• il y a 3 mois
Cet épisode d'"Enquête Exclusive" nous plonge dans le monde sombre et dangereux des nouveaux barons de la drogue en France. De plus en plus jeunes, ces trafiquants sont ultra-violents et parviennent à amasser des fortunes colossales en peu de temps. À travers des témoignages, des infiltrations, et des enquêtes de terrain, la vidéo révèle le quotidien de ces jeunes criminels qui règnent sur le trafic de drogue, et les méthodes qu'ils utilisent pour imposer leur pouvoir dans les quartiers et au-delà. Un regard saisissant sur une réalité inquiétante et méconnue.

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00:00:00C'est ça, c'est du shit, regardez c'est bien servi, même ça dépose du sac.
00:00:17T'as envoyé quelqu'un à Dubai, tu vas vouloir déguster la vie comme ils déguisent.
00:00:21Et pour ça on en revient toujours au même, il faut de l'argent.
00:00:25On a l'instinct que si quelqu'un a les couilles de venir, il repartira sûrement mort.
00:00:30En 10 000 euros vous allez tuer.
00:00:33Parce que je devais aller en vacances.
00:00:35On a à peu près ce qu'ils vendent bien, ce que les gens recherchent.
00:00:39Pourquoi la cale à Chnikov elle est aussi utilisée dans les règlements de comptes ?
00:00:42Vous les mettez dans la main de n'importe qui qui a déjà joué aux jeux vidéo,
00:00:45il saura la charger, il reste juste plus qu'à appuyer.
00:00:49On a acheté ce qu'on avait à acheter et on est partis faire ce qu'on avait à faire.
00:00:52Et en traduction, de manière concrète, ça veut dire quoi ?
00:00:54Ça veut dire qu'on est partis on a pris les armes, on est partis on a tué.
00:00:59Vous avez réussi, vous en avez combien ?
00:01:01Et puis vous avez repensé ?
00:01:032 millions.
00:01:042 millions.
00:01:06Bonsoir et bienvenue dans Enquête Exclusive,
00:01:08qui vous propose ce soir un document tout à fait étonnant, parfois glaçant.
00:01:12C'est une plongée inédite dans l'univers du trafic de drogue en France.
00:01:16Un marché noir qui génère entre 3 et 6 milliards d'euros chaque année en France, d'après les experts.
00:01:22Et ce serait entre 200 et 250 000 personnes qui en vivraient directement ou indirectement.
00:01:28Alors c'est un marché noir, c'est aussi un marché de la mort,
00:01:31avec ses règlements de compte, avec ses victimes collatérales.
00:01:34Il faut savoir que 150 personnes ont été victimes de cette guerre entre gangs l'an dernier.
00:01:40Il faut savoir aussi que les tueurs sont de plus en plus jeunes.
00:01:43Les nouveaux barons de la drogue en France, c'est une enquête signée Solène Oyénaud pour Vigie et Enquête Exclusive.
00:01:52Le rendez-vous nous a été donné dans un appartement, quelque part en France.
00:02:00L'homme qui se présente à nous est un tueur à gages, un professionnel du crime.
00:02:08Il a environ 35 ans et fait déjà partie des criminels expérimentés.
00:02:23Aujourd'hui, vous avez tué combien de personnes ?
00:02:32Des tueurs indépendants comme lui, qui ne sont affiliés à aucun clan,
00:02:36ont fait leur apparition dans le monde de la drogue depuis une dizaine d'années.
00:02:41Pour une mort, c'est à peu près 100, 150 000 euros.
00:02:44On ne paye en avance. Je passe par certaines personnes.
00:02:47Je ne connais pas le commanditaire et je ne veux pas le connaître.
00:02:50Dans la rue, son métier a un nom, charcleur.
00:02:54Ça vous fait quoi de tuer ?
00:02:56Aujourd'hui, franchement, ça ne me fait plus rien.
00:02:59Je fais mon taf, je charcle, je rentre chez moi dormir, j'oublie tout.
00:03:03Je peux aller faire la fête, je fais un repas en famille, tout va bien.
00:03:08L'homme est venu avec une partie de ce qu'il utilise.
00:03:14Dans son sac, plusieurs armes à feu de différents calibres.
00:03:19Je vais vous présenter tout ce que j'utilise.
00:03:24L'AK-47.
00:03:25L'AK-47.
00:03:28Je vérifie qu'il n'y a rien dedans.
00:03:30L'autre nom de la Kalashnikov.
00:03:32Chargeur, 7.62x39.
00:03:34Autrefois peu répandue,
00:03:37ces armes de guerre sont aujourd'hui habituelles dans les fusillades.
00:03:41C'est une petite très pratique, ça.
00:03:43Peu précise, semi-automatique,
00:03:46elles font de gros dégâts
00:03:48et sont souvent responsables des victimes collatérales des règlements de compte.
00:03:53Là, j'ai les armes de poing.
00:03:557.65x39.
00:03:57Blessure de jambe, c'est pour blesser les jambes.
00:04:01C'est une petite punition, on va dire.
00:04:04Punition avant la méchanceté.
00:04:05La méchanceté,
00:04:07dans son jargon,
00:04:09ça veut dire la mort.
00:04:11Ce jour-là, sur la table,
00:04:136 armes à feu
00:04:15et des dizaines de balles.
00:04:175.56x45.
00:04:19Elle est plus petite que celle de 7.62x39,
00:04:22mais elle fait autant de dégâts, celle-là.
00:04:24Elle te rentre dedans, elle ricoche sur l'os
00:04:26et elle te perforte l'intérieur.
00:04:28Elle fait que déricocher.
00:04:31L'homme nous dit accepter des contrats régulièrement,
00:04:35car la demande ne fait qu'augmenter.
00:04:39Je suis beaucoup sollicité, bien sûr.
00:04:41Paris, c'est une grosse ville meurtrière.
00:04:43Il y a Lyon aussi qui est une ville meurtrière.
00:04:45On a Lille.
00:04:47Un peu de partout, en fait.
00:04:49En vérité, je vais être franc avec vous,
00:04:51la France, ça commence à être l'Amérique.
00:04:53Là, ce que vous voyez sur la table,
00:04:55vous faites l'émission au jour d'aujourd'hui.
00:04:57Peut-être que demain, une de celle-là,
00:05:00le nombre a disparu.
00:05:02Cet homme nous dit être aujourd'hui
00:05:04l'un des tueurs à gages les plus âgés dans le milieu.
00:05:06Car depuis quelques années,
00:05:08de nouveaux profils ont fait leur apparition.
00:05:10Des jeunes,
00:05:12parfois mineurs,
00:05:14qui acceptent de tuer pour 10 à 15 000 euros.
00:05:18Pourquoi l'ultra-violence
00:05:20dans le monde du stupéfiant a-t-elle explosé ?
00:05:22En France, en 2023,
00:05:24le nombre d'homicides
00:05:26et tentatives d'homicides liées au trafic de drogue
00:05:28a augmenté de 57%
00:05:30par rapport à 2022.
00:05:32C'est nécaton.
00:05:34C'est nécaton.
00:05:36Quand je dis que Marseille, c'est devenu un cimetière,
00:05:38pour moi, c'est un cimetière.
00:05:40En France, les réseaux n'ont jamais été
00:05:42aussi puissants et aussi riches.
00:05:44200 000 personnes
00:05:46vivraient directement ou indirectement du trafic.
00:05:48Les violences qu'ils génèrent
00:05:50ont aussi atteint un niveau record.
00:05:52Assassinats,
00:05:54enlèvements,
00:05:56violences
00:05:58et tortures.
00:06:02Désormais,
00:06:04l'ultra-violence s'assume et s'exhibe.
00:06:10Plus inquiétant encore,
00:06:12les soldats de ces guerres
00:06:14meurtrières n'ont jamais été aussi jeunes.
00:06:16A Marseille,
00:06:18plus de la moitié des mises en examen pour assassinat
00:06:20ou tentative d'assassinat l'an dernier
00:06:22ont moins de 20 ans.
00:06:26Ils l'ont pris, ça y est.
00:06:28Durant plusieurs mois,
00:06:30nous avons enquêté
00:06:32et vécu en immersion dans le monde de la drogue.
00:06:34Nous avons recueilli des témoignages inédits
00:06:36au plus haut niveau du trafic.
00:06:38Aujourd'hui, vous êtes à quel niveau
00:06:40des échelons ?
00:06:42Il n'y a personne au-dessus de moi.
00:06:44Des grands patrons
00:06:46jusqu'aux plus jeunes,
00:06:48prêts à prendre les armes et tuer
00:06:50pour quelques milliers d'euros.
00:06:52Le plus cher que vous ayez pris,
00:06:54c'était combien ?
00:06:5625. Et le moins cher ?
00:06:5810. Pour 10 euros,
00:07:00vous avez tué.
00:07:02Parce que je devais aller en vacances.
00:07:04Voilà, t'as à peu près ce qui se vend bien,
00:07:06ce que les gens recherchent.
00:07:08Nous avons vécu de l'intérieur
00:07:10ces guerres de territoire.
00:07:14Là, elle est passée la balle.
00:07:16Là, elle est pas passée.
00:07:18On va pas trop risquer, non ? Pourquoi ?
00:07:20C'est un peu risqué pour nous.
00:07:22Plongée au coeur du trafic
00:07:24de drogue, de ses codes
00:07:26et de sa violence.
00:07:28Un business qui génère chaque année en France
00:07:303 milliards et demi d'euros.
00:07:38Rien qu'à Marseille, la vente de drogue
00:07:40dans la cité phocéenne rapporterait
00:07:4210 à 15 millions d'euros chaque mois.
00:07:44Certains quartiers
00:07:46se sont ainsi spécialisés dans la vente
00:07:48de stupéfiants.
00:07:50Leurs engrangés sont ahurissantes.
00:07:52Dans les quartiers nord,
00:07:54d'après nos sources,
00:07:56la cité de Campagne-Lévesque
00:07:58générerait un chiffre d'affaires
00:08:00de 60 000 euros par jour.
00:08:02La Castellane, 50 000 euros.
00:08:04Plus au sud,
00:08:06Herbel, 30 000 euros.
00:08:08Un business qui se centralise
00:08:10depuis quelques années autour des fours.
00:08:12Ces points de deal
00:08:14qui fonctionnent aujourd'hui comme de vraies entreprises.
00:08:20C'est également le cas
00:08:22de la cité Félix-Piatt,
00:08:24dans le troisième arrondissement de la ville.
00:08:26L'un des quartiers
00:08:28les plus précaires de France.
00:08:34Aujourd'hui,
00:08:36la vente de drogue y est devenue
00:08:38une activité presque comme une autre.
00:08:40Exceptionnellement,
00:08:42nous avons vécu en immersion
00:08:44au sein de ce point de deal
00:08:46pour en expliquer le fonctionnement.
00:08:48Le rendez-vous
00:08:50nous a été donné à 10h du matin.
00:08:52A 7h,
00:08:54le point de deal n'a pas encore ouvert.
00:08:58Si la cité semble calme,
00:09:00dans les étages
00:09:02de cet immeuble habité,
00:09:04une petite main
00:09:06commence à s'activer.
00:09:12Vous cherchez quoi ?
00:09:14On nous a tournés pour regarder
00:09:16s'il n'y a rien là, il n'y a rien là.
00:09:18Moussa a 16 ans.
00:09:20Sa mission,
00:09:22s'assurer que les forces de l'ordre
00:09:24n'ont pas mis leur immeuble sous surveillance.
00:09:28Là, je fouille parce que la police
00:09:30elle vient par en haut
00:09:32et ça nous embête.
00:09:34On ne peut pas travailler normalement.
00:09:38On perd des sous.
00:09:40Moussa est le vendeur
00:09:42et c'est à lui que revient
00:09:44la responsabilité de sécuriser l'immeuble.
00:09:48Il faut tout regarder.
00:09:50Il doit fouiller intégralement
00:09:52les 14 étages de cette tour.
00:09:56Dehors, d'autres jeunes
00:09:58s'activent aussi.
00:10:00Eux vont assurer la sécurité
00:10:02aux abords du point de deal.
00:10:04Qu'est-ce que vous faites là ?
00:10:06On met le barrage.
00:10:08Pourquoi ?
00:10:10Pour que la police ait du mal à rentrer.
00:10:12Ils servent à ralentir les forces de l'ordre
00:10:14qui devront slalomer avant d'atteindre le point de deal.
00:10:18Cela permet aux trafiquants de gagner du temps.
00:10:22En amont du barrage,
00:10:24un autre maillon indispensable du trafic
00:10:26est déjà en place.
00:10:28Ce sont les guetteurs.
00:10:30Ils sont là pour prévenir en cas de passage de la police
00:10:32et doivent crier des codes à destination des vendeurs.
00:10:34Les axes à surveiller, c'est ceux-là.
00:10:36Là,
00:10:38ici, c'est le S.
00:10:40Là, c'est Miami.
00:10:42Et cette petite ruelle, là,
00:10:44c'est la résine.
00:10:46Chaque passage de la police
00:10:48doit être indiqué clairement.
00:10:50Quand la police est là à Miami,
00:10:52il doit crier.
00:10:54Quand la police rentre,
00:10:56il doit crier le ARA.
00:11:00Grâce au cri, le vendeur aura le temps
00:11:02de se mettre à l'abri dans les étages.
00:11:04Ce n'est qu'une fois que toutes les petites mains
00:11:06du réseau sont à leur poste,
00:11:10que Moussa, le vendeur,
00:11:12peut s'installer.
00:11:14Le lieu de vente
00:11:16se trouve derrière ce dernier rempart
00:11:18installé en permanence
00:11:20qui condamne les issues de secours de cet immeuble
00:11:22où vivent plusieurs centaines de personnes.
00:11:24Ici,
00:11:26on vend principalement du cannabis.
00:11:28C'est du shit, ça.
00:11:30C'est de l'arc-en-dix.
00:11:32C'est bien servi.
00:11:34Même ça dépose du sac.
00:11:36Mais également de la cocaïne.
00:11:40C'est bon.
00:11:42Avant le début de la vente,
00:11:44tout est minutieusement compté.
00:11:46Comme tous les matins,
00:11:48le point de deal ouvre donc ses portes
00:11:50et les 1ers acheteurs sont déjà là.
00:11:52Ici,
00:11:54tout est structuré comme dans une entreprise.
00:11:56Aux côtés de Moussa, le vendeur,
00:11:58il y a le gérant.
00:12:00C'est lui qui va tenir les comptes sur son petit bout de papier.
00:12:10Dans la cage d'escalier,
00:12:12c'est le défilé de consommateurs
00:12:14venus de tous horizons.
00:12:16Travailleurs,
00:12:20cadres,
00:12:22étudiants,
00:12:24hommes, femmes,
00:12:28toutes les catégories socio-professionnelles
00:12:30s'y retrouvent sans complexe.
00:12:38L'usage de stupéfiants
00:12:40est un délit puni d'une peine maximale
00:12:42de 1 an d'emprisonnement
00:12:44et de 3 750 euros d'amende.
00:12:46Les vendeurs
00:12:50ont même adopté
00:12:52tous les codes des commerciaux traditionnels
00:12:54et font la promotion de leurs produits.
00:13:00Mais l'apparente tranquillité
00:13:02du trafic a néanmoins ses limites.
00:13:10Le cri d'alerte retentit.
00:13:12Les transactions s'arrêtent immédiatement.
00:13:16La police est aux alentours.
00:13:18Avant même son arrivée,
00:13:20toute la cité est au courant.
00:13:28Une patrouille à pied a été repérée.
00:13:32Régulièrement, les forces de l'ordre
00:13:34tentent de venir interpeller les trafiquants.
00:13:36Les policiers pénètrent
00:13:38dans les étages.
00:13:40Le barrage installé le matin
00:13:42a permis aux vendeurs de prendre la fuite.
00:13:44Les policiers détruisent les barricades.
00:13:46A défaut d'interpellation,
00:13:48cela permet de ralentir le trafic.
00:13:50Dehors,
00:13:52les jeunes attendent tranquillement.
00:13:54Les guetteurs ne risquent qu'une amende
00:13:56de 68 euros pour tapage injurieux,
00:13:58une amende rarement infligée.
00:14:00Ils veulent attraper
00:14:02les petits dons,
00:14:04mais il ne faut attraper personne.
00:14:14Une fois la police partie,
00:14:16les dealers reprennent leur quartier.
00:14:22Ils veulent reconstruire
00:14:24le plus rapidement possible
00:14:26car leur business est à l'arrêt
00:14:28depuis plus d'une demi-heure.
00:14:42Au pied de la tour,
00:14:44les clients attendent tranquillement
00:14:46que le point de deal ouvre de nouveau,
00:14:48comme si la situation
00:14:50était normale.
00:14:58Les policiers sont toujours aux alentours.
00:15:00Le point de vente reste donc fermé,
00:15:02mais la reconstruction du barrage,
00:15:04elle continue.
00:15:06Parmi ces jeunes,
00:15:08qui tiennent le point de deal ce dimanche,
00:15:10beaucoup sont mineurs
00:15:12et certains sont même scolarisés.
00:15:14C'est un terminal,
00:15:16un terminal général.
00:15:18Et pourtant,
00:15:20les jeunes ne peuvent pas
00:15:22s'occuper d'eux-mêmes.
00:15:24C'est un terminal,
00:15:26un terminal général.
00:15:28Et pourtant, vous êtes ici. Pourquoi ?
00:15:30Je vais tout seul un peu.
00:15:32En mode, je sais pas,
00:15:34je vais à Marseille,
00:15:36je vois les gens faire,
00:15:38après, je sais pas.
00:15:40Je suis en bac pro au commerce,
00:15:42en première.
00:15:44Ça se passe bien ?
00:15:46Ça va, ça se passe bien.
00:15:48Au bout d'une heure,
00:15:50finalement,
00:15:52il va pouvoir reprendre,
00:15:54après un énième inventaire.
00:15:56Car un problème de comptabilité
00:15:58les effraie bien plus
00:16:00que la présence policière.
00:16:02Torture, humiliation,
00:16:04dette, certains patrons font régner
00:16:06la terreur en cas de trou dans les comptes.
00:16:18Les dealers
00:16:20font preuve d'une grande minutie.
00:16:24C'est comme dans les supermarchés,
00:16:26c'est le même système,
00:16:28il faut toujours compter la caisse à la fin des journées.
00:16:30Là, on recompte toute la journée,
00:16:32histoire d'être sûr que la fin, ça soit carré.
00:16:34Toutes les deux heures,
00:16:36la recette est évacuée pour éviter
00:16:38d'être saisie par la police
00:16:40en cas d'interpellation.
00:16:42Parce qu'après, s'ils prennent l'argent,
00:16:44on n'aura plus rien.
00:16:46On n'aura pas de paie,
00:16:48les gérants ne vont rien toucher.
00:16:50Car souvent,
00:16:52les petites mains sont payées avec les recettes de la journée.
00:16:54Et si de l'argent manque à la fin,
00:16:56il pourra être retenu
00:16:58de leur salaire.
00:17:00Pour une journée de 8 heures,
00:17:02le guetteur touche entre 100 et 150 euros.
00:17:04Le vendeur,
00:17:06entre 200 et 400 euros.
00:17:08Et le gérant,
00:17:10600 euros.
00:17:12Au total, seule une petite quinzaine
00:17:14de personnes permettent au réseau de fonctionner.
00:17:18Et là, c'est à la fin de la journée.
00:17:20Tu es plus heureux,
00:17:22et en plus de ça, tu prends plus.
00:17:24Là, tu vas en prendre beaucoup plus
00:17:26que si tu t'affairais
00:17:28dans les locaux.
00:17:30Gagner beaucoup en peu de temps
00:17:32et espérer s'offrir
00:17:34ce qu'ils voient au quotidien sur les réseaux sociaux.
00:17:38Influenceur,
00:17:40star du rap, trader dans la crypto-monnaie.
00:17:42Mais tout est possible.
00:17:44Donc crois en toi, crois en tes rêves
00:17:46et crois en l'élite.
00:17:48Mener la grande vie sur fond d'argent facile et rapide.
00:17:50Le nouveau rêve
00:17:52de cette génération.
00:17:54Tu vas voir quelqu'un à Dubaï,
00:17:56tu vas vouloir déguster la vie
00:17:58comme ils dégustent.
00:18:00Et pour ça, on en revient toujours au même,
00:18:02il faut de l'argent.
00:18:04Et pour avoir cet argent-là, nous, on se débrouille autrement.
00:18:10Ce jour-là, les forces de l'ordre
00:18:12semblent avoir décidé de ne pas lâcher Félix Piat.
00:18:16Cette stratégie policière
00:18:18s'appelle le harcèlement de points de deal.
00:18:20Les barricades sont de nouveau détruites.
00:18:26Puis une fois les policiers repartis,
00:18:28sont immédiatement reconstruites.
00:18:30Les réseaux
00:18:32font preuve d'une résilience à toute épreuve.
00:18:36Car la demande constante des consommateurs
00:18:38rend le trafic quasi inarrêtable.
00:18:42Aujourd'hui, la police est venue à trois reprises.
00:18:44Mais la vente n'a été interrompue
00:18:46qu'une heure trente au total.
00:18:50Il est 19h.
00:18:52La relève
00:18:54est arrivée.
00:18:56C'est comment, les gars ?
00:18:58C'est comment, les gars ?
00:19:00C'est la fin de la journée
00:19:02pour l'équipe de jour et l'heure de la paye.
00:19:08Le garçon
00:19:10semble habitué à manier les billets.
00:19:12C'est ça qui nous fait venir le lendemain.
00:19:14On est partis, on vit pour ça.
00:19:18J'en ai fait pour ça.
00:19:20A la prochaine.
00:19:22Le point fermera ses portes à minuit.
00:19:24Au total,
00:19:26plus d'une centaine de consommateurs
00:19:28est venu se fournir sur cette seule journée.
00:19:32Les points de deal,
00:19:34véritable supermarché de la drogue,
00:19:36n'ont pas seulement repris les codes
00:19:38de la grande distribution dans la rue.
00:19:40Plus discrètement,
00:19:42non loin du lieu de vente,
00:19:44se trouvent des appartements nourris.
00:19:46Des habitants,
00:19:48contre leur gré
00:19:50ou pour une forte somme d'argent,
00:19:52acceptent de cacher d'autres membres du trafic,
00:19:54chargés, eux,
00:19:56du conditionnement du produit.
00:19:58C'est l'équivalent
00:20:00de l'arrière-boutique,
00:20:02toujours surveillé par un haut-gradé du réseau.
00:20:06C'est l'endroit où il faut découper,
00:20:08paller, étirter,
00:20:10et une fois que ça sera fini,
00:20:12ça sera distribué
00:20:14à la personne qui s'occupe de la vente.
00:20:16Dans cette cuisine,
00:20:18on conditionne en moyenne chaque jour
00:20:204 kilos de résine de cannabis.
00:20:22A la revente,
00:20:24cela représente près de 32 000 euros.
00:20:26Le produit, il est très très très frais.
00:20:28Il vient tout droit, tout droit d'en bas.
00:20:30C'est où, en bas ?
00:20:32En bas,
00:20:34c'est au Pays des Merveilles.
00:20:36Par kilo, j'ai un nombre précis
00:20:38de combien je dois faire de capsules.
00:20:40Et si je m'amuse à faire 4 grammes 1,
00:20:424 grammes 2,
00:20:44s'il y a plus, nous, ça va nous perdre dans les comptes,
00:20:46ça veut dire qu'on va perdre de l'argent,
00:20:48et s'il y a moins, on va perdre un client.
00:20:50Dans les deux cas, il faut être précis.
00:20:52C'est mieux de faire pile pile,
00:20:54au moins tout le monde est content.
00:20:56Une fois terminés,
00:20:58les capsules sont conditionnées et étiquetées.
00:21:00Chaque réseau y appose sa signature,
00:21:02une manière de se démarquer
00:21:04de la concurrence,
00:21:06et d'être toujours identifiable par les consommateurs.
00:21:08Des techniques venues tout droit
00:21:10du marketing.
00:21:12Dernière étape, ce scotch.
00:21:14Gage de transparence.
00:21:18C'est une nouvelle invention, c'est une sécurité.
00:21:20C'est comme un produit, une fois que tu l'ouvres,
00:21:22on voit que tu l'as ouvert, ça veut dire que le produit a été touché.
00:21:24Si on essaie d'ouvrir la capsule, regardez.
00:21:26Directement, le client s'aperçoit
00:21:28que c'est plus le même scotch rouge
00:21:30et qu'il a été ouvert.
00:21:32Il rend la capsule, il sera remboursé,
00:21:34il aura une capsule en plus.
00:21:36Il y a 10 ans,
00:21:38la découpe se faisait au lieu même du stock.
00:21:40Désormais, tout est séparé,
00:21:42cloisonné, une question de sécurité.
00:21:46Car le principal ennemi d'un trafiquant,
00:21:48c'est son concurrent,
00:21:50qui n'hésitera pas à l'attaquer pour voler la marchandise.
00:21:52Là où il y a le stock,
00:21:56si quelqu'un a les couilles de venir,
00:21:58il repartira sûrement mort,
00:22:00c'est sûr et certain.
00:22:02Des fours,
00:22:04des nourrices
00:22:06et des stocks.
00:22:08Tout cela est ultra protégé
00:22:10par des hommes armés
00:22:12et dirigé depuis l'étranger.
00:22:14Désormais,
00:22:16les patrons ont quitté les quartiers
00:22:18pour s'installer plus au sud.
00:22:20Espagne, Maroc, Algérie
00:22:22ou Dubaï sont les destinations
00:22:24préférées des narcotrafiquants.
00:22:26Un éloignement
00:22:28qui ressemble plus à un exil forcé,
00:22:30une manière de vivre en sécurité.
00:22:34Sur les bords de la Méditerranée,
00:22:36nous avons rendez-vous avec l'un de ces trafiquants.
00:22:38Depuis une dizaine d'années,
00:22:40il gère sa propre structure
00:22:42dans une grande métropole française.
00:22:44Le rencontrer
00:22:46nous a demandé des mois de négociation.
00:22:50C'est le chef du réseau,
00:22:52celui que l'on appelle
00:22:54la tête.
00:23:12Une centaine
00:23:14de personnes vit directement de l'argent
00:23:16de son réseau.
00:23:18Lui a personnellement amassé une fortune.
00:23:24Plus précisément ?
00:23:32Mais ce n'est pas pour le soleil
00:23:34que ces gros patrons sont partis à l'étranger.
00:23:36C'est un moyen de se protéger
00:23:38de la police, mais également
00:23:40des autres trafiquants.
00:23:54Vous avez été jusqu'où
00:23:56pour garder le business ?
00:23:58Enlèvement, séquestration, assassinat ?
00:24:00Tout ce qu'il fallait faire.
00:24:02Je ne peux pas te donner de détails sur tout,
00:24:04mais séquestration,
00:24:06on te sera déjà obligé d'y passer.
00:24:08Il y aura forcément des gens qui ne vont pas payer,
00:24:10qui vont essayer, qui vont tester.
00:24:12Donc tu vas les prendre
00:24:14et ils serviront d'exemple au reste.
00:24:16Vous avez déjà torturé ou fait torturer ?
00:24:18Ouais, mais c'était des fils de pute.
00:24:20Contrairement à ce qu'on pourrait penser,
00:24:22cet éloignement géographique
00:24:24n'affaiblit pas les chefs
00:24:26ni leur autorité.
00:24:28Ce n'est pas la distance
00:24:30qui fait la dangerosité de la personne.
00:24:32La France est un pays dangereux,
00:24:34mais ce n'est pas Macron qui va au front.
00:24:36Le chef du réseau, c'est la même chose.
00:24:38On sait qu'il a tant de soldats,
00:24:40qu'il a une grosse puissance de feu
00:24:42et qu'il peut donc déclencher ces choses-là.
00:24:44Dans le trafic de stupéfiants depuis près de 20 ans,
00:24:46il a vu le monde de la rue évoluer.
00:24:48Et le principal bouleversement
00:24:50de la crise du Covid,
00:24:52qui dans la rue aussi,
00:24:54a redistribué les cartes.
00:24:56Il y en a qui ont pu être opportunistes
00:24:58parce que le prix du hachiche,
00:25:00il a considérablement augmenté.
00:25:02Il y en avait peu.
00:25:04Donc ce qu'on avait,
00:25:06c'était comme s'ils avaient de l'or.
00:25:08Ça a redistribué les cartes.
00:25:10Et c'est ce qui fait que des personnes plus jeunes,
00:25:12moins expérimentées, qui n'ont pas gravi
00:25:14tous ces échelons, se retrouvent avec les sommes
00:25:16permettant d'être ambitieux.
00:25:18Un petit con peut se mettre en tête
00:25:20avec 2-3 potes aussi cons que lui
00:25:22qui vont récupérer le point.
00:25:24Ils vont essayer. Ça va être une guerre.
00:25:26Dans la plupart des cas,
00:25:28ces petits cons finissent par ramasser
00:25:30et par regretter, mais ils ont quand même
00:25:32fait des dégâts autour d'eux.
00:25:34Ces jeunes patrons sont devenus
00:25:36la bête noire des anciens,
00:25:38pourtant habitués à la violence,
00:25:40dont ils sont eux aussi les auteurs
00:25:42et les commanditaires.
00:25:44C'est ce qu'on appelle le choc des générations,
00:25:46mais traditionnel.
00:25:48Pourquoi vous avez accepté de faire cette interview aujourd'hui ?
00:25:52Les proportions que ça a pris,
00:25:54elles sont énormes.
00:25:56C'est au sein des nôtres qu'il y a beaucoup de drame
00:25:58et les morts amènent les morts
00:26:00et que la violence amène la violence.
00:26:02Donc les gens, ils vont se venger.
00:26:04Impatients,
00:26:06revanchards et ultra-violents,
00:26:08ces nouveaux trafiquants
00:26:10ont bouleversé la structure des réseaux.
00:26:12C'est précisément l'histoire
00:26:14de ce jeune homme que nous rencontrons.
00:26:16Il dirige plusieurs points de deal
00:26:18dans la région parisienne
00:26:20et va être pris devant nos caméras
00:26:22dans une guerre de territoire.
00:26:24Celui que nous appellerons Azim
00:26:26n'a connu que la rue.
00:26:28A 14 ans,
00:26:30il commence en bas de l'échelle du trafic
00:26:32et travaille pour plusieurs patrons.
00:26:34D'abord il guette, puis vend,
00:26:36avant de devenir gérant.
00:26:38Aujourd'hui,
00:26:40c'est le patron.
00:26:42Dans le monde où l'argent est roi,
00:26:44il est étrangement très compliqué d'en parler.
00:27:12Il a grandi dans le milieu
00:27:14et en connaît tous les rouages.
00:27:16Il fait partie de cette nouvelle génération de trafiquants.
00:27:36En 2017,
00:27:38il est arrêté alors qu'il est vendeur
00:27:40des points de deal.
00:27:42En détention, son réseau ne le soutient pas financièrement,
00:27:44ce qui est pourtant une règle tacite
00:27:46dans le trafic de drogue.
00:27:48En prison,
00:27:50il retrouve un autre jeune
00:27:52qui travaillait pour le même patron.
00:28:10Leur prise de guerre,
00:28:24la voici.
00:28:26Cet immeuble d'une quinzaine d'étages.
00:28:28Son équipe
00:28:30est composée de jeunes gens comme lui,
00:28:32impatients et prêts à tout
00:28:34pour redistribuer les cartes du trafic.
00:28:36Le point de deal
00:28:38est situé plus haut dans les étages.
00:28:48Il est midi,
00:28:50le point de vente ouvre ses portes à 14h.
00:29:06Azim
00:29:08est très fier de gérer son propre réseau.
00:29:18Ce point de deal,
00:29:20il l'a repris avec les armes.
00:29:22Une opération qui lui a coûté
00:29:24aux alentours de 40 000 euros.
00:29:26On a fait un petit groupe de soldats,
00:29:28on a acheté ce qu'on avait à acheter
00:29:30et on est partis faire ce qu'on avait à faire.
00:29:32Et en traduction, de manière concrète,
00:29:34ça veut dire quoi ?
00:29:36On est partis, on a pris les armes,
00:29:38on est partis, on a tiré.
00:29:40Il y a eu des victimes ?
00:29:42Des morts, je vous le jure.
00:29:44Même des blessés ?
00:29:46Des blessés, bien sûr,
00:29:48sinon pourquoi sortir le fer
00:29:50s'il n'y a pas de blessés ?
00:29:52Donc la reprise de ce point,
00:29:54ça vous a coûté une victime ?
00:30:04Et ça ne vous dérange pas plus que ça ?
00:30:06Non, je pouvais...
00:30:08Je préfère que ce soit lui,
00:30:10que ce soit ça, moi.
00:30:12Dans son équipe armée,
00:30:14certains étaient mineurs.
00:30:16C'est vous, personnellement,
00:30:18qui avez blessé la personne ?
00:30:20Non.
00:30:22C'est un petit jeune homme, si vous voulez savoir,
00:30:24de 16 et demi.
00:30:26Et pourquoi il a fait ça ?
00:30:28Le monsieur voulait aller en Thaï.
00:30:30Où ça ?
00:30:32En Thaïlande.
00:30:34Il a pris combien ?
00:30:36Assez pour aller en Thaïlande
00:30:38et rester plus de 25 jours.
00:30:40Donc combien ?
00:30:42Assez pour rester 25 jours en Thaïlande.
00:30:44L'argent, peu importe les risques
00:30:46et les conséquences.
00:30:48Cette violence leur semble même presque normale.
00:30:50Vous avez l'impression que c'est le nouveau visage du banditisme ?
00:30:52Non, on n'est pas des banditismes.
00:30:54On n'est vraiment pas des bandits.
00:30:56Le mot bandit veut dire beaucoup de choses.
00:30:58Il ne veut pas dire ce qu'on est, nous, déjà, pour commencer.
00:31:00Alors vous dire que je suis un bandit, non.
00:31:02Je suis un bébé bandit, oui.
00:31:04Mais un bébé bandit qui prend les armes,
00:31:06qui tire sur des gens,
00:31:08c'est plus un bébé bandit à ce niveau-là.
00:31:10C'est un bébé bandit à l'air imbécile.
00:31:12Depuis 7 mois,
00:31:14date de conquête du point de deal,
00:31:16le jeune patron est néanmoins très tendu.
00:31:20En prenant ce lieu par la force,
00:31:22il s'expose à d'éventuels représailles.
00:31:24La violence appelle la violence
00:31:26et le monde du stupéfiant a la rancœur tenace.
00:31:30Vous pensez que le camp d'en face pourrait faire quoi ?
00:31:34Ah...
00:31:36On va s'entrejouer de la musique entre nous ?
00:31:40Jouer de la musique entre vous,
00:31:42vous faites référence au Kalachnikov qu'on surnomme les guitares ?
00:31:44C'est ça.
00:31:46La fameuse Kalachnikov.
00:31:48Les tensions sont justifiées.
00:31:50Quelques heures plus tard, pendant notre tournage,
00:31:52son point de vente est attaqué.
00:31:56Comment Azim va-t-il réagir ?
00:32:02Mais qui sont ces jeunes ?
00:32:04Prêts à blesser ou tuer pour quelques billets ?
00:32:08Nous avons réussi à rencontrer l'un d'entre eux.
00:32:10Obtenir ce genre de témoignage
00:32:12est extrêmement rare.
00:32:14Car le jeune homme risque la prison à perpétuité.
00:32:18Dans la rue,
00:32:20on les appelle les charcleurs,
00:32:22le nom actuel pour dire tueur à gage.
00:32:26Il a tout juste 20 ans.
00:32:30Votre métier, comment on pourrait le définir ?
00:32:34Je suis un guerrier.
00:32:36Ça peut être de l'enlèvement,
00:32:38de la séquestration,
00:32:40ou éteindre la lumière de la personne.
00:32:42Éteindre la lumière, cela veut dire l'exécuter.
00:32:44Le plus cher que vous ayez pris,
00:32:46c'était combien ?
00:32:4825.
00:32:50Et le moins cher ?
00:32:5210.
00:32:54Pour 10 000 euros, vous avez tué.
00:32:56Ça les valait ?
00:32:58Vraiment pas.
00:33:00Mais pourquoi vous l'avez fait ?
00:33:02Parce que je devais aller en vacances.
00:33:06Et vous y avez pensé pendant ces vacances ?
00:33:08Non.
00:33:10J'ai pensé, une fois que j'avais plus de sous,
00:33:12à refaire la même chose.
00:33:14Comment peut-on être capable de tuer,
00:33:16juste pour partir en vacances ?
00:33:18Son itinéraire criminel
00:33:20n'a malheureusement rien d'original.
00:33:22Issu d'une famille modeste,
00:33:24il commence à être guetteur,
00:33:26et débute alors une lente glissade
00:33:28vers la violence.
00:33:30J'étais jeune,
00:33:32et je fumais beaucoup.
00:33:34Pour acheter un peu de fumette,
00:33:36il me fallait un peu de sous.
00:33:38Donc automatiquement, on guette,
00:33:40on vend, on est gérant.
00:33:42Après, derrière, tu peux faire tout ce que tu veux.
00:33:44Du moment que tu rentres dans le monde,
00:33:46c'est stupéfiant, après, t'as mille emplois.
00:33:48Un jour,
00:33:50il bascule et accepte d'honorer
00:33:52un contrat pour un réseau.
00:33:54Le jeune homme est alors à peine majeur.
00:33:56Qu'est-ce qui se passe dans votre tête
00:33:58quand on vous appelle ?
00:34:00Tout s'arrête.
00:34:04Je rentre dans une autre chambre.
00:34:06C'est la chambre
00:34:08de l'angoisse, du stress,
00:34:10de l'adrénaline.
00:34:12Et à ce moment-là, vous tirez,
00:34:14et il se passe quoi dans votre tête
00:34:16quand vous réalisez que la personne, elle est morte ?
00:34:18J'ai pas réalisé sur le tas.
00:34:20C'est après, par confirmation d'une autre personne
00:34:22qui a eu un mort à tel endroit.
00:34:24Et...
00:34:26C'est là où on se dit...
00:34:28On l'a fait, quoi, voilà.
00:34:30Le jeune tueur repassera
00:34:32ensuite à l'acte.
00:34:34Désormais dans la rue,
00:34:36charcleur est sa nouvelle fonction pour les réseaux.
00:34:38Vous croisez le visage des gens que vous avez tués ?
00:34:40Moi, personnellement, bizarrement,
00:34:42j'arrive plus à...
00:34:44C'est comme si j'avais l'image, mais sans le visage.
00:34:48C'est spécial, quoi.
00:34:50Vous croisez parfois la famille
00:34:52de ces personnes ?
00:34:54Souvent. Si je les connais pas,
00:34:56j'essaie de pas aller vers eux, voilà.
00:34:58Mais si je les connais,
00:35:00c'est automatique.
00:35:02Je fais le gentil, je fais la double face.
00:35:04Bonjour, tata.
00:35:06Ça va, tata ? Ça se passe ?
00:35:08T'as besoin de quelque chose, tata ?
00:35:10Vous avez tué des gens
00:35:12que vous connaissiez très bien dans la famille ?
00:35:14Le jeune homme
00:35:16a pleinement conscience de la gravité
00:35:18de ses actes. Aujourd'hui,
00:35:20il aimerait arrêter.
00:35:22Pour autant, si un réseau l'appelle,
00:35:24il tuera sans doute de nouveau.
00:35:26On n'arrête pas comme ça.
00:35:28Vous êtes drogué à l'argent ou vous êtes drogué
00:35:30à l'adrénaline ?
00:35:32Pas les deux. On est plus drogués
00:35:34au regard des gens, en fait.
00:35:38Pourquoi vous avez un crainte ?
00:35:40Parce que dans la crainte, il y a le respect.
00:35:42Mais le respect est pur et dur.
00:35:44Et dans le respect,
00:35:46il y a de la peur aussi.
00:35:50Son témoignage est glaçant.
00:35:52Et pourtant, il est assez banal
00:35:54chez ces jeunes tueurs.
00:35:56C'est ce que nous confirme aussi
00:35:58la tête de réseau que nous avons rencontrée.
00:36:00Ils préfèrent
00:36:0210 fois
00:36:04prendre 15 000 ou 20 000 euros
00:36:06pour passer, mettre 3 balles à un mec,
00:36:08le laisser sur le carreau.
00:36:10Ça va lui prendre 5 minutes.
00:36:12Il sauve, il jette l'arme, c'est oublié.
00:36:14Plutôt que de tenir un point pour 3 000 euros
00:36:16par mois parce qu'il va devoir tous les jours
00:36:18être là, travailler, veiller sur les choses
00:36:20tant qu'il choisisse la facilité.
00:36:22Argent, rapide, facile, principe zéro.
00:36:24Un rapport presque
00:36:26obsessionnel à l'argent,
00:36:28mais aussi une volonté de se faire respecter
00:36:30les autres.
00:36:32Ils se ressentent tous.
00:36:34C'est un peu le même profil.
00:36:36Perdus pour la plupart, jeunes,
00:36:38pas très forts physiquement et qui ont justement
00:36:40ce besoin de se dire que
00:36:42moi aussi je fais peur.
00:36:44Peut-être que parce qu'eux aussi ils ont peur,
00:36:46va savoir. En tout cas, eux, ils avaient un complexe
00:36:48dans ce que j'ai vu.
00:36:50Ces nouveaux profils, une ville
00:36:52en a été la principale témoin.
00:36:54Marseille.
00:37:00En 2023, 49 personnes
00:37:02ont été tuées dans des narcomicides.
00:37:04C'est l'année la plus sanglante
00:37:06dans la cité phocéenne.
00:37:08Plus d'une trentaine de ces morts
00:37:10l'ont été dans une guerre entre deux clans.
00:37:12La DZ Mafia d'un côté
00:37:14et Yoda de l'autre.
00:37:16Deux clans
00:37:18et deux visages.
00:37:20Mehdi Laribi, surnommé Tick,
00:37:22considéré comme l'un des chefs de la DZ
00:37:24et Félix Bengui de l'autre,
00:37:26à la tête du clan Yoda.
00:37:28Les deux réseaux
00:37:30contrôlent fin 2022 plusieurs dizaines
00:37:32de points de deal très rentables.
00:37:34Pour un différent personnel
00:37:36entre ces deux chefs, début
00:37:382023,
00:37:40une guerre sanglante éclate.
00:37:42En quelques mois,
00:37:44elle a fait des dizaines de victimes.
00:37:48Quelque part dans Marseille,
00:37:50nous rencontrons cet homme.
00:37:52Il prend d'énormes risques
00:37:54en nous parlant. S'il était reconnu,
00:37:56sa vie serait menacée.
00:37:58Nous ne pouvons donner aucun détail
00:38:00qui pourrait le confondre.
00:38:02Simplement lui poser les questions
00:38:04que nous voulons.
00:38:26Selon lui,
00:38:28la DZ de mafia serait aujourd'hui
00:38:30l'un des groupes criminels
00:38:32les plus puissants de France.
00:38:34Félix Bengui,
00:38:36le chef présumé du clan Yoda,
00:38:38a lui depuis été arrêté.
00:38:40Durant cette guerre sanglante
00:38:42l'an dernier,
00:38:44parmi les personnes arrêtées
00:38:46pour homicide ou tentative d'homicide
00:38:48à Marseille,
00:38:50plus de la moitié des victimes
00:38:52ont été arrêtées.
00:38:54Parmi ces jeunes
00:38:56aujourd'hui en prison
00:38:58et en attente de leur jugement,
00:39:00il y en a un qui a fait
00:39:02beaucoup parler de lui
00:39:04dans la presse et sur les réseaux.
00:39:06Car il a un nom
00:39:08et un visage.
00:39:10Mathéo.
00:39:12Mathéo, est-ce que ça vous dit quelque chose ?
00:39:14Oui.
00:39:16Dans les médias, on a dit
00:39:18que Mathéo était affilié à la DZ.
00:39:20On ne peut pas dire ça comme ça.
00:39:22Quand on est affilié à quelqu'un,
00:39:24c'est comme travailler avec lui.
00:39:26Là non, il était payé pour ce qu'il faisait.
00:39:28Ce serait lui, ici,
00:39:30avec son arme,
00:39:32en train d'abattre un homme en pleine rue.
00:39:34La particularité de Mathéo,
00:39:36c'est qu'il se mettait en scène
00:39:38sur les réseaux sociaux
00:39:40en se vantant de ses actes.
00:39:42Je vais enchaîner les contrats,
00:39:44je vais redescendre,
00:39:46je vais remonter à Paname,
00:39:48ça va tout baiser sur la vie de ma mère.
00:39:50Lui, ça a été beaucoup médiatisé.
00:39:52Il s'est filmé.
00:39:54Après, ils disent que dans les médias,
00:39:56ils se filmaient pour les patrons des réseaux,
00:39:58pour qu'ils puissent le faire chanter
00:40:00ou le renvoyer,
00:40:02mais ce n'est pas vrai.
00:40:04Il n'y a personne qui lui a demandé de faire ça.
00:40:06Pourquoi ?
00:40:08Pourquoi nous montrer ?
00:40:10C'est nous qui t'avons donné la voiture et les armes.
00:40:12Pourquoi tu veux nous remontrer les armes
00:40:14et la même voiture ?
00:40:16Le jeune tueur est soupçonné
00:40:18d'être impliqué dans neuf assassins.
00:40:22Mathéo, il aurait déclaré en audition,
00:40:24en policier,
00:40:26des types comme moi à Marseille, il y en a plein.
00:40:28Il y en a plein. Il n'a pas tort.
00:40:30Ah oui, il y en a beaucoup.
00:40:32Et des plus fous que lui même.
00:40:34Lui, il a été gentil.
00:40:36Enfin, gentil.
00:40:38Il a fait des conneries.
00:40:40Des grosses conneries.
00:40:42Mais il y a des plus petits qui sont plus...
00:40:44plus déterminés,
00:40:46plus intelligents que lui.
00:40:48Ils sont dehors, ces petits-là,
00:40:50à l'heure actuelle ?
00:40:52Ils sont là.
00:40:54Ils sont là.
00:40:56Malgré son expérience du milieu,
00:40:58l'homme se méfie de cette nouvelle génération.
00:41:00Si tu leur cries dessus,
00:41:02ils sont fous.
00:41:04C'est-à-dire ?
00:41:06Ils peuvent faire des choses de cons.
00:41:08Ils font des choses de cons,
00:41:10ils peuvent faire des choses de cons avec nous aussi.
00:41:12Vous finissez par en avoir peur ?
00:41:14Non, pas en avoir peur.
00:41:16On n'a peur de personne.
00:41:18Mais si après, il veut se retourner contre toi,
00:41:20c'est...
00:41:22ça ne fait pas rire.
00:41:24Parce qu'après, il va falloir le tuer, après.
00:41:26Mais vous vous en méfiez quand même ?
00:41:28Il faut s'en méfier.
00:41:30Il faut.
00:41:34Ces jeunes, dont le Marseillais
00:41:36se méfie lui aussi,
00:41:38sont d'autant plus dangereux et incontrôlables
00:41:40qu'ils sont parfois recrutés directement
00:41:42sur Internet, en quelques clics.
00:41:46Les nouvelles applications préférées
00:41:48des narcotrafiquants,
00:41:50les messages récryptés.
00:41:52C'est ici, sur des boucles de discussion
00:41:54que circulent les petites annonces.
00:41:56Nous avons infiltré
00:41:58certaines d'entre elles.
00:42:00Sur ce message,
00:42:02une proposition pour un travail de vendeur à Aubagne.
00:42:04Sur celui-ci,
00:42:06une proposition pour Strasbourg,
00:42:08une proposition pour Lyon.
00:42:10Désormais, les petites mains du trafic
00:42:12se recrutent dans toute la France
00:42:14et se déplacent au gré des opportunités.
00:42:16Horaire, tarif,
00:42:18lieu et durée du contrat.
00:42:20Tout est indiqué de manière très professionnelle.
00:42:24Même le titre de cette discussion
00:42:26reprend le nom d'un célèbre site
00:42:28d'offre d'emploi.
00:42:30C'est aussi ici que l'on passe
00:42:32certaines annonces de recrutement
00:42:34pour tueurs à gage.
00:42:36On propose 20 000 euros pour tuer quelqu'un.
00:42:38Sur celle-là,
00:42:4020 000 euros pour deux morts.
00:42:42Mais ces canaux
00:42:44sont aussi faits pour montrer sa force.
00:42:48Comme dans le sud de la France,
00:42:50où les attaques de points de deal
00:42:52sont diffusées et revendiquées.
00:43:06Montrer sa force,
00:43:08mais aussi faire régner la terreur.
00:43:14Scène d'humiliation.
00:43:22De tabassage.
00:43:30Certains des assassinats
00:43:32sont même filmés.
00:43:36Nous avons décidé
00:43:38de ne pas les diffuser.
00:43:40Sur ces canaux,
00:43:42circulent aussi des images de torture
00:43:44et d'actes de barbarie
00:43:46en provenance des cartels d'Amérique centrale.
00:43:50Ce genre de vidéos
00:43:52immergent les jeunes dans cet univers d'ultra-violence.
00:43:54Des images auxquelles ils s'habituent
00:43:56et qui peuvent avoir des conséquences
00:43:58profondes sur leur état d'esprit.
00:44:00C'est ce que nous confirme le jeune tueur.
00:44:02J'ai une vidéo où je me rappelle
00:44:04qu'elle m'avait donné des frissons
00:44:06de la transpiration.
00:44:08J'en avais une boule au ventre.
00:44:10C'était un papa
00:44:12qui était mis à quatre pattes
00:44:14devant ses deux enfants.
00:44:16Et pour faire souffrir le papa,
00:44:18ils ont fait tuer
00:44:20les petits-enfants
00:44:22devant ses yeux.
00:44:24Il se passe quoi dans votre tête à ce moment-là ?
00:44:26Je me dis, je suis une brebis, moi.
00:44:28C'est tellement fort que nous,
00:44:30ce qu'on fait, c'est caca.
00:44:32On s'ouvre automatiquement une deuxième porte.
00:44:34On se dit, tiens,
00:44:36je vais pas aller à peu près
00:44:38à ce qu'ils font, mais les rejoindre.
00:44:40Alors que,
00:44:42si on se pose cinq minutes,
00:44:44c'est choquant, c'est grave,
00:44:46c'est pas humain, quoi.
00:44:48Ces vidéos, qui fascinent
00:44:50le jeune garçon, finissent par le faire
00:44:52définitivement basculer.
00:44:54Je voulais comprendre la chose.
00:44:56C'est-à-dire comprendre la chose. Comprendre quoi ?
00:44:58Ce que c'était de le faire.
00:45:00De tuer ?
00:45:02Je sais pas comment vous l'expliquer.
00:45:04L'engrenage dans lequel il est tombé,
00:45:06il parvient seulement aujourd'hui
00:45:08à s'en rendre compte.
00:45:10Vous avez conscience que vous êtes juste
00:45:12un fusible pour les réseaux,
00:45:14pour faire de ça le boulot ?
00:45:16Oui, je suis même un pion.
00:45:18Je suis qu'un pion, moi. Je le sais
00:45:20et je le prends en compte.
00:45:22Et ça vous fait quoi ?
00:45:24C'est comme ça, c'est la vie.
00:45:26On peut pas forcer la chose.
00:45:28Sur ces réseaux,
00:45:30on retrouve aussi l'une des principales
00:45:32composantes des assassinats.
00:45:34Les armes à feu.
00:45:36Car chez les narcotrafiquants,
00:45:38au-delà de la guerre,
00:45:40afficher la puissance du groupe criminel
00:45:42est fondamental.
00:45:44L'armement est aussi devenu une question
00:45:46de standing et de dissuasion.
00:45:50En région parisienne,
00:45:52nous avons pu rencontrer
00:45:54ceux qui sont au cœur de ce business.
00:45:56Les conditions pour les approcher
00:45:58sont très strictes.
00:46:00Nous avons dû laisser nos téléphones
00:46:02à plusieurs kilomètres
00:46:04et nous y faire conduire
00:46:06par l'un de leurs contacts.
00:46:08Tout est brouillé dans un règne d'environ 150 mètres.
00:46:10Donc là, on peut pas être localisé
00:46:12ni écouté.
00:46:14Ils sont l'un des premiers maillons
00:46:16de cette chaîne meurtrière.
00:46:20Les trafiquants d'armes.
00:46:22Et ça, qu'est-ce que c'est ?
00:46:24Alors ça, c'est un six-over.
00:46:26C'est du gros calibre.
00:46:28Arme suisse.
00:46:30Arme de guerre.
00:46:32Et ça, c'est un USAS-12.
00:46:34C'est du calibre 12, mais qui tire en rafale.
00:46:36Ces armes proviennent le plus souvent
00:46:38de braquages d'armeries
00:46:40ou de pays en guerre.
00:46:42En moyenne, en France,
00:46:44plus de 9000 seraient volées chaque année.
00:46:46Elles se revendent ensuite
00:46:48à prix d'or sur le marché noir.
00:46:50Là, ça vaut
00:46:52entre 3000 et 5000 euros.
00:46:54Là, c'est des armes jetables
00:46:56à 1500 euros.
00:46:58Environ 4500.
00:47:00Ça, ça vaut
00:47:02environ 5000 euros.
00:47:04Pareil, ça, c'est un fusil jetable
00:47:06qui tire en rafale.
00:47:08Les armes jetables, autrement dit celles vouées
00:47:10à n'être utilisées qu'une seule fois,
00:47:12puis détruites pour effacer toute preuve.
00:47:14Voilà, t'as à peu près
00:47:16ce qui se vend bien.
00:47:18C'est ce que les gens recherchent.
00:47:20Il y a une dizaine d'années,
00:47:22le fusil à pompe était
00:47:24l'arme typique des criminels.
00:47:26Aujourd'hui, les armes semi-automatiques
00:47:28sont légion.
00:47:30Y a personne qui ont des gros fours
00:47:32dans des quartiers,
00:47:34qui veulent défendre leur four, en fait,
00:47:36qui vont pas se déplacer avec l'arme,
00:47:38qui la gardent à portée, dans une fenêtre
00:47:40ou sur un pont.
00:47:42Avec la voiture.
00:47:44Actuellement,
00:47:461,5 à 6 millions d'armes circuleraient
00:47:48illégalement en France.
00:48:00Les points de deal se sont
00:48:02multipliés, et avec eux,
00:48:04les guerres de territoire.
00:48:10C'est quoi l'intérêt du full auto ?
00:48:17Avec une portée d'un kilomètre,
00:48:19et des munitions capables de traverser
00:48:21les carrosseries de voitures
00:48:23et les gilets pare-balles,
00:48:25la Kalachnikov est devenue
00:48:27l'arme de guerre la plus prisée sur le marché.
00:48:47Pourquoi la Kalachnikov,
00:48:49elle est aussi utilisée
00:48:51dans les règlements de compte ?
00:49:11Ces trafiquants,
00:49:13qui risquent jusqu'à 10 ans d'emprisonnement
00:49:16pour vendre d'armes illégales,
00:49:18craignent que ces tueurs inexpérimentés
00:49:20permettent aux forces de l'ordre
00:49:22de remonter plus facilement jusqu'à eux.
00:49:24Ils nous disent ne plus vendre d'armes aux jeunes.
00:49:26C'est bien sûr impossible à vérifier.
00:49:46Le bien,
00:49:48et le mal.
00:49:50En région parisienne,
00:49:52le jeune Azim
00:49:54y est directement confronté.
00:49:56Le point de deal,
00:49:58sur lequel il a mis la main de force
00:50:00il y a quelques mois,
00:50:02vient tout juste d'être attaqué.
00:50:085 minutes à peine sont passées,
00:50:10Azim est le premier
00:50:12à arriver sur place.
00:50:15Il cherche son équipe,
00:50:19mais personne ne répond.
00:50:23Le guetteur et le vendeur
00:50:25se sont enfuis.
00:50:31Sur la porte d'entrée du hall,
00:50:33deux impacts de balles.
00:50:45Là elle est passée la balle.
00:50:47Là elle n'est pas passée.
00:50:51Les tirs n'ont pas fait de victime.
00:50:57Les douilles sont encore au sol.
00:51:11Pourquoi faire disparaître les douilles ?
00:51:15Pour la ballistique,
00:51:17parce qu'il y a la ballistique,
00:51:19à chaque fois que ça tire,
00:51:21ils viennent,
00:51:23ils restent très longtemps.
00:51:25Ça serait nous faire perdre de l'argent
00:51:27vu que le petit ne pourra pas se placer tranquillement.
00:51:29Malheureusement on enlève les empreintes
00:51:31des gens qui nous mettent du mal.
00:51:33Pour le bon fonctionnement de la chose.
00:51:37C'est un peu compliqué.
00:51:39C'est la première fois qu'il se fait attaquer,
00:51:41depuis qu'il a repris le point de deal
00:51:43il y a quelques mois.
00:52:07Dans le monde du stupéfiant,
00:52:09si la tête tombe,
00:52:11la structure est totalement désorientée
00:52:13et le réseau peut s'effondrer rapidement.
00:52:15Azim ne peut pas se permettre
00:52:17de rester plus longtemps sur place.
00:52:29Il cherche le ou les auteurs des tirs.
00:52:41Chaque silhouette, chaque voiture,
00:52:43est suspecte.
00:52:45Azim veut s'assurer
00:52:47que les tireurs ne sont pas cachés dans le quartier,
00:52:49prêts à attaquer de nouveau.
00:53:12Les gens sont suspicieux là un peu ?
00:53:14Ils sont plus pires qu'autre chose.
00:53:16Peur de quoi ?
00:53:18De toute la merde qu'on ramène ici,
00:53:20à cause de nous.
00:53:22C'est malheureux, mais il faut le dire.
00:53:24C'est-à-dire ?
00:53:26C'est-à-dire que les voisins,
00:53:28ceux qui habitent là, ils ont un peu peur.
00:53:30Ils ont des enfants.
00:53:34Nous-mêmes on a peur.
00:53:36Faut pas se mentir, on reste des êtres humains.
00:53:39Je suis allé marcher, je suis fatigué.
00:53:41J'étais en train de faire un brouhaha.
00:53:43Regarde, à la fin, je l'ai vomi.
00:53:45Pas par peur, mais par angoisse,
00:53:47stress.
00:53:49Devenue concrète,
00:53:51la guerre secoue le jeune patron.
00:53:53En plus de risquer de se faire tirer dessus
00:53:55à chaque coin de rue,
00:53:57la police, elle aussi, peut arriver.
00:53:59La situation est très tendue.
00:54:01Ils sont tous en train de me casser les couilles.
00:54:03Tous à faire les tapettes.
00:54:09Ça vous marque quand même ?
00:54:11Ça casse les couilles.
00:54:16C'est une vie qu'attend.
00:54:18C'est-à-dire ?
00:54:20C'est un roulement qu'on se raconte en un an,
00:54:22deux ans après.
00:54:24Toutes les merdes du monde tombent sur toi.
00:54:28Les gens croient que c'est un jeu,
00:54:30c'est facile, on perd beaucoup de choses.
00:54:32Mais vraiment beaucoup, beaucoup.
00:54:34Vraiment.
00:54:36C'est la moitié de notre entourage.
00:54:38Nous voyons en tant que mauvais, que sale.
00:54:40C'est pas propre, quelqu'un qui...
00:54:42Qui fait de la merde toute l'année.
00:54:46Pendant quelques minutes,
00:54:48le jeune dealer semble rêver d'une autre vie.
00:54:50Mais rapidement,
00:54:52le business reprend ses droits.
00:54:54Les clients, ça les a fait buffer sur le terrain ?
00:54:56C'est bon ?
00:54:58Son équipe a rapidement trouvé un autre lieu
00:55:00pour pouvoir reprendre les ventes.
00:55:02Le plus important maintenant, c'est pas qu'on perde les clients,
00:55:04c'est pas qu'on perde notre base,
00:55:06parce qu'il leur a gagné.
00:55:08Ils nous ont coupé les ponts, on les vive.
00:55:10Sur son téléphone, le jeune homme
00:55:12vient de recevoir une vidéo.
00:55:14Je suis dégoûté de vous montrer ça.
00:55:16L'attaque a été filmée par l'un des guetteurs,
00:55:18caché dans un buisson.
00:55:20On voit qu'il s'approche.
00:55:22Il était déjà sorti du véhicule,
00:55:24il se retourne pour voir s'il y a quelqu'un derrière lui.
00:55:28De coup à coup, il part.
00:55:30Dans le monde de la rue,
00:55:32il y a un simple avertissement.
00:55:34Le responsable pourrait être l'ancien propriétaire
00:55:36ou une autre bande
00:55:38qui convoite son point de vente.
00:55:40Vous inspirez quoi, les tirs ce soir ?
00:55:42Pour moi, c'est un zéro.
00:55:44Un zéro, c'est...
00:55:46S'il a déclaré quelque chose,
00:55:48il est obligé de la terminer.
00:55:50C'est comme ça, et d'un côté,
00:55:52c'est pas plus mal, parce qu'on l'attendait.
00:55:54Au moins, il a déclenché la chose,
00:55:56et c'est pas nous, on a cherché la merde.
00:55:58Quand on va commencer, on va pas s'arrêter,
00:56:00je tiens à vous le dire, madame.
00:56:02La seule chose qui puisse faire que tu puisses déclencher ça,
00:56:08c'est soit de voir un membre de ta famille mourir
00:56:10à cause de tes problèmes,
00:56:14à répétition,
00:56:16soit toi-même te ramasser des coups à coups.
00:56:18Des coups à coups, c'est des balles.
00:56:20La violence
00:56:22ou la mort,
00:56:24cela fait partie de leur quotidien.
00:56:26C'est presque devenu une fatalité
00:56:28pour ces jeunes trafiquants.
00:56:40Durant ces mois de tournage et d'enquête,
00:56:42nous avons rencontré
00:56:44toutes les strates des trafiquants.
00:56:46Des petites mains,
00:56:48aux grands patrons,
00:56:50et une chose nous a marqués,
00:56:52le sentiment d'un grand gâchis.
00:56:54A quoi ça ressemble,
00:56:56la vie d'un mec comme vous ?
00:56:58Ça ressemble à rien.
00:57:00C'est-à-dire ?
00:57:02On a les sous pour,
00:57:04mais on vit pas avec.
00:57:06C'est bizarre, un peu.
00:57:08J'ai une baguette magique, là.
00:57:10J'ai un super pouvoir.
00:57:12Je peux réaliser tous vos rêves.
00:57:14Un seul.
00:57:16C'est quoi, votre rêve ?
00:57:18Recommencer à zéro.
00:57:20Ça veut dire repartir à l'école primaire.
00:57:22Pourquoi ?
00:57:24Parce que ma meilleure vie,
00:57:26je l'ai eue quand j'étais à l'école primaire.
00:57:28Quand j'étais petit, c'est là où...
00:57:30je vivais.
00:57:32Et dans votre cœur,
00:57:34de petit garçon, d'enfant ?
00:57:36J'ai plus ce cœur-là.
00:57:38Ils l'ont pris, ça y est. Il est parti.
00:57:40J'aimerais bien l'avoir.
00:57:42Ce serait ma dossière.
00:57:44C'est un cercle,
00:57:46qui se brisera jamais.
00:57:48La seule chose qui se brise,
00:57:50c'est quand on vous n'aime.
00:57:52Un sentiment,
00:57:54partagé par la tête,
00:57:56pourtant tout en haut du réseau.
00:57:58Le milieu, là,
00:58:00il fait rêver
00:58:02parce que t'as de l'argent,
00:58:04parce que t'as des jolis décors,
00:58:06parce que tu peux aider plein de monde autour de toi.
00:58:08Mais,
00:58:10en même temps,
00:58:12il peut tout le temps y avoir des ennemis,
00:58:14y a des trahisons,
00:58:16y a des gros problèmes,
00:58:18qui peuvent venir tout péter,
00:58:20et y a pas vraiment de règle dans ce milieu.
00:58:22Leur mère a été prise,
00:58:24leur enfant a été pris,
00:58:26leur sœur a été prise.
00:58:28Si je pouvais retourner en arrière,
00:58:30j'aurais préféré une simplicité.
00:58:32La simplicité d'un travail,
00:58:34de faire les choses doucement,
00:58:36mais de pouvoir me réveiller tranquille
00:58:38et me dire, je vais au boulot,
00:58:40je paie mon loyer,
00:58:42je vis normalement.
00:58:44La tranquillité, elle n'a pas de prix, en fait.
00:58:48Le futur pour la France, vous voyez comment ?
00:58:52Bien triste.
00:58:54Ce qu'on fait,
00:58:56c'est pas beau.
00:58:58T'as même pas besoin de le mettre,
00:59:00c'est juste que j'ai réfléchi,
00:59:02t'as question, je pense,
00:59:04parce que tu me la poses.
00:59:06En vrai, c'est triste de ouf.
00:59:18Un autre enquête à Grenoble,
00:59:20où la guerre des gangs fait rage.
00:59:22Depuis le début de l'année,
00:59:2417 épisodes de violences par arme à feu
00:59:26ont été recensés dans la cité alpine.
00:59:28La préfecture reconnaît même
00:59:30une accélération des faits criminels
00:59:32ces derniers jours.
00:59:34Fusillades, règlements de comptes,
00:59:36Grenoble a été tristement sous le feu
00:59:38de l'actualité en matière de délinquance
00:59:40et de trafic de drogue cet été.
00:59:42Un agent municipal a été tué ici,
00:59:44il y a quelques jours,
00:59:46par un procureur de la République du Grenoble
00:59:48qui n'hommage pas ses mots en matière
00:59:50de lutte contre le trafic.
00:59:54Éric Vaillant, procureur ici depuis 5 ans,
00:59:56dresse un constat.
00:59:58Le trafic de drogue grenoblois
01:00:00a changé de main.
01:00:02Comment s'organise le business
01:00:04de la drogue à Grenoble ?
01:00:06Grenoble a toujours connu une grosse activité délinquante.
01:00:08On parlait à une époque
01:00:10des délinquants
01:00:12italo-grenoblois.
01:00:14Aujourd'hui, ces italo-grenoblois
01:00:16ont quasiment disparu, sont à la retraite.
01:00:18Les cités, les trafics sont gérés
01:00:20par des délinquants,
01:00:22le plus souvent français.
01:00:24D'origine maghrébine, mais français.
01:00:26Grosso modo, dans l'agglomération grenobloise,
01:00:28la grosse agglomération grenobloise,
01:00:30c'est environ 500 000 personnes,
01:00:32on dénombre une trentaine
01:00:34de points de deal. On a l'impression
01:00:36que ce nombre de points de deal est en diminution,
01:00:38ce qui pourrait être rassurant, mais je pense
01:00:40que s'il y a des points de deal
01:00:42qui ferment, c'est sans doute grâce à l'action des policiers
01:00:44et des gendarmes, et de la justice,
01:00:46mais sans doute aussi parce que, de plus en plus,
01:00:48on va assister à une ubérisation
01:00:50du trafic
01:00:52de stupéfiants, avec des livraisons
01:00:54à domicile. Parce qu'en fait, derrière
01:00:56les trafics, il y a des individus,
01:00:58des hommes, essentiellement des hommes, quelques femmes.
01:01:00Je parle essentiellement des français,
01:01:02mais de plus en plus, ces français
01:01:04chefs de gang
01:01:06emploient des étrangers en situation irrégulière,
01:01:08ils emploient des mineurs,
01:01:10pour ne pas aller tabasser quand
01:01:12ils se font arrêter par la police,
01:01:14et qu'ils ont perdu une quantité de stupéfiants.
01:01:16C'est vraiment un milieu
01:01:18de criminels.
01:01:20C'est une société extrêmement hiérarchisée et complètement inégalitaire,
01:01:22parce que le gros malais gagne beaucoup d'argent,
01:01:24mais les dealers, les chauffeurs,
01:01:26gagnent quelques dizaines d'euros, quelques centaines d'euros.
01:01:28Je ne suis pas d'accord, je trouve qu'ils gagnent quand même de l'argent,
01:01:30c'est d'ailleurs pour ça qu'ils arrivent encore à les attirer.
01:01:32C'est-à-dire qu'un jeune sans formation,
01:01:34mineur éventuellement,
01:01:36ou étranger en situation irrégulière, qui gagne 100 euros
01:01:38par jour, ça reste une grosse somme.
01:01:40Ce n'est pas tout le monde en France qui gagne 3000 euros par mois.
01:01:42Donc même le chouffe
01:01:44gagne bien sa vie,
01:01:46et c'est d'ailleurs pour ça qu'ils n'ont aucun mal à trouver
01:01:48des personnes qui vont venir travailler avec eux.
01:01:50En cinq ans,
01:01:52le procureur de la République a réussi à créer
01:01:54de nouvelles méthodes pour faciliter
01:01:56le travail des forces de police sur le terrain.
01:01:58On a eu l'initiative à Grenoble
01:02:00d'un procès-verbal simplifié
01:02:02contre les guetteurs.
01:02:04Moi je suis allé en ville
01:02:06à mon arrivée, avec les équipes
01:02:08de la police, BST ou BAC.
01:02:10Et ils me disaient, nous,
01:02:12on ne peut pas arrêter tous les guetteurs qu'on voit,
01:02:14on les relâche, parce que quand on appelle
01:02:16notre poste centrale, ils nous disent
01:02:18qu'on a déjà suffisamment de garde à vue,
01:02:20juste pour un guetteur, ça ne sert à rien.
01:02:22Donc je leur ai dit, est-ce qu'on pourrait mettre en place
01:02:24un procès-verbal simplifié, une sorte de QCM,
01:02:26avec des cases à cocher,
01:02:28qui vous permettrait à la fin de saisir
01:02:30le talkie-walkie, de saisir le téléphone,
01:02:32et de saisir l'argent du guetteur.
01:02:34Je leur ai dit, est-ce que ça vous serait utile ?
01:02:36Ils m'ont dit, oui, ce serait formidable si vous arriviez à monter ça.
01:02:38Et donc on l'a monté,
01:02:40et ça a été mis en place
01:02:42seulement au mois de mars dernier.
01:02:44Mais depuis le mois de mars, on a récupéré plus de 15 000 euros
01:02:46sur des guetteurs comme ça.
01:02:48Étonnamment, malgré
01:02:50cette répression accrue,
01:02:52le gramme de cocaïne
01:02:54baisse.
01:02:56Le prix du gramme de cocaïne baisse.
01:02:58Il baisse en prix et il augmente en qualité.
01:03:00Il augmente en qualité,
01:03:02c'est-à-dire qu'il est moins en moins trafiqué.
01:03:04Tout à fait. On est sur des taux de pureté
01:03:06minimum 65%, je crois à peu près.
01:03:08Et souvent plus maintenant.
01:03:10Oui, vous avez raison,
01:03:12il faut qu'aux frontières, il y ait une action,
01:03:14et notamment sur les zones portuaires.
01:03:16C'est incroyable ce qui arrive en France.
01:03:18On parle toujours d'Anvers,
01:03:20des ports belges, des ports néerlandais,
01:03:22mais un port qui est
01:03:24moins connu, on se dit, c'est quand même la campagne française,
01:03:26Cherbourg.
01:03:28C'est un port à problème.
01:03:30Il faut surveiller
01:03:32ces entrées, c'est une évidence.
01:03:34Ma conviction forte,
01:03:36c'est que la lutte
01:03:38contre les trafiquants, c'est une lutte
01:03:40tous azimuts.
01:03:42Il faut s'occuper de tout.
01:03:44Y compris déstabiliser les consommateurs ?
01:03:46Y compris lutter contre les consommateurs,
01:03:48et sans aucun souci, oui.
01:03:50Vous le faites comment, par exemple, ici, dans une ville comme Grenoble ?
01:03:52Moi, j'ai appelé de mes voeux
01:03:54la mise en place des amendes forfaitaires
01:03:56délictuelles contre les
01:03:58consommateurs de stupéfiants.
01:04:00Ça s'est mis en place depuis, je dirais,
01:04:02maintenant 3-4 ans. Ils sont réglés ?
01:04:04Le taux de recouvrement, il est grosso modo
01:04:06le taux de recouvrement de toutes les amendes en France.
01:04:08C'est-à-dire de l'ordre de 40%.
01:04:10C'est évidemment insatisfaisant.
01:04:12On préférerait que ce soit 100%.
01:04:14Néanmoins, 40%,
01:04:16qui va les payer, ces 40% ?
01:04:18Ceux qui se disent, je me vois mal ne pas
01:04:20payer une amende. Et notamment,
01:04:22une partie des consommateurs,
01:04:24les plus bobos, les plus insérés,
01:04:26les étudiants, les jeunes travailleurs, etc.
01:04:28Ils sont interpellés où, alors ?
01:04:30Sur le point de deal, très régulièrement.
01:04:32Ce qu'on essaie de faire, ce qu'on va développer
01:04:34dans les prochaines semaines, c'est
01:04:36notre action sur les drives.
01:04:38Le consommateur passe en voiture,
01:04:40quelques billets...
01:04:42On voit surtout qu'il a consommé
01:04:44et qu'il conduit alors qu'il a consommé.
01:04:46Donc, on lui supprime le permis et on va essayer
01:04:48de faire ça en temps réel.
01:04:49Il faut cibler les délinquants.
01:04:50On sait qu'il y a environ 200 000 délinquants
01:04:52en France.
01:04:54200 000 personnes qui vivent directement
01:04:56du trafic de drogue.
01:04:58Tout à fait. Et on sait qu'en haut, il y a
01:05:008 000 semi-grossistes et seulement 1 000
01:05:02chefs de réseau.
01:05:04C'est quand même pas énorme, 1 000.
01:05:06C'est pour ça qu'il est intéressant de travailler sur eux.
01:05:08Oui, souvent, mais pas toujours.
01:05:10Mais l'idée, c'est que
01:05:12les trafiquants que nous, on cible à Grenoble,
01:05:14on essaye de les faire sanctionner.
01:05:16Évidemment, pour trafic de stupéfiants,
01:05:18si on peut, mais aussi pour toute autre action.
01:05:20L'idée, c'est que si on les arrête
01:05:22pour une conduite en état alcoolique,
01:05:24on va se dire ça, c'est un de nos trafiquants ciblés.
01:05:26On va lui faire une réponse pénale
01:05:28majorée parce que c'est un de nos trafiquants ciblés.
01:05:30Le procureur,
01:05:32et c'est unique en France, collabore également
01:05:34avec les services d'allocations familiales
01:05:36pour lutter contre les trafiquants.
01:05:38L'idée, c'est que nos jugements
01:05:40de condamnation de trafiquants de stupéfiants...
01:05:42Ça compagne un arrêt
01:05:44du versement des allocations familiales.
01:05:46Oui, parce qu'on a envoyé ce jugement à la caisse
01:05:48d'allocations familiales qui dit, mais monsieur,
01:05:50vous avez échangé pendant X mois
01:05:52tant d'argent illégalement,
01:05:54vous auriez dû nous le déclarer
01:05:56parce que c'est des ressources que vous avez eues dans la poche
01:05:58et donc nous, on vous verse
01:06:00des allocations alors qu'on n'a pas tenu compte
01:06:02de ces ressources, certes illégales,
01:06:04donc du coup, on doit vous supprimer
01:06:06un certain nombre d'allocations.
01:06:08Et on demande un remboursement aussi, ou pas ?
01:06:10Oui, et on peut percevoir, en réalité,
01:06:12dans les dossiers qui ont déjà été traités,
01:06:14il s'avère qu'une fois qu'on a réintégré
01:06:16cet argent illégalement perçu,
01:06:18il y a toujours un reliquat d'argent
01:06:20à verser par la caisse d'allocations familiales
01:06:22parce que c'est le calcul. Par contre, la CAF
01:06:24peut, sur ce reliquat à verser,
01:06:26récupérer ce qu'elle n'aurait pas dû verser
01:06:28plus une pénalité de 3000 euros.
01:06:30Donc ça, c'est quelque chose d'intéressant.
01:06:32Depuis la mise en place de ce partenariat en 2020,
01:06:3455 jugements définitifs
01:06:36de dealers ont été transmis
01:06:38à la caisse d'allocations familiales
01:06:40et sont en cours de traitement.
01:06:42Il faut rester humble parce qu'on sait très bien
01:06:44qu'on n'arrivera pas à éradiquer le trafic,
01:06:46on va faire que ça s'étende plus que ça ne l'est.
01:06:48C'est déjà un niveau trop important
01:06:50et il faut qu'on continue à agir tous ensemble
01:06:52pour en limiter les effets.
01:06:54Je n'ai aucune envie que la ville de Grondob
01:06:56soit un jour dirigée
01:06:58pas seulement sur le stupéfiant,
01:07:00mais sur d'autres aspects, par des trafiquants
01:07:02qui ont réussi à mettre de l'argent de côté
01:07:04et à le blanchir.
01:07:06Merci de votre accueil, merci de l'explication.
01:07:10C'est à Lyon que nous poursuivons notre enquête
01:07:12avec un spécialiste des questions de sécurité.
01:07:14Sébastien Rocher,
01:07:16politiste et chercheur au CNRS.
01:07:18Vous parlez de l'échec
01:07:20de la politique répressive
01:07:22menée par l'État français
01:07:24depuis une trentaine d'années en matière de lutte
01:07:26contre le trafic de drogue,
01:07:28parce que ce trafic n'a cessé de s'amplifier.
01:07:30Par ailleurs, on le voit, un des indicateurs pour vous
01:07:32c'est le fait que le prix de la cocaïne
01:07:34a beaucoup baissé.
01:07:36Divisé par cinq, c'est ça, tout à fait.
01:07:38D'abord, c'est un problème très important.
01:07:40C'est un problème que l'Europe ne connaissait pas.
01:07:42Aux Etats-Unis, on a cette épidémie
01:07:44de commerce de cocaïne
01:07:46et de fusillades.
01:07:48En France, jusqu'aux années 2000, on ne connaît pas ça.
01:07:50Il n'y a que depuis 20 ans qu'on connaît ça
01:07:52avec le développement du commerce de cocaïne.
01:07:54C'est un vrai problème.
01:07:56C'est un problème pour la France,
01:07:58pour la Finlande, pour les Pays-Bas.
01:08:00C'est un vrai problème.
01:08:02Avec des millions de consommateurs.
01:08:04La France fait partie des cinq pays européens
01:08:06où il y a le plus de consommateurs de cocaïne.
01:08:08La réalité du problème est là.
01:08:10La discussion est sur
01:08:12ce qu'on fait par rapport à ça.
01:08:14Est-ce qu'on s'étouffe moralement
01:08:16en criant que c'est absolument insupportable
01:08:18et on dit qu'on va faire la lutte,
01:08:20la guerre à la drogue
01:08:22et on va supprimer le trafic ?
01:08:24C'est un peu la position de Darmanin
01:08:26qui dit qu'à Paris, on a supprimé en deux ans
01:08:28un tiers des points de deal, 25% en France.
01:08:30Si c'était vrai,
01:08:32ça se verrait dans le prix du gramme.
01:08:34Il y a une autre explication.
01:08:36Il y a des pays comme la Colombie,
01:08:38qui étaient des petits producteurs,
01:08:40ont multiplié par 4 ou 5
01:08:42leur capacité de production
01:08:44en quelques années.
01:08:46Est-ce que c'est l'offre qui fait la demande
01:08:48ou c'est la demande qui fait l'offre ?
01:08:50En tout cas, en termes d'objectifs,
01:08:52la stratégie qu'on peut mener
01:08:54se joue au niveau international
01:08:56avec la coopération judiciaire internationale.
01:08:58Mais ensuite, sa matérialisation,
01:09:00c'est la résorption des points de distribution.
01:09:02Tant qu'on a des points de distribution
01:09:04et tant qu'on a de la demande,
01:09:06on a un trafic de drogue
01:09:08qui ne va pas s'interrompre.
01:09:10Sébastien Rocher
01:09:12prône une méthode développée
01:09:14dans les années 90 aux Etats-Unis.
01:09:16Tolérance zéro avec les têtes de réseau
01:09:18et plus originale, inciter les petites mains
01:09:20à quitter le trafic.
01:09:22L'idée, c'est de défaire
01:09:24les marchés de la drogue à ciel ouvert.
01:09:26En France, on appelle ça les points de deal.
01:09:28C'est les marchés de la drogue à ciel ouvert.
01:09:30On va enlever les personnes les plus dangereuses.
01:09:32Pour cela, on ne va pas chercher à les intimider.
01:09:34On cherche, comme on fait en France,
01:09:36à faire un dossier judiciaire
01:09:38pour avoir suffisamment de preuves
01:09:40pour pouvoir les faire incarcérer.
01:09:42Ensuite, on va s'intéresser à ceux
01:09:44qui sont toutes les petites mains
01:09:46qui sont autour du trafic
01:09:48et qui permettent le trafic
01:09:50sans être eux-mêmes des personnes
01:09:52qui vont commettre des crimes.
01:09:54Et là, on va faire pression sur eux,
01:09:56on va les informer
01:09:58du fait qu'on dispose de preuves
01:10:00de leur implication dans le trafic
01:10:02et on va leur faire la proposition suivante.
01:10:04Vous vous arrêtez
01:10:06ou on va mettre en oeuvre
01:10:08un système de punition.
01:10:10Mais ce qui est intéressant,
01:10:12c'est qu'on ne cherche pas à les punir tout de suite.
01:10:14On cherche à les dissuader
01:10:16parce que la sanction, c'est très coûteux.
01:10:18L'appareil judiciaire, l'appareil policier,
01:10:20quand vous le mobilisez, ça coûte très cher.
01:10:22Donc, moins vous le mobilisez
01:10:24pour un résultat égal,
01:10:26plus vous faites des économies.
01:10:28Ce qu'ils cherchent à faire,
01:10:30c'est de faire des économies.
01:10:32Cette négociation se fait avec les dealers
01:10:34plutôt qu'avec les gros bonnets ?
01:10:36Elle se fait avec tous ceux qui font le deal
01:10:38mais qui ne sont pas des personnes
01:10:40qui ont commis des crimes.
01:10:42Là, on va rassembler la personne elle-même
01:10:44mais en présence de sa famille
01:10:46et des autorités locales
01:10:48et des travailleurs sociaux.
01:10:50On va faire une sorte de package
01:10:52en disant que votre famille ne veut pas
01:10:54que vous soyez dans le trafic,
01:10:56vous risquez la prison
01:10:58et vous proposez une porte de sortie acceptable.
01:11:00Et c'est ça qui est la révolution.
01:11:02On va aider des personnes
01:11:04qui sont dans le trafic de drogue
01:11:06pour qu'elles s'arrêtent.
01:11:08On ne va pas juste chercher à les punir
01:11:10parce que le but, c'est l'efficacité.
01:11:12Le but, ce n'est pas de venir à la télé
01:11:14en disant qu'on a fait 115 interpellations.
01:11:16Le but, c'est de faire diminuer
01:11:18l'intensité de la violence
01:11:20et les troubles dans un lieu précis.
01:11:22Aux Etats-Unis, cette méthode
01:11:24baptisée cessez-le-feu
01:11:26est une criminalité violente
01:11:28liée au narcotrafic.
01:11:30C'est la fin de cette émission.
01:11:32Merci de l'avoir suivie.
01:11:34Rendez-vous la semaine prochaine
01:11:36pour un nouveau document d'enquête exclusive.
01:11:38Dimanche prochain, dans Enquête exclusive,
01:11:40plongé dans une des dictatures
01:11:42les plus étonnantes de la planète,
01:11:44le Turkménistan.
01:11:46Pourquoi toutes les voitures sont blanches ici ?
01:11:48Nous sommes dans le Guinness Book des Records
01:11:50car nous avons la ville la plus blanche du monde.
01:11:52Dans la capitale,
01:11:54Ashkabad,
01:11:56tous les bâtiments sont en marbre blanc
01:11:58et les statues du dictateur
01:12:00dorées à leur fin.
01:12:02C'est le leader du peuple turkmène.
01:12:04Vous pouvez vous cacher derrière lui
01:12:06parce qu'il vous protégera.
01:12:08Dans cette ancienne république soviétique,
01:12:10les dirigeants se transmettent
01:12:12le pouvoir de père en fils.
01:12:14Régime autoritaire,
01:12:16culte de la personnalité,
01:12:18la famille Berdimoura-Medov
01:12:20a même un musée à sa gloire.
01:12:22C'est sa voiture de golf.
01:12:24C'est son club de golf ?
01:12:26Oui, il est en or.
01:12:28C'est de l'or ?
01:12:30Sa puissance, le dictateur la doit à un trésor,
01:12:32les quatrièmes réserves de gaz au monde
01:12:34devant les Etats-Unis.
01:12:36Le pays bat des records de pollution
01:12:38mais ça ne dérange pas le pouvoir,
01:12:40bien au contraire.
01:12:42Regardez, notre cher dirigeant
01:12:44conduit une puissante voiture de sport
01:12:46à toute vitesse.
01:12:48Pour découvrir les secrets de cette dictature
01:12:50interdite aux journalistes,
01:12:52nos reporters se sont fait passer pour des touristes.
01:12:54Notre président adore ce cheval.
01:12:56Allez-y, goûtez.
01:12:58C'est du vrai caviar de la mer Caspienne.
01:13:00Ne prenez pas de photos, s'il vous plaît.
01:13:02Il n'aime pas qu'on soit là.
01:13:04C'est peut-être un policier ou quelqu'un des services secrets.
01:13:06Malgré la surveillance permanente,
01:13:08nous avons découvert la face sombre du régime.
01:13:10Nous n'avons rien à manger.
01:13:12Et eux, pendant ce temps,
01:13:14ils construisent ces monuments en or et en marbre.
01:13:16Quand tu critiques le pouvoir,
01:13:18ils peuvent t'enlever.
01:13:20Mon fils a été tabassé à mort.
01:13:22Turcménistan,
01:13:24enquête interdite au cœur d'une extravagante dictature.
01:13:26Rendez-vous dimanche prochain
01:13:28à 23h,
01:13:30dans Enquête Exclusive.

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