans vos préconclusions,
28:53la massification de la production informationnelle
28:56et du coup, la diminution de la tension.
28:58Plus vous avez d'informations,
29:01moins vous êtes attentifs à cette information.
29:03Le problème de la dilution de cette information
29:07et de la hiérarchisation de l'information,
29:10on ne sait plus dire
29:12qu'est-ce qui est vraiment une information
29:14et qu'est-ce qui n'en est pas.
29:15Et on le voit bien sur les réseaux sociaux.
29:17Alors, tout vaut à peu près la même chose,
29:21ce qui commence à devenir vraiment problématique.
29:24Une augmentation des contenus synthétiques,
29:26donc des contenus qui sont générés par l'IA
29:29avec des nouveaux médias
29:30que je crois que vous avez appelés du troisième type,
29:32c'est ça.
29:34Donc des médias synthétiques, une perte des repères
29:37et donc un risque aussi de polarisation
29:40de l'information dans ce cadre-là.
29:46C'est un vrai sujet, c'est un vrai souci
29:47puisque c'est un sujet de démocratie.
29:49Vous savez que la presse, c'est le socle de la démocratie
29:54et dans cette année très marquée par les élections,
29:59c'est une vraie inquiétude.
30:00Alors, quelles solutions sur cet aval
30:04et donc sur cette information qui pourrait être générée
30:07par l'intelligence artificielle ?
30:09Alors là, je vous ai mis quelques idées de solutions
30:14qui ont été évoquées par les uns, par les autres.
30:16Certains disent qu'il faut créer un label
30:19pour labelliser la création humaine,
30:22donc pour dire que ça, c'est humain.
30:27Pour reconnaître, pour identifier la singularité
30:30de cette création humaine.
30:32Peut-être imaginer aussi un nouveau type de référencement,
30:36un référencement de confiance.
30:37Vous savez, sur les moteurs de recherche,
30:38vous avez le référencement naturel, le référencement local
30:42et puis le référencement payant.
30:44Est-ce qu'il pourrait y avoir un référencement de confiance,
30:47un référencement avec une information vérifiée ?
30:51L'IA va nous permettre aussi de développer
30:53les solutions de fact-checking et d'audit.
30:55Donc là encore, ça peut être aussi une des solutions
31:00à apporter pour l'information.
31:02Le règlement européen a contribué
31:05puisqu'il a, lui aussi, imposé une transparence.
31:10Et alors, vous le voyez ici, sur cette publicité d'Undies.
31:14Alors, c'est bien sûr trop petit, mais là...
31:20Dans l'angle en haut à droite,
31:22eh bien, vous avez déjà l'obligation d'information
31:24qui est remplie.
31:25C'est-à-dire qu'il y en a qui se mettent déjà en conformité
31:28avant même la mise en application du règlement.
31:33Donc, il va falloir informer le public,
31:35il va falloir aussi marquer ces contenus générés par l'IA.
31:39Moi, ce que je veux dire en conclusion,
31:41c'est que je crois que sur ces sujets,
31:43il est temps de collaborer et de sortir un peu des postures.
31:46Voilà, je crois que si on veut retenir une idée,
31:50c'est que les fournisseurs d'IA ont besoin de données,
31:54ils ont besoin de données de qualité
31:57pour entraîner les modèles.
32:02Il y a une phrase en informatique
32:03que mes collègues informaticiens me répètent souvent,
32:05ils me disent, garbage in, garbage out.
32:07Si vous mettez de la poubelle en entrée,
32:08vous avez de la poubelle en sortie.
32:10D'ailleurs, il y a une très bonne étude scientifique également
32:13qui démontre que lorsqu'on entraîne un système d'IA
32:16avec des données synthétiques, le système dégénère.
32:19Donc on a besoin de contenus humains,
32:21on a besoin de contenus humains de qualité.
32:23Prenons acte qu'on a besoin de contenus humains
32:25et de contenus humains de qualité.
32:27Prenons acte également qu'il est important
32:29que les fournisseurs d'IA accèdent à des données de qualité
32:32pour des raisons de découvrabilité,
32:34de diversité également culturelle,
32:36parce qu'il est important que notamment la culture française
32:39soit représentée dans ces modèles.
32:42Mais respectons la chaîne de valeur.
32:44L'ensemble des intrants sont rémunérés,
32:46les données, à un moment, devront aussi...
32:49Je crois qu'il est temps, devront aussi être rémunérés
32:54aussi pour instaurer cette confiance
32:57dont on a besoin en aval.
33:00Voilà ce que je voulais vous dire un peu vite.
33:04Et en conclusion, j'aime bien citer cette phrase
33:07d'un collègue, Gérard Berry, qui dit
33:11l'homme est lent, peu rigoureux et très intuitif,
33:13l'ordinateur est super rapide, très rigoureux
33:15et complètement con, ce qui nous laisse un petit peu d'avance
33:18par rapport à l'intelligence artificielle.
33:20Je vous remercie.

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