MEURTRE DE PHILIPPINE - Anne Sénéquier est l'invitée de Yves Calvi

  • il y a 13 heures
En ce jour d'obsèques de la jeune Philippine, tuée par un criminel, violeur récidiviste, un débat s'ouvre sur la prise en charge des criminels sexuels. Quels moyens mis en place derrière et après la sortie de prison ? Regardez l'analyse d'Anne Sénéquier, psychiatre, co-directrice de l'Observatoire de la santé mondiale à l'Iris, l'Institut des relations internationales et stratégiques.
Regardez L'invité de Yves Calvi avec Yves Calvi du 27 septembre 2024.

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Transcription
00:00Yves Calvi et Agnès Bonfillon, RTL Soir.
00:04Il est 18h19, bonsoir Anne Sénéqué, merci de nous rejoindre dans RTL Soir.
00:09Vous êtes psychiatre, co-directrice de l'Observatoire de la Santé Mondiale à l'IRIS,
00:13l'Institut des Relations Internationales et Stratégiques.
00:16Et en ce jour d'obstacle de la jeune Philippine tuée par un criminel violeur récidiviste,
00:21nous allons revenir avec vous sur la prise en charge des criminels sexuels.
00:24Tout d'abord, Anne Sénéqué, est-ce qu'elle existe cette prise en charge quand les violeurs sont derrière les barreaux ?
00:30Oui bien sûr, elle existe en fait. Dans les prisons, il y a un grand travail fait avec les patients autour de la santé mentale.
00:38Alors en lien avec leur condamnation, mais aussi c'est une opportunité justement pour travailler plus en profondeur
00:45et permettre une réinsertion ou préparer une sortie ou tout simplement améliorer sa santé mentale.
00:53Pardonnez-moi, je vous ai interrompu, excusez-moi.
00:57Quels sont les moyens déployés et y a-t-il des traitements médicamenteux ?
01:01Ce que l'on peut mettre en place, ce sont des thérapies.
01:04Alors on va le faire en fonction du profil du patient, si on parle du côté médical.
01:10Donc il y a des thérapies individuelles, des thérapies de groupe.
01:13Souvent on préfère les thérapies de groupe, mais certaines personnalités finalement ne matchent pas avec ce genre de thérapie.
01:19Donc on va préférer des thérapies individuelles dans ces cas-là.
01:22Et on va partir plutôt sur des thérapies, les TCC, ça s'appelle les thérapies cognitivo-comportementales,
01:28où on va aider finalement à déconstruire les schémas de pensée et comportements inappropriés des patients qui ont commis des agressions sexuelles.
01:37Donc on va essayer de travailler sur le contrôle des impulsions, sur la gestion des émotions et la responsabilité des actes.
01:42Souvent on a cette problématique avec ce genre de personnes, de la problème d'altérité,
01:47c'est-à-dire la difficulté de reconnaître l'existence de l'autre finalement.
01:51Finalement si l'autre n'existe pas ou n'est insignifiant, je peux finalement m'en servir comme je le souhaite.
01:58Donc on travaille aussi cette approche-là.
02:01Et puis après effectivement il y a la possibilité, ça peut être mis en place en prison,
02:07mais c'est souvent quelque chose qui peut aussi être mis au moment de la sortie,
02:10c'est-à-dire les traitements hormonaux qui vont avoir pour objectif de limiter les pulsions sexuelles.
02:18Et là on est typiquement sur des médicaments qui sont là pour diminuer la production de testostérone
02:24et diminuer les pulsions sexuelles.
02:27Ça n'empêche pas les rapports sexuels, mais du coup c'est moins fréquent et moins sur le passage à l'acte.
02:32Donc le terme de castration chimique est impropre.
02:35En fait vous nous décrivez un traitement inhibiteur de la libido.
02:39Oui c'est ça en fait, c'est souvent des hormones qui vont inhiber justement la sécrétion de testostérone.
02:47Ça peut être des analogues de la gonatrophine qui est impliquée justement dans la sécrétion de la testostérone,
02:54des anti-androgènes.
02:56On peut même aussi avoir des progestatifs qui sont un traitement hormonal féminin.
03:00Donc il y a un éventail des possibles assez large et on va adapter en fonction du patient.
03:06Parce que malheureusement ce n'est pas parce qu'on lui donne telle molécule que ça va fonctionner
03:10et qu'il va la tolérer et qu'elle va être efficace.
03:12Donc on va essayer de chercher le meilleur match.
03:14On a bien compris que le traitement était reversible quand on l'arrête.
03:17Ces traitements sont-ils proposés ou imposés ?
03:19Et par qui ? Le juge ? L'administration pénitentiaire ?
03:22Alors en fait ils ne sont pas du tout décidés par la juridiction pénale.
03:26Ils sont décidés par le médecin qui est en charge du patient.
03:30C'est une proposition.
03:31Donc c'est en France en tous les cas, c'est sur le volontariat, sur la base du volontariat.
03:36Mais en fonction de la peine qui a été donnée au patient.
03:41Si le patient refuse, il peut se voir en cas de crime 7 ans de prison supplémentaire.
03:49On a connu des situations rocambolesques où le délinquant ne suivait plus son traitement
03:53mais le médecin refusait de le signaler pour ne pas être un délateur.
03:56Ça vous choque ? C'est normal ?
03:59Là on est toujours dans la problématique du secret médical.
04:03Normalement on est délivré du secret médical.
04:06Là quand on arrive dans une injonction de soins en fait, parce que c'est de ça dont il est question.
04:11Il y a le médecin traitant qui doit rapporter justement à la justice régulièrement
04:17à travers un médecin coordinateur qui rapporte au juge d'application des peines.
04:22Donc oui concrètement ça n'est pas normal.
04:26Après c'est compliqué aussi de proposer des thérapies qu'elles soient psychologiques
04:30ou même médicamenteuses avec ce genre de patient.
04:32Parce que dans le sens de la thérapie, du lien de soins, on est un peu en porte-à-faux.
04:40D'un côté on se dit que c'est un patient mais c'est aussi quelqu'un qui a fait un crime.
04:50Et du coup en termes de relation au patient et relation de confiance,
04:57c'est là où c'est compliqué pour certains praticiens qui peuvent justement être amenés à ce genre de dérive.
05:03Maintenant il faut bien comprendre que cet objectif de castration chimique,
05:07puisqu'elle est sur la base du volontariat,
05:09elle est faite en coopération avec le patient et pour améliorer justement la réinsertion
05:14ou la rendre possible tout simplement dans la société.
05:18Il y a des expériences qui vous paraissent intéressantes dans d'autres pays européens,
05:21peut-être parfois plus efficaces que nous, et si oui lesquelles ?
05:25Alors il y a effectivement plusieurs approches.
05:28On parlait justement de cette prise de médicaments sur la base du volontariat.
05:33Ça ne l'est pas par exemple en Allemagne ou en Pologne et en République tchèque
05:37où ça peut être une injonction de soins donc obligatoire.
05:40Après aujourd'hui la façon de faire qui ressort véritablement en Europe, c'est l'Espagne.
05:47C'est-à-dire d'avoir déroulé le continuum de la problématique des agressions sexuelles,
05:54en partant de l'éducation des enfants dans les familles, dans la société,
05:59lutter contre les inégalités hommes-femmes,
06:02travailler sur la thématique du consentement dans tous les lieux
06:07et pas juste taper du doigt, taper du poing sur la table
06:11en ayant juste une mesure pénale et judiciaire pour ces délinquants.
06:18Et c'est ça qui fonctionne aujourd'hui, c'est d'aller dépister les déterminants
06:21qui amènent une personne à un moment donné de se sentir hors cadre
06:26et de pouvoir s'approprier le corps de l'autre.
06:30Et pour ça, bien sûr, il faut une réponse judiciaire
06:33mais il faut aussi dérouler tout ce qu'il y a avant
06:35pour pouvoir régler toutes les problématiques qui arrivent à cette possibilité-là.
06:39Parce qu'aujourd'hui finalement, dans les prisons françaises,
06:43en ce moment à priori il y a à peu près 10% de personnes incarcérées
06:49qui sont là pour délits sexuels.
06:52Ça fait quand même quasi 9 000 à 10 000 personnes, c'est beaucoup trop.
06:57Merci beaucoup Anne Séné qui est psychiatre et co-directrice
06:59de l'Observatoire de la santé mondiale à l'IRIS,
07:01l'Institut des relations internationales et stratégiques.
07:04Il est 18h26 dans un instant, bien entendu le journal de 18h30
07:07et nous partons au village olympique, ou plutôt ce qu'il en reste
07:10puisqu'il est en train d'être littéralement démonté.
07:13Mathilde Piquet va tout nous raconter, puis à 18h45
07:15nous ferons le bilan de la visite du président Zelensky aux Etats-Unis.
07:18Qu'a-t-il obtenu ? Comment s'est passée sa rencontre avec Donald Trump ?
07:21A-t-il d'ailleurs pu avoir de l'armement ?
07:24Nous ferons un point complet avec le spécialiste Frédéric Rancel.

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